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Ok. On arrête tout.

On se pose deux secondes et je t'explique ce qu'il vient de m'arriver à la lecture de cette pépite.

Etrangement, ma plus belle lecture de ce début d'année est donc une bande dessinée, un roman graphique. Je me suis fait cueillir comme on se fait surprendre par une petite claque sur la tronche.

Je ne connaissais pas Alix Garin. J'ai acheté ce livre juste pour son titre, pour sa couverture. Quelque chose m'appelait très fort. Je pressentais une pudeur, une vérité. Et je ne me suis pas trompé.

Clémence vient rendre visite à sa grand-mère, qui une fois de plus s'est « échappée » de sa maison de retraite. Pour son bien, il faut la droguer, lui faire encore plus perdre l'esprit. Pour qu'elle reste là, à attendre on ne sait quoi.

Clémence ne peut se résoudre à l'abandonner ainsi et la kidnappe. Débute alors le plus joli des roads trips que j'ai pu lire …

Je n'oublierai pas. Je n'oublierai toutes ces émotions qui m'ont traversé, parfois transpercé devant la justesse de cette histoire simple comme la vie. Je n'oublierai pas la délicatesse des sentiments, la vérité des silences, des dessins qui parsèment cet ouvrage. Je n'oublierai pas les sourires, je n'oublierai pas ces pages qui m'ont mouillé les yeux.

Je n'oublierai pas cette envie de ne jamais à avoir à refermer ce livre.
Les thèmes de la vieillesse, du temps qui passe, de l'enfance qui toque aux portes de nos mémoires abimées, de l'amour immense, sont traités avec grandeur d'âme, à hauteur d'humanité. Sans tabou mais avec une infinie délicatesse.

Du sourire, aux larmes, en quelques bulles. Dieu que j'aime lire ça, la vie, la vraie. Des héros quotidiens qui se débattent contre l'oubli, cette mémoire qui flanche et prend l'eau.

Je n'oublierai pas. Je relirai ce livre. Encore et encore.

Et je n'oublierai pas.

Lien : https://labibliothequedejuju..
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La tendresse
C'est un geste, un mot, un sourire quand on oublie
Que tous les deux on a grandi
C'est quand je veux te dire je t'aime et que j'oublie
Qu'un jour ou l'autre l'amour finit

La tendresse.
Allez viens.

Ne m'oublie pas. Moi qui t'aime tant chère mamie, moi qui me souviens de ta tendresse, de tes sourires, de tes bisous, ne m'oublie pas.
Allez viens mamie, on va aller faire une énième fugue mais ensemble, toutes les deux, parce que les mouroirs ça rapporte pas un sou, puis ça pue la mort et la tristesse. Viens mamie, on va aller jusqu'en France dans la maison de ton enfance. Tes souvenirs ils sont là bas, on va aller les chercher pour que la mémoire vienne te picoter ton petit coeur. Viens mamie, ensemble on va s'aimer une dernière fois et sur tes trous noirs, on fera la courte échelle pour attraper le mauvais sort et lui tordre le cou.

La tendresse,
C'est refaire pour quelques instants un monde en bleu
Avec le coeur au bord des yeux.

Coup de coeur pour cet album rempli de tendresse, de simplicité qui nous rappelle que le temps est compté, que c'est aujourd'hui qu'on s'aime.
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"Ne me demande pas de me rappeller
N'essaie pas de de faire souvenir..."
Demande d'un malade d'Alzheimer.


Elle a fugué encore une fois, et Clémence a kidnappé sa Mamy, pour l'emmener loin de la maison de retraite.


Pour lui donner l'occasion de revoir sa vieille maison.
"J'avais oublié que les roses sont roses
J'avais oublié que les bleuets sont bleus
J'avais oublié tant de belles choses..."


"Ne me sermonne pas
Ne me maudit pas, ne pleure pas
Je ne peux m'empêcher d'agir comme ça"


L'auteure avait eu envie, tant de fois, de faire la même chose avec sa propre grand-mère.
Ne pas oublier, non, ne pas les oublier dans une maison de retraite, un EPADH ou un...mouroir.


