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EAN : 978B08GCNCVGB
Delcourt (02/09/2020)
3.95/5   50 notes
Résumé :
À l'été 1870, alors que la puissance de l'armée prussienne décide du sort du second Empire, le moral du peuple français est au plus bas. Quand un jeune notable de Dordogne, Alain de Monéys, se rend à la foire d'Hautefaye, il ne sait pas que c'est pour y subir les pires tortures, jusqu'à son meurtre et sa dévoration par une foule rendue hystérique d'avoir cru l'entendre dire : "à bas la France"...
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Critiques, Analyses et Avis (15) Voir plus Ajouter une critique
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En cette belle journée du mois d'août 1870, le nouvel adjoint de Beaussac, Alain de Moneys, s'apprête à se rendre à la fête annuelle de Hautefaye. Ayant travaillé longuement la veille au soir à son projet d'assainissement de la Nizonne, il se fait déjà tard. Aussi se dépêche-t-il d'embrasser ses parents avant de filer, sa mère regrettant son départ dans une semaine à cette guerre contre la Prusse. En bon patriote, il a décidé de s'engager pour son pays même si son statut de notable aurait pu lui éviter de combattre. Avant de partir, il a quelques affaires à régler, notamment offrir une génisse à Bertille, trouver quelqu'un pour réparer le toit d'une grange. En chemin pour Hautefaye, on le salue, le félicite pour son engagement, le congratule pour son élection à Beaussac, l'interroge quant à son projet d'assainissement qui devrait approvisionner tous les champs alentour en eau. Arrivé au village, certains esprits s'échauffent quant à l'avancée de la guerre qui, pour certains, tourne au désastre. Une dispute éclate et l'un des villageois a entendu le cousin d'Alain crier « Vive la Prusse ! ». Peinant à y croire, connaissant son cousin, Alain sait qu'il ne peut avoir prononcer une telle absurdité. C'est alors qu'il dit « Pourquoi pas "À bas la France !" ». Aussitôt, il y a méprise sur le sens de ses mots. S'il plaide un malentendu, les villageois ne l'écoutent plus et l'un d'eux le frappe en plein visage...

Adapté du roman éponyme de Jean Teulé, cet album retrace un véritable et tragique fait divers survenu en 1870, en Dordogne. Alors qu'il voulait simplement défendre les paroles de son cousin Maillard, Alain de Moneys prononce une phrase qui sera tout de suite très mal interprétée par les villageois de Hautefaye. Dans une ambiance déjà tendue, ceux-ci l'accusent purement et simplement d'être un Prussien. Et c'est un déferlement de violence qui s'abat sur le jeune adjoint de Beaussac. Une violence allant crescendo et une folie collective que rien ni personne ne semble raisonner. de notable et adjoint fort respecté, Alain devient le traître à abattre. Cet album est tout simplement glaçant et relève d'une absurdité confondante. L'on est plongé dans des scènes d'horreur et de violence presque insoutenables et inexplicables d'autant qu'il s'agit d'un terrible fait divers. Gelli illustre parfaitement cette ambiance féroce et inhumaine, ainsi que la folie qui s'est emparée des villageois, grâce à son trait tendu, ses visages haineux et son noir et blanc éclaboussé de rouge sang.

Effroyable...

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Jean Teulé a pris l'habitude de ressortir de vieux faits historiques qui se sont perdus dans nos mémoires et de les remettre en perspective. Ainsi, j'avais beaucoup apprécié « Entrez dans la danse » où l'action se situait à Strasbourg en plein coeur du Moyen-Age.

Là, c'est une terrible histoire qui s'est passée en août 1870 à la fin de l'Empire de Napoléon III pendant la guerre avec les prussiens. le cadre sera celui d'un petit village de la Dordogne. Un brave gars va aller dans une fête villageoise où il y a une foire paysanne. Il va se faire lyncher, torturé et brûlé vif avant d'être mangé par la foule en délire alors qu'il pensait être de retour pour boire le thé avec sa mère.

Un simple malentendu sur une plaisanterie va entraîner toute une réaction en chaîne. En effet, on venait d'apprendre la défaite des troupes françaises à Reichshoffen. Il fallait accepter la mauvaise nouvelle et surtout trouver un responsable de ces malheurs.

