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EAN : 9782080296313
240 pages
Flammarion (10/05/2023)
3.96/5   62 notes
Résumé :
Les émotions ont mauvaise presse et souffrent depuis toujours d'un préjugé tenace. Les émotions, ce sont les « humeurs », ou encore les « passions » ? passivité de l'âme. Aujourd'hui encore, les hommes, bien souvent, ne doivent pas montrer leurs larmes, tandis que les femmes passent pour hystériques quand elles le font. Pourtant, ce sont nos émotions, ce que nous ressentons, qui nous rendent humains. À rebours du développement personnel, c'est un guide philosophique... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (10) Voir plus Ajouter une critique
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"Il m'a fallu beaucoup de temps pour comprendre qu'être émotive ne signifie pas être instable ou déséquilibrée : simplement être vivante, ouverte et vulnérable face à l'expérience du monde".

L'ouvrage d'Ilaria Gaspari Leçons de bonheur, exercices philosophiques pour bien conduire sa vie avait été une très belle découverte, et tout naturellement, j'ai eu envie de lire le Petit manuel philosophique à l'intention des grands émotifs. Mais s'agit-il ici d'un "traité des émotions", d'une "histoire des émotions" ? Difficile à dire.

Ilaria Gaspari s'interroge sur la place qu'occupent les émotions dans notre vie, sur notre manière de les exprimer. Philosophe de formation, l'autrice se propose d'analyser des émotions, positives ou négatives, telles la colère, l'envie, la jalousie, l'émerveillement, la gratitude. Sa méthode : un dialogue ininterrompu avec le lecteur avec lequel elle partage ses connaissances et son expérience personnelle. Nulle pédanterie, nulle suffisance lorsqu'elle évoque les philosophes et en particulier Descartes et Spinoza, nous parle des grands textes de l'Antiquité. On éprouve, au contraire, le sentiment de partager des connaissances, d'échanger, et au final d'avancer ensemble.... Ilaria Gaspari a une manière bien à elle de rendre les choses beaucoup plus claires....

J'ai beaucoup aimé cet ouvrage, et en particulier l'analyse de deux émotions : nostalgie et gratitude (celle de l'antipathie m'a bien amusée....).
Une bibliographie nous permet d'aller plus loin, nous ouvre d'autres portes, la perspective d'autres lectures. Sur babelio, une video permet de faire la connaissance d'Ilaria Gaspari et d'assister à un débat auquel elle a participé, il existe des podcasts sur France Inter qui donnent également la parole à l'autrice.

En ces temps où l'on nous assène vérités et contre-vérités à tout bout de champ, un essai qui pose des questions et nous amène à nous interroger - en douceur - sans nous diriger est le bienvenu.

Et vous, quelle place accordez-vous à vos émotions ?
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Le titre original du livre est « Vita segreta delle emozioni ». Vous aurez compris qu'on n'y parle pas de philosophie. Alors que le titre français met la notion de philosophie au premier plan et diminue l'importance des émotions. On y trouvera bien des réflexions philosophiques mais pas au premier plan. Ce qui pourra dérouter le lecteur français s'il s'attend vraiment à un manuel de philosophie, même petit. En fait, le parti pris de Ilaria Gaspari est de choisir une dizaine d'émotions et de les passer au crible de la pensée philosophique, en s'appuyant sur les textes des philosophes qui en ont parlé., mais également à travers la littérature - Dante est abondamment cité. de plus, pour chaque émotion abordée, elle se confie et n'hésite pas à se raconter de manière parfois assez intime. C'est par le prisme de ces deux approches que l'auteure nous parle du regret et du remords, de l'angoisse, de la compassion, de l'antipathie, de la colère… Et c'est ce qui donne un ton assez étrange, mais très agréable, au livre. A la fois sérieux, car les citations d'Aristote, de Platon, de Spinoza ou encore de Schopenhauer… prouvent l'application et la profondeur portée à ses réflexions, et d'autre part, les propos personnels qu'elle nous confie pourraient presque se confondre avec les confidences d'un journal intime. Il en ressort que son approche des émotions est très attrayante et que son livre se lit assez facilement. Il constitue une bonne approche de ce que sont les émotions, telles que l'on peut les ressentir dans la vie quotidienne. On ne trouvera pas ici de lecture psychologique ni d'approche psychiatrique, ou très peu. La pathologie apparaissant lorsque les émotions deviennent des symptômes invalidants pouvant constituer une prise en charge par des professionnels de santé. La notion de faute se manifeste régulièrement dans les confidences de l'auteure, sous l'influence de la tradition judéo-chrétienne. L'écriture de ce livre pouvant alors apparaître comme une catharsis, une confession libératrice.
