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EAN : 9782350875286
336 pages
Editions Héloïse d'Ormesson (20/08/2020)
3.65/5   129 notes
Résumé :
Le 12 avril 1978, une série de tableaux enflamme les enchères chez Sotheby's. Pourquoi son acheteur choisit-il de rester anonyme ? Qu'a-t-il à cacher ? Quarante ans plus tard, à New York, madame Janik conserve précieusement les toiles dans son modeste appartement. Sur chacune d'elles, une adolescente blonde, à la beauté froide et envoûtante, dont le mystère lui résiste encore. Mais lorsque la vieille dame solitaire se prend d'affection pour Ethan, son jeune voisin, ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (28) Voir plus Ajouter une critique
3,65

sur 129 notes
Énormément de qualités littéraires dans ce premier roman d'une jeune scénariste nommée Céline Spierer, née à Genève et vivant à New York. J'en avais engagé la lecture sans idée préconçue, avec la réserve de rigueur lorsqu'on se lance dans l'inconnu, je l'ai terminée avec un réel enthousiasme.

Entre New York et l'Europe centrale, le Fil rompu entremêle sur quatre cents pages les fils de plusieurs intrigues déroulées sur plus d'un siècle et bouleversées par les deux guerres mondiales. La construction du roman, méticuleusement élaborée, est ambitieuse et complexe, peut-être un peu trop. Dans cette fiction en forme de vaste puzzle, le risque est de désorienter le lecteur, notamment dans les cent ou cent cinquante premières pages, car l'auteure s'y montre aussi prolixe sur des personnages accessoires et leur vécu profond, que sur les personnages clés de la narration.

Mais finalement, une fois les pièces du puzzle toutes posées, les péripéties, dont certaines dénotent une belle imagination, s'avèrent d'une cohérence absolue.

Le scénario de surface est assez classique. New York, 2015. Une dame âgée d'origine étrangère vit en solitaire, au jour le jour, entourée d'objets qui pourraient raviver une mémoire de plus en plus lointaine. Elle se lie d'amitié avec un jeune voisin, intrigué par les secrets qu'il subodore dans son passé. La sensibilité du jeune homme, ses qualités d'observation et d'écoute lui permettront de reconstituer l'histoire de la vieille dame et de son ascendance.

Son histoire ne manquera pas d'expliciter, dans les toutes dernières pages, le mystère affiché en préambule du livre, celui des six tableaux d'un peintre inconnu, enlevés à prix d'or par un acheteur anonyme lors d'une vente aux enchères. La narration comporte aussi son « côté polar » avec, dans les premières pages, deux meurtres qui ne seront élucidés que bien plus tard.

Le coeur du roman est une sorte de saga, l'histoire de trois femmes d'une même lignée. La première, Katarzyna, une jolie femme blonde aux yeux bleus, quitte toute jeune la Pologne en 1913, secrètement enceinte. A New York, dans le Lower East Side, point de chute des immigrants européens, elle épouse un jeune homme juif brassant des affaires aussi illégales que prospères, et se convertit au judaïsme. Après sa mort brutale, vingt ans plus tard, leur fille Edith fait le chemin inverse et part en Pologne en quête d'un éventuel père biologique. La propre fille de celle-ci, Magda, née à la veille de l'invasion de la Pologne par l'Allemagne nazie, devra à son apparence physique, qu'elle tient de sa grand-mère, de survivre à Dresde pendant la guerre dans des conditions stupéfiantes.

Trois femmes, trois destinées qui se suivent, mais en rupture, sans rien pour les relier ; trois tempéraments fondamentalement différents, que l'auteure analyse en profondeur avec une finesse subtile. Katarzyna, que l'on ne découvre qu'après sa mort, est une femme secrète et inaccessible. Edith, au caractère sombre et tourmenté, sera brisée par la guerre et l'occupation nazie. Magda, petite fille à la résilience inflexible, s'adaptera à toutes les circonstances, en observant les personnes qui l'entourent d'un même oeil juste, lucide et froid.

