L'ombre de Claudia

Elle avait horreur que l'on décide pour elle. Ce n'était pas tant la menace d'un procès, de la prison, ou même d'être rayée de l'ordre des médecins qui l'avait mise hors d'elle dans l'histoire de Rouen. Non, ce qui lui avait fait le plus mal avait été la contrainte de passer sous les fourches caudines dressées par Agatha et de devoir démissionner pour les fautes commises par un autre.

Elles me viennent de ma mère. Je n'ai pas pu m'en séparer, et je me suis dit que ma clientèle étant à quatre-vingts pour cent féminine, elles pourraient être un accessoire précieux dans mes thérapies. Lorsqu'elles arrivent ici et qu'elles retrouvent ces poupées qu'elles ont connues dans leur enfance, mes patientes se sentent soudain plus en confiance. Un peu comme si chacune avait pu apporter sa peluche préférée.

La jeune fille qu'elle avait laissée avec trente kilos de trop était aujourd'hui devenue une jolie femme sans un gramme excédentaire, et le strict petit tailleur gris qu'elle portait renfermait un corps qui ne devait pas être loin des mensurations idéales pour sa taille.

Sa voix était si douce, si tendre, si persuasive... Elle avait terriblement envie de dire oui, de se retrouver dans ses bras, de poser la tête sur son épaule, de le sentir la déshabiller et la porter dans le grand lit qu'elle devinait les attendre là-haut.

Une nouvelle vie s'offrait à elle. Elle allait tirer un trait définitif sur l'ancienne et oublier tout ce qui la composait. À commencer par Alex.
Plus facile à dire qu'à faire.