Je ne peux que conseiller cet ouvrage pour tous ceux ou celles qui s'interrogent sur leurs émotions et en recherchent le sens.
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Pour écrire sur le bonheur, elle a besoin de solitude, créée lors d'une nuit passée à l'hôtel près de chez elle. Ilaria Gaspari raconte ses et des histoires liées à une émotion, éprouvée, étudiée, chantée par d'autres au cours des siècles - philosophes, poètes ou écrivains. Surtout, elle parle d'elle-même, se livre à coeur ouvert. Elle s'efforce d'être fidèle à ce qu'elle ressent, émotion pleine ou contenue, les deux contribuant à une meilleure connaissance de soi. Quelle générosité de tant vous exposer au cours d'un voyage émotionnel, qui traverse joies et tristesses, vous regarde dans les yeux avec connivence et affection.
Ce petit manuel est une belle et grande ode à la vie, à l'ouverture sur le monde et nos semblables. La philosophe loue l'émerveillement, une émotion vitale, synonyme de stupeur et d'étonnement, lorsqu'on touche le mystère d'être au monde, en laissant place à la surprise d'un moment inattendu, d'un sentiment d'euphorie, propices à l'aventure de l'inconnu, contrepoint à une vie où la technologie donne l'illusion de pouvoir nous prémunir des aléas de l'existence.
L'émotion nous renvoie à notre humanité. L'auteure, en narrant ses expériences nées des onze émotions de son manuel si précis dans l'expression de notre présence au monde, touche et convainc de laisser libre cours à nos émois, de les reconnaître, de les accepter.
En un mot comme en cent, il nous est dit que la vie est belle, lorsque nous résonnons à l'unisson de notre être profond, lorsque nous laissons sa place à l'optimisme. C'est dit dans de belles phrases, qui charment l'esprit et le coeur.
Cette lecture m'a procuré un apaisement insoupçonné à l'entame d'une lecture en ordre disparate, avec d'abord la colère, l'envie et la jalousie, suivies de l'émerveillement et du bonheur.
Je vais ajouter quelques citations, brèves, à la liste déjà longue d'extraits, alors que les critiques tardent à se manifester. Peut-être parce que les grands bonheurs sont muets.


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Rédiger une critique de ce « Petit manuel philosophique » est probablement une manière de prolonger mon plaisir de lecteur et donc de ne pas tourner la page trop vite.
Ilaria Gaspari est une jeune philosophe italienne, spécialiste de Spinoza, qui depuis très jeune manifeste un grand intérêt pour la psychologie et la psychanalyse. Elle se dit « encline à se faire des noeuds au cerveau. »
La jeune femme est atteinte d'amusie, cette anomalie neurologique qui l'empêche de percevoir la musique dans son ensemble. Elle s'est très tôt sentie à contretemps, «  à contretemps pour frapper dans les mains à l'école maternelle, à contretemps dans les chorales..., à contretemps pour jouer à la balle aux prisonniers, et le ballon (lui) arrivait droit sur la tête. »
Cette hypersensible nous propose un voyage philosophique à travers l'histoire des émotions, afin de nous familiariser avec elles, et comprendre en quoi elles nous rendent profondément humains.
Ilaria Gaspari nous entraîne avec elle sur le chemin du sensible, de la colère à l'émerveillement en passant par l'angoisse ou la jalousie.
Philosophie, mythologie, littérature, psychologie, se mêlent subtilement, d'Homère à Dante, d'Aristote à Pascal, de Spinoza à Kierkegaard.
Et à chaque chapitre, elle se dévoile d'abord à nous, illustrant son propos par sa propre histoire, avec humour, intelligence, sincérité. Elle met en place un dialogue intime qui nous aide à mieux cerner nos propres émotions.
