Les manuels militaires et les discours politiques pouvaient bien chercher à mobiliser les hommes avec des rêves de gloire, cherchant à les convaincre que mourir pour son pays était un accomplissement, tels n'étaient pas les sentiments le plus souvent exprimés par ceux qui faisaient la guerre. Les soldats avaient essuyé les pilonnages d'artillerie, ils savaient ce que signifiait la mort au combat. Au cœur de la bataille, les camarades comptaient bien plus que le patriotisme, l'eau-de-vie plus que la gloire.
C'est toujours en temps de guerre que le désir d'écrire, le besoin de communiquer avec le monde extérieur est le plus impérieux.
Il en allait de même pour les jeunes Français affectés aux bataillons de la Révolution et de l'Empire. Le désir de communiquer provoqué par les longues périodes d'absence, un désir d'autant plus ardent que l'expérience de la guerre était absolument singulière et que la distance qui séparait les jeunes hommes de leur famille paraissait immense, ce désir était tel que des gens qui n'auraient jamais attribué auparavant à l'alphabétisation une quelconque utilité déploraient soudain leur manque d'instruction et déclaraient ouvertement combien ils aimeraient jouir de la liberté que confèrent la lecture et l'écriture.