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EAN : 9782330121525
182 pages
Actes Sud (01/05/2019)
4.25/5   201 notes
Résumé :
L’Europe, l’ancienne, celle d’un vieux monde bouleversé par la révolution industrielle, et l’Union européenne, belle utopie née sur les cendres de deux grandes guerres, sont l’alpha et l’oméga de ce texte en vers libres relatant un siècle et demi de constructions, d’affrontements, d’enthousiasmes, de défaites et d’espoirs.
À l’heure où certains doutent, où d’autres n’y croient plus, ce récit européen humaniste rappelle qu’une mémoire commune, même douloureuse... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (43) Voir plus Ajouter une critique
4,25

sur 201 notes
Lecture coup de poing à la prose aussi magnifique que véhémente !!

Toute première fois que je lis Laurent Gaudé (même si "Eldorado" m'attend patiemment depuis un bon moment sur un des mes rayonnages !!). Ce texte
m'interpellait plus particulièrement...par ce vaste sujet,d 'actualité intense...vu les dysfonctionnements, injustices, déséquilibres économiques grandissant de nos sociétés !!

"- Nous, l'Europe- est né de cette envie : raconter notre épopée commune et le faire avec passion. Au moment de terminer ce texte, je me rends compte qu'il est inachevé. Non pas que je ne sois allé au bout du projet que je m'étais fixé, mais parce qu'il souffre de n'être qu'une voix quand je voulais qu'il fût pluriel. Durant toute sa rédaction, j'ai eu le souci d'ouvrir le plus possible le récit aux réalités des pays européens voisins, et pourtant, las...
J'ai constaté tout au long de mon travail à quel point je savais peu de l'histoire et de la géographie des vingt-six autres pays, et combien, à mon corps défendant, ce récit allait rester celui d'un Français. J'ai mesuré la distance qu'il restait à parcourir pour que nous ayons un socle de culture commune.
En somme, si - Nous, l'Europe- est un poème inachevé, c'est parce qu'il est en attente d'autres voix, venues d'Italie, d'Allemagne, de Pologne, d'Espagne...pour qu'un jour, peut-être, un grand texte naisse, nourri de plusieurs feux qui s'éclairent, se répondent et s'enrichissent." (p. 11)

Ouvrage parcouru en grande partie, il y a quelque temps; larges passages qui m'avaient sonnée par les rappels historiques, économiques, diplomatiques discordants...Je l'ai auparavant offert à une amie... qui
vient juste de me le prêter de nouveau, afin que je puisse achever
ma première lecture partielle !

Un texte fort où Laurent Gaudé nous rappelle les leçons de l'histoire,
des conflits, de ce mal perdurant: la volonté de domination de "ses
voisins", la loi du profit, l'abandon de l'utopie, d'un idéal humain...
un texte qui emporte , entre les rappels des événements passés répétitifs,
le découragement, la lucidité et tout en même temps l'Espérance...que l'on dépasse tout cela... pour enfin réaliser cette "Europe fraternelle", forte, débarrassée des exclusions, des précarités, des abus des puissants...sur les plus faibles, les drames des migrants fuyant la misère !! Un nouveau monde toujours à réinventer !!

"Indésirables
Dans tant de villes, de régions, de campagnes, il faut fuir.
Pour tant d'hommes et de femmes, il faut essayer de se mettre à l'abri.
Des familles entières quittent tout pour rejoindre la France, la Suisse, l'Angleterre,
Ou passer aux Etats-Unis.
dès qu'ils sont sur les routes, ils ont un nom nouveau : "Indésirables" .
Le continent devient une carte compliquée de points de passage, de barrages et de frontières fermées. "(p. 87)

