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sur 59 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
« Je vais vous parler de l'horreur. L'horreur banale, anodine, qui nous cueille sur le sentier de l'ordinaire et nous rend à lui sans laisser de trace » Ainsi débute ce témoignage d'une jeune mère qui revient sur ce viol subit il y a douze ans alors qu'elle avait 19 ans.
Difficile de raconter l'indicible, surtout lorsqu'on a préféré mettre tout cela entre parenthèses pour continuer à vivre, parce qu'il le faut bien.
« On disait que j'allais bien. Je le disais à mon tour pour ne pas décevoir. Et aussi, je crois, parce que c'était vrai »
Mais la réalité rattrape Elsa Fottorino lorsque, douze ans après les faits et l'affaire classée sans suite, le coupable est enfin identifié. La jeune mère, qui attend son second enfant, voit l'histoire de ce viol la submerger à nouveau.
C'est avec pudeur et délicatesse qu'elle revient sur ce drame et sur l'enquête, les interrogatoires et le procès auquel elle ne veut pas assister.
C'est alors qu'elle décide de prendre la plume pour dire vraiment ce qui lui est arrivé et ne plus se contenter de parler tout bas.
Ce témoignage est davantage un cheminement intérieur qui s'attache à raconter le mal-être, la peur, le vide causé par le traumatisme, la culpabilité et ce déni de sa souffrance qu'elle enfouie. Il lui faut cinquante pages pour se raconter dans l'intime avant de pouvoir parler du viol, de sa violence et de la sidération qui a suivi, cinquante pages avant d'aborder l'horreur et toute la procédure qui suivra.
Il y a une certaine lenteur dans le récit, l'auteure prend le temps avant d'affronter à nouveau ce passé et on la comprend, on l'admire pour sa sincérité, sa mise à nue. Faut-il en passer par là pour, enfin, en avoir terminé avec ce poids ?
Elsa Fottorino nous raconte aussi la vie, avec ses souvenirs d'enfant, et le bonheur d'être mère.
L'écriture est sobre, avec une mélancolie qui affleure souvent, et on ne peut qu'être touché par ce récit émouvant et vrai.
Je remercie Lecteur.com et les éditions Mercure de France pour la découverte de ce roman émouvant.



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Un jour d'hiver, la narratrice, 19 ans, est violée dans un bois, à quelques centaines de mètres de chez ses parents. Douze ans plus tard, son agresseur est arrêté. Convoquée pour le procès qui va suivre deux années après, elle découvre que l'homme a fait onze autres victimes.

Dans « Parle tout bas », la narratrice qui est aussi l'auteure du livre, Elsa Fottorino, revient sur cette déflagration dans sa vie. Mais contrairement à de nombreux autres ouvrages qui abordent ce thème de manière très détaillée, « Parle tout bas » nous livre ici la confession intime d'une femme qui a pris le parti de transformer une chose monstrueuse en exercice littéraire. Prenant de la distance par rapport à ce qui a été et à son statut de victime, l'auteure s'applique à travailler son style. Non, elle ne dira presque rien sur l'agression elle-même. Elsa Fottorino se protège, protège son nom aussi – elle est la fille d'Eric Fottorino, journaliste au "Monde" puis fondateur du magazine hebdomadaire « Le 1 ». A-t-elle le choix ? Pas vraiment de ce qu'elle en dit. Ce viol, très vite ses proches l'ont amenuisé. « Plus de peur que de mal » lui disait-on… Alors en jeune fille sage qu'elle était, elle a suivi le mouvement. Pourtant, la honte est toujours là, le traumatisme bien présent même s'il est caché. Quand on lui annonce le procès alors qu'elle est enceinte et heureuse, c'est finalement la ramener à cet état d'objet, de corps sans être, qu'elle a enduré dans cette forêt de février. Mais une fois encore, elle ne cédera pas au rôle qu'on voudrait lui assigner.
En nous parlant du procès auquel elle n'a pas voulu assister, elle raconte les différentes étapes qu'elle a traversées, de la sidération à la mémoire traumatique, de l'enquête et des démarches, du procès à la reconstruction. Elle montre d'ailleurs qu'on peut se « réparer » psychologiquement autrement que par la justice et se défaire de l'identité de « victime » , en gardant ainsi une forme de dignité aux yeux des autres, tout en reconnaissant que ce fameux statut est nécessaire pour que justice se fasse.

