Direction Mayotte dans ce polar haletant ! Pourtant, oubliez la carte postale de rêves, les plages de sable fin et le soleil. L'auteur nous emmène dans les bas-fonds de l'île, noyée sous des trombes d'eau. Une succession de cadavres oblige un commissaire de police un peu je-m'en-foutiste, prochainement muté en métropole, à s'allier à une pseudo-journaliste réunionnaise pour découvrir le meurtrier. Bien vite, ce duo improvisé aux méthodes peu conventionnelles va donner un bon coup de pied dans la fourmilière des passeurs de clandestins et des flics ripoux.
L'auteur, ancien flic dans ce territoire d'outre-mer, s'attaque aux côtés sombres de l'île de Mayotte : les clandestins y arrivent régulièrement des Comores par des kwassas (bateaux de passeurs), sont arrêtés par la police des frontières, reconduits sur leurs îles avant de revenir quelques semaines plus tard. C'est à ce trafic que se trouve mêlé notre duo de choc, bien malgré lui. L'écriture est dense, riche, parfois un peu maladroite, ce qui ne gâche pourtant rien au plaisir de lire ce roman, dont l'enquête est narrée par le commissaire. Un bon moment de lecture édité par une petite maison d'édition bretonne spécialisée dans le polar, Noir édition !
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Sur fond de calculs politiques finement suggérés, l'auteur construit une intrigue haletante, nourrie de rebondissements inattendus et excelle à créer une atmosphère, à camper des personnages hauts en couleur, sans jamais se départir d' un humour souvent dévastateur.
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Excellent livre, l'auteur par sa touche de poésie et d'humour nous emmène au coeur de Mayotte. de plus, il manie a perfection l'art de la description et nous permet de voyager au gré de son enquête.
Je recommande donc fortement ce livre et plus globalement l'auteur qui aura déjà su me surprendre par ses premiers livres
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De retour au service, je laissai mon adjoint grimper à l’étage et filai chez Pelletier. Chef du service d’investigation depuis deux ans, il obtenait d’excellents résultats grâce à une connaissance parfaite de la procédure pénale. Par contre, au niveau de l’humain, il devait se situer dans la limite étroite qui sépare une communicabilité erratique de l’autisme. Ne parlant quasiment à personne s’il n’y était pas obligé, refusant d’arbitrer tout conflit au sein de son propre service, Pelletier constituait un cas d’espèce particulièrement intéressant. Il était une sorte d’observateur contemplatif ne jugeant jamais les autres et leur accordant en toute circonstance une capacité d’écoute toujours égale. Bien entendu, il ne sortait pratiquement jamais du service, en partie parce que je lui avais interdit de le faire depuis qu’en portant une convocation dans un bidonville proche du commissariat, il s’était perdu corps et bien. Il avait erré des heures durant dans les ruelles poussiéreuses par une température insupportable. Par chance pour lui, un groupe de clandestins rigolards l’avaient pris en affection et, tout de go, nous l’avaient ramené après lui avoir offert un quart d’eau.
Environ dix jours par an, la pluie envahissait tout. Des gouttes énormes, qui s’écrasaient dans un crépitement sonore, martyrisaient un bitume de piètre qualité toujours prompt à se déliter dès le premier signe d’intempérie. Sauf nécessité impérieuse, une sortie à l’extérieur prenait des airs d’inconcevable et les rares automobilistes stoppaient leur progression, trahis par des essuies-glace soudain rendus inopérants par cette frénésie aquatique.
L’île se recroquevillait, immobile et humide. Seuls, deux ou trois hères vêtus de hardes trempées maintenaient une veille fragile et arpentaient résignés la rue principale. Malgré l’absence d’instructions en ce sens, mes fonctionnaires s’accordaient une trêve dans leur chasse quotidienne aux clandestins. Ils accaparaient alors la salle de repos dans des invectives joyeuses, la transformant rapidement en un vestiaire festif d’après match. La femme de ménage elle-même renonçait à toute activité, nous laissant patauger dans une fange noirâtre, ramenée du dehors, qui se plaisait à infiltrer le moindre recoin du commissariat. On la retrouvait en général chez le responsable de la logistique, occupée à boire du thé ou à manger des gâteaux faits de la veille.