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Stéphanie Lux (Traducteur)
EAN : 9782330137199
224 pages
Actes Sud (04/11/2020)
3.17/5   20 notes
Résumé :
Née en RDA en 1987, Johanna n'a pour ainsi dire jamais connu son père, parti à l’Ouest juste avant la chute du Mur, alors qu’elle n’avait que deux ans. Désormais majeure, elle vient de s’installer à Berlin, qu’elle arpente en tous sens à bord des tramways dont elle sera bientôt l’une des conductrices, quand un message laissé sur le répondeur de sa mère fait ressurgir Jens.

L’heure est enfin venue d’éclaircir les raisons qui l’ont Née en RDA en 1987, J... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Lorsque Johanna avait deux ans, son père est parti au travail un beau matin et n'est jamais revenu.
Il est parti à l'ouest, juste avant la chute du mur de Berlin, la mère de cette jeune fille a dû tout assumer et n'a jamais trop su ou parlé de ce qui était arrivé à son conjoint. Mais ce qui est sûr, c'est qu'il n'a jamais vraiment cherché à reprendre le contact. de temps en temps, une carte postale arrivait , toujours abstraite, aucune coordonnées transmises, aucune réponse attendue...
Aujourd'hui, un coup de fil de ce grand absent. Mais il est trop tard, Jens est en phase terminale de cancer, son état ne permet pas de communiquer avec lui, et les réponses ne viendront jamais, en tous les cas pas de lui. Alors, Johanna, s'accroche, à sa demi-soeur qu'elle vient de découvrir, et qui, elle, a un peu connu son père vers la fin, et à sa grand-mère paternelle , revêche et taiseuse...

J'aimerais vous dire que cette quête du père, d'une filiation, de ses origines , m'a touchée et beaucoup émue, mais le style de l'auteur est trop froid , trop "gris" , trop flou.
Johanna m'a fait l'effet d'un papillon de nuit se cognant sur toutes les surfaces qu'elle rencontrait ( mère/ père/ demi soeur, amoureux) et même dans son pays ex-RDA, Allemagne réunifiée, la grande histoire. C'est certainement voulu, mais ça n'aide pas à rentrer en empathie.
Entre toutes ces petites bribes glanées et les notes des archives de la STASI ( son père a pu être interrogé et considéré comme un opposant au régime), Johanna se (re) construit doucement. Mais l'on comprend très vite que ces interrogatoires et observations du Lieutenant chef Séléné , si au début sont réelles, ne sont vers la fin, que supputations, Johanna remplissant les vides, le mystére qu'a été la vie de son père. ( Vers la fin du roman, le lieutenant Séléné devient " Collab. Innoff. Séléné " ).

Très opaque, mais profond et très vraisemblable, ce roman sera une petite sortie de route de ma zone de confort littéraire.
Je ne peux pas dire que j'ai aimé, mais je peux dire que j'ai apprécié le sérieux de la démarche littéraire. Beaucoup de respect pour l'auteure , laquelle retranscrit parfaitement la vie avec ce qu'elle a de rendez-vous ratés, de mauvais timings , d'abandons, de mocheté, de pas terrible, de banal. A aucun moment, elle m'a semblé prendre les chemins de la facilité.

Sobre, sérieux et âpre...
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La narratrice, Johanna, vit depuis quatre mois à l'Ouest, à Berlin, où elle fait un apprentissage de conductrice de tram. Elle passe de temps en temps voir sa mère qui habite encore à l'Est. le Mur est tombé en 1989, mais dix-neuf ans plus tard, Johanna et sa mère raisonnent encore en termes d'Est et d'Ouest. Jens, le père de Johanna, est parti quelques mois avant la chute du Mur, sans doute pour passer à l'Ouest. Il n'a jamais cherché à revoir Johanna ni sa mère, Astrid. Il n'a donné aucune nouvelle sinon, de temps à autre, par des cartes postales laconiques. Et voilà qu'il a laissé un message sur le répondeur d'Astrid : d'où il est, il voit le Mur, mais de l'autre côté, et « La petite n'a qu'à me rappeler à l'occasion » dit-il… Après quelques hésitations, Johanna se décide à le joindre. Il est à l'hôpital, mourant. Quelles relations vont-ils pouvoir développer dans ces conditions ? Les chapitres du récit de la narratrice sont entrecoupés de rapports d'interrogatoire et de procès-verbaux rédigés en 1989 par le commandant, sous-lieutenant ou lieutenant Séléné, ou par sa « collab. inoff. » Ces imprécisions prendront tout leur sel au fur et à mesure de la lecture.
***
Plusieurs aspects sont extrêmement séduisants dans ce roman de Paula Fürstenberg. Ainsi, le titre, La Famille du tigre ailé, trouve sa source dans les cartes que collectionne Johanna depuis longtemps. Celle qu'elle préfère est la reproduction de la mappemonde d'Ebstorf dans laquelle, comme dans beaucoup de cartes du Moyen Âge, des animaux fabuleux sont représentés aux marges du monde connu, dont un tigre ailé. Cette carte se présente, je crois, comme une métaphore de la vie de son père : une Terra Incognita à explorer, plutôt que comme la carte d'un Berlin-Ouest à connaître comme elle le dit elle-même. Les théories qu'échafaude Johanna pour se rassurer m'ont bien plu aussi. Elle hiérarchise les étages de l'hôpital selon la gravité des cas, par exemple, ou encore associe le choix d'une paire de chaussures à l'intention de celui qui les porte : les baskets, c'est seulement pour boire un verre ; les chaussures en cuir, c'est pour une relation plus sérieuse… On suivra les efforts de Johanna pour se construire. Elle ne connaît pas l'Ouest où elle vient de s'installer, elle ne connaît pas son père et elle se demande bien comment elle va pouvoir faire la part des choses : sa mère, sa demi-soeur puis sa grand-mère paternelle qu'elle découvre toujours vivante, ces trois femmes n'ont pas la même version sur l'homme qu'est Jens ni sur les motifs de son départ. Se pourrait-il qu'il ne soit jamais revenu à cause d'elle, sa fille ? La plongée dans le passé où ses recherches l'entraînent, une certaine perte de contact avec la réalité et le présent, la difficile prise de conscience de son isolement, la maîtrise progressive de la colère qui l'habite finiront par l'amener vers une fragile forme de sérénité. C'est un bon premier roman, à lire pour l'ambiance très particulière induite par ce Mur, construit/détruit, mais toujours présent…

