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EAN : 9782070772469
182 pages
Gallimard (30/09/2004)
3.53/5   49 notes
Résumé :
L'O.N.U. est en émoi. Un fantôme portant une colombe hante les couloirs de l'Organisation à New York. On découvre qu'il s'agit d'un jeune cow-boy du Texas, venu faire des études supérieures, au grand dam de son père. Dévoué avec passion à l'idéal des Nations Unies, le jeune homme loge avec sa colombe dans un réduit secret du building, et observe cette conscience du monde. Il s'aperçoit vite que l'O.N.U. est une machine qu'aucun moteur n'entraîne et, déçu, il conçoit... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Diplomate un jour, diplomate toujours. En 1946 le capitaine Gary intègre le ministère des Affaires étrangères qu'il quitte en 1961 après avoir été entre autres en poste à New-York de 1951 à 1954 à la Mission permanente de la France auprès des Nations unies. Droit de réserve oblige, il publie en 1958 L'homme à la colombe sous le nom de Fosco Sinibaldi.
A quoi servent les Nations unies? C'est la question lancinante que se pose Johnnie un cow-boy texan qui s'est battu en Corée au nom de la Charte et qui déchante un peu plus chaque jour, alors pourquoi ne pas monter une arnaque burlesque qui le rendrait riche...mais c'était oublier que le "public" est roi et décideur, ce qui devait être un canular tourne au mystique.
Romain Gary dresse un tableau fort désabusé et désespérant certes sur l'institution des Nations unies mais aussi sur les rouages politiques et sur les masses qui se laissent berner par tout et son contraire.
Après un début de lecture jouissif, il était difficile à l'auteur de sortir Johnnie de l'impasse, la fin m'a donc semblé tirée par les cheveux mais Sinibaldi c'est déjà du Gary et puis lu 60 ans après sa parution ce texte reste d'une actualité démoniaque!
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Romain Gary lance ici sa carrière littéraire. Occupant encore en 1958 des fonctions diplomatiques, il signe prudemment, déjà, d'un pseudonyme, celui de Fosco Sinibaldi.

C'est que le propos est de dénoncer la complète inefficacité de l'O.N.U., plombée par son objectif premier de long terme, qui serait de survivre elle-même en temps qu'institution à toutes les crises qu'elle est censée contribuer à résoudre, et donc de jouer la carte de l'immobilisme. Il est d'ailleurs bien difficile de sortir de ce carcan dès lors que les américains et les russes sont présentés comme s'entendant pour ne jamais être d'accord et empêcher ainsi que les choses bougent afin de préserver leur leadership, leurs zones d'influences respectives, et galvaniser leurs opinions publiques.

Pour dénoncer cette situation, Romain Gary montre déjà dans ce roman aux allures de conte philosophique le sens de l'absurde et du paradoxe dont il fera grand usage par la suite.
Son héros Johnnie est un jeune cow-boy texan venu faire des études à New-York. Adhérant à l'idéal en principe défendu par les Nations Unies, il trouve le moyen de s'installer clandestinement, avec sa colombe, dans une petite pièce cachée au coeur du bâtiment siège de l'O.N.U. Mais il se rend vite compte de la paralysie complète de l'institution. Visité puis entouré par son amie Frankie et quelques fidèles complices, il décide de sortir de l'ombre et d'orchestrer une fausse grève de la faim pour décrédibiliser l'instance internationale.
Il devient alors un véritable héros aux yeux des peuples du monde, des dons d'argent affluent à son profit...mais quand il décide de mettre fin à la plaisanterie en dévoilant sa supercherie, personne ne l'écoute, il est devenu définitivement un objet d'adoration. C'est le début d'une descente aux enfers pour cet authentique adepte des beaux idéaux...

Bien sûr, ce n'est pas encore du très grand Gary. Il se cherche un peu, retient probablement les coups, se répète et nous explique parfois trop son idée force, comme s'il craignait qu'on ne l'ait pas compris immédiatement, ce qui alourdit le propos et en réduit l'impact à mon avis.

Pourtant j'ai trouvé ce roman intéressant en ce qu'on y sent déjà la patte et la pâte stylistiques du futur écrivain de métier Romain Gary, et surtout parce que son analyse et sa clairvoyance des relations internationales et des rouages actionnant la diplomatie sont remarquables...d'autant plus que ces "principes" sont clairement toujours à l'oeuvre aujourd'hui dans cette institution, aussi vénérable que frileuse et trop souvent démunie parce que trop facile à bloquer dans ses résolutions par l'emploi facile du droit de véto par les grandes puissances.