Un ouvrage rare...de réflexion, de remise en cause dérangeante, mais nécessaire pour tous...
A lire et relire ! Chaque phrase serait à méditer...sur l'état du monde, en général.
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Deux ans après « de sang et de lumière », les indignations et le militantisme de Laurent Gaudé donnent naissance à un nouveau recueil estampillé poésie. « Nous l'Europe, banquet des peuples ».
Un an après « SOS Méditerranée : L'odyssée de l'Aquarius », aux colères et autres écoeurements de l'écrivain quant à l'Europe, viennent s'ajouter un triste constat et un espoir.
A la veille d'une mascarade de plus pour choisir les maîtres de ses maîtres, les députés Européens goutent aux bains de siège pour la mettre profond aux dépités Européens.
« Nous l'Europe » est un historique de notre merveilleuse civilisation depuis le XIXe siècle jusqu'à nos jours. Une civilisation bâtie sur la haine, sur le mépris et l'humiliation, sur la domination et l'asservissement, sur le pillage et l'égoïsme, sur la négation de l'autre, sur un totalitarisme économique.
Nous l'Europe, nous l'Oxydant !!!! Les libéraux se servent des fachos, les fachos des progressistes, les progressistes des libéraux. Pourquoi tant de mots pour une même philosophie de bas fond ? A, à, à la queue leu leu, tout l'monde s'éclate… et plus si affinités.
Laurent Gaudé garde malgré tout l'espoir que les peuples se réveilleront à temps. Que le mot respect retrouvera un sens, que… Elle est là la poésie du bouquin, dans cet espoir de révolution des consciences.
Le bouquin est bon, il se lit d'une traite. Plus doux que « de sang et de lumière » la nausée n'en est pas moins présente.
Je vais faire court parce que les érections Européennes ne me font pas bander, pas plus que les autres maintenant. Des politiChiens, je ne veux plus être la chienne.
Ni dieu ni maître, Serge si tu passes par là ça me va de plus en plus au teint.

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1848, "le Printemps des peuples" est la matrice originelle de l'idée européenne. C'est à ce moment précis que Laurent Gaudé débute son récit sur l'aventure européenne dans son bel essai : "Nous, l'Europe : Banquet des peuples". En 100 pages, Laurent Gaudé fait avec maestria le portrait d'une Europe qui est morte plusieurs fois avant de renaître à la vie. Victor Hugo prononce un discours lors du "Congrès des amis de la paix universelle"qui s'ouvre le 21 août 1849 à Paris. L'écrivain y prophétise "l’effacement des frontières sur la carte et des préjugés dans les cœurs" et appelle de ses vœux à la création des « États-Unis d’Europe », garants de "la fraternité des hommes". Cent soixante dix ans plus tard, toute proportion gardée, Laurent Gaudé, intellectuel et auteur brillant, tisse à nouveau la trame d'une Europe de fraternité, d'ouverture et d'humanisme qu'il souhaite voir émerger. Sa plume est pleine de verve de souffle lorsqu'il invoque la colonisation, le pêché originel d'une Europe dont les États voulaient se partager le monde pour leur seul profit. Il évoque aussi les deux conflits mondiaux de 1914-1918 et de 1939-1945 qui saigneront des générations entières de jeunes européens mais pas seulement (songeons aux tirailleurs sénégalais..) et puis cette impardonnable compromission avec le mal incarné par les régimes fascistes, le national-socialisme.. (Quid du communisme et de Staline dont les crimes sont ici passés sous silence, ce que je regrette profondément). La Shoah bien sûr, événement traumatique face auquel nous restons tous sans mot tant l'horreur est ici indicible. La chape de plomb communiste à l'Est, coupant l'Europe en deux jusqu'à la chute du mur en 1989. L'histoire ne s'arrête pas là puisque quelques années plus tard la guerre sévit à nouveau en Europe, en Ex Yougoslavie cette fois, où les Serbes orthodoxes, les Croates catholiques et les Bosniaques musulmans s'entretuent. Laurent Gaudé a le don de rendre son texte clair et bien construit. C'est à un sursaut qu'il nous incite pour faire vivre cette Europe trop technocratique à son goût, pas assez traversé par le souffle de la jeunesse des peuples d'Europe. Je trouve très intéressant que Laurent Gaudé puisse prendre la plume afin de nous dévoiler son désir d'Europe. Bien sûr, il y a une part d'utopie très importante dans son texte. On peut trouver cela naïf mais l'on sent toute la sincérité de l'auteur. J'ai des divergences de point de vue sur "sa vision" de l'histoire européenne. La perception du monde de Laurent Gaudé est très (trop) "bien pensante". Je ne vais pas vous le cacher, sa perception candide de Mai 68 m'a heurté. Nous n'en sommes plus là fort heureusement. J'aurais souhaité voir Laurent Gaudé prendre davantage de risques quand à ses prises de position. Un peu à l'image de ce que peut faire Michel Onfray par exemple. J'ai trouvé ainsi dommage que sur les questions d'immigrations, sujet polémique et pertinent s'il en est, avec ces clivages entre une Italie refusant les migrants, (l'extrême droite étant au pouvoir) et une position officielle française pour le moins ambiguë.. j'aurais donc souhaité voir un humaniste tel que Laurent Gaudé prendre position de façon claire, le tout avec un propos ambitieux et salutaire. Hors l'auteur ne nous en dit pas plus sur ses solutions, doit-on accueillir tous ces êtres humains en souffrance ? le peut-on sans risquer la déstabilisation d'équilibres déjà précaires ? enfin, j'aurais aimé qu'il nous parle d'une Europe, qui n'est plus en paix, depuis que l'islamisme radical nous a déclaré la guerre au nom d'une idéologie mortifère. Quel place l'islam doit elle avoir en Europe ? Que faire face à la montée des populismes d'extrême gauche ou d'extrême droite ? Ceux sont des sujets très complexes et je comprends parfaitement que répondre à ces interrogations auraient nécessité un travail différent. J'émets donc des réserves sur ce texte et surtout sur les derniers chapitres de "Nous, l'Europe : Banquet des peuples", je souligne la qualité littéraire de ce récit qui n'est pas sans rappeler, un autre auteur fascinant, aimant parler d'histoire : Eric Vuillard. Lire Laurent Gaudé, quoiqu'il en soit, est toujours d'une infinie richesse intellectuelle. Son livre est bouillonnant et je le redis empli d'un souffle qui manque trop souvent à nos hommes et femmes politiques. A lire en ces temps troublés.
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Ce livre devrait être accessible à tous, ados et adultes. Il remet en place que l'on a tendance à oublier : comment est née l'Europe, pourquoi. Il pose aussi la question « quel avenir pour l'Europe », mais ça c'est le futur qui le dira et ses peuples dont elle est composée.

