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EAN : 9782330030810
160 pages
Actes Sud (02/04/2014)
4.05/5   22 notes
Résumé :
Évocation subjective et captivante de la vie, de l’œuvre et de l’engagement si singuliers du peintre Roman Opalka, le sculpteur du temps, qui éclaire de façon inattendue la création romanesque de Claudie Gallay, et établit une filiation secrète entre les deux œuvres.
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Quand j'ai vu un tableau d'Opalka pour la première fois dans un musée d'Art moderne,blanc sur blanc ,je n'ai vu qu'un tableau blanc. Ce n'est seulement en m'approchant, que j'ai réalisé les multitudes de chiffres peintes les uns à côté des autres.Par la suite ,j'en ai vu d'autres ,toujours des nombres les uns à côté des autres,du noir au blanc.Comme l'auteur de ce livre ,Claudie Gallay, avec le temps j'ai été fasciné par cette oeuvre bâti sur une seule idée ," le temps ", que l'artiste creuse obstinément.
Dans ce petit livre passionnant,Gallay nous plonge dans les coulisses de cette oeuvre d'une vie, qui débute avec un premier tableau en 1965, avec des chiffres peints en blanc sur fond noir de 1 à 35327. Il continuera ainsi , éclaircissant le fond noir avec un soupçon de blanc , peignant les chiffres toujours en blanc, à chaque tableau; jusqu'à ce que le fond noir de sa toile aura été tellement dilué qu'il sera devenu blanc.Par la suite quand "les tableaux seront proches de l'effacement, il utilisera deux blancs différents, le blanc de titane pour l'écriture des chiffres et le blanc de zinc( mêlé au noir ) pour le fond.Ainsi, le tracé des nombres restera lisible sous certaines lumières ".
En 1968 il ajoute une variante à son concept, se prendre en photo à la fin de chaque séance de travail,toujours avec la même chemise blanche,même lumière et sans expression. "Les photos suspendent le temps.Mais dans la réalité,le temps est toujours en mouvement , il ne s'arrête pas", nous commente Gallay ( cette démarche photographique d'Opalka , se présente comme détails, dans ses divers romans). La même année ,il ajoutera une autre variante,s'enregistrer,énonçant en polonais-sa langue maternelle -le nombre qu'il est en train de peindre.....

Comme dit Gallay,l'oeuvre d'Opalka n'a rien d'esthétique, "ce n'est pas une peinture de décoration ni de dessus de divan.... Elle est monotone et ne représente aucun motif reconnaissable ...C'est une pensée emmêlée au temps." Tout ça a l'air trés abstrait, pourtant même moi qui ne raffolle pas de l'Art conceptuel,ça me fascine, et ce livre qui approfondit les différentes phases du concept ,éclaire en faites un concept de vie, qui me touche par sa structure solide et intègre, une structure bâtie avec les chiffres," La vie par les nombres". Un concept mélange de philosophie et de mathématiques qui matérialise le passage du temps.
Gallay nous rapproche encore plus d' Opalka, en y intégrant l'influence de l'artiste sur sa vie et ses propres livres et y attachant ses propres réflexions,expériences et anecdotes.
J'ai adoré ce livre. Je suis une inconditionnelle de Gallay,et une fois encore je la remercie infiniment pour ce plaisir de lecture qu'elle nous offre.

Je terminerais avec les propres mots d'Opalka, qui considère son travail sa connerie, "une connerie, parce que la vie en est une".

p.s.J'adore le petit chien qui plaisait tant à Opalka, du magnifique tableau de Carpaccio " la vision de Saint-Augustin"( disponible sur Internet,et....dans le livre,tout à la fin !)
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Gallay Claudie – "Détails d'Opalka" – Actes Sud / Babel, 2014 (ISBN 978-2-330-09696-0)

