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EAN : 9782811106133
216 pages
Karthala-GEMDEV (21/03/2012)
3/5   1 notes
Résumé :
La montée en puissance de la présence chinoise en Afrique a autant suscité d'analyses qu'elle a éveillé de fantasmes dans les pays du Nord. Ce livre apporte d’utiles informations sur les motivations des investissements chinois, sur leurs modalités et leurs impacts.
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L'arrivée de la Chine en Afrique charrie son lot de fantasmes. On imagine volontiers qu'elle résulte d'une stratégie fourbie dans une salle secrète de la Cité interdite par quelques hiérarques du Parti communiste en mal de matières premières pour nourrir la croissance de l'empire milliardaire et de débouchés commerciaux pour écouler ses produits. On en exagère les manifestations : la Chine achèterait des millions d'hectares dans le seul but d'assurer sa sécurité alimentaire ; elle enverrait ses prisonniers politiques construire des routes… L'ouvrage dirigé par Jean-Jacques Gabas et Jean-Raphaël Chaponnière entend dénoncer ces rumeurs qu'entretient, il est vrai, une opacité voulue par les autorités chinoises elles-mêmes. Refusant la facilité qui consiste à recycler des analyses déjà publiées et à utiliser des informations de seconde main, ils se sont appuyés sur un solide travail collectif mené au sein du master de Coopération internationale de Paris-I dirigé par Yves Viltard, dont plusieurs étudiantes ont été missionnées au Cap-Vert, au Niger ou au Zimbabwe…
En quelques années, la Chine est devenue un acteur majeur sur le sol africain. Cela ne signifie pas qu'elle en était absente. Sans remonter jusqu'à la flotte de l'amiral Zheng He qui explora la côte swahilie au début du XVe siècle, la Chine de Mao s'intéresse à l'Afrique : elle coopère avec Sékou Touré ou Nyerere, et construit entre Lusaka et Dar-es-Salam une pharaonique voie ferrée de 1 600 kilomètres. L'objectif est alors essentiellement politique ; il s'agit de concurrencer à la fois l'URSS et Taiwan. Mais c'est durant les années 2000 que la Chine réalise une véritable percée. le symbole le plus éclatant en fut la tenue à Pékin, fin 2006, du Forum de coopération sino-africain qui rassembla la quasi-totalité des chefs d'État africains.
Entre 2000 et 2010, les échanges commerciaux sont multipliés par douze, atteignant près de 100 milliards de dollars. La Chine est désormais le premier partenaire commercial de l'Afrique subsaharienne. Mais la réciproque est loin d'être vraie : la part de l'Afrique dans les exportations chinoises représente à peine 4 % en 2010, soit deux fois moins que la Corée du Sud. Alors que la Chine enregistre globalement de faramineux excédents commerciaux, ses échanges avec l'Afrique restent — légèrement — déficitaires. Elle en importe plus de pétrole, de minerais et de bois qu'elle n'y exporte de biens de consommation (l'auteur ne dit-il rien des infrastructures qu'elle y conscrit ?). Ses achats massifs ont contribué à l'envol du prix des matières premières et aura permis à l'Afrique de traverser sans trop de dommages la crise financière de 2008. Ce constat vaut essentiellement pour les pays africains exportateurs de matières premières : au premier chef l'Angola, qui fournit la moitié des importations chinoises de pétrole africain, mais aussi le Soudan, les deux Congos ou le Nigeria. La situation est différente dans les pays dépourvus de matières premières (Bénin, Togo), dont le solde commercial se creuse. Les produits chinois de consommation courante ont conquis le marché africain au détriment des fabrications industrielles et artisanales locales (coton), mais surtout des produits de meilleure qualité de marques européennes ou japonaises (téléphones portables, deux-roues, médicaments…).
La deuxième dimension de la percée chinoise est son « aide au développement » — une expression occidentale qu'elle a finalement consenti, début 2011, à substituer à celle, plus tiers-mondiste, de « coopération au développement ». Faute de statistiques fiables, cette aide est difficile à mesurer. Mais les économistes s'accordent à lui reconnaître un poids incomparablement plus faible (environ 2,5 milliards de dollars par an) que celui de l'aide occidentale. Concentrée dans le secteur des infrastructures — la réalisation la plus emblématique est le nouveau siège de l'Union africaine à Addis Abeba —, elle est la cible de nombreuses critiques : elle n'est pas déliée (elle profite majoritairement à des entreprises chinoises) ; elle n'est pas concertée (alors que la Chine a pourtant signé la déclaration de Busan sur l'efficacité de l'aide) ; elle n'est subordonnée à aucune conditionnalité politique (elle permet à des « États voyous » comme le Soudan ou le Zimbabwe de contourner les sanctions occidentales) ; elle encourage le réendettement de pays qui viennent de bénéficier de remises de dettes.
La troisième dimension est migratoire. S'imaginer que la Chine envisage de créer des colonies de peuplement en Afrique pour alléger la pression démographique chez elle serait néanmoins très exagéré. le nombre de Chinois vivant aujourd'hui en Afrique avoisine probablement le million (dont la moitié en Afrique du Sud) : c'est quatre fois plus que la communauté française, mais trois fois moins que la communauté indienne. Comme le montrent les enquêtes de terrain réalisées dans le cadre du livre, ces migrations sont spontanées, temporaires et désordonnées. Elles ne sont pas le résultat d'une stratégie délibérée d'implantation. Césarine do Rosario, l'un des auteurs du livre, qui se penche dur le cas du Cap-Vert, décrit une communauté chinoise très visible dans la sphère économique (les Chinois ont réussi à racheter la plupart des boutiques du centre commercial), mais très discrète dans l'espace social (la communauté vit repliée sur elle-même, limite ses échanges au lieu de travail et ne s'implique pas dans la vie associative ou politique cap-verdienne). La présence chinoise, enfin, par sa faible exogamie : cette communauté, majoritairement masculine, ne fréquente pas les Africaines ; et lorsqu'elles tombent enceintes, les Chinoises rentrent au pays pour y accoucher. On le voit : on est encore très loin de la colonisation redoutée par certains ...
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