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EAN : 9782369560807
140 pages
Editions Intervalles (21/08/2019)
4.29/5   12 notes
Résumé :
Karl et Frederick, deux frères que tout oppose nés dans une même ville d’Albanie, se retrouvent à la mort de leur père, après plus de deux décennies de séparation. Brutalement confrontés à leurs différences, le nationaliste enraciné et le cosmopolite convaincu vont devoir faire face au passé de leur famille et de cet étrange territoire, cristallisant à travers leur confrontation l’histoire chaotique des Balkans et de l’Europe des XXe et XXIe siècles. ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
A travers la vie de Karl et de son frère Frederick, c'est l'histoire des albanais du XXème siècle que nous narre Gazmend Kapplani.

Il y a ceux qui restent malgré tout, et ceux qui partent, comme Karl, à la recherche d'une liberté perdue. Car l'Albanie ce n'est pas le Paradis... Point de mention de Kanun ici, mais plutôt une référence constante à un gouvernement totalitaire qui censure, qui enferme, qui torture et qui tue.

Le personnage de Frederick, nationaliste non violent, touche parfois le lecteur par son amour pour sa famille et pour ce pays qui est pourtant difficile à vivre. Mais la plupart du temps, ses mots durs et blessants choquent et heurtent.
Son frère, Karl, attire tout de suite la sympathie du lecteur, lui qui a fui un père communiste intransigeant et dur, un pays violent. A la recherche perpétuelle d'une liberté absolue qui n'existe pas (ou de l'image de sa mère), il traverses les frontières, permettant par là-même à l'auteur de parler des émigrés de tous bords. Polyglotte, instruit, curieux, humain, il choque aussi parfois, notamment par ses actes envers Clio. J'ai beaucoup aimé le personnage de Clio, femme en quête d'amour qui se voit vieillir, qui se trouve plus d'une fois abandonnée.

Les retrouvailles des deux frères lors des obsèques de ce père à la fois aimé et haï sont prétexte à aborder de nombreux thèmes : le communisme et les dictatures, la vie de couple et le lien père/fils, les racines et le nationalisme, la mixité des cultures, l'émigration, la place de la femme dans la société...

C'est un récit très riche, écrit de manière sensible bien qu'assez factuelle, mais d'une mélancolie prégnante.
Ce fût une très belle découverte cependant, et je remercie pour cela sincèrement Babelio et les éditions Intervalles.
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Un très beau roman qui traite si bien de toutes les questions qui hantent les hommes et pas seulement ceux de notre époque. Gazmend Kapplani pose de façon lumineuse la question de l'identité grâce à un dialogue entre deux frères. L'un, Karl, a quitté l'Albanie, et est confronté à l'exil et son frère, Frédérick, qui est resté auprès de son père, un pur communiste qui a défendu « le grand dirigeant » Henver Hodja.. Les deux prénoms sont déjà porteurs de l'engagement du père : Karl, le prénom de Marx et Frédérick, celui d'Engels . Comme il y a beaucoup d'humour dans ce récit, on verra que, si Karl en albanais est trop proche du mot signifiant « bite », en revanche en exil avoir un prénom qui ne soit pas musulman lui a été favorable pour l'obtention de papiers (vrais ou faux). On apprendra petit à petit pourquoi Karl est si viscéralement hostile à son père, à l'Albanie à son village et si loin de son jeune frère. Au fur et à mesure qu'il décrit son exil et ses difficultés, on entend la voix de Frédérick qui pense que rien ne vaut la peine de s'exiler, que l'on est toujours de son village, de son pays, de sa langue et de ses morts. Il faut dire que Gazmend Kapllani sait bien de quoi il parle, lui qui a vécu vingt-quatre ans en Grèce sans jamais avoir obtenu la nationalité. Karl, comme l'auteur, vit et enseigne en ce moment aux USA car il a fui la violence raciste des néo-nazis grecs qui le menacent de mort . Il a révélé dans ce roman (et dans la vie réelle), les meurtres horribles contre les minorités albanaises » les Tchames. Toutes ces questions autour de l'identité de l'exilé nous interpellent aujourd'hui, mais si ce livre est un coup de coeur, c'est aussi que la trame romanesque est bien menée, on suit avec étonnement Karl qui n'arrive pas à être triste de la mort de son père, et qui semble distant avec son frère que l'auteur rend attachant. Et puis, au fil des chapitres, le passé revient et avec lui les attitudes des uns et des autres aux pires moments de la dictature communiste. Alors certes, l'exil est compliqué, et la cruauté des hommes ne connaît pas de frontières, mais quand on est exilé dans sa propre famille, je crois que rien ne peut retenir celui qui, comme cet écrivain, est capable d'apprendre, de parler et d'écrire une petite dizaine de langues.