Comme elle l'explique dans le magazine Lire de juillet-août 2022, « L'émotion implique une réaction à ce qui nous entoure, nous proposant une autre vision de notre vie. »
Oui, j'ai trouvé ce « Petit manuel » passionnant et touchant. Et comme l'écrit Ilaria Gaspari : « sans émerveillement, la philosophie n'existerait pas. »
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Ayant entendu à la radio une interview d'Ilaria Gaspari, je me suis précipitée pour acheter son essai. Il m'a fallu du temps et de la concentration pour déguster à petites bouchées ce livre qui commence en disant que la philosophie guérit les maux. Chaque chapitre est consacré à une émotion. Ilaria Gaspari n'hésite pas à puiser dans sa propre expérience pour alléger et illustrer en même temps ce qu'elle présente.
J'ai glané ici et là des idées. Certaines ont eu un écho tangible avec mes propres ressentis, d'autres ont été une véritable découverte.
Le postulat de départ est notre peur d'être comme les autres, de ressentir des émotions, les mêmes émotions. Or ressentir des émotions, c'est s'accepter, et en s'acceptant, on est capable de les affronter de face.
« Il est libérateur de dire : « J'ai peur du monde, et cette peur, je peux l'affronter ! » ».
Pour l'envie, elle cite Dante qui dit que l'envieux est affamé de vengeance et sa source inconfortable : le manque de confiance en soi.
Elle nous incite aussi « à sortir de la comptabilité des prix (et des punitions) pour mieux nous aimer, être aimés. »
La question « Suis-je heureux ? » doit s'être posée régulièrement. Si se poser cette question est douloureux, ce n'est pas grave. le bonheur était une vocation pour les Grecs. Se poser la question est une bonne chose avant de s'apercevoir que le bonheur est parti, en garder le souvenir pour les jours de disette, garder l'espoir ainsi. Savoir en profiter pleinement et non, par exemple, tout prendre en photos, être là sans être là.
Socrate souligne l'importance d'être fidèle à soi-même, ce qui suppose de se connaître, comprendre qui l'on est. Être heureux, c'est réussir à vivre sans se trahir, ce qui est difficile.
« Je ne dois pas m'efforcer de retenir quoi que ce soit, mais me contenter d'être, être toujours ».
Le dernier chapitre aborde la gratitude, qui efface les dettes entre celui qui donne et celui qui reçoit. Elle cite Adorno « La seule relation de la conscience au bonheur est la gratitude ». Quand on a été éduqué dans une arithmétique de devoirs, de dettes, on ne peut s'adonner au bonheur. Il y a l'orgueil, la jalousie qui l'empêchent de survenir. « Comprise pleinement, la gratitude nous pousse vers la personne qui nous a apporté son aide ou vers la personne que nous avons aidée, parce que la reconnaissance concerne la relation entre le bénéficiaire et le bénéficiant ».
Il y a toutes ces frustrations liées à l'attente d'un geste, d'une récompense. Ne plus rien attendre libère sûrement et le cadeau reçu sans raison a encore plus de saveur dans ce cas.
Je ne pense pas avoir profité de tous ses enseignements, mais il est sûr que ce livre m'a donné une forme d'apaisement réjouissant, voir qui sait ? Guérit quelques maux avec ses mots … Lire de la philosophie c'est faire un écho avec soi, mettre en résonnance ses idées avec celles des autres, en toute modestie. Cela demande un peu de courage d'expérimenter cet exercice rare, rechercher par exemple des définitions ou décrypter certaines citations de philosophes. C'est aussi un rendez-vous choisi avec un ou une amie qui donne à réfléchir.

Lien : http://objectif-livre.over-b..