Déception.
Dans cet ouvrage qualifié de "récit" par l'auteur elle-même, Claudie Gallay tente de nous expliquer ce qui l'émeut et la touche chez ce peintre Roman Opalka. Né en 1931 à Abbeville de parents polonais qui décidèrent de rentrer en Pologne en 1935, il se trouva obligé d'exercer son art dans l'un de ces anciens pays communistes d'Europe de l'Est où il exerça la fonction de chef décorateur de l'Armée.
Dès les années soixante, il s'intègre dans le mouvement qui prône un "art conceptuel". A partir de 1965, il décide de ne plus peindre que la suite des nombres (en blanc sur fond noir) commençant depuis le "un" pour ne plus s'interrompre : chaque toile – intitulée "Détail" suivi de la tranche des nombres retranscrits –, mesure 196x135 cm (à l'exception de "cartes de voyage") : la succession des nombre vers l'infini enjambe donc les oeuvres.
A partir de 1972, il ajoute 1% de blanc dans le fond noir, de telle sorte qu'à partir de 2008 (2010 pour Claudie Gallay, cf p. 172), il peint des chiffres blancs sur fond blanc, "LE" grand classique de l'art contemporain, d'ailleurs Claudie Gallay fait allusion à la célébrissime et drôlissime pièce de théâtre "Art" de Yasmina Rezza (p. 174). A la fin de chaque toile, il prend son visage (aussi impassible que possible) en photo ; tout en peignant les nombres, il s'enregistre en train de les dire en polonais.

Libre évidemment à tout un chacun de trouver cela intéressant : après tout, nos musées d'art moderne sont remplis de variations du "carré blanc sur fond blanc" ou "rouge sur fond rouge", dans la lignée des Malevitch, Rodtchenko, Strzeminski (dont Opalka se réclame), Rothko, jusqu'à Klein ou Soulages (cités p. 97) etc, et de riches collectionneurs dépensent des fortunes pour acquérir de tels "chefs d'oeuvre" très à la mode.

Cependant, même Claudie Gallay, auteur talentueuse s'il en est, ne parvient pas à nous convaincre que le simple fait de peindre la succession des nombres depuis le "un" vers l'infini reviendrait à illustrer la fuite du temps, puisque n'importe quelle autre activité humaine s'inscrit ainsi dans le temps qui passe inexorablement : on peut se demander si elle parvient vraiment à s'en convaincre elle-même, puisqu'elle ressasse cette affirmation à plusieurs reprises sans parvenir à en fournir une explication emportant l'adhésion.
On peut également se demander à qui peut tant plaire des suites de nombres ainsi alignés sur une toile : un Macron (obsédé et borné par les chiffres) ? un banquier atteint de trouble obsessionnel compulsif ?

Il en va de même du cheminement inéluctable vers le blanc sur fond blanc : c'est devenu un tel lieu commun que cela ne mérite même plus le moindre commentaire, alors que l'auteur en fait tout un plat à plusieurs reprises, surtout pour l'autoportrait qui devient lui aussi progressivement tout blanc et est donc sensé symboliser la marche de l'individu vers sa disparition.

Entre autres postulats ressassés, l'auteur répète que ce type d'activité représenterait un effort quasi surhumain (cf ex. p. 74), surtout lorsqu'il s'agit de peindre des nombres en blanc sur fond de plus en plus blanc : l'activité en question ne représentant que quelques heures de travail par jour, il n'est pas interdit tout de même de soupçonner que le pauvre manoeuvre en train de pelleter des gravats sur un chantier (ou la pôvre caissière d'hypermarché) a un travail un peu plus harassant...

Elle revient également souvent sur le fait qu'Opalka se serait "affranchi de l'épineuse question du sujet" puisqu'à partir de 1965, il se livre à une mono-tâche intensive (pas trop quand même, cf ci-dessus). Il y a là – à mes yeux d'infâme béotien – une grosse lacune dans les explications possibles : ayant moi-même vécu de l'autre côté du "rideau de fer", là où tout artiste était étroitement surveillé et embrigadé par le pouvoir, je me demande dans quelle mesure Opalka ne s'est pas ainsi affranchi de la doxa officielle, une succession de nombres étant probablement ressentie comme "non-dangereuse" par les suppôts du "réalisme socialiste".

Viennent s'ajouter à tout cela des formules quelque peu pédantes du genre
"le peintre sculpte le temps et le temps sculpte le visage du peintre" (p. 134)
ou
"Opalka défiait la Camarde autant qu'il se soumettait à elle" (p. 135),
ainsi que des détails biographiques comme l'effroi devant la vision d'une fille poussant un landau et donc la décision de rester stérile, comme Zoran Music et Ida Barbarigo (p. 161 – l'auteur aurait du ajouter les noms des responsables européen-ne-s d'aujourd'hui, toutes et tous stériles, les Macron, Merkel, May, Renzi etc), ou encore l'allusion à Christian Boltanski (p. 94) et son île japonaise si difficile d'accès, déjà présentée dans "La beauté des jours"...
Mais nous sommes rassurés : Opalka n'a pas oublié de s'enrichir au passage, ni de goûter au "plaisir de conduire de belles voitures" (p. 66)...

