AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Gaëlle Fonlupt (Autre)
EAN : 9782491996215
308 pages
Les éditions d'Avallon (15/11/2020)
4.17/5   93 notes
Résumé :
Lou est hospitalisée en psychiatrie. Elle ne sait ni pourquoi ni comment elle est arrivée dans ce « lieu où l’humanité a été avalée par les horloges ». Louiza a tout quitté pour se consacrer à la photographie. Au Vietnam elle rencontre Nils, un jeune homme ambitionnant de devenir diplomate. Tout les sépare et pourtant cette rencontre marque le début d’une histoire qui, du Vietnam à Paris en passant par la Bretagne et Malte, les conduira au cœur d’une nuit qui fera b... >Voir plus
Que lire après Elle voulait vivre dans un tableau de ChagallVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (66) Voir plus Ajouter une critique
4,17

sur 93 notes
5
39 avis
4
19 avis
3
5 avis
2
0 avis
1
0 avis
Quand Louiza tombe amoureuse d'un jeune employé à l'Ambassade au Vietnam, elle ne se doute pas de l'engrenage obsessionnel qui l'attend sur plusieurs années.
En parallèle, dans les coulisses, Lou est hospitalisée dans un service psychiatrique, annihilée de tout souvenir sur le pourquoi et le comment de cette hospitalisation.

Ce premier roman d'une auteure prometteuse est d'une très grande beauté. Il est parsemé d'autant de lumière que d'ombres inspiré tout au long des tableaux enchantés et colorés de Marc Chagall. Teinté de mystères, de poésie, de descriptions sensuelles et vivantes de la nature vietnamienne, de l'amour fou mais aussi de la folie avec un questionnement intelligent sur les maladies mentales. Un portrait très sensible et sensoriel sur ces vies abîmées par les aléas de la vie nous traînant dans un labyrinthe tortueux.

J'ai aimé cette beauté vivifiante et imagée tout au long du livre. Un univers onirique en restant très terre à terre avec un subtil antagonisme entre le paradis et l'enfer. Mon petit bémol réside dans le fait qu'étant une éternelle impatiente, j'ai eu parfois du mal à cerner le fil conducteur de l'histoire. Ce n'est qu'à la toute fin que toute l'histoire prend forme et sens.

Ce livre m'a rappelé deux excellents romans : le festin du lézard et Dans la chair des anges.

Si vous aimez la littérature riche d'images flottant sur des rizières poétiques, inspirée des peintures de Chagall, foncez, c'est une pépite. J'aurai pu vous partager de nombreuses autres citations, si elles vous plaisent, nul doute, ce livre vous plaira.
Commenter  J’apprécie          8310
« Mon amour ce qui fut sera
Le ciel est sur nous comme un drap
J'ai refermé sur toi mes bras. »
Louis Aragon – Nous dormirons ensemble

*
Le titre de ce roman m'a tout de suite attirée car j'adore les tableaux de Marc Chagall. J'aime ce mélange de rêves et de réalité qui cache beaucoup de profondeur et de justesse. J'aime les couleurs éclatantes de ses compositions, ce bleu si intense et lumineux. J'aime sa façon de mêler sa vie intime, ses émotions à des thèmes graves, comme la guerre, les persécutions, l'exil.
Je suis entrée dans le roman à la recherche de Chagall. Je l'ai trouvé, mais d'une manière différente de celle que j'imaginais.

*
Louiza est amoureuse, de la vie, de Nils rencontré lors d'un vernissage à Hanoï. Ce jeune homme au teint de marbre est beau comme une statue antique, un bel Adonis vaniteux et immature. La jeune femme se laisse prendre au piège d'un amour qui prend, mais qui ne donne pas.

« Tu es grand, même pour un occidental, alors ici ta stature te range parmi les géants. La coupe de ta veste de costume dissimule un corps de tout jeune homme, trahi par la finesse de ta nuque. Boucles cendrées, mains délicates, visage lisse et pâle, tu glisses dans l'assistance comme un Lohengrin sur son lac. Un Lohengrin mâtiné De Grèce antique dans le tracé des hanches et la forme de la cuisse. »

Dans un intervalle de cinq ans, nous rencontrons une jeune femme, Lou, internée dans un hôpital psychiatrique. Sa mémoire s'est effacée, vidée suite à un traumatisme dont elle ignore l'origine. Ne lui restent qu'une voix intérieure et des loups qui la guettent à la lisière de son esprit, attendant de se jeter sur elle pour lacérer son corps, la déchiqueter de leurs griffes et de leurs crocs. Dans ce monde aseptisé et froid, Lou se débat, seule, plus maîtresse de sa vie, de son corps, sanglée, abrutie par les médicaments. Elle n'est qu'un cri silencieux, déchirant et apeuré que personne n'entend.

