Contacté par l'auteure sur Facebook, j'ai été ravi de recevoir d'elle ce premier opus d'une série qui en compte déjà quatre (avec un cinquième en route). J'ai eu l'imprudence de parcourir les réactions sur amazon, en revanche – allez savoir pourquoi –, et j'ai entamé la lecture de ce livre avec pas mal d'attentes. Belle découverte, saga historique, fresque familiale, ainsi les lecteurs ont-ils décrit ce livre (j'en passe et des meilleurs). Malheureusement, je suis resté sur ma faim, moi. À vrai dire, j'ai tourné les yeux au ciel si souvent que j'ai l'impression d'avoir plus regardé mon plafond que l'écran de mon Kindle. Disons-le tout de suite, sans détour. Ce livre contient tout ce qui pourrait faire un beau livre, un livre passionnant, haletant, émouvant. Hélas, en l'état, il reste, pour moi, une ébauche. Trop de choses sont seulement esquissées, restent embrouillées, confuses, pas abouties.
Regardons l'intrigue. le synopsis ne révèle que deux tiers du livre, le premier tiers à peu près étant dévolu à l'enfance de Mark et Paul. Ce dernier, fils de Lord and Lady Hilston, voit Mark débarquer un jour. On est au début des années 20, le père de Mark est mort dans les tranchées de la guerre 14-18, sa mère s'est suicidée. Les deux garçons, âges de 4 et 6 ans, si mes souvenirs sont bons, passent deux années ensemble, et un lien indéniable, un lien qui dépasse la simple fraternité enfantine, se noue entre eux. Mark a aussi deux soeurs, des jumelles, qu'on autre couple vivant à proximité élève dans leur maison. Déjà, on se demande pourquoi l'auteure s'est compliquée la vie (compliquant ainsi et l'histoire et la lecture) ; les Hilston auraient très bien pu prendre en charge les trois enfants, de ce fait facilitant tout ce qui suit plus tard, notamment l'attirance de Paul pour une des jumelles. Mais soit. À un moment, l'oncle de Mark arrive et emmène le garçonnet avec lui en Suisse, où il vit avec son amant allemand. Les enfants sont déchirés, émotionnellement, mais la vie reprend vite le dessus. À partir de ce point de départ, l'on peut se référer au synopsis pour connaître la suite du roman, qui nous fait découvrir ce qui se passe des années 30 jusqu'à la fin de la Seconde Guerre mondiale.
Pour commencer, il y a bien trop de personnages. Entre Lord Peter Hilston, sa femme, leurs enfants (Paul a une grande soeur), la nounou, le majordome, leur petit-fils, les autres domestiques (qui changent en plus au cours du livre), le couple qui a recueilli les soeurs de Mark, les deux soeurs elles-mêmes, un médecin plus sa femme plus son fils, l'oncle de Mark et son amant Karl, etc., etc., j'ai vite été perdu. Ce qui complique la chose, c'est que l'auteure n'a pas voulu choisir une narration suivie. Deux, voire trois narrateurs auraient amplement suffi, mais non, on regarde l'intrigue tantôt du point de vue de Peter, tantôt de celui de sa femme, tantôt de celui de Paul, ou de Mark, ou des soeurs jumelles. Les changements de perspective se font parfois même dans un seul et même chapitre, ce qui renforce ce sentiment de fouillis. On n'est pas aidé par l'écriture, par le style de l'auteure, non plus. Que de détails (souvent vraiment sans aucune importance) ! Encore, si c'était présenté de façon intelligible ; mais des bouts de phrase sont parfois injectés dans d'autres phrases, genre « elle mangeait décidément elle avait bon appétit une tranche de gâteau ».
Donc, j'ai trouvé ce livre très compliqué à lire. Non pas que les phrases soient trop longues ou trop complexes ; elles s'avèrent juste, assez souvent, maladroites dans leur tournure. La mise en page n'aide pas trop, non plus, car on saute parfois d'un événement, d'un personnage, à un autre, sans que cela ne se voie. Abondance de personnages ; trop-plein de points de vue de narration ; retournements de situation évitables ou plus faciles à amener et expliquer ; solutions parfois téléphonées (notamment la fin, ou Paul apparaît comme un pantin que l'on se partage sans qu'il n'ait voix au chapitre) ; événements qui n'apportent rien à l'histoire et qui l'encombrent inutilement – ça, ce sont mes griefs principaux. Hélas, ce n'était pas tout. Je n'ai pas compté les fautes d'orthographe, de grammaire et de ponctuation, non plus. C'est comme si personne n'avait sérieusement relu le manuscrit avant publication. Des virgules manquent un petit peu partout, une omission qui me fait toujours soupirer d'irritation (NB : les virgules sont utiles, elles servent à rendre un texte compréhensible). Étant donné la longue période couverte par l'intrigue, beaucoup trop de choses sont racontées au lieu d'être montrées. J'ai suivi, mais je n'ai pas été embarqué, je n'ai pas été « dedans ». du fait du décuplement des personnages, ceux-ci aussi restent souvent à l'état d'esquissé, même quand il s'agit d'un protagoniste important. Paul, par exemple, est resté inconstant et inconsistant pour moi. le seul à tirer son épingle du jeu est Mark, qui ressemble peu ou prou à un personnage en chair et en os.
Écrire un roman historique et, ce qui plus est, une saga familiale, ce n'est pas une sinécure. Il faut faire en sorte que tout concorde, des personnages en passant par la narration jusqu'au cadre historique et l'intrigue elle-même. Comme je l'ai dit initialement, l'intrigue, une fois amincie, dépouillée, travaillée, avec des scènes parlantes où les personnages sont montrés dans ce qu'ils sont, ce qu'ils veulent, ce qu'ils ressentent, et non pas résumés platement, pourrait donner un roman satisfaisant. L'auteure sait faire, en plus, parce que, de temps en temps, je suis tombé sur de jolies petites pépites, et je me suis mis à espérer pour la suite. Mais quand j'ai refermé le livre, j'ai dû me rendre à l'évidence. Je n'ai pas été conquis, désolé.
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