PS. Je ne suis pas complètement certaine d'avoir compris le titre. Mais est-ce le même en grec ?
Lien : https://luocine.fr/?p=11465
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La dernière page de Gazmend Kapellani, lu à la suite de notre voyage en Albanie fut un coup de coeur, j'ai poursuivi la découverte de cet écrivain albanais, mais qui écrit en Grec avec Je m'appelle Europe, toujours avec bonheur.

Gazmend Kapellani écrit des variations sur le thème de l'exilé, de la recherche du bonheur du migrant, de la critique de la dictature terrible qui fut celle d'Enver Hoxa.

Son ouverture aux autres cultures, son empathie pour l'humain le rendent sympathique.

Au décès de son père, ancien dignitaire communiste, Karl (en l'honneur de Marx bien sûr )retourne dans sa ville natale en Albanie et retrouvé son frère Frédéric ( Engels). Celui qui est parti et celui qui est resté, fidèle au père à sa ville à ses racines. Tout les oppose. Pourtant le lecteur perçoit une certaine bienveillance.

Occasion de raconter l histoire de la ville l arrivée des partisans d Enver Hoxa la chute du régime. Scène baroque que le deboulonnage de la statue. On s amuse dans ce livre. Récit émouvant aussi de massacres en Grece. le nationalisme est un poison dans les Balkans.

Nostalgie de l exilé. Recherche d un monde meilleur si l'histoire est balkanique elle est aussi universelle.
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Ce que j'aime chez Gazmend Kapllani, c'est que ces romans sont écrits dans une langue simple, très abordable (voir La dernière page, son roman précédent, déjà traduit par Françoise Bienfait), qu'ils sont courts et denses et qu'ils abordent des questions à la fois personnelles, individuelles et collectives. Cette fois-ci, c'est le changement des pays qui ont longtemps été dirigés par des régimes autoritaires et les bouleversements d'après 1989 et la chute du mur de Berlin, l'entrée dans l'Union Européenne et l'ouverture au capitalisme, ...

Mais c'est aussi la confrontation de deux visions du monde : le nationalisme qui monte un peu partout avec l'arrivée au pouvoir de gens aussi ouverts et sympathiques que les présidents ou dirigeants des Etats-Unis, du Brésil, d'Italie, Hongrie, et j'en omets. J'aime bien l'extrait suivant qui résume cela (c'est Frederick qui parle) : "Je me souviens d'un jour où notre père nous expliquait ce que signifient la faille, la nation, les racines. Karl avait rétorqué : "Les créatures humaines ne sont pas des arbres avec des racines. Les hommes ont des pieds et des rêves, ils veulent voyager, mais vous, vous les avez mis en cage comme des bêtes." Une violente dispute avait alors éclaté. Chaque fois que mon père et Karl se querellaient, quelque chose se brisait en moi..." (p. 61)