De manière simple, accessible, remarquable et passionnante, Laurent GAUDE donne les clés pour faire prendre conscience de ce qu'est l'Europe, tout simplement.

Je l'ai lu deux fois, une fois avant les élections, et une deuxième fois, en prenant mon temps.

Prenez le temps de le lire et surtout, n'hésitez pas à le passer à d'autres. Pour « Plus jamais ça »… Vous aussi, participez au "Banquet des Peuples".

Début du livre

Qui sommes-nous ? Héritiers de quel passé ? Traversés par quels tourments ? Fautifs de quels crimes et porteurs de quelles utopies ? Que voulons-nous ? Notre continent a inventé des cauchemars, fait gémir ses propres peuples, mais il a aussi su faire naître des lumières qui ont éclairé le monde entier. C'est cette contradiction-là qui nous constitue. Nous sommes peuples du tourment, peuples entremêlés depuis si longtemps, dans la rivalité, le commerce, la mort et l'élan, peuples si différents que notre choix de nous unir dans une assemblée commune est un évènement inouï au regard de l'Histoire. A quelle époque, en quels lieux, a-t-on vu semblable aventure politique : vingt-sept nations décidant de faire un grand banquet des peuples ?

Fin du livre

Est-ce cela, notre projet : dominer ? - ce qui veut dire soumettre…
Nous avons des rêves plus grands,
Nous voulons inventer un rapport d'équilibre
Qui ne soit pas celui de l'exploitation voilée,
Pour ne plus fouler aux pieds, comme mille fois
auparavant,
Les peuples humiliés.

Venez,
Dépêchez-vous,
Fracas et utopie,
Apportez tout avec vous.
Que l'Europe redevienne l'affaire des peuples.
Ce sera heureux.
Approchez,
Chauffe,
Tourne,
Comme à l'origine
Mais non pas de vapeur sueur, cette fois,
Non, de rage et d'idées.
Chauffe, tourne.
C'est cela que nous voulons :
Que l'ardeur revienne.
Que l'Europe s'anime,
Change,
Et soit,
A nouveau,
Pour le monde entier,
Le visage lumineux
De l'audace,
De l'esprit,
Et de la liberté.
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Je retrouve la même plume, le même plaisir de lecture que dans son précédent recueil « de sang et de lumière ». Toujours en vers libres avec une plume ardente, vive et souvent sans concessions, Laurent Gaudé au travers de son histoire, ses politiques, les bouleversements industrielles, les guerres, les diverses révolutions nous évoque l'Europe :

Nous savons ce que c'est de disparaître,
Nous l'avons vécu si souvent :
La menace barbare,
Les Empires qui chutent,
Nous savons ce que c'est d'avoir régné en maître,
Et de s'évanouir ensuite dans l'immensité du temps,
Chacun de nos pays a connu la lumière et la ruine,
Mais il y a autre chose,
De plus sombre :
Ce que l'homme peut faire à l'homme,
Tueur méthodique,
Inventeur de la mort à cadence d'usine,
Nous savons.
Ici, sur cette terre d'Europe,
L'optimisme a été tué
Et cela fait de nous
Des héritiers de l'angoisse.

