Ce roman raconte l'histoire de Blaise, vendu par son miséreux père lorsqu'il était enfant à Maître Battisto, qui avait su déceler l'extraordinaire talent du gamin pour le dessin. Maître Battisto recueille Blaise et lui enseigne les rudiments de la peinture à Paris, en pleine Renaissance. Apprenti peintre, Blaise accompagne Battisto, l'aide à remplir ses contrats et apprend à gérer un atelier. À la mort soudaine de Battisto, Blaise se retrouve sans argent et il devient responsable des dettes de son protecteur. Pour se départir d'un engagement de Battisto, il aboutit chez Gaspar de Vallon, anatomiste méchant et ambitieux, qui l'oblige à contribuer gratuitement par le biais du dessin à son traité d'anatomie. Ce dernier veut publier le plus beau des traités anatomiques.
Blaise au cours d'une séance d'anatomie rencontre Marie-Ursule, une prostituée à la beauté frappante. Cette dernière a été trouvée sur la route par Adel alors qu'elle était un bébé.
Entre Blaise et Marie-Ursule (ces deux enfants abandonnés) se tissent des liens d'amitié, puis d'amour.
Les deux protagonistes fuiront Paris pour se libérer de la tyrannie de Vallon et entreprendront un voyage qui les entrainera dans des situations rocambolesques. le récit se termine en Italie…
J'ai bien aimé cette histoire qui n'est pas très conventionnelle pour un lecteur québécois. D'une part, cette dernière se déroule durant la Renaissance à Paris. D'autre part, elle aborde le roman d'apprentissage historique, un genre plus ou moins exploité dans la littérature québécoise. le lecteur se retrouve dans les ruelles de Paris où déambulent des prostituées, dans les cimetières à la recherche de cadavres, dans des pensions plus ou moins recommandables, sur les routes peuplées de brigands et de voleurs. de plus, le lecteur est amené à assister à des séances anatomiques très précises. En ce sens, je lève mon chapeau à Maryline Fortin qui a su présenter des scènes bien captivantes où se mélangent la science et l'art.
“Il était là pour dessiner, alors il dessina. Il s'astreignit à observer les lignes, les masses, les volumes, les ombres, les lumières, les textures, plutôt que les chairs sanguinolentes, les viscères impudiquement dévoilés, la coupure monstrueuse, les liquides qui gouttaient lentement sur la table, ce corps dans son ensemble, si humain et si mort à la fois, qui hier encore était animé d'une vie propre, d'une existence qui aurait pu mener l'homme devenu charogne à croiser le chemin de Blaise en d'autres circonstances. (p. 99)”
J'ai trouvé assez fascinante cette histoire qui m'a permis d'aller à la rencontre de protagonistes malchanceux individuellement (Blaise et Marie-Ursule), mais qui tenteront de s'en sortir ensemble.
Après les cadavres, Blaise pourra peindre sa muse et exploiter sa créativité.
“À présent seul sous la galerie du cloître, Blaise promenait son regard autour de lui. Sous les traits délicats de Vénus au-dessus des mers ou de Diane chassant le cerf, elle le contemplait aussi. Elle était partout. Tous les personnages féminins empruntaient la physionomie de Marie-Ursule telle qu'il se la rappelait, c'est-à-dire dans ses moindres détails. Chaque beauté autour de lui avait l'ourlet de sa lèvre, le contour de sa mâchoire, la rondeur de son sein, la courbure de sa cuisse. (p. 543)”
De surcroit, il est à noter que le livre est parsemé au début des chapitres des illustrations tirées du traité anatomique de 1543 de Humani Corporis Fabrica de l'Italien André Vésale. Au début, je croyais que Maryline Fortin avait découvert ce traité qui était demeuré inconnu. Je me suis fourvoyée. C'est durant sa maitrise qu'elle a remarqué cet ouvrage dont on ignore qui a fait les gravures se retrouvant à l'intérieur. Dans «La fiction comme réponse», article publié dans le journal le Droit, Maryline Fortin mentionne à Valérie Lessard, la journaliste :
“Dans le cadre de ma maîtrise, j'étudiais la relation entre les artistes et les scientifiques dans la «découverte» de l'anatomie humaine pendant la Renaissance. À cette époque, l'intérieur du corps humain équivalait à un continent inexploré, et les anatomistes étaient aussi assoiffés de découvertes que leurs contemporains explorateurs […]. J'ai été intriguée par les nombreuses mentions soulignant qu'on ne savait pas à qui attribuer les illustrations de l'ouvrage de Vésale, sans pour autant que quiconque ne pousse ses recherches plus loin pour identifier cet artiste.”
En ce sens, elle a tenté de trouver une réponse à ce mystère par le biais de son récit.
Je tiens aussi à souligner la beauté de la couverture. C'est tout à fait mon genre… Dans le livre, il est mentionné qu'en couverture est présentée Baigneuse de William-Adolphe Bouguereau, de 1864.
Si vous aimez les romans d'apprentissage ou encore l'époque de la Renaissance, je vous encourage à lire ce récit car vous ne vous ennuierez pas! C'est difficile de s'arrêter lorsque l'histoire est commencée. À cet égard,
La Fabrica est un livre réussi qui se lit très bien. Comme première parution, je félicite l'écrivaine
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