« Je me réveille dans le désespoir
D'une journée nouvelle, de mes désirs
Pas encore dessinés
Pas encore frottés de couleurs. »
Marc Chagall - Si mon soleil

Je suis entrée tout doucement dans ce récit, accompagnée par les très jolies citations à chaque début de chapitre, déstabilisée par le style du récit qui flotte entre beauté et étrangeté, réalité et imaginaire.
Chaque chapitre alterne une des deux voix, tantôt le passé de Louiza, tantôt le présent de Lou, tandis que l'écart temporel se resserre au fur et à mesure que le dénouement se rapproche.
Moments de vie amoureuse pour Louiza qui se laisse emporter par les flots d'une passion aveugle et débordante.
Moments de détresse pour Lou qui se noie dans un quotidien morne, avilissant et sans chaleur humaine.

« … c'est toujours le même film : contention, seringue, puis elle s'écroule. Comme un veau à l'abattoir. Imparable. »

*
La force du récit tient avant tout dans sa structure où passé et présent se succèdent et convergent, rendant l'intrigue prenante et addictive. On sent que ces deux trajectoires de vie sont liées et vont irrémédiablement se rencontrer.

Gaëlle Fonlupt entretient délibérément la confusion et le mystère.
En lisant le récit de Lou chargé de non-dits ou de pensées équivoques, on entre dans l'esprit d'une personne malade.

« Évidemment qu'elle s'invente des histoires. Elle rêve qu'elle fout le camp par la fenêtre, qu'elle s'envole. Elle voudrait être une mouette. Elle aime les mouettes, leur battement d'aile, leur cri. Être une mouette et partir loin au-dessus de la mer. »

Le lecteur avance à tâtons, assailli de questions, en quête de réponses, essayant de comprendre le lien qui unit ces deux jeunes femmes et d'imaginer les évènements traumatisants refoulés qui ont conduit Lou à son internement.

Les rebondissements et les révélations sont savamment distillés. Petit à petit, le mystère qui entoure ces deux femmes se dévoile, certaines phrases jusqu'alors énigmatiques s'éclairent progressivement et leur passé prend forme. Mais, si beaucoup de portes s'ouvrent sur le passé des deux personnages de l'histoire, l'auteure semble ne pas vouloir toutes les refermer, laissant le lecteur tirer ses propres conclusions.

Le mystère est déjà présent dans la magnifique couverture qui m'a interpellée et interrogée. L'observer, c'est déjà entrer dans l'intrigue.
Le titre fait référence à l'oeuvre de Chagall alors que le tableau accroché au mur est celui du Caravage, référence à « ce mélange de violence contenue, d'obscurité fertile, de lumière jaillissant de la chair » qui habite ce roman.
Il y a aussi une référence au temps qui passe avec le lapin blanc d'« Alice au pays des Merveilles » et l'horloge accrochée au mur. le temps a son importance dans ce récit : l'absence de temps pour Lou qui vit son hospitalisation comme un emprisonnement, et la perception différente de Louiza, qui dans sa relation amoureuse, se démarque par une autre forme de temporalité.

*
Marc Chagall disait : « Si toute vie va inévitablement vers sa fin, nous devons durant la nôtre, la colorier avec nos couleurs d'amour et d'espoir ».
Chagall aimait étudier toutes les nuances et les différentes intensités de la couleur. Ainsi, toute son oeuvre se distingue par une profusion de couleurs et en particulier le bleu qu'il associe à l'amour, au désir, à la contemplation.

Comme une artiste peintre, Gaëlle Fonlupt habille élégamment son roman de nombreuses nuances bleutées, mélangeant les teintes de couleurs pour faire naître les sentiments et les émotions les plus justes.
Le lecteur plonge ainsi dans un univers poétique fait de couleurs, de jeux d'ombre, de lumière, de transparence et d'opacité. La vie des deux femmes s'y reflète, y pénètre, s'y mêle, y résonne.

Un bleu onirique et lumineux, celui des amants qui se cherchent et s'abandonnent dans une étreinte passionnée. Ce bleu tendre et intense, symbole d'amour et de vie.

« Je contemple les contours de ton visage figé, ta bouche close, tes mâchoires crispées. Nos corps étendus baignent dans des limbes bleutés. de la rue, une enseigne lumineuse projette un halo rouge incandescent qui ondule sur le plafond, mêlé d'un vert intermittent. Nous sommes dans un tableau de Chagall, celui où deux amants bleus d'un sommeil éternel sont veillés par une chèvre verte, tandis que, flottant dans le ciel sombre de Paris sur les ailes déployées d'un oiseau vermeil, une sirène écarlate emporte un nourrisson sur son sein. Un bébé rouge sang. Notre bébé. »

Le bleu profond de l'océan, celui dans lequel nage Louiza, qui ne se lasse pas d'explorer le corps de son amant et de s'y fondre.