Il nous invite à la fin au Grand banquet :

Grand banquet.
C'est cela qu'il nous faut, maintenant.
De l'ardeur,
De la chair et du verbe !
Grand banquet
Venez,
Soyez nombreux,
Apportez ce qu'il faut pour faire bondance et débat.
Elle est là, notre mission :
Faire revenir les peuples au coeur de l'Europe.
Inviter l'utopie et la colère,
Car rien jamais ne c'est fait sans eux.
L'Europe s'est trop longtemps tenue éloignée du corps
bruyant des peuples.
Elle avait peur de leur mauvaise humeur,
De leurs coups de sang,
Elle avait trop vécu d'aliénation collective.
Elle a essayé d'inventer une entité qui naîtrait de la raison,
Mais ce faisant, elle a oublié la sève,
Et découvre le risque de devenir un grand corps vide.
Allez,
Venez,
Grand banquet
Il faut revenir à l'élan des peuples.
Cela ne sera pas confortable
Ni doux.
Les peuples avancent par à-coups et renversent les tables,
Mais l'Europe mourra si elle se tient éloignée de la passion.

Juste ces deux petits extraits pour peut être vous donner envie de lire ce recueil qui ne laisse pas indifférent, qui retrace nôtre histoire, qui fait réfléchir sur l'avenir et le devenir de l'Europe.
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critiques presse (1)
LePoint
13 mai 2019
Puissent les électeurs de mai lire ce livre, un long poème simple et vivant, une évocation de l'histoire de cette Europe qui devrait consolider son identité et faire le choix des valeurs qui ont été à son origine.
Lire la critique sur le site : LePoint
Citations et extraits (75) Voir plus Ajouter une citation
Les nations se servent, les individus aussi.
Tout un pays pour un seul homme, vous croyez que c’est impossible?
Savez-vous à qui est le Congo?
« Propriété privée du roi des Belges ».
Léopold II,
Crachez sur son nom,
Avec sa belle barbe
Et son nez d’officier.
Pas « colonie Belge »,
Non,
« Propriété du roi »
Léopold II
Crachez sur son nom
C’est son jardin, le Congo,
Son terrain de jeu.
Et il n’aime pas les mains, Léopold,
Crachez sur son nom
En tout cas pas celles des noirs
Il doit trouver ça superflu…
Alors il les fait couper,
A grande échelle.
Pour tout travailleur Africain qui ne ramènerait pas assez de caoutchouc ou se serait enfui,
Pour tous les paresseux, les réfractaires,
Sanction!
Toujours la même:
Coupez!... Coupez!...
Vous trouvez ça monstrueux?
Pourtant, Léopold II a des statue à son effigie,
De ci de là,
Crachez sur son nom,
Place du trône à Bruxelles,
Place Wiertz à Namur
Une avenue à Paris qui donne sur la place Rodin.
Ce que nous avons mangé a fait de nous ce que nous sommes
Et pendant des siècles nous avons mangé le monde
Nos pays ont fait la course
Pour s’approprier les matières premières.
Etre celui qui vend et non celui qui achète,
Celui qui décide et non celui qui subit.
Tout s’est joué là pendant des décennies.
Qu’avons-nous fait lorsque nous avons régné?
Nous nous sommes bâfrés.
Et comme nos pays étaient trop petits,
Nous avons inventé la Conférence du Découpage,
C’est un modèle qui resservira,
Que l’on déclinera à souhait:
Quatre ou cinq hommes autour d’une table,
Une carte d’état-major dépliée,
Des verres de whisky et des cendriers, parce que les nuits de négociation sont parfois longues,
Et une règle pour pouvoir tirer des traits sur les pays à partager.
A toi,
A moi,
Des villes,
Des peuples,
Des civilisations entières,
D’un coté ou de l’autre,
A toi,
A moi,
Selon l’humeur et le rapport de force.
A Berlin en 1885, ils sont tous là: Français, Italiens, Anglais, Espagnols, Belges, Danois, Hollandais, Portugais, Russes, Norvégiens, Ottomans, Américains, Austro-Hongrois,
Devant une énorme assiette,
L’Afrique
(…)
La règle est simple: tant qu’il n’y a que des Noirs, c’est à nous.
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"Charbon",
Signera le siècle,
C'est toujours la même histoire :
Une époque se choisit une matière première et s'en
gave.
L'Europe s'est faite avec le charbon.
Les villes où nous habitons,
Les guerres que nous avons faites,
Les objets qui ont accompagné nos vies,
Ont longtemps porté ce nom : charbon.
Tout le monde en veut.
Il faut creuser.
Gueules noires,
En Angleterre, au pays de Galles, en Wallonie ou
en Pologne.
De père en fils,
De grand-père en petit-fils.
Gueules noires de femmes en femmes aussi.
Noires de frotter les linges souillés,
De vider la bassine au pied du lit où le mari crache
ses toux de nuit.
Gueules noires par famille entière.
Les usines tournent,
Machines à engloutir du charbon de bois,
Machines à bouffer des vies.
Peuple de gars fiers.
Descendre à la mine, remonter à la lumière,
Toute une vie comme cela,
Au pied de ces terrils qui poussent comme des
mausolées pour les tousseux.
Il faut travailler charbon et ça ne s'arrête jamais
parce que, dans les mines, il n'y a pas de saison.
Et, à la fin, crever grisou ou crever craché, c'est selon.
Gueules noires, gueules cassées.
Longue lignée qui s'use.
Morts, vivants, on finit par ne plus très bien savoir.
Une vie entière dans les entrailles de la terre pour
que d'autres vivent en pleine lumière.
Ce mot,
Charbon,
Pour dire le changement du monde.
Commenter  J’apprécie          130
Oh, les terres de convulsions…
Tant d’évènements,
D’agitations,
Tant de destins avalés…
Et vous trouvez que nous vivons dans une période troublée?
Mais quelle génération a connu plus de calme et moins de dangers?
Les deux siècles qui nous précèdent ne sont que courses, fièvre, assauts et révolutions.
Les siècles qui nous précèdent sont des ogres qui ont avalé le courage et le génie par vies entières.
Et nous sommes là,
Nous,
Avec ces mots qui nous ont été légués: « Nation », « Egalité », « Liberté »,
Que nous contemplons avec fatigue.
Depuis si longtemps nous sommes citoyens de l’ennui.
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Depuis quelque temps, l'Europe semble avoir oublié qu'elle est la fille de l'épopée et de l'utopie. Elle s'assèche de ne pas parvenir à le rappeler à ses citoyens. Trop lointaine, désincarnée, elle ne suscite souvent plus qu'un ennui désabusé. Et pourtant, son histoire est celle d'un bouillonnement permanent. Tant de feux, de morts, tant d'interventions et d'art, aussi. La littérature, peut-être, peut nous rappeler cela : que le récit européen est histoire de muscles, de verve, de ferveur, de colère et de joies. Les mots de la littérature, peut-être, peuvent replacer au coeur du récit la conviction et l'élan sans lesquels rien ne se fait. (p. 7)
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Depuis quand l’Europe a-t-elle perdu le sommeil ?…


