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Citations sur Rien à déclarer (11)

Les Américains souffraient de constipation intellectuelle, ils étaient incapables de soutenir une conversation digne de ce nom - et a fortiori de chanter une chanson -, ils ne savaient pas boire, n'avaient pas de second degré et on les entendait rarement rire de bon coeur. Mais ils étaient authentiques et ouverts.
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Il existe un malheur si grand que la peur qu’il inspire fait alliage avec le bonheur.
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Betsy avait déniché à Mitch une maison de style néoclassique conforme à ses attentes sur Palmer Street, et puis, lors de la seconde visite, elle avait couché avec lui dans le lit du client. Pour toute explication, elle avait avancé qu’à la fac, elle avait lu un livre sur des enfants perdus, victimes d’un cyclone sur une ile des mers du Sud.

Tous les animaux – lézards, oiseaux et bêtes à poils – étaient devenus fous à l’approche de la tempête. L’ouragan avait bon dos ces temps-ci, notamment pour justifier des choses qui se seraient sûrement produites sans lui. Comme si la vie de chacun ne portait pas en elle son ouragan sur mesure. »
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Poussez-vous, m'sieu. " Jenna était dans le lit, tiède, moite, lisse sous ses couvertures. Un fil de lune tombait sur son épaule nue, sur le sein qu'elle cachait tout juste de sa main. À un moment donné, il avait dû retirer ses chaussures, remonter le couvre-lit, mais il ne s'était pas déshabillé. Sous les couvertures, Jenna prenait de la place, elle était plus imposante qu'on aurait pu croire. Étrangère. petite paysanne. " Je suis restée dans l'autre lit qui sent mauvais tant que j'ai pu, mais je me gelais, lui chuchota-t-elle.



   - Tu es toute nue, dit-il sans se réveiller. pas étonnant que tu aies froid." 



   Elle se rapprocha de lui. " On étouffe dans un pyjama. Il faut que tu me réchauffes. Je sais que tu es vieux et triste. J'attends pas de miracle. " Elle l'empoigna avec la même brusquerie qu'elle lui avait demandé son nom au bar : " Et vous, vous êtes qui ? " Elle était tout entière contre lui, ses cheveux, son visage, ses genoux, son dos nu humide - ses petites jambes insistantes. Elle sentait le savon Camay, laissé sur le lavabo par la femme de Fenderson. " T'es tout chaud, toi, dis donc. " Elle s'écrasait le nez contre sa poitrine, ses jambes s'insinuaient. Il toucha son sein sans le faire exprès. ce qui lui fit émettre un "mmmm, oooh " . Puis tout bas : "pas plus, hein ? d'accord ?

   - Quoi ? de quoi tu parles ?... 

   - Tu veux parler de ta femme ? Tu peux.

   -  Non, je ne veux pas." Il chuchotait, lui aussi...

  -  Comment elle s'appelle, s'appelait ? lui demanda Jenna, tout contre lui.

   - Je te l'ai dit, Mae.

   - Mai, comme le mois ? ...

   - Oui. Mai comme le mois.

   - Je comprends. D'accord." Ainsi en fut-il dans les instants avant qu'il s'endorment ...

Il se réveilla en sueur. Cette fille était une chaudière. Il voyait double de l’œil gauche. Il avait les mains engourdies à force de serrer les poings. Jenna dormait, bouche ouverte. et elle émettait des petits bruits en respirant. Son haleine imprégnée de gin-tonic sentait le pain bis. Elle était partie pour dormir des heures.

   Chaussures à la main, il descendit au rez-de-chaussée qui était resté allumé. Il avait l'intention d'aller se recoucher dans la petite chambre dès qu'il aurait éteint. Il avait cessé de se sentir piégé dans une situation catastrophique défiant le bon sens. Tout irait bien. Sauf si elle avait quatorze ans...

   Il trouva une cuillère, sortit la tarte du placard, et là, en socquettes devant l'évier, main sur sa poitrine comme son père, l’œil gauche divaguant et mis-clos, il plongea généreusement la cuillère dans la tarte, prit une grande inspiration et se remplit la bouche - c'était liquide, acide et douceâtre en même temps - pour avaler presque sans mâcher. C'était bon, carrément, délicieusement bon - le cœur était encore tiède, la croûte un peu amère, le sucre solidifié sur le dessus. Il engouffra une autre bouchée avec délectation. Il en servirait à Jenna au petit déjeuner avant qu'ils partent récupérer sa voiture.