« le bleu des rideaux transforme la chambre en fond sous-marin, à l'abri des vagues et du chaos de la surface. Nous nageons dans le bleu. Un bleu enfantin, irréel, éclatant. Ce bleu avec lequel Chagall a peint les amants. Un bleu à faire voler les poissons et rougir la lune. Nos corps se confondent, se liquéfient, se coulent l'un dans l'autre. En moi, tu fais céder toutes les digues. Je me livre, sans voiles et m'emplis de toi avec l'avidité d'une terre d'été. »

Le bleu du ciel, l'Azur, serein, apaisant, qui forme un écrin accueillant pour leur amour. Leur corps en apesanteur dans le ciel, volant au-dessus d'une mer sans nuage.

Néanmoins, comme Chagall, l'auteure apporte d'autres touches de couleurs, des teintes de noir, de rouge, de jaune ou de vert, exprimant des ambiances et des sentiments différents, flottants.
Ainsi, ce bleu, lorsqu'il se teinte de noir, prend des nuances inquiétantes, participant à créer une atmosphère sombre et menaçante, et devient le recueil d'émotions contrastées, douloureuses, violentes et incontrôlées.
Lorsque le bleu se heurte au rouge, il apporte une ambiguïté entre désir amoureux, passion, douleur, violence et sang.

« Elle se souvient de la lune qui baignait leurs corps bleus, de l'ombre rouge qui flottait au-dessus. »

*
J'ai aimé l'écriture de l'auteure, subtile, passionnée, sensuelle, pleine d'images et de métaphores. Elle jongle habilement avec les pronoms personnels, je, tu, nous, permettant de mettre en lumière les différences de perception de l'amour.



*
J'ai été particulièrement sensible à l'atmosphère étouffante de ce roman : j'ai ressenti un flux d'émotions, parfois contradictoires. L'attitude et les réactions des personnages m'ont troublée, contrariée, exaspérée, irritée, attristée. J'ai ressenti le silence, la tristesse, la solitude, la peur de l'abandon, le sentiment de trahison et de rejet.

Les scènes dans le service psychiatrique sont particulièrement difficiles et paraissent malheureusement très crédibles.
Dur de voir la souffrance des patients, qui se sentent isolés, abandonnés.
Dur de voir le malaise qui règne dans les hôpitaux par manque de moyens.

*
En tissant avec beaucoup de talent les destins enchevêtrés de ses personnages, Gaëlle Fonlupt nous offre un beau premier roman où le lecteur navigue entre rêve et réalité, lumière et obscurité, douceur et violence, vide et incompréhension, présence et abandon, un peu comme si on pénétrait un tableau de Chagall.
Un thriller psychologique à découvrir.

*
Pour finir, je tiens à remercier Diana (DianaAuzou), Fanny (Fanny1980), Nathalie (Romileon) et Bernard (Berni_29) pour cette lecture commune qui s'est enrichie de nos échanges de nos points et de vue.
Commenter  J’apprécie          5940
Un livre qui à la fois m'attirait depuis longtemps et en même temps me faisait peur. La folie, un sujet jamais facile à aborder, souvent casse-gueule et souvent difficile à lire.
Et celui-ci ne fait pas exception. Certaines scènes m'ont glacée, et cela d'autant plus que l'autrice confirme dans ses remerciements qu'elles sont toutes écrites à partir d'évènements véridiques. Mais que cela ne rebute pas le lecteur potentiel. Malgré cela, je dirais même grâce aussi à cela, ce livre reste pour moi un immense plaisir de lecture.

Deux temporalités, deux narrations différentes, deux femmes dont on se doute très vite qu'elles ne sont qu'une.

Lou est internée en psychiatrie, elle n'a aucun souvenirs des évènements qui ont causé son internement. Elle essaie de survivre malgré l'enfermement, l'ennui, la voix intérieure qui la dénigre sans cesse, les médicaments qui l'abrutissent, les lapins blancs qui surgissent toujours pour l'immobiliser. L'histoire de Lou est racontée à la troisième personne.

Louiza est photographe. Elle rencontre à Hanoï Nils, jeune homme comme il faut, promis à un brillant avenir, plus jeune qu'elle. Elle va le croiser, le recroiser, et petit à petit tomber amoureuse. Cet amour va tourner à l'obsession, mais Louiza ne peut etre l'avenir de Nils, trop différente, trop âgée, trop ... . Cette histoire est racontée à la première personne, par Louiza, qui s'adresse à Nils.