Une immersion très bien rendue dans le New York d'avant les années trente et dans les territoires du Troisième Reich. le vocabulaire est riche, la syntaxe légère. La prose de Céline Spierer est très soignée, tant pour s'insérer dans la tête et dans le coeur des personnages, que pour décrire les environnements. Sa qualité littéraire rend le roman très agréable à lire et de plus en plus captivant au fil des pages.

Une construction ambitieuse, une cohérence sans défaut, une écriture ciselée. Cela témoigne, chez l'auteure, de beaucoup de talent et de beaucoup de travail.

Lien : http://cavamieuxenlecrivant...
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J'ai emprunté ce livre auprès de ma médiathèque car j'en avais entendu parler par l'une des rares booktubeuses que je suis. Je l'ai vu en rayon, je me suis dit, "tiens, pourquoi pas". Je l'ai donc ouvert sans attente particulière, je savais simplement qu'il était possible que je passe un bon moment. Et quel bon moment j'ai passé!

Passé les trente ou quarante premières pages, qui peuvent sembler complexes et un poil longues, j'ai eu beaucoup de mal à le lâcher.

Une vieille dame cache dans son appartement (je ne trouve pas de verbe plus adéquat) des toiles achetées anonymement aux enchères des années plus tôt. Il s'agit des six seules toiles d'un peintre désormais disparu. Son jeune voisin les trouve "par hasard", la vieille dame décide de lui raconter leur histoire, et par truchement la sienne.

Céline Spierer m'a fait voyager à travers le temps et à travers l'espace, de New York aux plaines enneigées de l'Empire russe, en passant par Berlin et la Pologne; elle m'a conviée à un voyage que je ne suis pas prêt d'oublier, peuplé de rencontres et de personnages parfois attachants, parfois mystérieux, d'autres fois encore remplis de contradictions.

La narration, qui peut paraître déroutante dans sa réalisation de prime abord, est parfaitement maîtrisée, toutes les pièces du puzzle se trouvent à la bonne place. L'écriture est belle, à la fois simple et aérée, sans fioriture mais pourtant soignée. Céline Spierer, dont il s'agit ici du premier roman, sait raconter des histoires, et a su toucher mon coeur de lectrice avec cette histoire dans L Histoire.

Si vous aimez les jolies plumes, si vous aimez L Histoire, si vous aimez les secrets et les sagas sur plusieurs générations, si vous aimez les romans aboutis, ce livre est fait pour vous. Je ne peux que le conseiller.

Lu en juin 2021
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Premier de la maison D Ormesson.
Ca n'était pas à lire en ce moment car les passages nazis n'engendrent pas l'allégresse.
Néanmoins, cette jeune auteure mérite les félicitations pour cette oeuvre si bien écrite et qui nous fait voyager entre l'Est et l'Ouest de 1912 à aujourd'hui.
Le fil rouge reste madame Janick, adorable vieille dame qui aura la chance d'avoir la visite un jour d'un jeune ado voisin qui s'attachera à cette belle personne et la conduira sur son dernier chemin.
Ces aller-retour de guerre en guerre, des US à la Pologne, des vies détruites, des histoires d'amour, le basculement d'un pays dans l'horreur, tout est raconté dans la douceur.
Une bien belle oeuvre !


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Haute couture romanesque pour un tissu d'histoire cousu en trois générations, Céline Spirer déploie un long fil sur un siècle de tragédies et de reconstructions depuis presque les monts Oural jusqu'à outre-Atlantique.

Ethan, un jeune adolescent new-yorkais vit avec ses soeurs et sa mère avec la tristesse d'avoir vu son père une dernière fois en mangeant une glace sans jamais le revoir. La famille est morose suite à ce départ sans explication, sans aucune nouvelle et la mère sombre souvent dans une mélancolie lugubre, s'il fallait nommer une couleur pour la définir ce serait un gris cendré.

