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Critique de LeScribouillard


Petite critique en mode coup de coeur, que je sortirai peut-être un mercredi en plus de celle hebdomadaire de samedi. Si comme moi vous êtes attirés par les comics indés mais avez rarement l'occasion d'y consacrer votre budget, alors vous avez peut-être comme moi reluqué longuement les étagères à l'entrée de la librairie Des Bulles et des Hommes de Saint-Étienne. Et vous serez alors tombés sur les sept épais volumes de Sandman, série dirigée par Neil Gaiman, célèbre dans les milieux SFFF pour son obsession envers les mythologies du monde entier. Vous vous serez dits : Y'a d'quoi lire, mais j'connais pas encore bien l'auteur, je sais pas si j'vais apprécier. Et puis nom d'un chien, j'ai déjà craqué tous mes sous de la semaine ?! Je mange pourtant la même salade en entrée depuis huit jours ! Hum… de quoi parlions-nous, déjà ?
Qu'importe, puisque maintenant que vous commencez à connaître mon blog, vous savez qu'il existe à Saint-Étienne un autre haut lieu de la culture : la médiathèque de Tarentaize. Alors je pourrais une nouvelle fois déverser mon fiel contre ses emprunteurs peu soigneux (l'exemplaire du livre dont je m'apprête à vous parler a été froissé et corné à de multiples reprises), mais reste que j'y ai trouvé le moyen de me pourvoir un choix remarquable d'Imaginaire pour pas un sou, et rien que ça, c'est beau. C'est donc comme ça que je tombe sur Sandman Overture et que j'ai l'opportunité de me l'offrir, même le temps éphémère de trois semaines. La couverture me séduit immédiatement : une créature ancienne des profondeurs du cosmos, dans une peinture sombre et énigmatique aux couleurs maîtrisées, laissant présager un monde graphique riche et de toute beauté.
Et on ne peut pas dire qu'on est déçu : Sandman Overture, préquelle de la saga Sandman, est ce que j'appelle de la SFFF « à gros budget » : des extraterrestres de partout, des voyages qui se font sur des centaines de galaxies, des êtres vieux de plusieurs milliards d'années, le tout en changeant de style de dessin toutes les trois pages (quand ce n'est pas dans la même case). On dépasse le cadre de la science-fantasy avec l'introduction d'éléments horrifiques ou relevant de l'imagerie fantastique traditionnelle, c'est pourquoi je rangerais plutôt ce comic dans cette mystérieuse catégorie fourre-tout qu'est le weird. Pour vous la faire court : l'Univers et ce qui existe au-delà sont dominés par les Infinis, des sortes d'entités collectives possédant une multitude d'incarnations différentes. Morphée, aussi connu sous le nom de Marchand de Sable (sandman en anglais), est l'une de celles du Rêve, entre autres frère du Délire et fils de la Nuit. Or voilà-t'y pas que suite à une erreur ancienne de sa part les étoiles ont décidé de mourir et de tuer l'un de ses autres moi. Non, l'histoire n'est pas toujours facile à suivre.
Elle l'est d'autant moins qu'on découvre une multitude de trames narratives en même temps, ne se rejoignant pas forcément tout de suite. Pourtant, par rapport à L'Incal de Jodorowsky (dont on devine que Gaiman s'est largement inspiré), le récit se perd nettement moins dans différents objectifs opaques et autres symboles ésotériques. de même, face à des mastodontes de complexité et de sous-intrigues comme Civil War, Sandman Overture se fait nettement plus fluide et infiniment plus poétique. Car quelle n'est pas notre récompense en découvrant cette overdose de sense of wonder ! J. H. Williams III fait un travail d'orfèvre, qui nous est décrit en détail dans un portfolio en annexe relativement épais (dont son co-dessinateur Dave Stewart est malheureusement absent). Dans un univers à la Sabrina Calvo mais en infiniment plus démesuré, des milliers de races extraterrestres (dont de nombreuses non-anthropomorphes) font face à une menace démesurée qui menace de détruire l'Univers ; un combat cosmique où même les Infinis mourront, où se côtoient dans un ensemble baroque l'effroi, l'émerveillement et la poésie.
J'ai bien souvent rêvé d'écrire une histoire qui ressemblerait aux morceaux de musique que j'écoute : ambient, krautrock, zheul, psydub, trance. Quelque chose qui prenne directement aux tripes, qui s'étende de manière gigantesque dans l'espace et le temps. Mais créer un récit conduit à narrer des évènements et des comportements précis, quand la musique et le dessin sont des arts dont l'interprétation peut varier et changer autant que nous le voulons. Par sa logique onirique qui lui est propre, son imagerie hallucinée mais aussi son prodigieux sens du sublime et de la démesure, Sandman Overture parvient à concrétiser ce rêve que j'espère moi aussi accomplir un jour. Il ne me reste plus qu'à vous le recommander chaudement pour peu que vous ne soyez pas allergiques aux worldbuildings surréalistes qui font passer les sensations avant la raison. Et puis bon, c'est pour votre culture...

Lien : https://cestpourmaculture.wo..
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