Ces deux histoires s'entrecroisent, offrant deux atmosphères différentes, qui tendent à se confondre, au fur et à mesure que l'amour de Louiza vire à l'obsession, que Nils s'échappe vers une autre vie. La lumière si vive qui éclairait ces premiers chapitres rejoint alors l'ombre qui règne en maitre sur cette vie enclose dans les murs d'un hôpital si sombre.

J'ai beaucoup aimé les pages qui décrivent cet amour naissant, le moment où il semble partagé, découvrir les infimes fêlures de ce grand garçon poussé par son désir de réussite. L'autrice nous raconte cela d'une écriture poétique, envoutante, sensuelle qui nous emporte au milieu d'images, celles du Vietnam d'abord, Louiza n'est pas photographe pour rien, celles plus tard aussi de la Bretagne qui ne suffira pas à adoucir la peine.

Et tout le livre est illuminé par la peinture de Chagall, ces tableaux reviennent au cours des pages, de nombreuse citations ouvrent les chapitres, certaines de Chagall , d'autres de nombreux auteurs, ajoutant à la beauté de l'écriture.

Il ne faut pas chercher à tout comprendre au fur et à mesure, les dernières pages éclaireront les mystères, permettront de comprendre certaines images. il faut juste se laisser emporter par les mots et vivre avec Lou et Louiza.

« Vivre est la chose la plus rare au monde.
La plupart des gens se contentent d'exister. »
Oscar Wilde

Merci aux éditions d'Avallon pour ce partage.


Lien : https://www.leseditionsdaval..
Commenter  J’apprécie          7222
Tu voulais vivre, Lou… Seulement vivre.

Faire de ta vie ton 𝘩𝘦𝘳𝘣𝘪𝘦𝘳 𝘥𝘦 𝘳𝘦𝘷𝘦𝘴… Et t'imprégner de toutes les couleurs de Chagall…

Vivre sous un soleil vermeil. T'envoler par-delà les toits de Paris… Disparaître dans le Cirque Azur. Au milieu des limbes bleutés, y croiser chevaux verts, violonistes mélancoliques, chèvres mauves, poissons volants… Peut-être même quelques poètes égarés ou amoureux de passage…

Tu rêvais de toutes ces couleurs.

Lentement, t'imprégner de toutes les saveurs de la terre en remontant le Fleuve Rouge, la « rivière originelle ». Te recueillir aux marches d'un temple sacré vietnamien, dans la moiteur du petit matin, sous la coiffe majestueuse d'un tamarinier. Parcourir les rizières qui se colorent d'un camaïeu de vert et se voilent d'un ciel orpiment et orangé lorsque naît le soleil. Lou, l'aventurière…

Puis vint cette rencontre…

Avec Lui, te laisser porter sur les flots azurs de la baie d'Hanoï, braver les pitons karstiques qui se dressent devant toi. Éviter les écueils. Te sentir enfin revivre. Enfin vivre. Te draper d'un bonheur soyeux et te noyer dans ses yeux gris bleu. Connaître dans ses bras juvéniles 𝘤𝘦𝘴 𝘯𝘶𝘪𝘵𝘴 𝘣𝘭𝘦𝘶𝘦𝘴 𝘲𝘶𝘪 𝘴𝘶𝘴𝘱𝘦𝘯𝘥𝘦𝘯𝘵 𝘭𝘦𝘴 𝘴𝘰𝘶𝘧𝘧𝘭𝘦𝘴. Lou l'enfant. Lou la femme…

Vivre dans ce bleu des amants de Chagall… légers, cotonneux, évanescents… Trop légers sans doute… le temps d'une saison. Avant que n'arrivent la mousson et les premières fissures sur son corps d'Adonis. 𝘊𝘦𝘵𝘵𝘦 𝘱𝘦𝘯𝘴é𝘦 𝘵𝘦 𝘧𝘢𝘪𝘵 𝘴𝘰𝘶𝘳𝘪𝘳𝘦. 𝘖𝘯 𝘯𝘦 𝘨𝘢𝘳𝘥𝘦 𝘱𝘢𝘴 𝘈𝘥𝘰𝘯𝘪𝘴 𝘲𝘶𝘢𝘯𝘥 𝘰𝘯 𝘯𝘦 𝘴'𝘢𝘱𝘱𝘦𝘭𝘭𝘦 𝘱𝘢𝘴 𝘈𝘱𝘩𝘳𝘰𝘥𝘪𝘵𝘦…

Lou, la passionnée… de ce rouge passion qui te dévore les entrailles.