Dans un autre appartement, vit une vielle dame répondant au nom de Janik et ne fréquentant personne. Sa démarche est indécise, ses vêtements inadaptés et pourtant il lui reste une noblesse dans sa façon de bouger, de regarder. Par hasard, Ethan et Madame Janik se rencontrent dans la cour de l'immeuble et pour la première fois un étranger sera invité à franchir le seuil de son appartement, une habitation à l'aspect désordonné mais où sont renfermées dans une pièce close des toiles achetées aux enchères il y a près de quarante ans. Les échanges sont sibyllins mais peu à peu les deux êtres prennent confiance, les confidences vont suivre.

Avec beaucoup de flash back, le lecteur découvre l'existence d'une Katarzyna, originaire de Kalisz en Pologne et réfugiée aux Etats-Unis, au début du XX° siècle, où elle rencontrera un jeune homme ambitieux et peu scrupuleux qui adoptera néanmoins l'enfant qu'elle porte. Une petite fille va naître, Edith, qui cherchera à connaître sa véritable histoire après l'assassinat de sa mère. Mais lorsqu'elle part à la recherche de ses origines dans l'Est de l'Europe, la montée du nazisme devient effroyable avec comme conséquence une guerre dévastatrice. Comment Edith va-t-elle pouvoir s'en sortir et qui est réellement cette Madame Janik ?

Si votre serviteur est loin d'être un amateur des sagas familiales, c'est pourtant avec une attention toute particulière qu'il a avalé ce roman fleuve coulant sur les terres polonaises et allemandes, puis se jetant dans l'Atlantique pour amplifier le récit époustouflant de trois générations prises dans les tourbillons de l'histoire.

Un roman qui surfe sur les sentiments cachés, les blessures inguérissables, le silence des voix et les non-dits des âmes à la fois errantes et emprisonnées par le vécu.

Beaucoup d'émotions également entre la relation qui se forme entre un jeune garçon, d'une grande maturité, et cette dame âgée si craintive et si peu portée aux confessions. Les descriptions des attitudes de deux protagonistes sont si précises et détaillées que ce n'est plus un livre qui est devant vos yeux mais un écran où se déroule une épopée livresque.