Lu dans le cadre du prix des Lecteurs de Cognac 2021
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Johanna a toujours vécu seule avec sa mère car son père est parti juste avant la chute du Mur de Berlin en 1989, alors qu'elle n'avait que deux ans. Elle ne sait rien de lui et personne ne la renseigne jusqu'au jour où elle reçoit un message téléphonique l'invitant à reprendre contact 19 ans après ! Jens est malade, en phase terminale et ne lui apprendra rien des motifs de sa disparition, restée inexplicable pour elle.
Johanna apprend à conduire les tramways, se fabrique une vie à elle, et visite son père à l'hôpital, devenu muet du fait du cancer qui gagne son cerveau.
Elle glane alors çà et là des éléments apportés par sa demi-soeur, Antonia, abandonnée elle aussi par le père mais qui vit bien mieux qu'elle les éléments lacunaires de sa vie, ou Hilde sa grand-mère paternelle, femme revêche et taiseuse sur le passé de son fils.
Le récit est entrecoupé de textes dactylographiés à la manière de documents officiels qu'on imagine émanant de l'époque de la Stasi. Mais le lecteur comprend rapidement que c'est Johanna qui écrit et recrée de toutes pièces le passé pour mieux comprendre ce père rêvé qui disparaît peu à peu en gardant ses secrets. Elle fabrique sa propre histoire du tigre ailé, figure métaphorique du père qui restera, malgré toutes ses recherches, « terra incognita », à l'image des marges vides figurant sur une carte médiévale qu'elle possède.
C'est le miracle de la littérature qui fait mieux que le réel, crée le monde, et sauve le père du néant et de l'affreuse possibilité de l'oubli. Puisque personne ne veut aider Johanna à connaître l'histoire du père, autant l'inventer.
Le lecteur replonge dans l'histoire récente du Mur, des modes de vies diamétralement opposés et des blessures encore vivaces aujourd'hui malgré la réunification des deux Allemagne.
Voici un roman original, qui place la littérature comme un remède au mensonge et à l'ignorance. Ce qu'on imagine vaut tout autant que ce qu'on ignore. La force du texte est aussi de montrer la quête désespérée de l'héroïne pour retrouver les traces du passé, nécessaires racines pour pouvoir se construire et vivre sereinement.
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Voici un titre joliment intriguant. J'ai découvert ce roman en cherchant des idées pour ma participation au challenge Les feuilles allemandes qui se tient au mois de novembre, organisé pour la quatrième année par Fabienne du blog Livrescapades et Eva et Patrice du blog Et si on bouquinait un peu. L'an dernier j'avais lu La huitième vie de la Géorgienne de langue allemande Nino Haratischwili, en lecture commune avec Fabienne. Coup de coeur fracassant, comme vous vous en souvenez. Bonne pioche également cette année, avec ce roman de l'allemande Paula Fürstenberg, qui m'a séduite.

« [Elle] me jette un regard indéfinissable, comme un dé dont on ne sait pas sur quelle face il va tomber. »

Berlin, 2008. Johanna apprend à conduire des tramways. Son père l'a abandonnée quand elle avait deux ans, il y a dix-neuf ans, quelques semaines avant la chute du Mur, pour passer à l'ouest et devenir un rocker célèbre. Silence radio depuis. Mais un matin son père la recontacte, et tout va se compliquer pour Johanna, tandis que se dissout le voile de ses certitudes.

« Parti à l'ouest », c'est ce que sa mère lui a toujours dit. Mais n'était-il pas plutôt en prison, arrêté par la Stasi (la police politique de l'ex-RDA), à cause de ses chansons subversives ? La famille du tigre ailé raconte la quête d'une jeune femme à la recherche de vérité. Une quête familiale compliquée par ce qu'implique le Mur de l'époque et la séparation des deux Allemagnes : les pièces du puzzle ont les bords floutés. Une quête aux ramifications soudaines et intrigantes, comme un jeu de piste qui prend parfois ses aises avec la réalité.

