Ingres, chaudement recommandé par ses anciens maîtres, fut bien accueilli et réussit bientôt à se faire connaître et apprécier. Dès ce moment, il résolut de se fixer définitivement parmi nous. Cette décision avait d’ailleurs un motif particulier. Quoique de petite taille, il était fort distingué, et se faisait remarquer par le soin extrême qu’il prenait de sa personne. Toujours élégant, coquet même, rasé de près et coiffé à la dernière mode, c’était un client assidu de maître Moulet, le perruquier de la Cour des Aides. Un jour vint où, charmé par les beaux yeux de la jeune Anne, fille du coiffeur, il demanda la main de la jolie parfumeuse, et fut agréé avec d’autant plus d’empressement que son futur oncle, François Moulet, maître plâtrier, avait pu apprécier son habileté.
Joseph Ingres était entré la première année au cours de dessin ; puis, poussé par son goût pour la sculpture, il travailla avec Lucas et étudia les principes d’architecture avec Labat ; ce fut, sans doute, un élève modèle, puisque tous ses professeurs, et en particulier Rivalz, lui prodiguèrent leurs encouragements et lui conservèrent toujours leurs sympathies.
Le maître tailleur ne voyait pas sans regret son fils engagé dans une voie qui dérangeait tous ses projets ; il laissait même souvent libre carrière à ses amères récriminations : cette lutte continuelle était insupportable à notre jeune sculpteur.