Alain de Moneys qui passait par là allait le payer de sa vie. On l'accusa d'être un prussien alors qu'il était sur le point d'être envoyé au front pour se battre contre eux et qu'il était plutôt le bienfaiteur de ce village.

C'était tout à fait ridicule mais on n'arrête plus une foule en délire qui veut du sang et de la vengeance gratuite tant la haine du pression était palpable dans ce village très reculé de la frontière. Certains ont essayé comme le curé. D'autres comme le maire ont plutôt été lâche (mangez-le si vous voulez). La justice ne laissera pas ce fait impuni.

L'auteur nous présente ce fait divers comme l'une des anecdotes les plus honteuses de l'histoire du XIXème siècle. Après lecture, je confirme que ce n'est pas exagéré. Encore aujourd'hui, il faut se méfier de la vindicte populaire. Une phrase mal comprise et c'est le bûcher dans la plus grande sauvagerie pour celui qui devient le bouc émissaire.

Les faits seront minutieusement reconstitué à la manière d'un reportage assez sordide.

Bref, on va avoir droit au pire de ce que l'humanité peut offrir. Une lecture qui ne sera pas saine et pour un public très averti.
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J'ai retrouvé toute la puissance du livre de Jean Teulé, avec le dégoût visuel en plus. Un ami qui n'avait pas lu le livre et ne connaissait pas le fait divers a été particulièrement déstabilisé en feuilletant la BD. Il faut dire que ce noir et blanc où les seules touches de couleur sont le rouge sang d'Alain de Moneys poursuivi, battu, torturé par la foule... c'est dérangeant. Mais nécessaire, à mon avis.

Le roman de Jean Teulé a déjà une forte puissance évocatrice. Et rendre cela, ce n'était pas un pari gagné d'avance. Mais le résultat est à la hauteur de l'abomination qui s'est déroulée en cette belle journée d'été 1870 à la foire d'Hautefaye. Sorte d'hallucination collective, de folie de masse, de mouvement de foule, comme on a pu en voir à Abu Graïb par exemple (aux dires des soldats jugés et condamnés). Sur un malentendu, la foule va se mettre à poursuivre Alain de Moneys, fils de riche propriétaire, bien vu de tout le monde et qui a refusé d'acheter un ticket d'exemption pour la guerre contre les Prussiens. Il veut aller combattre. Et c'est toute l'ironie de la chose... il va être pris pour un Prussien dans ce mouvement de folie collective. Car la France subit de lourdes défaites face aux Pruissiens et les paysans ne veulent pas que leurs fils partent à la guerre (cela n'excuse ni ne justifie rien...). Et cette folie est loin d'être passagère... Plusieurs heures durant, il va être torturé, puis sauvé par quelques amis qui voient clair, puis repris et torturé de nouveau, et ainsi de suite. Et il va même être brûlé, cuit et mangé sur des tartines. Il est vrai que la météo est mauvaise, les récoltes désastreuses... mais cela n'excuse rien, bien sûr. Cela fournit un détail macabre de plus à Jean Teulé. Il en raffolait.

Il faut revenir sur ces amis d'Alain de Moneys. Car cela montre un peu d'espoir. Tout le monde ne cède pas à la folie collective. Et je formule le voeux que j'aurais été de ce côté, et non pas de la foule.

Le fait divers est saisissant et dérangeant, malaisant. Tout comme le roman. Tout comme cette BD. Mais cela vaut la peine de s'accrocher jusqu'au bout. Jusqu'au jugement. Jusqu'aux suites plusieurs mois plus tard.
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De qui préférons-nous tenir ? du chimpanzé ou du bonobo ?

Le roman de Jean Teulé a fait son petit effet en son temps, et je ne suis pas sûr qu'il ait valu à son auteur une grosse côte de popularité de la part des périgourdins ! Il faut reconnaître que les faits, avérés historiquement, ne livrent pas une image paisible des autochtones du nord Dordogne de cette époque. Une image que leurs... descendants(?) n'apprécient sûrement pas qu'on mette en avant...
Une image qui cadre mal avec la douceur de vivre d'une campagne vallonnée réputée pour sa douceur de vivre, le foie-gras qu'on y cuisine, les noix, les cèpes et la truffe qu'on y récolte, le Bergerac , le Pineau, le Cognac ou quelque autre nectar plus ou moins fermenté qu'on y peaufine et consomme avec plus ou moins de modération.

