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Critique de Presence


Ce tome est le premier d'une série. Il contient les épisodes 1 à 5 parus en 2012/2013, écrits par Matt Fraction, dessinés et encrés par David Aja (épisodes 1 à 3) et Javier Pulido (épisodes 4 & 5), ainsi que le numéro 6 de la série "Young Avengers presents" écrits par Fraction, dessiné par Alan Davis et encré par Mark Farmer (2008, consacré à Kate Bishop).

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Hawkeye - Épisode 1 - Clint Barton est passé par une fenêtre, il se retrouve à l'hôpital, puis dans un fauteuil roulant. Quelque temps après il apporte un chien victime d'un accident de la circulation dans une clinique vétérinaire en exigeant qu'il soit soigné. Entretemps il a réglé un problème d'éviction pour loyer impayé. Épisode 2 - le "Cirque du Nuit" donne une représentation à destination d'un public très huppé, aux activités peu recommandables. Clint Barton et Kate Bishop sont sur place parce que des signes en langage des itinérants sur les murs de la ville indiquent qu'il se prépare un gros coup. Épisode 3 - Une femme a volé une voiture à un gang qui roule en Fiat Mini, et Barton a couché avec elle. Épisodes 4 & 5 - L'organisation d'espionnage du SHIELD confie une mission à Clint Barton : récupérer une cassette vidéo contenant des images le montrant en train d'assassiner un chef politique.

Clint Barton apparaît pendant 2 pages en costume d'Hawkeye (les 2 premières), et c'est fini, pendant tout le reste du tome il sera en civil. Qui est Clint Baton selon Matt Fraction ? C'est un individu blond, simple, aventureux, avec une bonne capacité à encaisser coups et blessures. Clint Barton est un célibataire, sans réelle attache, assez insouciant, qui est resté très accessible malgré son boulot prestigieux dans les Avengers. Il aime bien les chiens et les gens normaux. Il ne refuse pas une partie de jambes en l'air de temps à autre (avec Cherry). Il entretient une relation particulière avec la jeune Kate Bishop, pour partie paternaliste et protecteur, lui faisant bénéficier de son expérience, pour partie faite de gentilles remontrances de Kate à son endroit du fait de son insouciance. C'est également un individu qui est ancré dans l'univers partagé Marvel puisque le lecteur connaisseur pourra identifier Wilson Fisk, Maynard Tiboldt (Ringmaster), Lonnie Lincoln (Tombstone), Opehlia Sarkissian (Madame Hydra), Maria Hill, etc. Bref c'est un type sympa proche de l'homme de la rue, à qui il arrive des aventures pas possibles, et disposant de talents de tireur d'élite qu'il exerce bizarrement avec un arme un peu archaïque (un arc).

Sur la deuxième page, Fraction résume la nature de cette série : Clint Barton (Hawkeye) est devenu le plus grand tireur d'élite du monde. Puis il a rejoint les Avengers. Voilà ce qu'il fait quand il n'est pas un Avenger. C'est tout ce que vous avez besoin de savoir. le lecteur a donc immédiatement la sensation que cette série se fixe pour ambition d'être lisible par le public du film Avengers (2012), c'est-à-dire par le grand public. Il s'en suit des aventures hétéroclites, dont l'unité est assuré par l'incroyable identité visuelle des dessins de David Aja (puis de manière un peu moins intense ceux de Javier Pulido). Au fil de ces aventures, le lecteur se rend compte que Barton est vraiment sympa (prêt à payer les loyers impayés des locataires de son immeuble, voire à racheter l'immeuble avec son salaire d'Avenger), prêt à jouer un tour à la pègre, ou à exécuter une mission secrète de la plus haute importance. La décontraction de Barton rend chaque histoire très agréable, ce qui est accentué par le fait que Fraction insère des pensées de Barton soit explicatives, soit gentiment moqueuses.