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critiques presse (1)
LeMonde
11 août 2022
C’est un genre littéraire malcommode à situer. Pure fiction ? Non. Travail exclusivement conceptuel ? Non plus. Le mélange des deux est constant, au fil d’un récit intime dont l’autobiographie fournit la trame.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (80) Voir plus Ajouter une citation
Les mannequins étaient aussi grands que l’homme que j’avais aimé jusqu’à tout récemment. Quand j’étais sûre que personne ne me voyait, j’enlaçais la silhouette recouverte de toile de chanvre et j’avais l’impression de l’enlacer lui ; sauf que le mannequin n’avait pas de visage, juste une tête lisse, ovoïdale, une tête non humaine, une tête que je décrochais avec un certain plaisir inavoué, pour enfiler les vêtements plus facilement. Que se serait-il passé si la situation avait été différente, si le mannequin avait été vivant, s’il avait été ce garçon, si je lui avais dit ce que j’éprouvais, mes doutes, la peur mêlée d’envie de nous redonner une chance ? Je ne le sais pas, nous ne le saurons pas. Sans doute la vie se serait-elle frayé d’autres chemins – actes manqués, négligences, lassitudes – pour nous séparer de nouveau, parce que tel était notre destin – un destin humain et non pas un fait impersonnel, une histoire qui se tisse au fur et à mesure et qui trouve toujours un moyen pour se réaliser malgré les résistances. Ainsi va le monde, disons, et cela ne date pas d’hier, et nous sommes en droit de penser que cela durera toujours ; bien avant que l’ancien français invente le mot «  regrés  », du reste, Sapho racontait avec une insoutenable précision le vertige du regret d’amour : que n’aurait-elle pas donné pour revoir une seule fois sa chère Anactoria : « sa démarche ravissante / Et l’éclat éblouissant de son visage 8 … » Et quiconque a déjà aimé puis perdu l’amour, même s’il l’a retrouvé plus tard sous une autre forme, comprendra Sapho, sera touché par sa détresse – car comment pourrait-il s’étonner qu’elle ait envie de tout sacrifier contre un seul regard ? Même ceux qui s’en sont sortis, même ceux dont le cœur blessé a guéri, dont le regret est déjà cicatrisé. Parce que bien sûr, le temps fera son œuvre ; d’autres amours se présenteront et nous nous dirons : c’était pour le mieux. Mais, pour chaque fois où nous aurons aimé puis vu l’amour s’enfuir, la voix de Sapho ravivera en nous le souvenir d’une ancienne plaie – Sapho qui pour apercevoir une seule fois son Anactoria perdue est prête à tout donner, tout, le plus beau et le plus précieux. Et nous pleurerons aussi devant le final de Nos plus belles années , quand les deux protagonistes qui se sont tant aimés malgré leur incompatibilité retombent l’un sur l’autre, comme deux inconnus, et que d’un coup prend corps, mais juste un instant, le fantasme de ce qui aurait pu être mais n’a pas été et ne sera jamais, parce qu’à présent leur histoire se conjugue au futur antérieur, le temps dans lequel aucun futur simple n’est plus possible. En effet la grammaire raconte la vie, et l’explique ; pour chaque indicatif, c’est un million de conditionnels qui meurent mais peuvent continuer à nous bercer, par l’imagination, en nous donnant l’illusion qu’ils sont meilleurs que la vie qui nous a échu. Dans l’imagination tout est plus facile, il n’y pas de friction, et nous pouvons aimer les roses non cueillies, les choses qui pouvaient être et n’ont pas été . Mais nous savons aussi très bien qu’il s’agit là d’un effet d’optique. Apprendre à vivre avec le regret, et le remords, n’est pas une mince affaire ; ce n’est pas facile d’accepter ce pacte tacite qui stipule que pour vivre vraiment, il faudrait nous dissiper, renoncer à une version possible de nous-même à chaque fois que nous devons faire un choix. Comme pour toute émotion profonde, le défi le plus dur et le plus urgent est d’éviter que le regret se transforme en ressentiment ; et pour l’éviter, le seul moyen consiste à prendre conscience de tout ce qu’on éprouve, même la douleur ; de ne pas chercher à s’en débarrasser, à la cacher sous le tapis, mais à la regarder dans les yeux, quitte à pleurer un coup, ou même plusieurs. Cette condamnation à nous dissoudre un peu à chaque fois pour nous déterminer et devenir responsable de nos actions ne manque pas de poésie. Bien sûr, il y aura des erreurs et du remords, mais peut-être que le désir que nous ressentirons alors de faire amende honorable saura nous conduire vers de nouveaux possibles , nous poussera à nous réinventer. Surtout si l’on pense que le regret et le remords, émotions déchirantes car solitaires, et absolument intimes, propres à chacun de nous, à la limite de l’incommunicable, existent et se développent de la même façon, secrète et mystérieuse, pour tous les êtres humains : ceux qui nous sont proches, et ceux qui nous paraissent lointains. Redisons-le : nous sommes seul, et en même temps, nous ne le sommes pas, si nous parvenons à discerner chez les autres, sans rompre le mystère, en la devinant de loin, la même imperfection impardonnable et pourtant toujours pardonnée. Et puis n’est-ce pas à cela que sert la littérature ? Elle n’existerait pas si n’existaient pas depuis des millénaires ces émotions que nous cherchons à déchiffrer – et d’ailleurs la philosophie non plus, ni l’histoire, en un mot, l’humanisme. Or comme il est fécond de se découvrir humain, fécond et utile, la plus utile des découvertes inutiles, celle qui nous aide à survivre et nous permet de dépasser la simple réaction stérile à cette douleur de vivre que nous connaissons tous. Et cette poésie de Penna sur la jeunesse ? Elle finissait comme ça : Il vaut peut-être mieux souffrir que jouir. Ou peut-être que cela revient au même. La neige aussi Est plus belle que le soleil.