Claudie Gallay nous apprend (p. 159) que ce peintre qualifiait lui-même son oeuvre de "connerie", en ajoutant "puisque la vie en est une" : voilà qui est profondément pensé...

Décidément, pour ce qui concerne la "transcription" littéraire du sentiment et de la démesure propres à l'art graphique, après le personnage d'Elstir, j'en reste pour l'instant à la "peinture" donnée par Patrick Grainville dans "L'atelier du peintre"...

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" Opalka a consacré toute sa vie à raconter la fuite du temps, il en a creusé l'idée, l'a développée, ramifiée jusqu'à sa philosophie et complète perfection, pour en faire un programme, une oeuvre d'art qui illustre parfaitement l'idée qu'un artiste qui travaille au plus près de sa vie peut rejoindre un universel qui nous concerne tous."

Opalka, peintre polonais né en 1931 consacre son oeuvre à la sculpture du temps. de 1965 à sa mort, il écrit en peinture blanche sur un fond noir les nombres de 1 à son infini atteint lors de sa mort. Enfermé dans le noir d'un camp de concentration, élevé dans l'attente, sa vie influence son oeuvre. le fond noir de ses toiles sera atténué de tableau en tableau avec 1 pour cent de blanc jusqu'à devenir "ce mur blanc" vers lequel nous avançons. Très vite, il associe à ses tableaux, une photo de son visage vieillissant toujours dans la même exposition et la même tenue. Puis la voix de l'artiste égrenant cette succession de nombres peints rythmera la monotonie de l'épreuve.
Claudie Gallay a aussi ce rapport au temps dans ses romans. Dans Seule Venise, la narratrice se photographie chaque mois et dans Une part de ciel, Carole photographie chaque jour une même scène. L'intérêt de l'auteur pour ce peintre de l'infini ne pouvait donner qu'une belle rencontre.

Dans ce court récit, Claudie Gallay m'a fait découvrir un artiste que je ne connaissais pas, m'a intéressée à son analyse de l'oeuvre grâce à une réflexion pertinente sur le passage du temps, sur l'art conceptuel, sur le sens de la vie d'un artiste.
Et l'excellence de l'auteur est de savoir communiquer sa passion pour un artiste qu'elle n'a jamais osé rencontrer mais qui guide son oeuvre, de parvenir à insuffler un rythme et même un suspense dans ce récit de la vie d'Opalka en décrivant " l'allant tenace d'un homme qui s'avance vers la mort."

Un peu déçue par le dernier roman de Claudie Gallay, Une part de ciel, je retrouve ici une auteur qui sait communiquer ses passions, provoquer le questionnement du lecteur, émouvoir par ses doutes et son acharnement à comprendre.

" J'aime l'art quand il me raconte une histoire, qu'il m'égare, m'enivre, me trouble ou me dérange, pas quand il va dans le mur en une surenchère qui frise la supercherie."

Si je remplace "l'art" par "un livre", vous comprendrez pourquoi j'ai vraiment aimé cette lecture.
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Première rencontre avec Claudie Gallay: et voilà que je commence par une oeuvre inclassable, en tout cas pas un roman, plutôt une sorte de documentaire sur un artiste et sa création, un peintre dont je connaissais l'existence sans que je sois capable de donner son nom mais dont j'avais vu les autoportraits si frappants et même certaines toiles — au moins une — mais auxquelles je ne m'étais jamais arrêtée, n'y voyant rien de bien intéressant a priori. C'est d'ailleurs les images de la couverture du livre de Claudie Gallay que j'ai reconnues et qui m'ont induite à le choisir. La lecture de ce petit opuscule (quelque 200 petites pages du forme réduit d'Actes Sud) m'a certainement rapprochée d'Opalka et rendue plus curieuse de revoir ses peintures. Je comprends aussi que ce livre en forme de documentaire est une clef pour lire l'oeuvre de Claude Gallay. Ce n'est peut-être pas celle de la porte d'entrée principale. C'est un peu comme si j'abordais son domaine par une porte dérobée. Quoi qu'il en soit, cette lecture m'a vivement intriguée, je dirais même intéressée et me donne le goût de me plonger dans ses romans (ce que je vais faire sans tarder).
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Roman Opalka est un artiste à l'engagement singulier. Pendant 46 ans il s'est consacré à un unique et colossal projet : la représentation du temps qui passe à partir d'enregistrements, de photographies et, surtout, d'une unique série de nombres, de 1 jusqu'à cet inconnu, qui tend vers l'infini mais qui, nécessairement, sera défini et marquera sa mort. Toile après toile, il compte et, ainsi, mesure le temps dans une unité inconnue. Une telle rigueur implique une ascèse qui laisse circonspect tout en forçant le respect.

