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sur 297 notes
D'Emily Dickinson, poète qui, bien malgré elle et à titre posthume, devait devenir l'une des grandes dames de la littérature mondiale, on sait juste qu'elle est née en 1830 et morte cinquante-cinq ans plus tard dans la même demeure du Massachusetts ; que, sans mari ni enfant, elle choisit de vieillir cloîtrée dans sa chambre ; et que de ses centaines de poèmes, elle n'accepta d'en publier que moins d'une douzaine. A partir des traces de papier – lettres et poèmes – laissées par cette femme mystérieuse, ainsi que des innombrables ouvrages publiés à son sujet, Dominique Fortier a librement imaginé sa vie, s'aventurant dans ce monde intérieur qui lui permit tant d'immobiles voyages, elle qui ne quitta sa maison de Amherst, devenue musée depuis, que le temps de son passage au séminaire féminin du Mont Holyoke, où elle fut l'une des rares jeunes femmes de son époque à faire des études supérieures.


Le résultat est un subtil et délicat kaléidoscope d'impressions fines et de détails intimes, qui, bien loin d'une biographie et de seuls faits historiques, donne l'intuition, en mille fugacités dont la superposition finit par composer une image fragile mais persistante, de ce qui aurait pu emplir l'âme-même de cette personnalité si singulière. Au fil des pages, se dessine un être dont la principale raison de vivre semble de se fondre toujours davantage, à force de cultiver son art de l'écriture, dans un monde de papier où tout le reste perd peu à peu de son importance. Ce que son entourage perçoit comme une réclusion de plus en plus marquée, n'est au final qu'une façon pour elle de s'approcher du coeur des choses et de mieux appréhender le monde.


Et, tandis que l'on observe Emily nourrir ses poèmes de ce qui lui tient le plus à coeur - sa maison, son jardin et son coin de nature devenus, au milieu des siens, un condensé du monde, de la vie et de la mort –, pendant que l'on s'émeut de la voir préférer enfouir son oeuvre dans le secret de ses tiroirs plutôt que de la soumettre aux exigences conventionnelles des éditeurs et du public, émerge en cette puriste la projection de ce que Dominique Fortier suggère comme idéal de l'écrivain : l'écriture, et rien que l'écriture, dans une quête solitaire et recluse du graal littéraire, à mille lieues des appétences commerciales et narcissiques qui viennent dénaturer l'esprit de création.


Ce petit bijou d'écriture est un enchantement de sensibilité pure, qui vous tient longtemps sous son charme, émerveillé et ravi. Coup de coeur.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Un texte très poétique, plein d'élégance sur la poétesse américaine, Emily Dickinson et les lieux où elle vécut …qui, en de brefs textes, suggèrent le parcours singulier de cette artiste… Narration subtile alternant entre la voix d'Emily, celles de ses proches et enfin, celle de l'auteure, qui trouve de nombreux points de convergence avec sa propre vie, principalement au niveau des lieux habités, familiers … !

« C'est cette existence secrète que j'ai tenté d'imaginer dans -Les Villes de papier-, qui se veut le roman de la vie d'Emily Dickinson en même temps qu'une réflexion sur les lieux-réels ou rêvés-que nous habitons et qui nous habitent. Habite-t-on jamais vraiment une ville, une maison, une famille, ou bien plutôt l'idée qu'on s'en fait ? Où est-on véritablement chez soi ? Peut-on vivre dans les livres ? Et comment se fait-il qu'en français, nous n'ayons pas de mot pour nommer ce qu'en anglais on appelle - home- ?

En voulant raconter la vie d'Emily, je me suis retrouvée à revisiter des pans de ma propre histoire, qui s'est déroulée un temps, presque en surimpression, dans les mêmes endroits que ceux où elle vécut: la ville de Boston, où nous nous sommes toutes les deux senties étrangères (...) Mais en me racontant, c'est encore d'Emily que je parlais. Il faut dire la vérité, mais la dire oblique, écrivait Dickinson.”

La fine musique des phrases de Dominique Fortier est en parfaite symbiose avec l'univers de la poétesse américaine…Cet ouvrage délicat donne envie de lire et relire les textes d'Emily Dickinson…ainsi qu'une curiosité éveillée pour les autres écrits de cette auteure québécoise !

