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Critique de meeva


Eh ! Toi ! Tu viens faire pseudo-pseudo avec moi…

- Oh, mon Dieu ! Crée moi… gémit Adam.
- Crées-toi toi-même, répondit Dieu.
Et Dieu créa la femme.
Et Adam se créa des tas d'emmerdements…



En 1937, Kacew décide de créer le Roman de sa vie.
Il extrait le vin des morts mais il a soif de reconnaissance, son talent restant dans l'ombre.
Il brûle de devenir Romain Gary de par son éducation européenne : Adieu Gary Cooper.
Monté tout en haut aux racines du ciel, il se fait à l'aube une promesse : la nuit sera calme.
En attendant, il est entré dans la danse de Gengis Cohn et tourne un peu en rond, il fait des noeuds, s'étouffe et s'éteint.
Mais il reste des braises. Alors, enchanteur, à l'occasion d'un gros câlin, il crée Emile Ajar.
Le feu reprend quelquefois dans cette nuit calme, au clair de femme, mais au-delà de cette limite, son ticket n'est plus valable, alors qu'Ajar, lui, a la vie devant soi.
C'est alors qu'il décide de faire pseudo-pseudo avec Paul-Alex Pavlowitch, couverture nécessaire au risque d'étouffer les braises.



Paul-Alex Pavlowitch fait dans ce livre le récit de la genèse d'Emile Ajar.
Schizophrène mâtiné de paranoïaque, Paul-Alex se trouve dans l'obligation d'écrire par réalisme et refus de « bêlant-lyrisme ».
Pour cette raison, il se fait soigner par différents psy qui ont pour mission de le soulager du poids du monde.

« J'ai failli pisser de joie. Je pisse toujours hors de propos. Je rêve de soulagement. »


Pavlowitch a donc toutes les raisons du monde de ne pas vouloir se faire repérer, dictatures, génocides, guerres… et il se cache derrière Emile Ajar.
Il parle souvent de Gary, « tonton Macoute », personnage cynique qui cache une fausse paternité. La fausse paternité concerne plus Ajar que Pavlowitch, mais nous ne sommes pas censé le savoir et en plus c'est un mensonge.

L'occasion dans ce livre de démentir toute forme de canular au sujet de l'écriture de « Gros câlin » et de « La vie devant soi ».
C'est bien lui, Pavlowitch, qui a écrit ces livres, n'en déplaise à tonton Macoute ou au psychiatre qui cherchent à le piéger pour qu'il continue à écrire.

« le directeur littéraire a été très gentil avec moi. Il m'a simplement dit une fois que « ça n'a pas empêché Hölderlin de faire une immense oeuvre poétique ». Je ne sais pas ce qu'il entendait par « ça ». Tout ce que je sais c'est qu'Hölderlin est resté fou près de trente ans et c'est beaucoup trop cher, comme prix littéraire. Aucune oeuvre poétique ne vaut ça. »



Roman très subtil lorsque l'on sait que Gary et Ajar ne font qu'un.
L'écriture nous emmène vraiment dans la folie supposée de l'auteur, d'un bout à l'autre.
Réflexion, au passage, sur la responsabilité, la culpabilité de l'homme en tant que représentant de l'espèce humaine, thème qui aura suivi Gary toute sa vie littéraire, donc toute sa vie.

On retrouve ici tout le sens de la formule de Gary, mais bien sûr, il est sûrement plus facile de le voir une fois que l'on sait qu'il s'agit bien de Gary.

« - Allons, allons. Les fous, oui. Il y a surtout des millions de gens qui gardent le silence parce qu'ils ont toute leur raison et ils savent que ce n'est pas la peine d'appeler au secours. Que c'est même dangereux, il y aurait des représailles. »

Et la folie de ce livre ressort bien plus quand on sait que Kacew s'était enfermé dans Gary, lui-même enfermant Ajar, mais secrètement.

« Il faut se lever tôt pour m'avoir. Malheureusement, le jour se lève tôt. »

Malheureusement, oui…

« Ceci est mon dernier livre. » conclut Pavlowitch-Ajar-Gary-Kacew.
Cet homme est-il digne de confiance ?





Un petit air, pour l'océan et parce qu'il repose l'esprit…

« Sittin in the morning sun,
I'll be sittin' when the evening come,
Watching the ships roll in,
And I'll watch 'em roll away again, yeah,
I'm sittin' on the dock of the bay,
Watching the tide roll away, ouh,
I'm just sittin' on the dock of the bay,
Wasting time.
[…]”

Extrait de “Sitting on the dock of the bay”, Ottis Redding :
https://www.youtube.com/watch?v=PyxLaHmOaYM
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