Puis vinrent les loups. Les éclaireurs d'abord, à pas de velours… Ensuite la meute entière. Se délecter des restes de ton âme meurtrie. Et enfin l'Alpha, la louve dominante… Jetedis…


𝘑𝘦𝘵𝘦𝘥𝘪𝘴 𝘢 𝘥𝘪𝘵 𝘤𝘰𝘶𝘳𝘴
𝘑𝘦𝘵𝘦𝘥𝘪𝘴 𝘢 𝘥𝘪𝘵 𝘷𝘰𝘭𝘦
𝘔𝘢𝘪𝘴 𝘱𝘢𝘴 𝘭𝘦 𝘫𝘰𝘶𝘳 𝘰ù 𝘫𝘦 𝘥é𝘤𝘰𝘭𝘭𝘦
𝘑𝘦𝘵𝘦𝘥𝘪𝘴 𝘢 𝘥𝘪𝘵 𝘤𝘰𝘶𝘳𝘴
𝘑𝘦𝘵𝘦𝘥𝘪𝘴 𝘢 𝘥𝘪𝘵 𝘢𝘪𝘮𝘦
𝘑'𝘢𝘪 𝘣𝘦𝘢𝘶 𝘵'𝘢𝘪𝘮𝘦𝘳, 𝘵𝘶 𝘱𝘢𝘳𝘴 𝘲𝘶𝘢𝘯𝘥 𝘮𝘦𝘮𝘦

𝘑𝘦𝘵𝘦𝘥𝘪𝘴 𝘢 𝘥𝘪𝘵 𝘮𝘢𝘳𝘤𝘩𝘦
𝘑𝘦𝘵𝘦𝘥𝘪𝘴 𝘢 𝘥𝘪𝘵 𝘳𝘦𝘷𝘦
𝘔𝘦 𝘧𝘢𝘪𝘵 𝘵𝘢𝘯𝘵 𝘮𝘢𝘳𝘤𝘩𝘦𝘳 𝘲𝘶𝘦 𝘫'𝘦𝘯 𝘤𝘳è𝘷𝘦
𝘑𝘦𝘵𝘦𝘥𝘪𝘴 𝘢 𝘥𝘪𝘵 𝘤𝘦𝘳𝘵𝘦𝘴 𝘫𝘦 𝘭𝘶𝘪 𝘱𝘢𝘳𝘥𝘰𝘯𝘯𝘦
𝘑𝘦𝘵𝘦𝘥𝘪𝘴 𝘦𝘴𝘵 𝘶𝘯 𝘳𝘦𝘷𝘦, 𝘱𝘢𝘴 𝘶𝘯 𝘩𝘰𝘮𝘮𝘦

𝘙𝘦𝘴𝘵𝘦 𝘶𝘯𝘦 𝘮é𝘭𝘢𝘯𝘤𝘰𝘭𝘪𝘦 𝘤𝘢𝘤𝘩é𝘦
𝘚𝘰𝘶𝘴 𝘮𝘰𝘯 𝘮𝘢𝘯𝘵𝘦𝘢𝘶 𝘥𝘦 𝘱𝘭𝘶𝘪𝘦
𝘘𝘶𝘪 𝘵𝘳𝘢î𝘯𝘦 𝘦𝘯𝘤𝘰𝘳𝘦

𝘑𝘦 𝘯𝘦 𝘴𝘦𝘯𝘴 𝘱𝘭𝘶𝘴 𝘭𝘦 𝘷𝘦𝘯𝘵 𝘥𝘢𝘯𝘴 𝘮𝘦𝘴 𝘷𝘰𝘪𝘭𝘦𝘴
𝘋𝘪𝘴-𝘮𝘰𝘪 à 𝘲𝘶𝘰𝘪 𝘮𝘦 𝘴𝘦𝘳𝘵 𝘮𝘰𝘯 é𝘵𝘰𝘪𝘭𝘦
𝘚𝘪 𝘫𝘦 𝘱𝘦𝘳𝘥𝘴 𝘭𝘦 𝘕𝘰𝘳𝘥 ?

𝘑𝘦𝘵𝘦𝘥𝘪𝘴 𝘯𝘦 𝘥𝘪𝘵 𝘱𝘢𝘴 𝘵𝘰𝘶𝘵
𝘑𝘦𝘵𝘦𝘥𝘪𝘴 𝘯𝘦 𝘥𝘪𝘵 𝘮𝘰𝘵
𝘑𝘦𝘵𝘦𝘥𝘪𝘴 𝘯𝘦 𝘴𝘢𝘪𝘵 𝘱𝘢𝘴 𝘤𝘦 𝘲𝘶'𝘰𝘯 𝘷𝘪𝘵
𝘑𝘦𝘵𝘦𝘥𝘪𝘴 𝘯𝘦 𝘴𝘢𝘪𝘵 𝘱𝘢𝘴 𝘲𝘶𝘦 𝘤'𝘦𝘴𝘵 𝘵𝘰𝘶𝘵 𝘨𝘳𝘪𝘴 (*)