J'ai vraiment beaucoup aimé cette histoire, qui en plus se tient admirablement jusqu'au bout, quelle joie. L'écriture de Paula Fürstenberg a quelque chose de spécial. Elle me fait penser à des pas dans de la neige fraîche. Johanna est très attachante et l'autrice interroge avec habileté plusieurs générations sur ce qui nous construit et la complexité « d'être », dans un pays qui n'existe plus.

« Dans une famille il n'y a pas de vérité, il n'y a que des histoires. »
Lien : https://lettresdirlandeetdai..
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Prendre pour héroïne une jeune fille née en 1987 permet à Paula Fürstenberg d'évoquer la difficulté, pour la première génération "post Allemagne du Mur", à se positionner dans le monde en l'absence d'une Histoire collective claire et cohérente.
Johanna a récemment emménagé à Berlin, où elle suit une formation pour être conductrice de tram, au grand dam de sa mère qui voudrait qu'elle fasse des études. Elle-même est vétérinaire, mais n'exerce plus depuis la réunification, se contentant de faire le ménage dans un zoo, et de recueillir chez elle toutes sortes d'animaux blessés qu'elle requinque avant de les relâcher.

Le père, Jens, les a quittées quelques jours avant la chute du Mur, trop tôt pour que Johanna en ait gardé quelque souvenir, sans doute pour fuir à l'Ouest, comme le prétend sa mère, et comme semble l'attester une carte postale que le fuyard leur a envoyé quelques semaines après sa disparition, les invitant à le contacter mais ne laissant ni numéro de téléphone ni adresse pour ce faire.

Or, voilà qu'après dix-neuf ans de silence, Jens se manifeste, sous la forme d'un message l'informant qu'il se meurt d'un cancer à l'hôpital. C'est en lui rendant visite que Johanna fait la connaissance d'Antonia, sa soeur aînée, et d'un père dont elle espère obtenir enfin des explications sur les motivations qui l'ont poussé à abandonner sa plus jeune fille. Malheureusement, quelques jours après leur première rencontre, la maladie affecte la fonction langagière de Jens, et le rend muet, suscitant chez Johanna une frustration désespérée.

La jeune fille est pourtant déterminée à mener l'enquête. Elle interroge les proches de son père -Antonia, dont la version des événements familiaux de 1989 diverge étrangement de celle de la mère de Johanna, puis Hilde, l'antipathique et austère grand-mère paternelle dont elle vient également de faire la connaissance-, envisage, ainsi que le permet la maladie de Jens, de réclamer son dossier à la Stasi… mais s'oppose à de nouveaux murs, intangibles ceux-là, des murs de silence, élevés par l'ignorance ou l'incompréhension que provoque sa quête obsessionnelle d'une vérité qui sans cesse fluctue et se dérobe.

Autant que d'une histoire paternelle, c'est d'une histoire tout court dont Johanna, née dans un pays qui n'existe plus, a besoin. Son ignorance du passé l'empêche d'avoir des perspectives pour l'avenir. Mais comment construire, a fortiori comment s'approprier une histoire dont les acteurs ont fait un tabou, muselant leur mémoire pour éviter de réveiller traumatismes, regrets et vieux antagonismes, d'admettre qu'ils ont été les perdants d'une réunification qui a fait avorté leurs projets, compromis leurs carrières ?

C'est finalement la fiction qui vient au secours de Johanna. Son passé comporte des trous, à l'image de ces cartes de la RDA qu'elle collectionne, et qui laissent un espace vierge à la place de l'Allemagne de l'Ouest ? Peu importe. Elle préfère se raccrocher aux fantasmes grâce auxquels elle le reconstitue, quitte à changer de version plusieurs fois, que de laisser béer les vides du réel, et convoquer, pour panser les plaies occasionnées par le mensonge et l'ignorance, le pouvoir de la littérature.

Dotant son héroïne tout aussi égarée que déterminée d'une voix singulière et consistante, Paula Fürstenberg déroule son récit sans fracas mais avec un sens aiguisé des nuances qui font la richesse des êtres, et nous livre un roman au charme subtil mais prégnant.
Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Compte rendu d'interrogatoire

Interrogatoire de l'accusé
Borg, Jens
par l'officier traitant " Rose"
(...)

J. aussi économise. Il économise ses efforts en cessant d'aller travailler, en cessant de venir à Löcknitz, Uckermark, il économise les efforts de toute sorte, professionnels et privés, et se montre prodigieusement doué et économe en compromis, concessions et retours ; il n'y a qu'en matière d'erreurs qu'il est particulièrement généreux.
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Petite, je passais des dimanches entiers à nettoyer des cages, à brosser des poils. Mais une fois arrivés le premier baiser, la première cigarette fumée en douce dans le champ de maïs derrière la station-service, j’ai perdu l’envie et passé la moitié de mon adolescence à faire comprendre à ma mère que je ne m’occuperais plus de ses animaux trouvés.
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