Je n'aurais jamais entendu parler de ce roman, si on ne me l'avait pas conseillé en série télévisée. Quelques recherches plus tard… apprenant que ce livre avait obtenu le prix Nobel de littérature ,( et de toutes façons, préférant toujours commencer par l'oeuvre originale ), je me suis attelée à cet immense pavé . Je ne dis pas cela de façon péjorative, quand j'aime, je ne compte pas les pages ! Mais force est de constater que cela fait une semaine que je vis avec la famille Forsyte… ( 793 pages avec une typographie absolument minuscule , dans mon édition reliée de cuir. Et un deuxième tome m'attend !)
C'est en 1906 que John Galsworthy publie" le Propriétaire", 1° volume de " Forsyte Saga" qui raconte l'histoire de la famille Forsyte sur trois générations.
Eux , ce sont de grands bourgeois londoniens, dont l'ancêtre (le premier Jolyon Forsyte) était propriétaire fermier.
Ils sont propriétaires fonciers, administrateurs, éditeur, négociant en thé et leurs enfants seront notaire, artiste peintre…( Les femmes bien-sûr, ne travaillent pas et vivent sous le toit protecteur d'un frère ou d'un mari ). Tout ce petit monde vit en bonne intelligence , jusqu'au jour où, la petite fille , June, présente son fiancé à la famille. Il est architecte, autrement dit pour l'époque : sans le sou.
C'est la première incursion dans leur monde feutré d'une personne différente et, la vie de certains membres de la famille en sera , à jamais impactée pour le pire ou pour le meilleur …
En choisissant comme titre du premier ouvrage, " le propriétaire", John Galsworthy savait ce qu'il faisait , car à l'époque, un homme était propriétaire de ses biens matériels mais également de son épouse… laquelle ne pouvait pas demander le divorce , elle devait attendre que son mari le demande. Une femme issue de la bourgeoisie avait sa chambre mais ne pouvait s'opposer à ce que son mari y rentre. Et en cas de rapports sexuels non consentis par la femme, on ne parlait pas de viol. En ce temps là, les jeunes filles ne savaient absolument pas à quoi s'attendre le jour de la nuit de noce, et parfois (souvent !) , c'était une mauvaise surprise….
A travers ce portrait de famille, c'est toute une étude de moeurs que fait l'auteur , d'une société anglaise qui passera de l'époque Victorienne au début du 20ième siècle et des femmes qui verront leurs libertés augmenter.
Cette histoire commence en 1886, avec les fiançailles de mademoiselle June et se termine vers 1920 (dans ce premier tome). Et si on survole l'époque , la guerre, les changements , l'auteur s'attache plus spécifiquement aux pas de quelques membres emblématiques de la famille Forsyte , tout comme Zola l'a fait avec les Rougon- Macquart, mais, ce dernier de façon plus détaillée, plus percutante.
Au delà de l'oeuvre magnifiquement ambitieuse , cela a été pour moi, un vibrant témoignage (même s'il est fictif…) sur la vie que pouvaient avoir nos ancêtres des deux derniers siècles passés.( Bien sûr cela se passe à Londres, mais cela pourrait être Paris… ).
Quand le personnage de Soames , nostalgique , dit adieu à une maison décorée à la mode victorienne , quand il réfléchit au temps qui passe , la société qui change , les membres de sa famille disparus, les fantômes qu 'il revoit assis sur les canapés de la maison …
Le premier Forsyte , a accumulé des biens, deux autres générations ont suivi . Mais qu'en sera t-il des descendants ? le personnage de Soames ( avoué) ,est le seul qui soit obsédé par l'argent (en gagner, le faire fructifier, le conserver, le transmettre )… Oui, qu'en sera -t-il des descendants, beaucoup plus " sensibles" ?Déjà certains cousins vivent sur leurs "acquis"… Je le saurai en lisant la suite. Les idées socialistes ont déjà atteint certains personnages.
Un regard à 180° sur le 19 et 20 siècle.
Une galerie de portraits. De bien jolis papillons épinglés par Monsieur Galsworthy, que ces membres de la famille Forsyte…
Intéressant, diablement intéressant et très agréable à lire..
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Grâce à John Galworsthy, nous allons découvrir l'univers bien singulier des Forsyte une famille bourgeoise londonienne vivant dans le west End à la fin du 19 ème siècle.
Une bien belle étude d'une famille avec ses mésalliances, ses conflits d'intérêts, ses jalousies et surtout ce besoin irrémédiable de sauver les apparences, pas de scandale ; un petit bijou en la matière.
Des vies guindées, étriquées, empesées, amidonnées comme le col de leurs chemises dans le carcan de leurs certitudes. Les Forsyte font de l'argent et aiment à montrer qu'ils en ont par le biais de leurs acquisitions.
