Formidable, magnifique ! Il faut lire ces nouvelles pour s'y trouver soi-même, y rencontrer le proche, le comparse, l'idée qui nous vient, le geste qui désole, la déception qui taraude, l'indifférence qui arrange, le désir qui se rêve. Pour répondre à la question : mais comment font les autres ? Pour rêver de ne pas être solitaire en n'aimant qu'être seul, pour supporter ce qui crisse.
Joëlle Gardes, qui aime l'analyse logique et le calcul mental, qui choisit d'aller jusqu'au bout des idées saugrenues et angoissantes qui nous assaillent, qui, sans trop y croire, chérit l'idée de l'amour, le rêve d'une famille qui ne soit pas qu'un souvenir d'enfance, répond sans solution, bien sûr, répond en partageant.
Tour à tour désabusée, stoïque, épicurienne, toujours sensée, dans un style cristallin qui brise la flûte du délicieux champagne rosé, un style dont l'apparente nonchalance fait vivre la cocasserie de l'exactitude des sensations, des sentiments ou de leur disparition. Quelle justesse ! Quel art !
Lire pour sourire parce que l'auteur et les personnages sont plus malins que leurs vies, parce qu'il reste toujours la possibilité de s'échapper, de se taire, de s'abstraire des contraintes choisies en toute méconnaissance. Il reste partout un coin de ciel, une traine de confiance dans une étreinte, un regard sur les plantes et les paysages, sur la main potelée d'un enfant, le tee shirt d'un clown, le délice d'être soi malgré tout.