La chasse à l'ours est ouverte ... Dans ce récit en un volume aux Editions "Des bulles dans l'océan", le scénariste
Patrice Bavoillot exhume de l'oubli un épisode méconnu de ce 19ème siècle finissant, marqué pour
L Histoire par l'Affaire Dreyfus.
1893, Aigues-Mortes. Alors que la récolte de sel bat son plein, les jalousies entre trimards et Ritals venus du Piémont, sur fond de rivalité amoureuse - dont l'auteur prend soin de préciser qu'elle fait partie des éléments de fiction ayant romancé le récit - débouchent sur une véritable chasse à l'homme, un déferlement de violence à l'égard des saisonniers italiens accusés de voler le pain et les femmes des français. Toute ressemblance avec des faits existants ou ayant existés ...
L'âpreté du récit est parfaitement servie par le travail de
Sébastien Gannat aux dessins et
Jérôme Alvarez aux couleurs. Qu'il s'agisse de la chaleur écrasante régnant dans les salins, de la tension qui monte entre les communautés, et pour finir du bain de sang, point d'orgue de la partie du récit consacré aux évènements de 1893, on est saisi par cette chape de plomb, cette cocotte-minute qui ne demande qu'à exploser.
Les dernières pages du récit sont plus "classiques", si j'ose dire. Un saut dans le temps et l'espace, où l'intrigue amoureuse - et au final secondaire - se dénoue. Mais avant cela, les auteurs ne manquent pas de souligner la lâcheté des autorités, comme la folie des hommes. Ou comment, de proche en proche, une fureur destructrice s'empare sans raison valable d'une population paisible ...
Et la dernière page est à ce titre terrible, qui s'ouvre sur une dernière phrase, "heureusement, toute cette violence est derrière nous maintenant", et se ferme sur une date ... Juillet 1914 ...