On ne passe pas par Crozon, on y va. Parce que c'est le bout de la Terre et qu'il n'y a rien à voir sinon la pointe de Pen Hir qui s'avance sur la mer et qui offre un spectacle époustouflant à celui qui aime perdre son regard loin vers l'étendue bleue, respirer le grand air et sentir les embruns lui caresser le visage.
Mais ce n'est pas du tout le sujet là.
Pour
David Foenkinos, Crozon, c'est tout autre chose.
La bibliothèque de Crozon abrite un rayonnage destiné à recueillir tous les manuscrits refusés par les éditeurs. Insolite, n'est-ce pas ?
Un jour, une jeune éditrice, Delphine, et son compagnon, un auteur en manque de célébrité, y trouvent le manuscrit d'un certain Henri Pick, racontant en parallèle la fin d'une histoire d'amour et l'agonie du poète russe
Pouchkine. Manuscrit sublime que Delphine s'empresse de vouloir éditer.
Seulement voilà ...l'auteur est un pizzaïolo qui n'a apparemment jamais lu un seul livre de sa vie et dont la veuve (parce que oui, il est mort Henri Pick) ne se souvient absolument pas de l'avoir vu rédiger une seule ligne..Pas même une liste de courses, c'est vous dire !
Mystère, mystère...
Chouette idée de départ, qui donne envie de découvrir rapidement la fin ! Fin qui arrive bien vite, je vous rassure.
Lire Foenkinos, ce n'est ni rebutant ni harassant. On avale les pages goulûment sans prendre la peine de mâcher et à peine on a commencé qu'on se retrouve déjà devant la farandole des desserts !
De ma part, ça n'a rien d'un compliment. Je me méfie tellement des livres que je juge «bien trop faciles à lire ».
Pourtant, j'aime bien la plume de Foenkinos. Légèrement acérée, un peu sournoise, ponctuée de malice, et portant sur le monde un regard à la fois bienveillant et critique.
Dans ce roman, il n'hésite pas à dresser un portrait satirique du monde de l'édition, mêlant avec impertinence fiction et monde réel. Il épingle à sa manière quelques têtes connues du monde littéraire sans pour autant être trop cinglant. Mais, là, n'est sans doute pas l'essentiel. Foenkinos aime les livres et le monde des livres et c'est surtout cela qui se dégage de son oeuvre.
Je dirai même que c'est là que le bât blesse...
Monsieur Foenkinos !
D'accord, c'est sympa de glisser deux ou trois clins d'oeil, mais quand le lecteur sent la présence de l'auteur derrière chaque page, ça devient euh...gênant, ce manque d'intimité entre le lecteur et le roman. C'est plus fort que vous, hein, vous ne pouvez pas vous empêcher de mettre votre petit grain de sel dans l'histoire de vos personnages.
Bon d'accord, c'est votre marque de fabrique, j'en conviens. J'imagine que vos lecteurs les plus fervents aiment ce procédé, alors, je ne dis plus rien.
Je lirai sans doute vos autres livres. J'ai bien aimé
Charlotte et
La délicatesse me tente bien..
Ah au fait ! Merci de m'avoir donné envie de lire
Pouchkine !