Quant à l'écriture, c'est une broderie, des mots piqués sur les fluctuations des destins, un raccommodage minutieux pour réparer tous les fils cassés par les mains destructrices des hommes.
Lien : https://squirelito.blogspot...
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Un titre plein de possibles, je crois d'ailleurs qu'on aurait pu dire les fils rompus. Car c'est bien de cela qu'il s'agit dans cette histoire coincée dans L Histoire ; malgré ces ruptures, Mme Janik retrace son histoire qui a débuté en plein coeur de la Shoah, du côté allemand et qui s'achève à New York, en 2016.
C'est une histoire en demi-teinte, oscillant entre tendresse et traumatismes de guerre, entre silences pleins d'allusions aux exterminations en masse qui ont permis à des personnes peu scrupuleuses de s'approprier biens et êtres humains au titre de droit du vainqueur !
Tout est écrit sur le même ton, ce qui en fait une lecture plutôt agréable même quand on sait ( on sent) qu'il s'agit de violences.
Céline Spierer a su créer ces liens entre les trois femmes qui étoffent son propos, des prémisses de la 2ème Guerre mondiale jusqu'en 2016, en passant par la Pologne, l'Allemagne et les Etats-Unis. J'ai bien dit liens et non pas fil rompu, car si, de fait, il y a des ruptures dans cette saga, l'auteure nous conduit de main de maître jusqu'à Ethan qui incite Madame Janik à dérouler la bobine.
J'ai beaucoup apprécié ce choix d'écriture qui n'est ni mièvre, ni désorganisé, comme on pourrait le penser à première vue, mais qui laisse le lecteur construire pièce à pièce le puzzle jusqu'au tableau final. C'est une façon de voir cette tranche d'Histoire qui me convient tout à fait.
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critiques presse (1)
LaTribuneDeGeneve
22 septembre 2020
Son écriture est très visuelle. Le cinéma n’est jamais loin. Un peu son métier aussi!
Lire la critique sur le site : LaTribuneDeGeneve
Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
- La mémoire fonctionne bizarrement , reprit-elle, soucieuse de ne pas transformer leur agréable échange en considération philosophique barbante. Quel que soit l'âge.
- C'est vrai, approuva Ethan.
- Ce dont on se souvient, ce qu'on oublie. On aimerait pouvoir se dire que ce tri répond à quelque logique. Qu'on laisse de côté le futile, le trop douloureux, et qu'on sauvegarde ce qui nous permet d'apprendre et d'avancer. Mais c'est bien plus arbitraire que ça.
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(New York 2015). Elle se méfiait des gens excessivement sûrs d'eux, redoutait leur assurance communicative et la facilité stupéfiante avec laquelle leurs convictions devenaient les siennes. Mais elle ne leur en voulait pas. Ils n𠆚vaient pas toujours conscience de se tromper et n𠆞ssayaient pas forcément de duper leur cible. On se méprend le plus souvent au sein d’un groupe, parce que le nombre convainc et qu'il est un argument en soi. Ainsi, madame Janik fuyait ceux qui maniaient trop adroitement l𠆚rt de la rhétorique. L’opinion bien formulée remplit si naturellement le vide de nos incertitudes. Elle ne s𠆞stimait pas nécessairement plus bête qu'un autre, mais sa compréhension du monde lui semblait terriblement limitée. Elle ne possédait pas toujours les outils nécessaires pour départager le vrai du faux parmi la masse d’informations quotidienne, et sa seule défense se résumait à ses doutes. P. 201
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(New York 2015)
- Qu'est-il arrivé à vos mains ?
(...)
- Ce n'est rien. Une vieille cicatrice.
C’était curieux ce besoin de savoir qui se contentait de si peu. Récent, aussi, lui semblait-il. À son époque, on acceptait l�sence d𠆞xplications, par pudeur, par respect et peut-être aussi parce qu'on savait la vérité difficile à supporter. La nouvelle génération était-elle réellement plus courageuse et plus soucieuse d’obtenir des réponses ? Ou était-elle animée d’une curiosité malsaine, façonnée par une culture de l'information de surface, de gros titres choquants, d'images frappantes où le contexte n’importait plus et où les faits, au bout du compte, n’intéressaient personne ? P. 330-331
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(Allemagne 1945) Pourtant, Magda s’interdisait de l𠆚pprécier, lui et ses qualités qui s’opposaient si drastiquement au tempérament de Père. Le quotidien rustique de monsieur Arden agissait comme le faisceau d’un projecteur sous lequel les actions passées de Père apparaissaient sous un jour neuf, moins glorieux et moins méritoire. Magda se surprenait à réviser ses souvenirs et à discerner dans le soin qu𠆚pportait Père aux apparences, dans ses choix et ses priorités, le signe d’une vanité superflue qui l𠆚vait desservi. La satisfaction que monsieur Arden retirait de son existence modeste piétinait les principes et les croyances de Père en soulignant leur vacuité. P. 340
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(Le peuple juif, vu par la grand-mère allemande. Dresde 1944) (...) elle se réjouissait que le Reich, enfin, permette aux gens moins éclairés de savoir à quoi s'en tenir. L𠆚pparence dépenaillée de cet individu n𠆚ltérait en rien son jugement, car Grand-Mère attribuait ces signes de détérioration physique à un choix plutôt qu𠆚ux conséquences d’une quelconque oppression. Cet homme se négligeait car ses priorités étaient ailleurs. Vers l𠆚rgent par exemple. D𠆚illeurs, s’il souffrait réellement, qu𠆚llait-il faire dans le parc à la tombée de la nuit ?
Grand-Mère éprouvait à l’égard des Juifs le même dégoût craintif qu’un enfant vis-à-vis de la créature maléfique supposément cachée sous son lit. P. 216
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Quel bonheur d'écouter Olivia de Lamberterie évoquer "la construction absolument géniale" du roman "très cinématographique" de Céline Spierer.
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