Par l'écriture, Elsa Fottorino a voulu explorer la complexité des sentiments et les états contradictoires qui nous traversent dans pareille situation. Ses mots sont choisis, son style est sobre et sans fioritures. Je regrette juste parfois un manque de clarté dans sa narration qui, à force d'introspection, perd un peu le lecteur. La chronologie y est très confuse. Mais ce sera mon seul bémol à ce récit tout en pudeur.
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Subir un viol, c'est un drame dont on se remet difficilement, ou jamais. Il faudra douze années à Elsa Fottorino pour, enfin, réussir à écrire son histoire, revenir sur les faits, l'enquête et la procédure, longue' qui ont suivi son agression jusqu'à voir l'affaire classée sans suite en l'absence de coupable. Et puis, alors qu'elle attend son second enfant, il y a un rebondissement de l'affaire avec un suspect et dix autres plaintes. Toute l'horreur de ce traumatisme refait surface
« Pour la première fois depuis le début de l'histoire, je peux dire « j'ai mal » et je sais précisément où. »
C'est avec pudeur et simplicité qu'Elsa Fottorino raconte ces longues années de peur et cette éclaircie, enfin, lorsqu'elle s'autorise à écrire son histoire, parlant pour toutes ces victimes silencieuses car un viol, comme le dit si bien l'avocate générale, est un « meurtre de l'âme ».
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La narratrice parle de « l'évènement » pour parler de ce viol, ce mot violent est utilisé pour parler d'autres victimes. le sujet est traité avec délicatesse (je ne trouve pas de mot) comme pour les autres victimes et elle même. Lorsqu'elle fini par évoquer l'acte elle dit juste ce qu'il faut pour qu'on comprenne sans heurter personne.

Ce qui m'a plu dans ce roman c'est qu'il ne suit pas une chronologie linéaire, on ne se perd pas dans les repères temporels. Il y a avant et il y a après… mais dans ces deux espaces il y a tellement de questionnements. Douze ans

Ce qui m'a marqué c'est ce temps qui rattrape la narratrice. Elle avait enfoui ce traumatisme et voilà qu'on lui demande de le faire resurgir. J'ai eu l'image d'un élastique, c'est comme si elle avait avancé en tirant sur cet élastique accroché à cet instant T et que d'un coup d'avoir trouvé le coupable coupait ce point de départ et que tout lui revenait à la fois en faisant des boucles.

On lui a appris depuis toujours à être discrète, se taire et ne pas faire de vague parce que c'est une fille et il y a aussi le milieu dans lequel elle évolue. Elle a continué à se forger la carapace qui la protège. Elle en deviendrait froide et « insensible ». On joue tous un rôle alors pourquoi pas celui-ci si ça lui évite les questions.

J'ai beaucoup aimé la délicatesse avec laquelle elle parle de toutes les victimes d'agression en ayant conscience que chaque une attitude différente en fonction de paramètres personnels, il n'y a pas une bonne ou une mauvaise façon de réagir et de survivre (ou pas).

J'ai aussi remarqué qu'il y a beaucoup de scènes présentes où la lumière est omniprésente, comme si elle voulait tendre vers plus de lumière dans sa vie, sortir de l'obscurité ce secret pour enfin vivre pleinement.

Ma crainte d'être dans la position du lecteur voyeuriste s'est vite évanouie pour mon grand soulagement.
Lien : https://latelierderamettes.w..
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Elle avait 19 ans, besoin d'air, avait séché les cours. Elle a sauté sur un VTT, pris le chemin de la forêt, il l'a stoppée.
Puis violée.

Il faut construire une vie après cette mort de l'âme. Une vie faite d'un classement sans suite, puis d'une réouverture du dossier, d'un violeur en série, d'un homme qui s'en prend aux petits corps de jeunes filles de 15 à 20 ans.
Elle n'était qu'une parmi la série.

La parole sur le viol se libère parce qu'elle s'écoute enfin. Si ces femmes connues sont si nombreuses à avoir été violées, combien d'anonymes?

J'ai vécu ma vie avec cette peur. J'ai toujours peur. Je ne compte pas les agressions de rue ni les agressions sexuelles que j'ai eu. J'ai toujours fait profil bas pour ne pas être violée. Chacune sa stratégie.

Elsa Fottorino, espérant sauver sa peau, a inondé son violeur de mots.
Aujourd'hui, elle les couche dans ce récit.

Si je n'ai pas été sensible à son style, confus, décousu, j'ai été sensible à sa douleur et sa pudeur. Ni crudité ni pathos, mais tout y est.