Une vision qui sent l'humanisme, la défense de l'esprit d'indépendance et de grandeur de la France, aux accents pro-gaullistes du bonhomme (à un moment il fait dire que la France a manqué une occasion de s'impliquer), mais aussi derrière l'humour un regard déjà un peu désabusé et pessimiste sur la marche du monde.
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Ce qui devrait être le haut-lieu de la conscience mondiale, le siège des Nations Unies, est investi par un illuminé qui, à grand renfort de symboles foulés au pied, offre prétexte à Romain Gary pour crier son désespoir. Celui de voir son idéal d'enjoliver le monde sacrifié sur l'autel d'un matérialisme forcené.

Diplomate en poste auprès des Nations Unies au moment où il écrit cette satire féroce, il est à la fois bien placé pour déplorer ce que deviennent les grandes et belles idées qu'il pouvait nourrir en son for intérieur quant à cette haute instance humanitaire, et mal placé pour le dénoncer. Il publie donc son ouvrage sous ce pseudonyme de Folco Sinibaldi et se taille ainsi sur mesure un grand défouloir duquel suinte toute l'aigreur du désenchantement.

Avec ce monument d'ironie il est question de la douleur d'appartenir à une espèce qui cultive son autodestruction. Romain Gary, sans doute désespéré du "pourrissement d'un grand rêve humain", applique tout son talent à le tourner en ridicule. Les Nations Unies, d'où devrait jaillir "l'étincelle sacrée de la conscience mondiale", ne sont donc rien qu'une machine à dissoudre dans l'abstraction ce qu'elles ne peuvent maîtriser. Tel en sera symboliquement du derrière de ce pauvre cow boy qui ne pourra désormais plus chevaucher son fier étalon. C'était lui l'homme à la colombe. Il l'avait bien cherché à cultiver bêtement un idéal d'intelligence collective chez une espèce gangrenée par l'individualisme.

C'est à la fois savoureux, fort talentueux, et malgré tout l'oeuvre d'un cœur meurtri.
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« Par une belle journée de septembre 195., vers les onze heures du matin, la grande cage de verre du gratte-ciel de l'Organisation des Nations unies étincelait dans le soleil d'automne, s'acquittant de sa mission pacifique, celle d'un grand centre d'attraction touristique américain. »

Le ton est vite donné. Dès l'incipit, Gary empoigne sa fiole d'acide fluorhydrique (celui qui dissout le verre) et la fracasse contre cette « cage » où il s'est si souvent laissé enfermer de 1951 à 1954, pendant sa contribution à la Mission permanente de la France auprès des Nations unies.

Gary, amoureux des paradoxes, nous présente celui-ci : l'humanité est représentée par une gigantesque machinerie, comparée à Disneyland. On y trouve d'ailleurs des personnages de cartoons, donc complètement caricaturaux. Dans l'élan d'un rire corrosif, on découvre des entrailles qui n'ont rien d'organique, de grands espaces théâtraux où des pantins s'agitent et brassent autant d'air que les immenses circuits de ventilation. Les ficelles sont grosses, mais c'est bidonnant.

A noter que les personnages conservent tout de même une part d'humanité attachante, du secrétaire général dépressif jusqu'aux sympathiques gangsters d'al Capone opérant en sous-main dans cette arnaque ambulante. Et que dire de ce chef indien et de son curieux calumet de la paix qui ne se fume pas (je vous laisse découvrir…). Mais ces « fantômes dans la machine » ne font que mettre en relief le chagrin d'amour entre Gary l'humaniste et l'ONU désormais honnie (ou ONI ? comme dans Ouverture sur le Néant et l'Inanité ?).

En témoigne par-dessus tout ce héros provocateur qui perd le contrôle de sa plaisanterie cynique, au risque de finir absorbé par l'idole même qu'il tentait de détruire. Une trajectoire qui renvoie à l'image publique de Romain Gary : Gary le mondain, Gary le séducteur. Autant de personnages artificiels, souvent façonnés par le regard des autres, et dans lesquels l'intéressé ne se reconnaissait pas. Alors il en rit jaune et se créé des identités alternatives, peut-être pour redevenir lui-même (Ajar), ou au contraire pour cloisonner les Gary indésirables (ce clown de Fosco Sinibaldi, auteur du présent roman ?). Ne pas oublier aussi qu'il était encore employé par le ministère des affaires étrangères en 1958. Il aurait donc été mal vu qu'il fasse paraître ce roman sous son « vrai » nom. Hé oui, parfois la vérité ne se trouve pas dans de grandes envolées idéalistes.
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D'abord publié en 1958 sous le pseudonyme Fosco Sinibaldi, "L'homme à la colombe est réédité en version définitive par Gallimard en 1984.

