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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Bleus horizons, en référence à « Horizons chimériques », une des rares oeuvres de Jean de la Ville de Mirmont, mort pour la France en octobre 1914, c'est la couleur des uniformes des poilus, ce sont aussi les horizons ciels et marines qui enchantent les rêves du marin, voguant de Bordeaux au Havre, ou réconfortent les « Gueules cassées » soignés à Deauville et Trouville.

Louis Gémon, héros imaginé par Jérome Garcin, est un bordelais embrigadé dans la même unité que Jean de Mirmont, et blessé quelques jours après lui. Pendant plus de vingt cinq ans, il consacre sa vie à connaitre l'écrivain et à diffuser son oeuvre. Evocation qui nous révèle André Lafon, Georges Pancol, Emile Despax, Fernand Moncaut-Larroudé, aquitains tombés au champ d'honneur, et François Mauriac, Jacques Rivière, André Lamandé, le Martiniquais de Bordeaux René Maran, et la mystérieuse Jeanne Alleman (alias Jean Balde) survivants au conflit.

Hommage également au vicomte Eugène Melchior de Vogùé à qui l'on doit de « mieux connaître, en France, les secrets de l'âme russe et le génie de son roman » et panégyrique de Charles Péguy (41 ans), Alain-Fournier (27 ans), Louis Pergaud (33 ans), sacrifiés avec Jean de la Ville de Mirmont (28 ans), aux cotés d'un million de poilus.

Leur sacrifice peut sembler vain, une génération plus tard, quand la Wehrmacht entre dans Paris et occupe la France, mais inspire Louis Gémon le 21 janvier 1942.

Subtile, documenté, délicat, cet essai remarquable s'inscrit dans la série que Jérome Garcin consacre aux vies exemplaires et brisées.
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"En écoutant en boucle les Leçons de ténèbres de Couperin , chantées par Alfred Deller, je guettais, dans les correspondances , les journaux intimes , les carnets de notes, les textes inachevés, les oeuvres interrompues, des traces du terrible pressentiment qui saisit celles et ceux dont la vie sera brève, dont l'oeuvre sera empêchée, et dont je me croyais secrètement, par je ne sais quel héritage spirituel, le légataire testamentaire."Jérôme Garcin dans Olivier.

Après Hérault de Séchelles , Etienne Beudant et Jean Prévost, Jérôme Garcin continue à parler de destins trop tôt brisés.
Empruntant son titre à un recueil de Roland Dorgeles, il évoque dans ce roman la vie d'un écrivain et poète Jean de la Ville de Mirmont mort au Chemin des Dames en novembre 1914. Employé à la Préfecture le jour, auteur d'un seul roman Les dimanches de Jean Dézert et d'un recueil de poèmes, L'horizon chimérique qui inspirera Gabriel Fauré... et beaucoup plus tard Julien Clerc.

Un jeune homme rêvant de voyages , de dangers, idéaliste , passionné , rongeant son frein dans son travail et trouvant dans cette guerre une occasion de vivre. Il y vivra deux mois.

Pour le faire réexister, Jérôme Garcin lui a inventé un "jumeau de guerre",amoureux, comme lui, de la littérature ,Louis Gémon , rencontré à Libourne et témoin de sa mort.
Louis Gémon, lui, survivra. Enfin, si peu. Car le rôle des jumeaux, pour Jérôme Garcin , quand l'autre manque, est de le faire exister quand même.
En le faisant connaître, reconnaître.Et, ici, publier,c'est difficile ce qui vaut un chapitre assez savoureux sur Bernard Grasset frappé d'indignité nationale en 1918.
On croise aussi dans ce roman Fauré, devenu sourd, Mauriac, l'ami d'enfance et tous les écrivains morts au combat.

C'est, encore, le récit d'un survivant qui ne comprend pas ,comme souvent, pourquoi il l'est . Louis Gémon ne se remettra jamais de la mort de Jean, se confondant en lui et refusant d'exister. Jusqu'au bout et au dernier chapitre, plein d'une ironie désespérée.