Une lecture lumineuse , pétrie de pudeur autant que d'intenses émotions retenues . On ressent très fort la forte empathie et compréhension de Dominique Fortier pour la poétesse qu'elle a choisie de faire revivre…Comme une « fraternité » admirative et pour l'oeuvre et… pour la personnalité atypique d'Emily Dickinson…!

"On raconte qu'elle a commencé par limiter ses visites au village, pour ensuite rester cantonnée au jardin, avant de ne plus guère quitter la maison, puis le deuxième étage, pour finalement élire domicile dans sa chambre, dont elle ne sortait qu'en cas de stricte nécessité. Mais en vérité, elle vivait depuis longtemps dans bien plus petit encore: un bout de papier grand comme la paume.
Cette maison-là, personne ne pourrait la lui enlever. (p. 120)"

Très heureuse de cette lecture et d'avoir fait la connaissance pour la première fois avec cette auteure née à Québec ! Noté mes plus vives curiosités prochaînes pour deux de ses textes : "La Porte du ciel" et "Révolutions"...
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D'Emily Dickinson on ne sait rien ou presque : cette poétesse américaine (1830-1886) a passé une bonne partie de sa vie recluse dans sa chambre. Seuls ses poèmes, petits flocons de neige, sont venus se poser sur nos existences. Elle a été. Elle fut là. Ses mots toujours nous appellent, nous interpellent :

« J'ai bu une Gorgée de Vie -
Savez-vous ce que j'ai payé -
Exactement une existence -
Le prix, ont-ils dit, du marché.
Ils m'ont pesée, grain par grain de Poussière -
Ont mis en balance Pellicule contre Pellicule,
Puis m'ont donné la valeur de mon Être -
Une unique Goutte de Ciel ! »
(Fragment extrait des Poésies complètes, traduction Françoise Delphy - Flammarion - 2009)

Pour lui redonner vie, l'auteure Dominique Fortier a entrepris de replacer Emily Dickinson au coeur de ses pensées et de ses occupations : lire, écrire, jardiner, observer le monde depuis sa fenêtre...
Entre réalité et imaginaire, l'auteure a recréé une ambiance d'une infinie douceur, même si on sent par ci par là les blessures qui ont marqué son héroïne. La seule maison d'Emily est celle de l'écriture. C'est son refuge, sa protection. Elle ne laisse personne y pénétrer puisqu'elle refuse même d'être publiée. L'écriture est son monde, son moi intime. Son célibat, sa réclusion volontaire sont les ses marques de liberté et font partie de son processus de création.

« Chacun – suprême idéal
Doit accomplir – soi –
A travers la prouesse solitaire
D'une vie qui se tait »

L'écriture de Dominique Fortier est douce et légère, les anecdotes et fragments de vie mêlés à ses interventions personnelles sont comme entourés d'un délicat papier de soie qu'on prend soin et plaisir à écarter pour en savourer le contenu.
J'ai très peu lu les oeuvres d'Emily Dickinson et j'avoue que l'approche qu'en a faite l'écrivaine québécoise est une gourmandise. Ses mots délicats nous emportent dans le monde invisible et profond de la poétesse.
Alors oui, l'envie de découvrir Emily Dickinson est bien là, et elle est accompagnée de celle de découvrir Dominique Fortier dont l'écriture est elle-même source de poésie.

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Un texte magnifique sur l'univers de la poétesse américaine Emily Dickinson.

« Les villes de papier » raconte qu'il y a des lieux (et aussi des gens) qu'on ne connait que sur papier, par les images et les mots qui les ont décrits.
Elle raconte Emily Dickinson, sa passion pour les fleurs, et toutes les petites choses de son jardin, un brin de jasmin ou un trèfle à quatre feuilles qu'elle pose dans un herbier.

Emily est née en 1830. Elle est donc dans la trentaine lorsque les États-Unis sont déchirés par la Guerre de Sécession. Elle habite Amherst au Massachusetts dans une famille prospère qui la met à l'abri du besoin. Elle n'aura pas besoin d'aller travailler dans les filatures de Manchester.

Mais quelles vies étaient alors possibles pour les femmes comme elle ? Faire de la broderie ou du jardinage, avoir un mari et des enfants… Ce n'est pas ce que veut Emily : elle écrit. Elle écrit, de la poésie, tout le temps. Elle ne cherche pas vraiment à publier, elle écrit, c'est une obsession qui prend toute la place dans sa vie.