"Je suis désorientée au delà de tout ce que tu peux imaginer
Je suis triste, malade et perdue
Tout ce que je sais
C'est que j'ai besoin de toi"...
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Clémence erre à travers les pièces vides de la maison qui se met à geindre comme un vieillard perclus de rhumatismes. Elle est assaillie par tous ses souvenirs d'enfance : le bol de chocolat chaud ; toutes ces heures à paresser devant la fenêtre ; le coup du 421 et l'odeur de la compote de pommes quand elle sort du four ; la nappe à carreaux rouge et blanc sur la table de la cuisine ; ces vieux bibelots accrochés aux murs, ces livres qui prennent la poussière sur les étagères ; ses genoux écorchés, le retour de l'école et les pantoufles de Papy ; son sourire fatigué, sa bienveillance et la vaine énergie de Mamy ; leur présence, leur tendresse, leur amour quand Maman n'était pas là…
« Je t'aime Mamycha, je t'aime ! »
Mamy justement vient d'avoir vingt ans. Elle veut rejoindre ses parents et ne comprend pas pourquoi on l'enferme dans cette maison où il y a ces espèces de bonnes soeurs. Alors elle fugue !
Nostalgie, mélancolie, amertume… Des rivages que n'aime pas trop Clémence. Elle sait qu'elle va faire une grosse bêtise. Sur les murs de son petit appartement, est punaisée une affiche de Cyrano de Bergerac. Audace. Effronterie. Panache.
Clémence va prendre la poudre d'escampette avec Mamy. Périple foireux à travers les routes de campagne. Diana et l'odeur entêtante de sa peau. Une belle rencontre amoureuse. de celle qu'on attendait plus.
Mamy retrouve son sourire, ses facéties de jeune écervelée, et entre deux absences, se drape dans les lambeaux de ses souvenirs. Ils ne sont plus très loin de la maison où son père jouait du piano. Celle qui se trouve au bord de la falaise. Elle est heureuse.
« Trop tard arrive plus vite qu'on croit… » Avant d'aller embrasser la mer, quelques derniers conseils à l'adresse de la naïve Clémence, une dernière lueur de lucidité…
Que celles et ceux qui ont eu une Mamy et un Papy mesurent leur chance.
Ne m'oublie pas.
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Ne m'oublie pas - Alix Garin - Roman graphique - Éditions Le Lombard - Lu en avril 2022.

Dédié par l'autrice "à Grand-père et Mamycha"

Marie-Louise est âgée, elle ne peut plus rester chez elle, et c'est le départ pour la maison de retraite.
"Mamy ne reviendra plus".
Grand-père, lui, est déjà parti dans l'au delà.

Comme l'a chanté Jacques Brel dans sa superbe chanson "Les vieux", "celui des deux qui reste se retrouve en enfer".

Marie-Louise a la maladie d'Alzheimer.

Lors d'une visite à sa Mamy, Clémence se désole de la voir là, assise solitaire dans son fauteuil attendant on ne sait quoi et la tristesse l'envahit.

Elle décide une folie, mais une folie géniale, elle enlève sa Mamy et l'emmène dans un périple en voiture pour retrouver sa maison d'enfance en espérant qu'alors les souvenirs lui reviendront.

Tout ne se passe pas comme prévu évidemment.
Il y a des passages bien drôles, d'autres tristes et plein d'émotion. Elles vivent des péripéties incroyables. de temps à autre, Mamy se souvient, des bribes de souvenirs lui reviennent... puis s'en vont.
"J'ai la mémoire qui flanche,
j'me souviens plus très bien.."

Quand Clémence pense à ses souvenirs de petite filles chez sa Mamy, les dessins sont en gris, en dehors de ça, ils sont colorés dans des tons pastels. C'est très doux au regard.

L'émotion est au rendez-vous, elle vous prend aux tripes, cette petite Mamy là, a de la chance malgré tout d'avoir une petite-fille qui vient la voir, la console, et se préoccupe de son bien-être. Toutes les Mamy et tous Papy n'ont pas ce bonheur.

Sur la dernière page, deux beaux dessins en noir et blanc,
Mamy, grande avec Clémence petite à ses côtés et puis, Clémence grande avec Mamy toute ratatinée à ses côtés.
C'est magnifique.

Je remercie ma fille cadette pour ce beau cadeau que je garderai bien précieusement, et que j'emporterai un jour , le plus lointain possible, moi aussi dans une maison de retraite.

Bravo à Alix Gardin pour ce petit bijou.




