Philémon, tome 10 : L'Âne en atoll

Cet album, tout en étant un peu moins chargé d'inventions et d'action que la moyenne, est plutôt riche de sens. Philémon va ce retrouver cette fois-ci dans le monde des lettres avec son âne Anatole. C'est l'occasion d'un hommage à Arthur Rimbaud, avec toujours cette imagination graphique débordante. Nous sommes sur le U, sur ce monde inversé, les bonnets d'ânes sont l'apanage de prestige. Anatole va se retrouver ministre dans un monde un peu cinglé où les ânes sont au pouvoir. Cet album m'a un peu laissé sur ma faim, il paraît plus court, trop vite lu, mais même s'il laisse une petite frustration, cette aventure est une fois de plus un voyage merveilleux et poétique. Je ne m'en lasse pas.

Ça y est, j'en suis persuadé, mon inquiétude concernant une potentielle lassitude lors de ma lecture de « L'île des Brigadiers » s'est éloignée et tant mieux ! Cette fois, Fred emmène ses personnages sur le U en les faisant passer, contre leur gré, par de la bave d'escargot. On retourne dans le monde des lettres et c'est un plaisir de revoir ce lieu rempli de rêves guidés par l'imagination débordante d'un auteur malicieux. C'est la première fois que l'âne de Philémon, Anatole, arrive dans l'univers des lettres et il est accueilli en ministre par tous les habitants qui voient en ses grandes oreilles la clef du savoir. Philemon, quant-à-lui, sera rejeté et devra tout tenter pour récupérer son fidèle destrier. Pour ce faire, il rencontre un artiste qui l'emmène sur le bateau volant d'Arthur Imbo, ancien poète et trafiquant d'armes ayant un attrait non dissimulé pour l'alcool (référence directe à Arthur Rimbaud). Cet album a beau paraître moins fourni que les précédents, ça ne m'a pas dérangé tant l'histoire est chouette et les dessins maîtrisés. Fred continue d'insérer des dessins semi-réalistes dans ses cases et de faire interagir son dessin avec, c'est une riche idée qui s'allie bien avec l'extraordinaire découpage des planches très peu conventionnel. C'est la première fois que j'ai du mal avec la couverture mais Fred est pardonné grâce au jeu de mot du titre très astucieux !

Quelle tristesse que cet album fut si court.
L'histoire est tellement passionnante que l'on aurait envie d'y rester plonger encore et encore. La prise de pouvoir par Anatole est intéressante dans la trame narrative de Philémon, il prend enfin une place prépondérante, et cette prise de pouvoir permet au passage une critique des élites comme Fred les apprécie.
Quelques cases sont inégales, mais dans l'ensemble l'album est superbe.

Que de bonnes idées, mais si peu exploitées ! On dirait un brouillon (comme beaucoup de Philémon malheureusement). Jusqu'aux couleurs très criardes. Passées à la va-vite ? Autant on lit des albums très aboutis, autant on se retrouve avec des histoires mal fagotées. Et ces cases qui ne sont tout simplement que de mauvaises photocopies noircies et pas très lisibles auxquelles Fred à ajouté quelques détails... L'un de mes gags préféré est le "O" de "bOum!" Un passage vers les lettres vraiment poétique, vraiment fantastique ! Lisez, vous comprendrez !

Malgré la belle inventivité de Fred, je me lasse des aventures de Philémon. Cette fois, c'est L'âne Anatole qui voyagera jusqu'aux lettres de l'Atlantique mais j'avoue que j'ai lu cette histoire d'un oeil distrait. C'en est fini de la magie qui enchantait les premiers albums. Est-ce l'habitude ou le manque nouveauté ? Un peu des deux je pense. J'essaierai quand même de poursuivre la série un de ces jours.