"On ne rattrape pas plus le soleil perdu qu'on ne réveille de son sommeil éternel l'ami disparu. Je me demande si cette fable sur l'illusion d'optique que Jean a écrite à vingt ans ne m'était pas destinée, si du moins elle n'était pas destinée au frère imaginaire qui lui survivrait. Ce pétrel plaintif, ignorant et borné, qui fonce droit vers la clarté sans comprendre que le soleil descend pour mourir, c'est moi. Je suis devenu un oiseau de l'amer aux ailes brisées qui se terre dans un trou humide du Senonais."

J'aime beaucoup Jérôme Garcin. L'écrivain.

"Je suis de ceux dont les désirs sont sur la terre
Le souffle qui vous grise emplit mon coeur d'effroi
Mais votre appel ,au fond des soirs, me désespère
Car j'ai des grands départs inassouvis en moi."
Jean de la Ville de Mirmont ( L'horizon chimérique)

Je signale encore l'excellent livre de Danièle Auby, qui évoque aussi ce poète et écrivain, mais au milieu de tous ces écrivains morts pendant cette guerre .
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J. Garcin est fasciné par les destins brisés, les vies brèves et après "olivier" qui évoquait son frère jumeau mort à l'âge de six ans, il retrace ici la vie du poète oublié Jean de la Ville de Mirmont mort aux Chenins des Dames en novembre 1914 et auteur d'un recueil de poèmes et d'un bref roman. Il lui invente un "jumeau de guerre", imaginaire lui, Louis Gémon qui survit à son ami et qui va consacrer sa vie à faire vivre l'oeuvre de Jean. Quand l'autre n'est plus là, la littérature doit continuer à le faire exister. Il imagine une rencontre de Louis Gémon avec François Mauriac (qui avait connu réellement Jean de la Ville de Mirmont) et Bernard Grasset. Comment survivre à un autre soi-même ? Jérôme Garcin a pu se construire et se réaliser après la perte d'Olivier, alors que l'amitié se son héros pour Jean est destructrice puisqu'il ne vit que dans le souvenir sans jamais rien réaliser. Les poèmes de Jean de la Ville de Mirmont ont cependant été mis en musique par Fauré (que l'on retrouve dans le roman) et beaucoup plus récemment par Julien Clerc.
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J'ai lu un livre de Jérôme Garcin. Jérôme Garcin, le type qui a fait de la critique littéraire un art abouti. Celui qui tient avec une bonhommie gourmande la laisse de ses séides du "masque et la plume", et qui les lâche parfois sur un auteur moyen, souvent pour notre plus grande joie.
Alors, ça fait quoi de lire un livre de Jérôme Garcin ? Au départ, on se dit qu'on va étriller le critique, comme un juste retour des choses en somme. On se montre déjà exigeant, sans même avoir ouvert la première page, et on se promet de ne rien omettre, de ne pardonner aucune faute, aucune maladresse même vénielle.
Et puis peu à peu, on admet que c'est bien écrit. Rien à dire, donc. L'ouvrage est tenu, l'histoire se déroule, tout se passe bien. du travail de pro, si j'ose dire. Sauf que c'est là que le bât blesse. On a effectivement le sentiment d'un bel ouvrage mais tout ça manque d'envie, de nerf, un peu comme une commande scrupuleusement honorée. On voudrait plus de don de l'homme et on se dit que peut-être aurait-il fallu lâcher un peu la bride. Trop léché, trop propre, trop académique, en somme..? Non, plutôt un livre de critique. Du beau travail pour montrer qu'on sait y faire...
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N°687– Octobre 2013.
BLEUS HORIZONSJérôme GARCIN - Gallimard

Jean de la Ville de Miremont, 28 ans, employé à la Préfecture de la Seine, était-il l'exacte illustration de cette image d'Épinal qui a montré les militaires, conscrits pour la plupart, partir au combat la fleur au fusil, persuadés qu'ils seraient de retour à Noël ? Se considérait-il, de part ses origines aristocratiques ou de sa confession chrétienne comme comptable de l'intégrité du territoire national ou le défenseur des valeurs patriotiques ? Devait-il à son côté poète des idéaux inatteignables ? Lui qui avait été réformé à cause d'une santé fragile insista pour s'engager, « pour la seule durée des hostilités ». Avait-il eu la prémonition de sa mort ? Il fut tué au tout début du conflit, en novembre 1914 au « Chemin des Dames » !