Ce qui fait sortir cette série de l'ordinaire des superhéros est donc la manière dont elle est racontée. Il y flotte une légère dérision, Barton se moquant régulièrement de lui-même (à commencer par le fait qu'il a choisi l'arc comme arme, dans un monde de flingues et de superpouvoirs). L'épisode 3 lui fournit même l'occasion d'utiliser ses flèches gadgets (flèche filet, flèche acide, flèche sonique, etc.). Alors que cette scène semble sortie tout droit d'un comics pour enfant des années 1950, Fraction et Aja la transforme en une séquence d'action haletante, crédible et drôle. Elle est haletante car il s'agit d'une course-poursuite en voiture, avec un minimum de texte, une mise en scène vivante rendant bien compte des mouvements sans tomber dans l'exagération, un encrage un peu gras, des dessins un peu épurés qui évoquent l'atmosphère des films d'action des années 1970, une petite merveille. Tout au long de ces 3 épisodes, David Aja fait preuve d'un sens de la composition incroyable. La première page de l'épisode 2 décrit Barton et Bishop plongeant dans une piscine dans un grand hôtel alors qu'on leur tire dessus, en 13 cases presque muettes associant gros plan sur un détail et vue plus générale dans un kaléidoscope qui rend compte de la frénésie du mouvement, de la violence des tirs et des dommages collatéraux, magnifique. Javier Pulido (dessinateur remarquable sur la série Human Target) utilise un style plus épuré, avec un encrage moins marqué et une mise en scène moins sophistiquée, mais qui reste raccord avec l'ambiance installée dans les 3 premiers épisodes.

De son coté, Matt Fraction se montre aussi très malin dans sa narration. Il joue avec la chronologie des histoires en plaçant d'abord une scène d'action, puis ensuite l'explication de comment les personnages en sont arrivés là. Il insère quelques références à la vie normale (en dehors des comics), comme le Cirque du Nuit (une transposition transparente du Cirque du Soleil, avec une petite faute de français), ou l'exécution d'un facsimilé de Ben Laden, ou encore l'élocution limitée des gros bras employant "Bro" 3 fois par phrase. Ces éléments ont pour effet d'éloigner ce comics de superhéros de son milieu d'origine, et de le rapprocher d'une fiction plus accessible au grand public. Il utilise également un ou deux dispositifs narratifs plus élaborés tels qu'un phylactère du Ringmaster contenant entre crochets "Quelque chose en français". Fraction indique à la fois que Barton ne comprend pas le français, mais aussi que finalement ce que dit Ringmaster n'a aucune importance. Enfin, Fraction pense au lectorat Marvel de base en insérant des personnages de cet univers, immédiatement reconnaissables pour le lecteur habitué, sans pour autant obérer le plaisir de lecture de celui qui ne les connaît pas. Il réussit même à jouer sur les 2 tableaux avec l'apparition de Nick Fury junior (Marcus Johnson, apparu pour la première fois dans Battle scars) qui est à l'image du Nick Fury des films (Samuel Jackson), tout en renvoyant à un point de continuité très pointu. Toutefois, Fraction se repose quand même sur des conventions propres au récit d'aventures comme le héros qui guérit vite de ses blessures et sans séquelle, ou l'aisance financière (son salaire d'Avenger) qui lui permet de consacrer tout son temps libre à ses aventures.

À l'évidence ce tome sort du lot de la production de comics Marvel, avec un personnage principal cool et courageux, sans costume de superhéros, et utilisant ses talents avec habilité et une pointe de dérision dans un monde un peu moins en vase clos que celui des autres séries de type Avengers ou X-Men. Fraction et Aja (et dans une moindre mesure Pulido) se servent de leur savoir faire pour donner une forme très ludique à ces histoires assez classiques, pour un niveau de divertissement remarquable.

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"Youg Avengers presents" 8 - Pendant la période du "Dark Reign" (Norma Osborn était alors devenu le responsable de la sécurité intérieure des États-Unis), une nouvelle équipe d'Avengers a fait son apparition : Young Avengers. Alors qu'Elijah Bradley (Patriot) et Kate Bishop (Hawkeye) font un tour de Central Park en calèche, Ronin (l'un des Avengers clandestin, en réalité Clint Barton) s'en prend a elle et lui fixe un rendez-vous pour un défi d'adresse au tir à l'arc.

Alors que Clint Barton avait disparu de la surface de la Terre, Kate Bishop s'était attribuée son nom de superhéros, et avait été adoubée par Captain America dans cette fonction. Avec cet épisode (antérieur à la série mensuelle, nettement plus superhéros que ceux d'Hawkeye, tout le monde porte son costume), Matt Fraction s'atèle à donner une légitimité à Kate Bishop face au vrai Hawkeye. Il le fait plutôt bien mettant en avant la personnalité de l'un et de l'autre, par le biais de répliques ciselées, l'expérience de Barton face à la fougue adolescente de Bishop. Les dessins de Davis et Farmer sont comme à leur habitude très agréables à regarder, avec une forme de rondeur et de fraîcheur. L'encrage de Mark Farmer semble parfois s'inspirer de celui de Bryan Hitch sur "Ultimates". Sans être indispensable, cet épisode se laisse lire et préfigure la relation particulière qu'entretiendront les 2 Hawkeye dans les épisodes de la série. En ce sens, la présence de cet épisode n'est pas déplacée dans ce recueil.
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