Les couleurs de Chagall se sont évanouies, aspirées dans ces potions chimiques que l'on te sert à présent en guise de petit déjeuner… Ne subsistent plus que ce voile blanc imprégné sur tes yeux délavés, 𝘭𝘦 𝘣𝘭𝘢𝘯𝘤 𝘨𝘭𝘢𝘤é 𝘦𝘵 𝘥é𝘷𝘰𝘳𝘢𝘯𝘵 𝘥𝘶 𝘷𝘪𝘥𝘦 , 𝘥𝘦𝘴 𝘮𝘢𝘵𝘪𝘯𝘴 𝘵𝘳𝘪𝘴𝘵𝘦𝘴, de la camisole des fous et des lapins blancs trop pressés…

Et malgré tout, l'arbre à fraises Tagada… L'espoir… Vivre avec cette gangrène qui te ronge jusqu'à la folie, est-ce possible Lou ?

𝘘𝘶𝘢𝘯𝘥 𝘫'é𝘵𝘢𝘪𝘴 𝘱𝘦𝘵𝘪𝘵𝘦, 𝘫𝘦 𝘷𝘰𝘶𝘭𝘢𝘪𝘴 𝘷𝘪𝘷𝘳𝘦 𝘥𝘢𝘯𝘴 𝘶𝘯 𝘵𝘢𝘣𝘭𝘦𝘢𝘶 𝘥𝘦 𝘊𝘩𝘢𝘨𝘢𝘭𝘭, 𝘣𝘢𝘳𝘣𝘰𝘶𝘪𝘭𝘭é𝘦 𝘥𝘦 𝘤𝘰𝘶𝘭𝘦𝘶𝘳𝘴 𝘢𝘶 𝘮𝘪𝘭𝘪𝘦𝘶 𝘥𝘦𝘴 𝘤𝘩𝘦𝘷𝘢𝘶𝘹 𝘢𝘪𝘭é𝘴, 𝘥𝘦𝘴 𝘴𝘰𝘭𝘦𝘪𝘭𝘴 𝘣𝘭𝘦𝘶𝘴 𝘦𝘵 𝘥𝘦𝘴 𝘮𝘶𝘴𝘪𝘤𝘪𝘦𝘯𝘴 𝘢𝘤𝘳𝘰𝘣𝘢𝘵𝘦𝘴… 𝘑𝘦 𝘤𝘳𝘰𝘪𝘴 𝘲𝘶'𝘢𝘶 𝘧𝘰𝘯𝘥 𝘤'𝘦𝘴𝘵 𝘵𝘰𝘶𝘫𝘰𝘶𝘳𝘴 𝘭𝘦 𝘤𝘢𝘴.


🔹🔸🔹🔸🔹

Si vous aimez les couleurs de Chagall, prenez votre billet et envolez-vous par le premier vol pour découvrir en urgence l'univers de Gaëlle Fonlupt. Ses mots ne sont que poésie et sensualité... Ils vous feront voyager aux quatre coins du monde, en pleine immersion dans de magnifiques paysages : en Indochine, au Mont-Saint-Michel, dans un château Cathare de l'Ariège, à Prague, à Lyon… Ils réveilleront vos cinq sens de leur sensualité forte… Les mots des amants et de l'émotion, métaphoriques, oniriques…

Quand toute la palette des bleus de l'âme et du coeur se mêle au vert turquoise de la baie d'Halong, au rouge passion des amants éperdus et au blanc glaçant et impersonnel de la maladie...

Son premier roman, Elle voulait vivre dans un tableau de Chagall, est une merveille littéraire !