Le prétexte de ce roman est le témoignage reconstitué et réécrit par Jérôme Garcin de l'amitié exceptionnelle de Louis Gémon, (1885-1942), obscur poète selon ses propres dires et de Jean de la Ville de Miremont (1886-1914) poète et romancier prometteur fauché en pleine jeunesse dans sa tranchée presque sous les yeux de son ami. Cette amitié basée principalement sur l'amour de la littérature débuta à Libourne lors de leur incorporation puis s'affirma dans les tranchées, autant dire qu'elle fut courte mais intense. Après la mort de Jean de la Ville, Gémon s'attacha , pendant toute sa vie, avec abnégation et admiration, à faire connaître l'oeuvre de son ami. Il le fit certes au nom du devoir de mémoire pour l'arracher à l'indifférence et à l'oubli mais aussi pour le faire revivre, pour que son écriture qu'il jugeait indispensable à la littérature fût connue de tous, lui dont l'existence avait été si injustement et si violemment interrompue. Il insista longtemps pour que cette oeuvre fût publié chez Grasset, sut motiver François Mauriac qui fut l'ami de Jean et qui signa une préface et Gabriel Fauré qui mit quelques-uns de ses poèmes en musique, notamment « Vaisseaux, nous vous aurons aimés » mais surtout il sacrifia sa vie professionnelle, son bonheur conjugal et sa propre existence à cette mission parce que son ami avait fait de lui, au fond de sa tranchée, son véritable exécuteur testamentaire littéraire (Jean avait laissé à Louis un recueil de poèmes, « L'horizon chimérique » pour qu'il le publie si d'aventure il mourrait avant lui). En effet, Gémon qui était aussi un auteur, s'effaça constamment devant Jean, vécut en présence de ce fantôme au point qu'il accepta que sa compagne le quitte, lassée de cette quête qu'elle jugea impossible (« J'ai cru que je survivais à Jean, mais la vérité, c'est que je me suis tué pour lui. Je lui ai tout sacrifié, au point d'en oublier de respirer. Je n'ai pas réussi à écrire parce que je passais mon temps à le relire. J'ai préféré son passé à mon avenir. Il a été mon jumeau de guerre, mon double idéal, et je ne suis jamais parvenu à en faire le deuil. ») . Il le fit aussi sans doute pour exorciser cette culpabilité d'avoir survécu à l'enfer de la guerre lui qui, grièvement blessé, en revint, estropié mais vivant.
Garcin imagine que la mère de Jean sollicite Louis Gémon pour lui parler des derniers moments de son fils. Il donne donc la parole à Louis qui, à travers les vers de Jean, livre les impressions que la guerre puis le quotidien lui inspirent, recréant, en parallèle, une histoire personnelle de cet homme dont on ne sait pratiquement rien. Louis se remémore l'été 1914 où l'ombre du conflit planait sur le pays, ces jeunes Français qui voulaient faire la guerre comme un passage initiatique ; elle serait courte et évidemment victorieuse et Jean n'échappa pas à cette fascination pour le combat. La réalité fut bien différente mais pendant que des jeunes gens souffraient et mourraient dans des conditions atroces, à l'arrière on festoyait et d'autres, plus riches ou plus débrouillards échappaient à leur devoir.

Je retiens, à titre personnel les premiers mots de ce roman. Parlant de la mère de Jean, le narrateur, Louis Gémon, note «  Elle attendait de moi que je l'encourage à porter plainte non pas contre l'armée mais contre le destin... Croyait-elle vraiment intimider Dieu, et faire condamner, pour le mort de son garçon, le juge suprême ?» de part son engagement religieux elle avait fidèlement servi et aimé ce Dieu qui lui avait enlevé son dernier fils encore vivant. Ces quelques mots me paraissent tout à fait sujets à remise en cause profonde des convictions religieuses et même de la foi des êtres humains en une divinité qu'on nous présente comme bonne et compatissante. Cette « vérité » qui a valeur de dogme, existe autant que les choses humaines sont normales, c'est à dire qu'elles ne sont en rien bousculées par les événements, mais aller à l'enterrement de ses enfants remet forcément en cause tout ce qu'on nous a affirmé. La révolte qu'on peut éprouver contre le destin, c'est à dire contre Dieu, est à la fois légitime et parfaitement inutile, c'est à dire finalement tellement frustrante que la foi en souffre forcément au point de disparaître et qu'on se raccroche à ce qu'on trouve pour ne pas sombrer.