    Les troubles de la vision font partie des symptômes de l'AVC, tout le monde le sait. Le vieux moteur assiégé. La tension, meurtrière obligeante. Il n'avait jamais pensé une seconde à sa propre mort - même au pire des moments, quand Mae donnait de la bande et s'apprêtait à quitter ce monde. Sa mort à lui n'était pas au programme - défaut d'empathie, peut-être. Il ne pensait qu'à la vie, et à tenir le coup. Il entendit quelque chose à l'étage. La voix de la fille. " Oooh, Mmmm." Et puis plus rien. Un rêve. Elle dormait profondément. L'heure n'était pas venue de mourir...
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 La nuit où tout était parti en vrille, Patsy et lui se trouvaient sur Dawson Street. IL pleuvait, il faisait froid. Novembre. Les bus venus de Stephen's Green tournaient sec dans Nassau Street, en face de Trinity College, avec un bruit de ferraille. Ils arrivaient toujours trop vite, surtout sur une chaussée glissante, par une nuit sans lumière, au milieu d'une circulation fébrile. Eux se rendaient à pied à l'université pour y suivre une conférence et s'étaient arrêtés au feu. Il y avait un gamin à côté d'eux, les pieds sur l'extrême bord du trottoir. À l'instant précis où le gros bus avait déboulé en ronflant, bien trop près, quelqu'un avait poussé le gamin par-derrière. Un des pneus - ils l'avaient tous vu - avait heurté sa tête. Mort sur le coup, devant tout le monde. le silence s'était abattu pendant un long moment insoutenable, et puis tout le monde s'était mis à crier : " Arrêtez, arrêtez ! "



   L'accident n'avait pas tenu à grand chose - une dispute insignifiante entre copains. Rien qui doive se solder par la mort. Mais tout à coup, Patsy avait craqué. Un instant qu'on n'a pas vu venir suffit parfois à bouleverser le cadre d'une vie. C'est absurde. Mais nous savons tous que c'est possible.



   Pour reprendre le dessus, elle était partie en voyage. Elle avait emmené les filles avec elle et elles étaient allées au Groenland marcher dans le froid et la glace aux vertus guérisseuses. Il était retourné au travail. Mais plus rien n'était comme avant. D'ailleurs, plus rien n'était comme avant depuis un certain temps. La famille de Patsy possédait une grande maison à Inishowen. Elle avait grandi au bord de la mer. Elle l'avait subitement pris à parti sur son fallacieux désir de "comprendre", manie d'avocat. D'interroger. Ce qui n'était pas comprendre, justement. Tellement américain. D'une telle mauvaise foi. Les Américains se figurent tout maîtriser. " J'ai toujours été comme ça, avait-il dit. J'y voyais une force. "Et elle : " Je sais. Je ne te connaissais pas assez bien, hein ? Chacun son grand tort. " Pour faciliter les choses, il avait renoncé à la maison du Ranelagh et pris l'initiative de se relocaliser à Bristol, où son cabinet avait des bureaux. De cette façon, il n'était pas loin de ses filles, qui venaient le voir lorsqu'elle le leur permettait...
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Quand votre père meurt et que vous n’avez que seize ans, bien des choses changent. La vie au lycée change. Vous êtes maintenant le garçon dont le père a disparu. On vous plaint, mais on vous dévalue aussi, et même on vous en veut – de quoi, vous ne le savez pas au juste. L’air qui vous entoure change de consistance. Autrefois, il vous contenait étanche. A présent, il s’y est creusé une brèche, qui vous fait peur, pas si peur pourtant.
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La veille, s'étant endormi en pensant à la traversée présente, il avait eu la sensation absurde - ce n'était pas exactement un rêve - que la durée entière de la vie, l'enchainement de toutes ces années, n'est réellement vécue que dans les dernières secondes avant que la mort claque la porte. Que tout le vécu n'est qu'une illusion des sens. Un mensonge si l'on veut. Rien de réel. Et pourtant, au bout du compte, cette impression était libératrice. Il avait pour habitude de considérer toutes sortes de choses comme libératrices.
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L'aiguille n'est jamais dans la botte de foin. L'aiguille est la botte de foin.
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Curieux, qu'ils aient élevé une enfant malheureuse, eux qui avaient été si heureux toute leur vie.
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Il y avait pourtant des voyages qui ne devaient s'accomplir qu'à moitié.
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