Depuis quand l’Europe a-t-elle perdu le sommeil ?
Quand a-t-elle commencé à tendre l’oreille ?
Depuis quand est-elle inquiète,
Sujette aux cauchemars ?
« Il y a moins de sommeil aujourd’hui dans le mondé *. »
Écoutez la voix de Stefán Zweig,
Fils d’une culture qui bientôt n’existera plus.
Le monde ne sait plus dormir,
Tout n’est plus que fracas, nerfs à vif et couleurs vives.
Ça frémit sous les doigts des peintres.
L’homme est un cavalier bleu.
Die Brücke,
Der Blaue Reiter,
Inquiétude des formes.
Les corps se tordent,
Les bouches s’ouvrent grandes,
Jaillissement de rouge, de vert, de bleu insomniaque,
Tout s’inquiète
Et le monde, de plus en plus souvent, parle d’une voix de régiment.


* Le monde sans sommeil de Stefán Zweig
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Laurent Gaudé, auteur acclamé, a marqué les librairies à 33 ans avec "Le Soleil des Scorta", lauréat du Prix Goncourt en 2004. Son succès international a confirmé sa place parmi les écrivains de renom. Diplômé en Lettres Modernes et Études Théâtrales, Gaudé excelle aussi dans le domaine théâtral depuis 1997. Malgré son premier roman "Cris" en 2001, il n'a jamais délaissé le théâtre. Actuellement, sa pièce "Même si le monde meurt", mise en scène par Laetitia Guédon, est en tournée, offrant une nouvelle immersion dans l'univers captivant de cet écrivain polyvalent. En avril 2024, il dévoilerait Terrasses, sur les attentats de Paris. L'occasion de revenir sur l'intégralité de son oeuvre.
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