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Alors qu'elle est en pleine révision pour le concours d'entrée à l'école nationale de théâtre, Clémence reçoit un SMS de sa maman la prévenant que sa grand-mère, Marie-Louise, atteinte de la maladie d'Alzheimer, a encore fugué. Aussitôt, elle se rend à la maison de retraite où elle retrouve sa mère, Valérie. La directrice de la résidence est alors on ne peut plus claire concernant l'avenir de Mamy, qui en est à sa troisième fugue. Il faut prendre des mesures radicales pour éviter que cela ne se reproduise, à savoir un traitement chimique doux. Devant son incapacité à la prendre en charge toute seule, Valérie, médecin généraliste, n'a d'autre choix que de signer les papiers. Mère et fille se rendent alors dans la maison de Marie-Louise récupérer quelques vêtements. Aussitôt, les souvenirs affluent et Clémence se rappelle les joyeux moments qu'elle a passés ici avec ses grands-parents. Comme sa grand-mère a 20 ans dans sa tête et pense habiter chez ses parents, Clémence a une idée plutôt folle : la kidnapper et entreprendre avec elle un long voyage vers la maison de ses arrière grands-parents, avec l'infime espoir de lui faire retrouver la mémoire...

♫♫ J'ai la mémoire qui flanche, j'me souviens plus très bien ♫♫ pourrait fredonner Marie-Louise, atteinte d'Alzheimer. D'ailleurs, c'est ce qu'elle fera dans la voiture en compagnie de sa petite-fille, Clémence. Dès les premières pages, l'on sait que tout se termine hélas comme Clémence l'aurait voulu. En effet, l'on assiste, en alternance, à son interrogatoire au poste de police. Si l'idée de kidnapper sa grand-mère était plutôt saugrenue, pour ne pas dire bête, Clémence n'en a que faire. Car, ce voyage en compagnie de sa Mamy, aura été riche en émotions, en larmes, en souvenirs et en péripéties. Un voyage inoubliable au cours duquel elle apprendra sur sa grand-mère, sur sa mère mais aussi sur elle-même. Alix Garin nous offre un album vraiment touchant, sincère (l'auteure ayant puisé dans son histoire personnelle), tragique mais aussi ponctué de touches d'humour sur les relations inter-générationnelles et la maladie d'Alzheimer (aussi bien les épreuves que doit surmonter l'entourage ainsi que la personne atteinte). Graphiquement, Alix Garin nous offre des planches poétiques au trait fin et aux couleurs très douces.
Un album sensible et réussi pour cette jeune auteure prometteuse...
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Séquence bd qui fout les poils . Sur le même thème que » le plongeon », les vieux humains en déshérence, autres Zimmer et Alzheimer, cette bd m'a sévèrement étrillé les émotions, par plusieurs vagues scélérates. Pochée comme un oeuf, je fus.

On sait comme il est difficile de préjuger des émotions d'autrui, mais sur ce coup-là , il me semble particulièrement difficile de ne pas décongeler de suite, décryogéniser sur place, en lâchant tous les oui mais.

Rentrer immédiatement en vibration avec la jeune autrice , Alix Garin, et se faire piéger avec l'insistance d'une tapette à souris, c'est ce qui m'est arrivé alors que je partais avec la bienveillance décontractée voire condescendante pour une oeuvre de jeunette (quoique Prix jeunes talents Quai des bulles 2017, tiens pour une fois que je suis d'accord avec un Prix).


Pour éviter la camisole chimique à Mamycha qui fugue comme un épagneul breton sur un gros coup, Clémence sa petite-fille élevée en grande partie par ses grands-parents, va concrétiser une révolte qui la taraude, en route vers la maison d'enfance de Mamycha. Sur ce scénario ô combien casse-binette, Alix Garin slalome entre tous les écueils , poussée par une énorme sincérité qui met en valeur plusieurs sujets brûlants.


Sacré tour de force de concentrer autant d'états d'âme , avec un panel XXL, enrobé d'un petit humour picotant qu'on n'espérait pas sur des sujets émotionnellement hardcore : culpabilité d'abandonner un proche, doutes sur sa personnalité pour Clémence, perte d'identité pour sa grand-mère, j'en passe.

Et le coup du faon , aaah , pour achever le lecteur qui a déjà bien morflé, fameux pain final dans les côtes, sacrée Alix, tu nous as bien eus, allez, pitié.

Où il nous est confirmé au passage que les meilleures intentions ont parfois des lendemains difficiles. Mais Clémence avait déjà cru remarquer que la vie, c'est pas toujours du Walt Disney.