(*) 𝘋'𝘢𝘱𝘳è𝘴 𝘑𝘢𝘤𝘲𝘶𝘦𝘴 𝘢 𝘥𝘪𝘵, 𝘊𝘩𝘳𝘪𝘴𝘵𝘰𝘱𝘩𝘦 𝘞𝘪𝘭𝘭𝘦𝘮 & 𝘡𝘢𝘻𝘪𝘦
Commenter  J’apprécie          5017
Elle voulait vivre dans un tableau de Chagall, c'est vrai c'est ce qu'elle exprime au début du récit, la personnage principale de ce premier roman de Gaëlle Fonlupt.
En venant à cette lecture, qui du reste s'est accomplie avec jubilation dans le cadre d'une lecture commune, je venais chercher une histoire particulière et j'y ai trouvé autre chose. Différemment.
Je venais chercher Chagall. Je l'ai rencontré ici sur d'autres chemins que j'imaginais au départ.
« Elle ressort à la fermeture du musée, la main de sa mère posée sur son bras comme un moineau, avec la sensation de vibrer au rythme de ce qui l'entoure, d'avoir retrouvé l'entièreté de sa vie et, dans la poitrine, la douleur palpitante du nouveau-né qui vient de déployer ses poumons pour la première fois. Une certitude s'accroche en elle à cet instant : elle veut vivre, vivre comme dans un tableau de Chagall, enivrée de couleur, légère, émerveillée, dans un ciel habité par tout ce qu'exhale la terre. »
Cette femme qui visite ce musée, est-ce la même femme qui part en reportage photos dans les contrées reculées du Vietnam, qui s'éprend d'un jeune stagiaire de l'Ambassade Française, ce Nils si différent, si jeune, tout les sépare, celle qui en tombe amoureuse, celle qui va questionner un chamane au bord d'un lac et en revient troublée par sa réponse... ?
Qui est cette femme qui plus tard surgira du passé, familière ou étrangère à tout cela...?
C'est peut-être l'histoire d'une femme, puis d'une autre, aux destins traversés de désirs et de douleurs.
Nous voyons se conjuguer deux itinéraires féminins, deux récits, au départ à cinq ans de distance, peu à peu les deux histoires semblent se rapprocher comme un étau et l'on est pris dans ce récit qui devient addictif.
Chagall vient couturer avec sa lumière et ses pinceaux des morceaux de puzzle que l'autrice éparpille sous nos pas, tel un Petit Poucet égaré sur son chemin. Parfois dans cette palette de couleurs je m'y suis perdu, je dois vous l'avouer.
Trop de chemins sans doute ouverts avec la générosité d'un premier roman et forcément, je m'y suis perdu comme le cheval fou que je suis !
L'écriture est belle, soignée à merveille, des thèmes qui me sont chers sont ici évoqués, - bien sûr l'amour, la passion, le temps qui passe..., des phrases ont réveillé en moi des émotions insoupçonnées. Des phrases, oui, mais noyées dans le flot d'un texte où je me suis retrouvé avec ma petite barque dans une mer tumultueuse, teintée de bleu et de gris.
Si je devais retenir une oeuvre de Chagall qui donne un sens à ce roman, ce serait celle du personnage d'Icare, image mythique d'un personnage idéaliste déployé vers le ciel, vers l'azur bleu immense, les ailes d'Icare forcément fondent au soleil, il se retrouve ici au sol par la grâce du geste de Chagall et non dans la mer à la différence du mythe, sur ce sol tâché de rouge comme le sang qui figure dans le roman.
Ici donc le bleu parle au rouge.
Ici la lumière parle à l'ombre.
Le rêve à la réalité.
Le passé au présent. Un passé idéalisé, un présent psychiatrique.
Le temps présent et le temps qui passe.
Et ce lapin, qui surgit du conte d'Alice au pays des merveilles, comme pour nous rappeler l'importance de l'immanence de l'instant, mais aussi les conditions d'hospitalisation où l'on court sans cesse après le temps qui vous échappe...
Tout devient étouffant brusquement. Et c'est là que j'ai perdu pied sans doute dans ce roman trop chargé de bagages pour un voyageur comme moi qui cherchait justement l'allègement du voyage.
C'est un roman riche, sans doute trop riche, qui ouvre des portes, des fenêtres, éveille des émotions différentes, l'autrice nous tend des clés sans nous dire forcément quelles portes elles ouvrent.
J'ai ressenti des émotions, ne serait-ce que dans le silence, la solitude de deux êtres qui ne sont pas faits l'un pour l'autre. L'abandon, le déchirement, ces choses comme cela qui en résultent, comme un effleurement au bord du vide, comme un vide abyssal dans le ventre...
C'est un roman du clair-obscur. C'est un roman où la mémoire souffre. C'est un roman qui parle d'amour et de folie.
Gaëlle Fonlupt nous propose des chemins multiples, avec une écriture sensuelle, poétique, qui offre un beau regard de femme sur une femme, sur des femmes, lu ici dans une lecture commune en compagnie de lectrices magnifiques, par un homme touché par la grâce de l'écriture et par les thèmes évoqués.
Dans cette lecture commune, je remercie mes fidèles compagnes de voyage, Diana (DianaAuzou), Fanny (Fanny1980), Nathalie (Romileon) et Sandrine (HundredDreams). Sans elles, mes mots ne seraient rien.