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Parce que si le bonheur est un voyage qui ne peut éviter les forêts obscures, denses, menaçantes, alors les moments que nous sommes habitués à considérer heureux, ces petits plaisirs intenses que nous nous remémorons, sont les alpages sur lesquels nous pouvons nous arrêter, ne serait-ce que le temps d'une courte pause, pour savourer l'amer, profond plaisir d'exister.
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la douleur du retour ne naît pas de l'impossibilité de revenir en arrière, mais de la conscience de cette réalité que nous cherchons à nier avec beaucoup d'obstination : nous n'avons finalement aucune envie de revenir en arrière. Au fond de nous, secrètement, nous savons que le passé est une terre étrangère, sur laquelle d'autres lois sont en vigueur et le temps retrouvé, si tant est que nous parvenions un jour à le retrouver ne ressemblerait en rien au temps qui a été. Il s'agirait d'un temps nouveau, aussi nouveau que nous le sommes lorsque nous parvenons à comprendre, au bout du compte, que vivre veut dire se renouveler en permanence. Et également se frotter à l'indocile et pérenne écueil de l'expérience humaine : le temps, la réalisation limitée d'une myriade de possibilités destinées à mourir sans être réalisées. Tous ces débuts imaginés, ces infinis développements potentiels, et les émotions ambivalentes qu'ils déclenchent en nous - nostalgie, regret, anxiété - sont le prix à payer pour pouvoir dire un jour : voilà, je le confesse, j'ai vécu ; j'ai dissipé la myriade de mes possibles afin qu'une fois sur un million, le possible se réalise.
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J'ai été une petite fille émotive, une adolescente émotive et, sans surprise, me voilà aujourd'hui une femme émotive. Un rien suffit à me troubler, je me laisse emporter, je m'émeus, je change d'humeur. Je pleure devant les films, y compris les navets, je pleure au moment des au revoir, même quand c'est moi qui pars ; j'oublie la fin des livres parce que la seule idée que les choses ont une fin me déprime. Il m'arrive de sentir mon cœur exploser de joie, puis tout à coup, l'instant d'après, une ombre s'abat sur moi. Je garde tout, les billets de train, les cartes postales, les tickets de caisse, pour essayer de me rappeler qui j'étais, qui je suis, dans l'espoir de rester connectée aux choses que j'ai vécues.
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Il m’a fallu beaucoup de temps pour comprendre qu’être émotive ne signifie pas être instable ou déséquilibrée : simplement être vivante, ouverte et vulnérable face à l’expérience du monde.
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Videos de Ilaria Gaspari (5) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Ilaria Gaspari
Faisons de la Saint-Valentin une fête littéraire et philosophique. Ce mercredi 14 février 2024, le romancier Nicolas Mathieu et la philosophe Ilaria Gaspari explorent le thème de l'amour dans la littérature : en amour, tout est-il déjà écrit ?
Pour en parler, Guillaume Erner reçoit : Nicolas Mathieu, écrivain Ilaria Gaspari, docteure en philosophie de l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et romancière
Photo de la vignette : Roberto Serra /Getty Images
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