Autant j'avais trouvé l' »évasion » d'Irène et ses potes (dans « le plongeon ») artificielle, peu convaincante et faussement impertinente, la sortie de piste pour Clémence et sa grand-mère m'a paru profondément juste, intensément satisfaisante , comme une violente impulsion que la raison ne contient plus et qui décapsule un trop plein explosif. En évitant la niaiserie, par talent.

Quelques scènes de Clémence petite avec sa mère nous cuisent également sur le grill de l'enfance universelle ; les souvenirs poignants de la maison de ses grands-parents, des petits gestes merveilleux passés à la forge de l'amour , l'estomac est formel : c'est légèrement bouleversant.

Géniale , forte et juste, puissante Bd. Superlative Alix tape un grand coup, bravo!
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"Ne m'oublie pas", c'est le cri du coeur de Clémence à Marie-Louise, sa grand-mère atteinte de la maladie d'Alzheimer, qui perd de plus en plus la tête et la mémoire. La mère de Clémence étant médecin généraliste ne comptant pas ses heures au cabinet, c'est presque Marie-Louise qui l'a élevée. Une relation toute particulière s'est installée entre elles, que la maladie vient quelque peu détériorer.

Alors que Marie-Louise vient de fuguer pour la troisième fois de la maison de retraite, l'équipe médicale suggère de renforcer son traitement, sans quoi elle finira par se mettre réellement en danger. Lorsque Clémence rend visite à sa grand-mère, elle la trouve groggy. Elle ne supporte plus de la voir ainsi.

Parce que Marie-Louise pense avoir encore 20 ans, elle parle sans cesse de sa maison d'enfance et de ses parents qu'elle imagine en train de s'inquiéter pour elle de son absence trop longue. Et si retrouver cette maison dont elle parle tant lui faisait du bien finalement ? Retrouver quelques repères et la mer ? Clémence va tenter le coup : elle enlève sa grand-mère et elles fuient toutes les deux vers une destination peut-être hypothétique mais qu'ont-elles à perdre ?

Ce voyage, c'est « une fuite, une quête, un égarement, l'occasion de se retrouver ».

Je ne m'étalerai pas sur les graphismes, plutôt minimalistes, très aérés et peu détaillés, pas désagréables pour autant et qui disent l'essentiel, parce que l'accent est mis sur les émotions, que la relation entre les deux femmes est au coeur de l'histoire et qu'elles nous touchent plus que de raison.

Je suis passée d'une émotion à une autre sans crier gare, j'ai d'ailleurs fermé ce livre la larme à l'oeil. Clémence et Marie-Louise nous emmènent bien plus loin que leur destination finale. Nous sommes dans un road trip émotionnel. Finalement, peu importe qu'elles retrouvent cette fameuse maison côtière, elles se retrouvent bien avant, que ce soit dans leurs rapports d'antan ou chacune individuellement.

À travers le voyage de ces deux femmes, Alix Garin évoque d'autres thèmes que la maladie dégénérative et les relations familiales. Il y est question également de remise en cause quant à ses rapports aux autres, de faire fi du regard et des opinions des autres, d'accepter le départ prochain d'un être qu'on affectionne, de profiter des derniers instants qu'il nous offre et de comprendre que le "trop tard" arrive toujours trop vite.

C'est beau. C'est émouvant. C'est drôle parfois, c'est triste également. C'est pétillant, autant que bouleversant.
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Ne m'oublie pas, c'est l'histoire de Marie-Louise, une grand-mère atteinte de la maladie d'Alzheimer qui a tendance à s'échapper et se met ainsi en danger. C'est aussi l'histoire de Clémence, sa petite fille, qui refuse de voir sa grand-mère pourrir dans un EPHAD sans rien faire. Témoin d'une histoire de vie terriblement touchante, cette bande dessinée aux couleurs sublimes, aux parfums de coucher de soleil, vous fera rire et pleurer comme si vous apparteniez à cette famille qui s'est perdue au fil du temps. À la fois belle, poignante et terriblement réaliste, vous passerez évidemment un superbe moment de lecture dans une bulle pleine de nostalgie et de douceur réconfortante. Préparez les mouchoirs.
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"Trop tard" arrive plus vite qu'on le croit.
Cette petite phrase pleine de sagesse, c'est Mamycha, la grand-mère de Clémence qui la prononce, dans un moment lumineux, un moment où elle a "toute sa tête". Car Mamycha a la maladie d Alzheimer. Il a fallu la placer en ehpad. Et si elle n'a plus sa tête, elle a encore assez de jambes pour s'en échapper. D'autres velléités de fugues? Comptons sur un petit cocktail médicamenteux pour lui ôter l'envie de prendre la poudre d'escampette. 

