Jean-Louis Fournier a écrit un Hymne d'amour à sa fille Marie « entrée en religion ». Oui, mais quelle religion ? Mis à part Monseigneur qui a étendu son emprise sur elle, nul couvent ou ordre religieux ne se profilent. « Monseigneur ne me paraît pas très catholique. Je ne lui donnerais pas le bon Dieu sans confession. »
« Elle est dans les ordres ou elle est aux ordres ?».
Elle a fait voeu de pauvreté, mais demande, à son père, un 4x4 intérieur cuir et une pension…. « Elle voudrait être une sainte subventionnée ». « Heureusement qu'elle a fait voeu de pauvreté, sinon elle m'aurait demandé une Rolls-Royce ».
Jean-Louis Fournier écrit : « S'ils plaisantent, c'est peut-être pour être moins malheureux.
L'humour est un antalgique, on l'utilise quand on a mal ». C'est ce qu'il fait dans ce livre d'une fort bien belle façon, à la manière des désespérés, il invite même Desproges, son compagnon, à son secours.
Parodiant une des dernières paroles du Christ, il écrit « Fille, Pourquoi nous as-tu abandonnés ? »
Il lui pose et se pose beaucoup de questions, voudrait comprendre :
« Peut-être qu'à la différence des piles, les sentiments s'usent quand on ne s'en sert pas ».
« Pourquoi maintenant c'est si difficile ? »
« Pourquoi, maintenant que tu dis être heureuse, que tu déclares être sur terre pour le bien des autres, tu t'es durcie ? »
Pourquoi, depuis que tu es à Dieu, tu es odieuse ? »
Que peut-il espérer d'autre que le bonheur de Marie ; « L'important, c'est qu'elle soit heureuse. Est-ce qu'elle est heureuse ? »
Au fil des années, il ne partage plus grand-chose avec sa fille et c'est terrible pour lui « Je ne l'ai pas invitée au Théâtre du Rond-Point pour voir mon dernier cheveu noir. Je n'ai pas eu envie qu'elle vienne. » Quelle phrase terrible et horrible
Petit livre qui se lit très vite, mais poignant et qui ne se laisse pas oublier. le sectarisme enferme et coupe de tout. « Sectaire, ça commence comme sécateur, ça coupe. Ça coupe des parents, ça coupe des amis, ça coupe du monde professionnel, ça coupe du monde tout court. ».
Et puis, il y a l'attente, cette attente de la voir quitter son gourou, revenir à son travail de graphiste qu'elle aimait tant.
Jean-Claude Fournier avec l'humour acide du désespéré, souffre. Sa détresse affleure à chaque phrase, mais il ose quémander avec cette supplique : « Reviens, avant que je m'en aille. »
J'ai lu de lui
Poète et paysan où il y avait déjà cet humour noir et acide. D'autres sont dans l'attente.
Jean-Louis Fournier est une belle personne, normal puisqu'il a travaillé avec Desproges en réalisant « La minute nécessaire de Monsieur Cyclopède » !
N'hésitez pas, lisez-le, c'est un petit bijou à faire grincer les dents.
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