Et au dessus de la cheminée : « Salus patries, suprema lex esto. » Pieter de Hooch, né en 1630 à Utrecht, est mort à Amsterdam après 1677, car on ne sait même pas la date exacte de la mort de ce merveilleux petit maître. Pendant plus d'un siècle, il est resté dans l'oubli, à ce point méconnu des amateurs que ses tableaux devaient être attribués à d'autres peintres pour obtenir quelque faveur. On le plaçait non seulement au-dessous de Metsu, mais encore après Miéris. On n'aurait pas même osé le comparer à Gérard Dou. Il a bien repris sa place maintenant. Voilà le vrai élève de Rembrandt,
celui qui a compris l'enseignement, et qui a gardé sa personnalité. Ses tableaux sont parmi les mieux disposés, les plus solides de formes. L'air et la lumière circulent parmi les salles dallées, les couloirs, les cours.
Jan Vermeer, ou Van der Meer de Delft (1632-1675), est, comme Pieter de Hooch, un grand artiste, plus singulier, plus inattendu. Sa Liseuse, debout en avant d'une muraille en partie couverte d'une carte géographique, lit une lettre qui lui a été probablement envoyée avec le coffre à bijoux ouvert devant elle. Sa jupe est verte, sa veste est bleue, du vert et du bleu de Van der Meer, et c'est la froideur apparente, la muraille nue, les découpages nets des meubles; mais la vie surprise et fixée ainsi est vive en tous ces
objets animés par la présence de cette jeune femme, au visage si attentif, la bouche entr'ouverte, aux bras demi-nus, aux mains blanches qui tiennent fermement la lettre.
Les commencements de l'école hollandaise se confondent avec les commencements de l'école flamande, et bien souvent encore les productions des véritables primitifs de la Flandre et de la Hollande se trouvent mêlées aux productions des maîtres de l'Allemagne, qui ont eu certainement la première et grande influence sur les artistes des Pays-Bas. Je sais bien que l'art allemand est considéré comme d'une expression plus extatique, plus détachée du réel, malgré sa vérité sèche et douloureuse, et que l'art de la Flandre est admis tout de suite comme plus intime, plus attendri de réalité familière.
L'impression ressentie à la Haye est toute particulière. Après Amsterdam, Haarlem, Leyde, et les autres petites villes que l'on a vues, c'est un changement complet, et il semble, aux premiers pas, que l'on ait quitté la Hollande. De grandes places, de larges voies, l'eau immobile du Vyver où se mire le sombre Binnenhof. Fromentin a fait de ce paysage d'eau et de pierres du Vyver une description si finement ressentie, si nerveusement exacte, que l'on revoit les choses telles qu' il les a fixées.
Le premier nom de peintre que nous trouvons, comme nom d'un artiste du XVe siècle, est celui de Geertgen van Saint-Jans. On lui-a attribué définitivement une Sainte Famille, qui n'est pas sans analogies de costumes et-d'expressions avec le tableau précédent. La scène se passe dans la nef d'une église gothique, et c'est une réunion de femmes qui occupe le premier plan : sainte Anne, la Vierge, sainte Elisabeth, Salomé.
"L'enfermé" de Gustave Geffroy.