Avec une belle écriture poétique, l'autrice Dominique Fortier présente une image positive et touchante de la poétesse, tout en racontant un peu son propre périple dans « ce monde de papier ».
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Je sais, l'année vient tout juste de commencer, mais je suis persuadée d'avoir lu avec Les Villes de papier mon coup de coeur 2019. Il m'a fait plaisir de revisiter la vie d'Emily Dickinson, poétesse américaine lue dans la vingtaine, et qui s'est absorbée complètement dans son monde interne et dans son écriture, à travers l'oeil de Dominique Fortier et ses référents géographiques, auteure que je lis pour la première fois. C'est touchant et délicat. De bien belles phrases. Je le recommande vivement.
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C'est par curiosité que j'ai choisi ce livre car le nom d'Emily Dickinson revenait souvent dans la littérature mais je dois avouer que je connaissais peu de chose de cette poétesse (il faut rappeler que je ne suis pas versée dans la poésie).

Dominique Fortier utilise son propre itinéraire dans les différentes villes et maisons où elle a vécu, entre Boston et Montréal, pour évoquer celui de cette femme si discrète, vivant  recluse, presque cloîtrée à la fin de sa vie dans sa chambre, à Homestead dans le village de Amherst (Massachusetts), par peur ou ayant une vie intérieure tellement riche qu'elle fuyait le monde, restreignant de plus en plus son espace de vie pour se concentrer sur ses observations et l'écriture.

Dominique Fortier évoque ce qu'elle imagine être la vie de la poétesse : une enfance complice avec Austin et sa soeur Lavinia avec qui elle partagera une grande partie de sa vie, les deuils qui l'ont éprouvée, sa fuite de la société et du monde. Une vie de papier et d'encre.

N'existant qu'un seul portrait de cette femme, ayant épluché tout ce qui a été publié, elle fait le choix d'imaginer sa vie, ce qui la rattachait à cette maison, aux liens qui l'unissaient à sa famille, aux tâches domestiques auxquelles elle était astreinte, mais avec pudeur et en gardant malgré tout la part de mystère qui l'entoure à jamais.

"(...) j'écume les sites où l'on voit des photos des deux maisons, Homestead et Evergreens, de la ville d'Amherst au temps des Dickinson. Jusqu'à maintenant, c'est une ville de papier. Est-il préférable qu'il en soit ainsi, ou devrais-je, pour mieux écrire, aller visiter en personne les maisons transformées en musée ? Simplement posé : vaut-il mieux avoir la connaissance, l'expérience nécessaires pour les décrire telles qu'elle sont en réalité, ou la liberté de les inventer ? (p24)"

Cette biographie survole une vie, de l'enfance à sa mort et met en évidence la priorité de l'écrivaine, s'oubliant en tant que femme, réduisant sa vie à quelques robes blanches, pour se concentrer sur ce qui l'anime, la nourrit, son oxygène :

"Soit, songe Emily en se remettant à frotter avec une rage renouvelée. Quelques jours par mois je serai une femme. le reste du temps j'écrirai. (p75)"

Est évoqué également l'importance des mots, de ceux recherchés mais aussi de la littérature

"Chaque livre en contient cent. Ce sont des portes qui s'ouvrent et ne se referment jamais. Emily vit au milieu de cent mille courants d'air. (p40)"

Emily Dickinson gardera tout son mystère mais Dominique Fortier restitue une vie telle qu'elle se l'imagine et lui rend un bel hommage en la mettant en lumière, elle qui ne cherchait qu'à vivre dans l'ombre, consacrant sa vie à une forme d'expression où chaque mot doit être juste, choisi pour refléter l'exactitude de la pensée, ne cherchant pas à être connue, cachant ses textes et ayant demandé à Lavinia de les brûler à sa mort.

Je comprends mieux désormais l'attirance de certains écrivain(e)s pour cette femme qui m'a beaucoup fait pensé aux soeurs Brönté ou à Virginia Woolf.