Dans ce récit, Claudie Gallay s'expose en même temps qu'elle nous raconte. Son immense respect pour Opalka transpire page après page. Sa démarche l'a frappée et la remue au plus profond d'elle-même. Ce n'est pas moi qui l'en blâmerait. Alors elle expose, explique et établit des ponts entre l'artiste d'origine polonaise et l'écrivaine en elle. Des ponts que parfois j'ai hésité à traverser, mais elle est la mieux placée pour décider de les construire. Peut-être ai-je été réticente parce qu'il m'a semblé que le récit manquait de corps. Mais certainement je ne pourrais lui faire aucune critique quant à son âme. Il y a une douceur dans l'écriture et une fidélité à l'artiste qui m'ont émue. Les Détails d'Opalka sont contés à la fois objectivement et poétiquement. À travers eux, Claudie Gallay s'est fait la passeuse d'un temps pourtant indicible. Pour lui, pour elle et pour nous, elle a traqué, sans jugement, les erreurs au fil des toiles et s'est essayée à l'expérience. Son récit est beau et donne à réfléchir en nous plaçant face à notre individualité dont le temps est nécessairement compté.
Lien : https://auxlivresdemesruches..
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Chez la plupart des artistes, les œuvres peuvent s’apprécier d’un seul coup, au premier regard et indépendamment les unes des autres. Le ressenti est immédiat, on voit et on aime ou on n’aime pas, cela ne demande pas d’efforts particuliers.

Chez Opalka, l’intellect fait partie de l’émotion.

Regarder un Détail, c’est voir une succession de chiffres peints en lignes très serrées du haut jusqu’en bas, pas de marge, aucun espace intouché, les nombres sont tassés sur un fond de plus en plus clair au fur et à mesure que les années passent.

Un Détail est quelque chose qui se regarde et qui se pense. On adhère ou on est rejeté, on e détourne ou on s’attarde. C’est un travail qui déclenche des réactions diverses, haussements d’épaules, indignations ou fascinations passionnelles.

Ce n’est pas une œuvre du désenchantement, c’est une célébration de la vie, de sa beauté, de sa brièveté. Chaque toile est une attention portée à la vie, un écho de nos existences fragiles, vies minuscules, formidables. Vies mortelles. C’est notre propre relation au temps qu’Opalka interroge. La première fois, quelque chose se passe. Ou pas.
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"Choisissez un travail que vous aimez et vous n'aurez pas à travailler un seul jour de votre vie" a dit Confucius. P.167
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P. 147 On sait toujours quand ce sont les premières fois, celles qui touchent au corps ne s’oublient pas, elles s’impriment dans les zones les plus sensibles de la mémoire, on se souvient de l’endroit, du temps qu’il faisait.
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p. 21 : Les deux dimensions émotionnelles de l’être sont celles de rencontre et de la séparation.
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P. 127 C’est le risque avec les tâches répétitives, on croit que c’est facile, la pensée divague et c’est la faute
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Vidéo de Claudie Gallay
Grandir, trouver son chemin, sa place dans le monde, rêver, évoluer et s'adapter, c'est le grand défi de la jeunesse. Luc Chomarat "Le fils du professeur" (La Manufacture de livres), Clara Dupont Monod "S'adapter" (Stock) et Claudie Gallay "Avant l'été" (Actes Sud). Animée par Élise Lépine, journaliste
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