Cet extrait montre aussi la relation entre les deux frères, ratée sans doute par une trop grande différence d'opinion, l'un suivant aveuglément son père, l'autre s'ouvrant aux autres et à une pensée moins rigide. Et comme souvent l'individuel montre le collectif, le personnel touche l'universel. Comme dans son précédent roman, son héros a quitté l'Albanie pour la Grèce, puis y revient pour un décès et rencontre les Albanais restés au pays, chaque parti s'interroge alors sur ce qu'il a réussi ou raté si tant est que l'on puisse parler en termes de réussite ou de ratage. Gazmend Kapllani est lui-même un émigré albanais arrivé en Grèce puis aux Etats-Unis, il parle donc de ce qu'il connaît, de manière claire et remarquable. Un auteur qu'il faut absolument lire, édité chez les inévitables éditions Intervalles.
Lien : http://www.lyvres.fr/
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Dans ce roman, Gazmend Kapllani nous raconte le retour au pays (pour une courte période) de Karl. Il y retrouve son frère Frédérick son contraire. En effet, Karl fuit l'Albanie pour trouver une liberté alors que Frédérick est resté au pays pour mieux y vivre son amour pour sa famille et son pays.
Karl revient chez lui pour l'enterrement de son père. Il nous raconte son histoire d'émigré: ses joies, ses peurs, ses doutes, ...
Ce livre est bien écrit et on ne peut que confondre la vie de Karl avec celle de l'auteur, ce qui donne un accent de vérité.
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Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
Karl aime rabâcher certaines idées que j'ai encore du mal à comprendre. Je me souviens par exemple qu'il m'a dit un jour : "Je ne peux pas éprouver d'amour pour une nation. La seule chose dont je sois capable, c'est d'aimer les êtres humains, quelle que soit la nation à laquelle ils appartiennent." De nos jours, en Albanie et ailleurs, les gens ont honte de dire qu'ils aiment leur pays et leur identité.
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Chaque fois que je repense à cette scène, je suis pris de nostalgie... Karl, lui, ne parle jamais du passé, et cela me frappe beaucoup... Peut-être parce qu'il ne le voit pas comme une vieille demeure où l'on revient chercher un peu de repos, où l'on retrouve la douce chaleur des souvenirs et l'assurance de pouvoir repartir d'un bon pied. Karl voit le passé comme une terre sombre et inconnue.
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Chaque pays a ses « tabous nationaux ». On les appelle ainsi parce qu’ils sont profondément enfouis dans l’oubli collectif, grâce à une convention tacite établie par la majorité des membres d’une communauté, de sorte que personne ne cherche à savoir la vérité. On peut aussi qualifier " d' ignorance institutionnalisée » ou de « statu quo » ce genre de convention. Pour prendre une comparaison un petit peu triviale, on pourrait dire que cette ignorance institutionnalisé est du même ordre que l’ignorance des usagers sur le fonctionnement des égouts, tout le monde sait qu’ils existent mais personne n’en parle, sauf quand une grande panne se produit et que leur contenu écœurant se déverse dans les rues.
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’après Christos, le nationalisme qui avait atteint ses contrés était une asthénie psychique bien particulière, inoculée par l’Occident qui était réputé pour sa froideur et son avarice, cette maladie incurable de l’Europe avait surtout frappé les petites nations, celles qui, d’après lui étaient nées au forceps du ventre de l’Histoire et se retrouvent est totalement dépourvues de défenses immunitaires. « Nous, dans les Balkans, nous sommes les enfants orphelins de trois empires, l’Empire romain, l’Empire byzantin et l’Empire ottoman », disait-il, planté devant la carte des Balkans qui incluait Constantinople et recouvrait presque tout le mur de son long couloir. Il avait également épinglé au-dessus une large bande de papier sur laquelle il avait écrit en gros caractères : « Chercher des gens ethniquement pures dans les Balkans revient à chercher des femmes vierges dans un bordel. »
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Il obtint sa première carte de séjour grâce à un cousin de Clio qui travaillait au commissariat central de police d’Athènes. Une carte minuscule, toute fine, du même bleu que le drapeau grec qui flottait au-dessus de la douane quand Karl attendait sur la-terre-de-nulle-part. « Heureusement que tu as un prénom chrétien », lui dit le cousin de Clio. Le faussaire albanais lui avait dit exactement la même chose . Si on ne portait pas de prénom grec, on devait en changer pour obtenir la carte de séjour et en choisir un plus « convenable », qui n’attirerai pas l’hostilité des autorités ni les soupçons des autochtones. Des milliers d’Albanais changeaient aussi rapidement de prénom qu’on se débarrasse d’un vêtement sale après le travail, espérant ainsi obtenir ce talisman que représentait pour eux la carte de séjour.
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