J'ai beaucoup aimé.
Lien : https://mumudanslebocage.wor..
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Avant d'avoir lu ce livre, je ne savais pas était Emily Dickinson. Maintenant j'ai l'impression de la connaître un peu dans sa singularité, son obstination de vivre à sa manière, sa relation particulière au monde. Mais presque rien de son oeuvre, puisque les rares extraits présentés ne suffisent pas à élaborer ne serait-ce que le début d'une impression sur ses poèmes, ni même à éveiller la curiosité envers ceux-ci. Encore que celle-ci pourra trouver réponse dans le tome qui suit, “Les ombres blanches”. Cette quasi absence n'ôte rien à la valeur de cette biographie qui m'a par ailleurs enchanté.

L'écriture est d'une finesse, d'un raffinement, une forme de dentelle. À travers ces coups de pinceau, se dessine une frêle mais déterminée Emily dont la conception de la poésie détonne à son époque. Étonnant aussi son manque d'intérêt à être publiée, une réticence sourde allant même jusqu'au refus; une écrivaine qui est volontairement son seul public est chose rare. Les insertions que fait l'auteure de sa démarche, et des pérégrinations qui vont avec, se fondent aisément dans le récit biographique, lui apportant une dimension supplémentaire sans entacher, au contraire, son déroulement. Bref une lecture captivante sur le fond, portée par une plume lumineuse, qui incite à poursuivre la découverte de cette poétesse que nous propose cette auteure de talent.
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Emily Dickinson était une célèbre poétesse américaine. Pourtant, on connaît peu de choses sur elle. Beaucoup de mystères échelonnent son parcours. Par exemple, pourquoi a-t-elle décidé de vivre recluse dans sa chambre pendant toute la seconde partie de son existence ?

Dominique Fortier va livrer un bel hommage à Emily. Elle tentera de retracer les événements charnières de la vie de cette poétesse, sous forme de petit roman poétique. Presque à la manière d'un kaléidoscope, Dominique nous livrera des tranches de vie. Bien évidemment, elle aura dû imaginer certains moments.

C'est vraiment un très bel essai que j'ai découvert. Avec beaucoup de sensibilité et d'émotions, Dominique retrace les grands événements de la vie d'Emily. Même si certains moments resteront sans réponse, j'en ai appris énormément sur cette écrivaine.

La plume de l'auteure est tout en délicatesse. Sous forme de chapitres courts et avec beaucoup de poésie, Dominique propose une promenade au lecteur dans l'univers d'Emily. Elle entrecoupera les passages faisant référence à la poétesse, avec des passages personnels. Dominique retracera ainsi son parcours au fil des déménagements qu'elle a dû effectuer.

Un très beau récit, où poésie et délicatesse s'entremêlent. À découvrir sans hésiter.

Lien : https://mavoixauchapitre.hom..
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Ville de papier, rues de papier, maison de papier, jardin de papier, êtres de papier : le monde d'Emily Dickinson, fillette rêveuse et imaginative, peut tenir sur un bout de papier, n'importe lequel, celui qui se trouve à sa portée. Des débuts de poèmes, des esquisses de paysages, des évocations d'un idéal de vie, Emily regarde par la fenêtre de sa chambre et rend compte de ce qu'elle voit et ressent.
ll fallait bien Dominique Fortier, avec cette sensibilité bien à elle doublée d'une écriture tout en dentelle, pour restituer le caractère de cette poétesse américaine née en 1830, à une époque où le destin des femmes était immuablement enchâssé dans le mariage et la maternité. « Elle écrit pour témoigner. (...) Chaque poème est un minuscule tombeau élevé à la mémoire de l'invisible. »
Je connaissais peu Emily Dickinson et ce court récit biographique me convainc d'explorer davantage l'existence de cette femme qui a fait le choix de la réclusion pour mieux appréhender sa vie intérieure.
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* Prix Renaudot 2020

“Les mots sont de fragiles créatures à épingler sur le papier. Ils volent dans la chambre comme des papillons. Ou bien ce sont des mites échappées des lainages - des papillons à qui manquent la couleur et l'esprit d'aventure.”

Qu'est-ce que les mots ? Qu'est-ce qu'écrire ? Qu'est-ce que la poésie ? Qui était Emily Dickinson ? À quoi pensait-elle pour écrire sa poésie ? Voilà ce que Dominique Fortier veut nous faire imaginer …. et c'est magnifique ! Tout est si bien décrit, les phrases sont de petites perles qu'il faut découvrir, douces et précieuses. Est-ce un roman ? Une biographie ? Un essai ? Peu importe c'est d'une beauté à couper le souffle …
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