Et voilà que June, la petite fille, de Jolyon le vieux, fait entrer un électron libre dans cette famille en la personne de Philip Bosinney, un architecte, qui vit aime, crée et va semer le trouble chez les Forsyte. Il sera le grain de sable dans un rouage bien huilé. Voyant que sa petite-fille va le quitter le vieux Jolyon par crainte de la solitude et par amour de son fils va se rapprocher de lui malgré ses incartades. Soames, son neveu lui fera construire une propriété pour contrôler un peu plus sa femme Irène. Mais elle va tomber amoureuse de Philip. Soames qui jusque là, l'a enfermée dans une cage dorée, certes, mais une cage et s'est juste demandé pourquoi elle ne l'aimait pas mais jamais si elle était heureuse, sûr de son bon droit va commettre l'irréparable, menant à la mort d'un des personnages.
A mon avis, on ne devient pas mais on naît Forsyte parfois une mutation génétique ou l'acquisition d'un nouveau membre de la famille fait vaciller l'édifice mais en général la famille reste unie dans l'adversité, pas de pitié pour ceux qui transgressent les règles. Les Forsyte ne sont pas une espèce en voie de disparition, il en existe toujours. Une très belle restitution du Londres du 19 ème siècle qui par certains côté n'a pas beaucoup changée mais j'aimais bien ce charme désuet de l'Angleterre. Un très bel aperçu du flegme britannique.
Un merci tout particulier à la traductrice Camille Mayran qui a su rendre le texte vivant. Grâce à cette lecture, j'ai enfin pu comprendre l'engouement et l'intérêt suscité par cette série culte diffusée dans les années soixante-dix et dont il existe un remake. Il ne me reste plus qu'à découvrir la suite.
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Tenir en cage un lion ou un tigre, c'était sûrement une horrible barbarie. Mais voilà ce que n'admettait aucun homme cultivé. L'idée qu'il était cruel d'enfermer des animaux sauvages n'était probablement jamais venue à son père, par exemple. Il appartenait à l'ancienne école qui trouvait, humain et moral d'emprisonner les panthères et les singes, convaincu, sans doute qu'avec le temps on persuaderait ces créatures de ne plus mourir si déraisonnablement de tristesse et de nostalgie, contre les barreaux de leur cage, imposant ainsi à la société la dépense de leur remplacement. Aux yeux de son père, comme aux yeux de tout Forsyte, le plaisir de contempler ces belles créatures en état de captivité compensait, et au-delà, l'inconvénient d'enfermer des bêtes que Dieu, si imprudemment, avait faites libres.
- Faites- lui surveiller une Mme Heron.
(…)
L'affaire sera 7x. La personne surveillée sera 17 ; celle qui la surveillera 19 ; le domicile de cette personne 25 ; vous- même - je devrais dire votre étude, 31 , moi- même 2. Au cas où il vous faudrait mentionner votre client par écrit, je l'ai appelé 43 ; s'il y a une personne que nous soupçonnons, elle sera 47 ; une seconde personne sera 51. Avez- vous des indications ou des instructions spéciales, pendant que nous y sommes ?
Elle (June) passait sa vie à s'enticher de tous les éclopés qu'elle rencontrait. Ce garçon n'avait pas le sou, il fallait donc qu'elle l'épousât ; un homme dans la lune, incapable de se conduire, un homme à se fourrer dans des difficultés sans fin.
Elle était venue le trouver un jour, à brûle-pourpoint, pour lui annoncer la nouvelle, et, comme si ce devait être une consolation, elle avait ajouté :
_ Il est épatant, il a souvent vécu de cacao toute une semaine.
_ Et il veut que toi aussi tu vives de cacao ?
Certaines choses avaient été perdues de vue.
Et d'abord, dans la sécurité produite par un grand nombre de pacifiques mariages, on avait oublié que l'Amour n'est pas une fleur de serre, mais une plante sauvage, née d'une nuit de pluie, d'une heure de soleil, jaillie d'une graine folle qu'un vent de désordre a jeté sur la route - une plante sauvage que nous appelons fleur si par bonheur elle s'épanouit entre les haies de nos jardins, mauvaise herbe quand elle pousse au-dehors, mais qui, fleur ou mauvaise herbe, garde toujours la couleur et le parfum sauvage qu'elle avait dans les bois.
Les Forsyte, bien entendu, sont très anglais, mais ils appartiennent à la commune humanité au moins en ceci qu'ils savent de quel côté se trouve leur profit : cette vertu n'est pas inconnue sur le reste de la terre. Ce qui peut-être les distingue, c'est de tendre à ce profit d'une manière si continue et si profonde qu'ils ne sont ne sont plus aptes à en faire usage quand ils l'ont obtenu. Les Forsyte font de leur vie un placement trop précautionneux pour pouvoir la vivre.
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