" Je me réveille dans le désespoir
D'une journée nouvelle, de mes désirs
Pas encore dessinés
Pas encore frottés de couleurs. "
Marc Chagall - Si mon soleil

[LECTURE COMMUNE DANS LE CADRE DU CHALLENGE PLUMES FÉMININES 2022]
Commenter  J’apprécie          6019

Citations et extraits (176) Voir plus Ajouter une citation
Je sors de notre chambre et avale à pleins poumons la brume lactique et bleutée. Cette brume que l’on ne trouve qu’ici, nichée entre les montagnes de Dong Van, dans la province vietnamienne de Ha Giang, alanguie le long de la frontière chinoise. Je m’accoude à la balustrade, le temps que mes yeux s’accoutument à cette ouate de lumière percée par les cimes. À perte de vue, des mamelles de pierre que tètent de gros nuages avant de s’assoupir le long de leurs flancs, laissant, au point du jour, les mamelons bleus dressés dans les vapeurs de lait. À l’ouest, les montagnes s’acèrent et, le soir, les aiguilles karstiques tricotent les couchers de soleil. Hier, elles avaient brodé un corsage de lumière parme lacé de pourpre bientôt englouti par des nuages lourds comme des ventres de parturientes. Puis l’orage comme une délivrance, déchirure éclatante recouvrant notre fenêtre d’un drap de pluie sonore.
Commenter  J’apprécie          190
Beaucoup de fous, d’angoissés, de bipolaires, de mélancoliques, ne sont « fous » que parce qu’ils égratignent l’ordre social, parce qu’ils ont jeté le masque en refusant de se vautrer avec les autres dans un divertissement dont ils voient toute la vanité, parce qu’ils savent qu’on les emmène à l’abattoir et refusent de tourner la tête. On qualifie de folie cette sagesse des clairvoyants qui voient la vérité crue d’un néant existentiel. Comment exiger de ces fous plus de force, plus de sagesse que d’un Cicéron ou d’un Sénèque qui admettaient la nécessité thérapeutique de la diversion de l’âme ?
Pour les empêcher de résoudre cette angoisse existentielle par un inévitable « passage à l’acte », on dégaine antidépresseurs, anxiolytiques, psychotropes et autres camisoles chimiques.
Les médicaments anéantissent les montagnes russes et la valse des émotions : plus de gouffres obscurs ni de sommets exaltés, plus de gloire céleste ni de ténèbres benthiques, plus d’escarpements, plus de vagues, juste la morne plaine de l’ennui, de l’engourdissement silencieux, de l’hébétude d’une vie étouffée dans une ouate incolore. En supprimant l’envie de mourir, ils éradiquent aussi le désir de vivre.
Commenter  J’apprécie          130
Beaucoup de fous, d’angoissés, de bipolaires, de mélancoliques, ne sont « fous » que parce qu’ils égratignent l’ordre social, parce qu’ils ont jeté le masque en refusant de se vautrer avec les autres dans un divertissement dont ils voient toute la vanité, parce qu’ils savent qu’on les emmène à l’abattoir et refusent de tourner la tête. On qualifie de folie cette sagesse des clairvoyants qui voient la vérité crue d’un néant existentiel. 
Commenter  J’apprécie          343
S’enraciner, c’est ce qu’elle voudrait faire, là, maintenant. Planter ses deux pieds dans la terre, lever les bras au ciel, offrir son visage au soleil et pousser, comme un arbre, en aspirant les nuages. Elle sentirait les coccinelles chatouiller ses doigts et les oiseaux nicher dans ses branchages. Elle serait plantée dans une prairie d’herbe grasse, comme le sapin veillant le Poète allongé de Chagall, étalant sa ramure dans un ciel rose. 
Commenter  J’apprécie          280
Aujourd’hui, quand Lou ferme les yeux, elle ne voit que du blanc. Le blanc sale des murs maculés de traces de doigts et de griffes, le blanc calcaire des lavabos, le blanc rouillé des radiateurs, le blanc asphyxiant des camisoles et des gilets de contention, le blanc pisseux des draps, le blanc des blouses qui passent sans s’arrêter, comme le lapin d’Alice aux pays des merveilles, blanc aussi, celui qui est toujours en retard. Pressé. Pas le temps. Et qui t’emmène dans un terrier, puis dans une chute interminable jusque mille pieds sous terre, au milieu des fous et des tordus. Au royaume de l’absurde.
Commenter  J’apprécie          190

autres livres classés : psychiatrieVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus


Lecteurs (231) Voir plus



Quiz Voir plus

Testez vos connaissances en poésie ! (niveau difficile)

Dans quelle ville Verlaine tira-t-il sur Rimbaud, le blessant légèrement au poignet ?

Paris
Marseille
Bruxelles
Londres

10 questions
1220 lecteurs ont répondu
Thèmes : poésie , poèmes , poètesCréer un quiz sur ce livre

{* *}