Ce n'est pas la première fois que cette revue s'intéresse à l'oeuvre romanesque de Jérôme Garcin [La Feuille Volante n°447 et 450]. Sa démarche est cette fois particulièrement bienvenue en ce qu'elle contribue à tirer de l'oubli quelqu'un d'exceptionnel dont le destin a été malheureusement brisé mais aussi un poète qui a si bien servi notre langue et notre culture.

J'ai lu ce roman sobrement écrit et plein de sensibilité avec une réelle émotion en pensant aussi, comme nous y invite l'auteur, à tous ceux qui ont accompagné Jean dans la mort et qui auraient pu avoir une vie après cette guerre. Il y a certes Louis Pergaud, Alain Fournier et Charles Peguy dont on se souvient mais il y a aussi les anonymes qu'on s'est empressé d'oublier et dont le souvenir ne perdure sur terre qu'à travers un nom gravé sur un monument ou une croix de bois ...



© Hervé GAUTIER - Octobre 2013 - http://hervegautier.e-monsite.com
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Pendant longtemps Jean de la Ville de Mirmont fut un écrivain culte, connu d'un petit nombre d'initiés, souvent de la région Bordelaise d'où il venait. En évoquant la mort et l'oeuvre de ce poète délicat et de cet écrivain aigu, Jérôme Garcin aura rendu rendu un service signalé à la littérature si ses lecteurs se précipitent sur "Les dimanches de Jean Désert" et les poèmes de "L'horizon chimérique" qu'il cite souvent. Au passage, il auront lu une biographie très habilement romancée de l'écrivain si tôt disparu, auquel Jérôme Garcin invente un frère d'arme qui maintient son souvenir dans le culte de son oeuvre. le roman est d'un belle facture, forte et sensible, sur l'amitié, la mémoire, les guerres. Avec une chute surprenante !
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Le narrateur part à la recherche du poète Jean de La Ville de Mirmont mort sur le front en 1914, et se bat pour le faire revivre.
Touchant.
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L'auteur nous livre une biographie joliment romancée d'un auteur bordelais tombé (pour la plupart d'entre nous )dans l'oubli : Jean de la Ville de Mirmont, lequel meurt dès les premiers jours de guerre, en 1914. Jérome Garcin évoque sa figure, sa mémoire à travers un jumeau imaginaire qui ne se remet pas de cette perte. Belle fresque et hommage vibrant aux victimes de guerre, la figure du jumeau inconsolable n'est pas sans évoquer la douleur de perte gemellaire qu'évoque l'auteur dans "Olivier"
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Jean de la Ville de Mirmont n'a publié qu'un roman de son vivant, Les dimanches de Jean Dézert, et un recueil de poèmes, L'horizon chimérique, qui inspira une pièce sous le même titre à Gabriel Fauré. Jérôme Garcin publie ici à la fois une biographie et un roman historique à travers la vie (fictionnelle) d'un de ses camarades de tranchée. L'occasion, comme dans Une après-midi d'été, de Bruno le Floc'h, d'aborder la question du retour et ici plus du « syndrome du survivant », Louis Gémon étant incapable de mener sa vie hors de celle qu'il essaye de reconstituer de Jean de la Ville de Mirmont. Au fil de sa quête, il lui fait croiser Gabriel Fauré (trop vieux pour avoir été mobilisé), François Mauriac (planqué), etc. Jérôme Garcin réussira-t-il son pari, une rue de Bordeaux portera-t-elle un jour le nom du poète fauché à la guerre dans un lieu si propice aux invasions, le chemin des Dames, entre Laon et Soissons dans l'Aisne [la suite sur mon blog]
Lien : http://vdujardin.com/blog/ga..
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