Pour Clémence, Mamycha incarne la tendresse et la douceur de l'enfance. Comme sa mère travaillait beaucoup et qu'elle n'avait pas de père, Clémence a grandi aux côtés de ses grand-parents. Ces deux-là lui ont tant donné et tant appris. Alors voir sa Mamycha avachie sur une chaise, les yeux noyés de chagrin, cela fait naître chez Clémence une saine colère. Sans rien dire à personne, les deux complices montent alors en voiture et partent en direction de la France, retrouver la maison d'enfance de Mamycha. Mais il y a loin, de la Belgique aux côtes françaises, et bien des péripéties les attendent sur le chemin.

Je lis peu de romans graphiques et c'est le titre, l'histoire, qui m'ont donné l'envie de lire celui-ci. Alzheimer, la maladie de l'oubli, celle qui vous vole votre vie et vous emmène au loin, vers un inconnu hérissé de peurs et d'angoisses. Parfois, comme un coquillage que la mer redéposerait sur le sable, elle vous octroie une pause et vous ramène à vous. Oh, cela ne dure pas. C'est un petit miracle, quelque chose de merveilleux en même temps que douloureux puisque toute conscience est soudain rendue. Alix Garin, s'appuyant très certainement sur son vécu, nous dépeint cette perte de soi avec un grand réalisme, nous livrant les moments de désespoir comme les moments cocasses. Car oui, l 'on peut passer de l'envie de pleurer à un franc éclat de rire au côté de ces malades qui ont une spontanéité et une fantaisie incroyables.
Pleins d'humour, les dessins d'Alix Garin suivent ce constant balancement, entre tragique et comique. Et puis il y a ce moment qui brise tout, celui où pour la première fois, Mamycha lui  lance un "qui êtes vous?"
Alix Garin fait de ce moment cruel un dessin d' une grande force sur lequel je me suis longuement arrêtée. le dessin criait et résonnait de tous ces  "qui êtes vous?" écrits en grosses lettres sur fond rouge. Il était simple et d'une parfaite justesse, exprimant mieux que mille mots la douleur que l'on ressent, celle du reniement. Vous en sortez perdu et brisé, ce "Qui êtes-vous?" ayant la force destructrice d'une grenade à fragmentation.

Alors je suis revenue à la première page et j' ai repris ma lecture en m'attachant davantage aux dessins. Je ne courais plus après l'histoire et j'ai lu très lentement, m'imprégnant de chaque détail. D'abord les couleurs, très douces, des roses, des mauves et du bleu myosotis, les couleurs que les vieilles dames aiment tant. 
Ensuite le trait, simple, épuré, allant à l'essentiel mais sans jamais négliger les expressions, donnant aux visages une vie telle qu'on les imaginerait surgir du papier et s'animer. Et puis ces planches en gris pour dire la nostalgie et les regrets.
Tout ici est pensé et dessiné avec soin et délicatesse, un peu comme on prépare un cadeau. Et ce roman graphique en est un, à n'en pas douter, puisqu'il est dédicacé à son grand-père et à sa Mamycha. 

Mais au-delà de cette échappée belle,  "Ne m'oublie pas" est aussi une histoire de filiation, de cette relation mère-fille  laissée à l'abandon, la parole gelée, le geste devenu rare, et qui pourtant ne demande qu'à revivre avant qu'il ne soit "trop tard".
Et puis, tout en pudeur, l'évocation de la découverte par Clémence de son homosexualité, la souffrance de se sentir rejetée par les filles parce qu'on a l'air d'un garçon et rejetée par les garçons parce qu'on est une fille. Les femmes qui nous entourent nous aident à nous construire. Elles montrent les chemins, ceux qu'il faut prendre et ceux qu'il faut fuir. Elles voudraient tellement que l'on souffre moins qu'elles. Y parviennent-elles? En partant, elles laissent, malgré tout, une empreinte d'amour.

Tendre, drôle, émouvant, "Ne m'oublie pas" est un livre qui appelle à le relire, petit grain de lumière contre les jours sombres. Alors j'y reviendrai et j'irai butiner ces myosotis que ma mère appelait si joliment "fleurs de Marie". 




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