Les trésors de la mer Rouge

Un livre énigmatique écrit par un Gary vieillissant qui cherche à retrouver les émotions de sa jeunesse aventureuse.
Les trésors, comme il l'annonce lui-même, ne sont ni des coffres de pirates ni l'or des trafiquants qui grouillent depuis toujours dans ces eaux infestées de requins.Ce sont des trésors immatériels, prêts à disparaitre comme des mirages, ou comme une caravane dans une tempête de sable. Gary est venu chercher ce qui reste de "l'Empire français", après la perte de ses Colonies. Un passé qui disparait des mémoires, mais qui a laissé des traces profondes en Afrique du Nord, en Afrique continentale et au Moyen-Orient.
Aucun exotisme de pacotille dans ces courts chapitres, on pense aux descriptions d'Albert Londres et ses pêcheurs de perles, aux trafics évoqués dans "Coke en stock".
Un témoignage sur la décolonisation, qui renvoie la population à sa misère et à sa détresse après avoir exploité les ressources locales.

Quatrième couverture : « du Djibouti au Yémen, Romain Gary sillonne les terres brulées et hostiles pour en rapporter un témoignage d'une rare force. »
Un livre de Romain Gary qui me plaisait beaucoup au début, on découvre les pays de la mer Rouge, quelques anecdotes savoureuses sur ces pays à la nature hostile. Mais j'ai moins accroché au côté enquête pendant la France colonialiste. J'ai préféré le côté nature et humain qui est superbement rendue avec la belle plume de Romain Gary. Malheureusement, le côté reportage politique m'a perdu…

Dans ce court récit que je ne connaissais pas, Romain Gary va à l'aventure en "collectionneur d'âmes", comme il l'avait été surnommé, guidé d'étapes en étapes par des rencontres avec les gardiens des anciennes colonies françaises, comme des lumières d'un astre mort. Les terres sont désolées, brûlées, dangereuses mais recèlent des trésors humains, les victimes de la dureté, les victimes de leur propre dévouement... Ces militaires ne restent pas par intérêt, il n'y en a plus, mais persuadés qu'ils sont utiles aux autres là où ils sont.

C'est assez dépaysant, par anachronisme, de lire tout cela. Nous sommes après soixante-huit, des portraits de Mao fleurissent même au Yemen, et pour Romain Gary, ces hommes, ces femmes représentent un monde disparu, c'est presque une dystopie / utopie ; un ex-OAS qui est là feint même d'ignorer que l'Algérie n'est plus française. Les descriptions sont belles, l'humanisme de Gary triomphe, mais je ne sais pourquoi je suis restée un peu extérieure au texte...
Lien : http://aufildesimages.canalb..

Des flashs des impressions de voyage de Romain Gary dans la région d'Aden, pas de souffle romanesque donc, mais on sent l'appel de l'aventure qui a perdu tant d'occidentaux dans ce triangle de désert. Et on découvre une nouvelle facette de la vie prodigieuse de l'auteur.
Pour avoir effleuré les paysages décrits, on retrouve dans ce petit livre la brûlure du soleil, la dureté de la vie, et la luxuriance des fonds marins.

"Ce ne sont ni les trésors engloutis qui dorment au sein des grands fonds sous-marins que je suis allé chercher pour vous sur ces eaux que l'art des conteurs arabes a peuplées de fabuleuses histoires. [...] Les trésors que j'ai ramenés de là-bas son immatériels et, lorsque la plume ne s'en saisit pas, ils disparaissent à jamais. le romancier que je suis, amoureux de ces diamants éphémères, parfois très purs, parfois noirs, mais toujours uniques et bouleversants dans leur mystérieux éclat, est parti à leur recherche vers cette mine de richesse et de pauvreté inépuisable que l'on appelait jadis l'âme humaine [...]"

Tout est dit dans cette très belle citation liminaire, servant en quelque sorte de préface à la série d'articles qui suivront, très centrés sur l'humain, au-delà des paysages traversés. Ceux-ci sont également évoqués, dans toute leur dureté le plus souvent, mais paraissent souvent en arrière-plan ou en tant que comparaison, comme ces diamants et ces âmes. Par ces "trésors", Gary témoigne d'une époque d'entre-deux, celle de la fin du colonialisme français : j'ai souvent eu l'impression de manquer de référence pour comprendre pleinement ces récits de voyage et ai pris le parti de me laisser bercer par la si belle écriture de l'auteur. Je le relirai certainement dans un autre texte : grâce à ce petit livre, j'ai enfin découvert cet écrivain et ne compte pas en rester là.

Une partie du journal de voyage de Gary, ici sur les 2 bords de la mer Rouge, côté Somalie et côté Yemen. Gary se cherche et se perd à la recherche d'un regard ...

Un voyage, là où vous n'iriez jamais. Un Romain gary toujours aussi curieux, la plume pourtant moins expressive, je trouve, mais c'est court, et prévue pour un autre format que le roman. Il faut voir ça comme un petit documentaire au coté d'un auteur que l'on aime.

A l'abordage !
Qui attendrait une épique histoire de pirates attaquant des navires marchands risquerait d'être bien déçu. Romain Gary, immensément connu pour La promesse de l'aube, se livre à un autre genre, tout aussi intime mais bien moins romancé. Dans Les trésors de la mer rouge, il partage un regard précieux sur son expérience lors de péripéties dans différentes contrées d'Afrique. Parti à la recherche de personnes qu'il a à coeur de retrouver, il y vit toutes sortes d'aventures et en narre aussi bien les merveilles que les dangers, provenant de l'homme ou de la nature. Sa notoriété et ses relations lui permettent de sortir des sentiers battus et c'est presque dans la peau d'un reporter de terrain qu'il s'applique à en restituer les moindres détails, qui prennent vie comme une carte postale animée.
Au final, et quelques décennies plus tard, la narration demeure intéressante mais parfois difficile d'accès. Comme si le trésor de l'auteur ne pouvait être autre que seulement le sien. Son récit est une richesse plus personnelle que collective : il a voulu nous partager son rendez-vous en terre inconnue, mais les grands frissons, c'est surtout lui, qui les a obtenus.

Dans ses récits, l'auteur dresse un immense tableau de l'Arabie à travers ses habitants, les guerres qui y ont lieu et ses paysages. L'écriture est magnifique et envoûtante, et pourtant frappée d'une vérité très cruelle.