Si vous avez le courage…
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Cette histoire à la première personne est un voyage sensible entre le traumatisme du passé et le jugement du présent. C'est dans une histoire étirée, ayant subi une longue interruption, qu'Elsa Fottorino plonge le lecteur. la connexion directe avec la narratrice installe une intimité fine et délicate, au-delà de la simple compassion. Elle reconnaît avoir peur et être maladroite avec les mots. C'est donc tout un exercice sensoriel et intellectuel de recomposer son passé, cet événement traumatique et violent. Elle doit se reconnecté à elle-même tout en admettant les conséquences de ce viol.
Cette narration de soi, indispensable à la survie, est portée magnifiquement par l'écriture d'Elsa Fottorino. L'autrice est à l'écoute de son personnage et met en scène tous les jeux de regards posés sur elle. Dès que ce drame personnel devient publique, alors les policiers, son avocate ont un point de vue et veulent écrire l'événement pour mieux le comprendre (dans une logique d'enquête et de justice). Ce roman est une histoire à plusieurs dimensions, où une vie, tout en étant éclatée, a continué. On sent l'énergie de cette femme à vivre, à construire et à se préserver de certains questionnements. Mais cela n'empêche pas, à certains moments, d'être un peu perdu dans la lecture de ce voyage dans le temps, dans les méandres chronologiques. le personnage principal semble tenir à lui seul ce roman, faisant des autres caractères, des ombres, des êtres de passage.
Le roman souligne les silences émotionnels des traumatismes en évitant de les encombrer de mots et de formules. En filigrane, peut-être que la romancière questionne ce besoin de recourir aux mots, de trouver la justesse d'une phrase et de son rythme pour mieux atteindre une forme d'apaisement.
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"Parle tout bas" de Elsa Fottorino parle du viol subi par la narratrice et comment la suite de sa vie a été bouleversée. L'auteur aborde le sujet avec beaucoup de délicatesse, de pudeur et d'humanité.
A l'époque son violeur ne sera pas identifié donc sa plainte sera classée sans suite. Elle sera régulièrement confrontée à l'administration à cause de plusieurs viols subis par d'autres jeunes femmes qui laissent penser que ce pourrait être le même auteur.
La chronologie du livre n'est pas linéaire et parfois le lecteur peut se perdre dans les nombreux questionnements de la victime relatifs parfois au passé ou alors au présent. Ce traumatisme la suit et ressurgit plus violemment lors d'appels à témoignage et notamment lorsque le procès aura lieu alors même qu'elle est enceinte.
Un roman écrit avec une grande sensibilité où l'on y découvre les rouages de la justice notamment.
Un style très particulier avec des phrases courtes et touchantes, qui met en avant la difficulté de parler à cause de son contexte familial, de sa carapace forgée au fil des années suite à ce traumatisme. La parole est aussi au centre de ce roman avec la parole des policiers parfois tellement inadaptée et dérisoire, la violence de nommer le violeur et la victime...
Un livre courageux et puissant qui aborde la reconstruction comme très personnelle.
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Lu juste après le livre de Christine Angot, celui d'Elsa Forttorino relate son viol et sa façon de gérer ce tragique événement. de manière très différente , elle raconte avec beaucoup de réserve et de pudeur cette journée fatale et les années qui ont suivies. La résilience, la discrétion, le désir d'oubli et de se terrer apparaissent ici, mais aussi le besoin de dire pour pouvoir vivre "normalement".
Une autre façon que celle de Christine Angot mais aussi efficace et poignante à lire.
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J'ai lu avec beaucoup d'attention le témoignage d'Elsa Fottorino. J'aime la pudeur qu'elle dégage et la sensibilité qui s'exprime.
Je trouve notamment une partie de ce livre très réussie. La complexité face à la réponse judiciaire, les méandres, les indécisions, le tumulte. Ne pas savoir ce qui est bien ou non, ce qu'il répondre ou non.
La justice suffira-t-elle ? Ce desarroi ainsi exprimé, ajouté à la naissance à venir, est d'une très élégante justesse.
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Avec Parle tout bas, la narratrice a choisi l'angle de la pudeur pour dire la violence des conséquences d'un viol subi alors qu'elle avait dix-neuf ans. Ce genre de viol aux circonstances rares, c'est-à-dire commis par un inconnu. Contrairement à ce que les médias veulent bien nous montrer dans les lignes “faits divers”, c'est plus fréquemment dans l'entourage proche de la victime que se déroulent ces exactions souvent impunies car peu dénoncées. Ici la narratrice décide de ne pas rester figée au stade de victime, elle avance avec force pour devenir plaignante. Elle nous raconte avec sensibilité et profondeur les différentes étapes qui mèneront au procès auquel elle préfèrera ne pas assister. Elle narre l'indicible avec réserve. Il est des mots qui n'ont nul besoin d'être exprimés pour être entendus. Seuls comptent pour le lecteur la complexité des sentiments, des interprétations, la béance laissée par l'incompréhension parfois, la douleur et le mal-être qui s'accrochent à celle qui a subi. Pour tenter de s'en défaire, pour ne pas conserver cette identité victimaire mais devenir une femme à part entière, elle passe par l'écriture car parler tout bas ne lui suffit pas. Par les mots déposés elle réussit à retrouver une forme d'apaisement. Ces mots salvateurs pour elle, le sont certainement aussi pour d'autres.
Merci donc à Elsa Fottorino pour avoir osé ce témoignage intime et poignant.


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