[...] adieu Kate, c'était bien, j'étais bien ici, trop bien, j'allais devenir Irlandais mais je ne peux pas, je suis parti pour plus loin, il faut que je parte, il faut que je parte d'où je suis bien pour aller là où je ne peux plus vivre, où je devrai mourir, mourir pour devenir autre.
Ils ne sont jamais neutres, les mots, ils déforment tout, ils nous chassent des pays merveilleux de l'enfance, ils nous circonscrivent, nous limitent et nous censurent et quand nous entrons dans une langue, nous ne savons pas dans quoi nous entrons, mais c'est une religion, c'est une cathédrale, c'est une maison, c'est un vêtement et nous aurons beau faire et beau nous débattre, nous sommes pris.
Je cherche comment l'atteindre, l'ouvrir, la prendre, la dévorer d'amour. Ça ne l'intéresse pas, d'être dévorée.
En silence nous escaladons la nuit, sous un ciel parfaitement noir.
Je déteste les mots, tu sais, oui je suis écrivain et je déteste tous les mots qui me poursuivent et me harcèlent et me persécutent et le mot écrivain est un de ceux-là parce que, c'est quoi ça être écrivain, penses-tu ?
"Propulsés par les turboréacteurs, nous déchirons le ciel dans son droit fil, au-dessus des nuages, des mers et des littératures."
Sur le quai de la gare, je la remarque tout de suite, avec ses châles, ses jupes longues et colorées, ses cheveux roux et lumineux, ses bottes anciennes à talons hauts et à boutons. Une artiste, une actrice, une folle, quelqu'un à qui parler.