Panique à l'ONU. Une étrange fantôme terrorise les employées qui font des heures sup. le soir. Cet étrange fantôme n'est autre que Johnie, un jeune homme, ex cow-boy du Texas, venu faire des études supérieures dans l'Est Américain, à qui son père, magnat du pétrole, a coupé les vivres...
La passion de Johnie, outre sa petite amie, Frankie, une solide cow-girl du Texas qu'il a faite venir avec lui, c'est le concept même de l'ONU qu'il porte à la hauteur d'un idéal.
Très vite, Johnie se rend compte que l'ONU est un gros moteur qui demarre au quart de tour, mais qui n'entraîne rien... un "machin", comme dirait le grand Charles...

Un ouvrage déjà, en 1958, cynique et décalé, qui en annonce bien d'autres... et quelle hauteur de vue quand on sait les difficultés de fonctionnement actuel de l'ONU. Romain Gary visionnaire dans cet "Homme à la colombe"...
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Citations et extraits (16) Voir plus Ajouter une citation
Nul n'ignore en effet qu'il existe entre les Etats-Unis et l'U.R.S.S. un gentlemen's agreement qui permet à ces deux grandes puissances de ne jamais être d'accord sur rien et de ne jamais adopter le même point de vue sur les affaires du monde, ceci afin de ne pas donner à leurs opinions publiques respectives l'impression d'un "nouveau Munich" et de ne pas créer un état d'affolement et d'insécurité dans leurs populations ni parmi leurs divers alliés et satellites.
Ceci exige naturellement des deux partenaires des contacts étroits et beaucoup de souplesse dans la manoeuvre.
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Ce que je veux dire c’est que, pour les Nations Unies, il n’est pas indispensable de résoudre les problèmes. Naturellement, il faut essayer. Mais il s’agit pour nous moins de résoudre les problèmes que de durer plus longtemps que ceux-ci. Notre but suprême, c’est la survie. Si, sans résoudre de problèmes, nous arrivons tout simplement à leur survivre, au bout de cinquante ans on commencera à dire que les Nations Unies ont accompli de grandes choses. Si nous demeurons là, solides au poste, malgré les guerres, les famines, les terreurs policières, et les injustices sociales, tout le monde sera convaincu de notre puissance.
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Les larmes humaines apparaissaient fréquemment certes dans les travaux de l’Organisation, mais uniquement comme une figure de style, un point de référence ou un effet oratoire et, à part quelques experts et chargés de mission, aucun des hauts fonctionnaires et des délégués n’en avait vu personnellement.
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Notre but suprême, c'est la survie. Si, sans résoudre de problèmes, nous arrivons tout simplement à leur survivre, au bout de cinquante ans on commencera à dire que les Nations Unies ont accompli de grandes choses. Si nous demeurons là, solides au poste, malgré les guerres, les famines, les terreurs policières, et les injustices sociales, tout le monde sera convaincu de notre puissance. Si au contraire nous usons nos forces et notre prestige à nous mesurer avec ces problèmes, nous n'arriverons qu'à donner au monde un exemple d'impuissance et de stérilité. Les Nations Unies doivent être une très grande dame. Cela demande beaucoup de dignité, beaucoup d'éloignement et une certaine façon de traiter le monde de très haut. Nous sommes très exactement ce qu'on appelle une force spirituelle. Il serait absurde de la gaspiller à vouloir résoudre les problèmes pratiques et immédiats, des problèmes de rencontre que nous croisons sur notre chemin.
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... il s'agit pour nous moins de résoudre les problèmes que de durer plus longtemps que ceux-ci. Notre but suprême, c'est la survie. Si, sans résoudre les problèmes, nous arrivons à leur survivre, au bout de cinquante ans on commencera à dire que les nations Unies ont accompli de grandes choses.
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Vidéo de Romain Gary
"Un monument ! Une biographie indispensable pour (re) découvrir Romain Gary, cet auteur incroyable ! " - Gérard Collard.
Dans le Jongleur, Agata Tuszyska peint un portrait unique de Romain Gary, unique auteur à avoir reçu deux fois le Prix Goncourt (pour Les Racines du Ciel et La Vie devant soi), diplomate, scénariste, pilote de guerre, voyageur; et montre comment son personnage va au-delà des limites de la pirouette artistique et des responsabilités humaines.
À retrouver en librairie et sur lagriffenoire.com https://lagriffenoire.com/le-jongleur.html
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