Il est d'ailleurs fait allusion page 24 à un cépage appelé Noah qui entrait à l'époque en Périgord dans la composition des nectars précités. Un cépage goûteux à forte teneur en sucre dont la culture fut interdite et les plants arrachés au 20e siècle, quand le corps médical eût démontré sa toxicité pour le système nerveux après fermentation...

Il faisait chaud cet été là, en 1870. Très chaud, même. La sécheresse sévissait depuis des mois et pour la population rurale locale c'était une calamité. A la foire de Hautefaye où traînaient quelques centaines de badauds, une bonne poignée de soiffards s'était déjà pas mal consolée avec une cuvée de Noah, précisément.
Concours de circonstance, c'est à ces soiffards qu'Alain de Money dut son calvaire et son incroyable supplice, pour une allusion à la guerre qu'il fit sans penser à mal et que ces quelques excités prirent pour du défaitisme. Et quel calvaire, quel supplice ! Roué de coups des heures durant, torturé puis brûlé et enfin même un peu mangé, on peine à le croire et c'est pourtant vrai !
Le plus incroyable dans cette histoire c'est l'effet boule de neige, car cette poignée de furieux "patriotes" entraîna vers la complicité active un nombre invraisemblable de suiveurs qui torturèrent toute une longue après-midi d'été ce pauvre de Money, le traînant de place en place pour un chemin de croix pour le moins... diabolique.
Mettre ce chemin de croix en images était une gageure et Gelli s'est mesuré au défi avec brio, je trouve. Son graphisme schématique monochrome est très efficace en noir et blanc, "rehaussé" de moins en moins discrètement par des éclaboussures de rouge, bien sûr.
La dramaturgie franchit les limites du supportable avec notamment l'orgie meurtrière collective dans la bergerie, "agrémentée" d'une scène de copulation très...dérangeante. On se demande s'il fallait oser les images mais Gelli l'a fait, jusqu'au bout, jusqu'au bûcher, jusqu'au cannibalisme.

A-t-il bien fait ? Je ne sais pas.
Ai-je bien fait de prendre cette BD dans ma petite bibliothèque du nord Dordogne où je vis ? Je ne sais pas.
Quoi qu'il en soit, fasciné, j'ai lu et regardé jusqu'au bout, incrédule bien que je connaisse l'histoire, bien que j'aie lu le livre de Teulé et vu à Paris la pièce qu'il en a tirée.
La mise en images est ici au moins aussi efficace, sinon plus, que le livre et la pièce ! Oui, avec sa BD, l'audacieux Gelli m'a chopé plus encore que ne l'avait fait Teulé, je crois.

Les faits-divers sordides ont un indéniable pouvoir d'attraction pour nombre de citoyens ordinaires, dont je suis pour le coup.
Peut-être se demande-t-on inconsciemment l'attitude qu'on aurait eu, si on avait été mis en présence d'une telle folie collective ?

L'homme, parfois bonne pomme, est aussi parfois un drôle de... bonobomme !
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MANGEZ-LE SI VOUS VOULEZ
de Gelli
d'après le roman de Jean Teulé

Roman graphique
Delcourt Éditions / septembre 2020

Jean Teulé fait partie de mon trio de tête concernant les auteurs français.

En adaptant le roman le plus noir de Jean Teulé, Dominique Gelli s'attaque aussi à un monument des annales judiciaires françaises. L'expressivité de son travail traduit de façon troublante le martyr d'Alain de Monéys.

Une triste illustration des capacités quasi infinie de la connerie humaine, surtout lorsqu'elle est portée par la foule, et par des élans de chauvinisme.

On ressort de ce récit sonné, halluciné, traumatisé, un récit véridique où la réalité dépasse largement la fiction, adapté avec grand talent par Gelli. Narrée dans un mode fictionnel, l'histoire bénéficie d'un découpage pertinent.

Chaque début de chapitre présentant une carte des lieux de l'action permet de rappeler que tout cela est bien arrivé, ce qui ajoute encore à l'effroi.

Gelli a su adopter la meilleure approche graphique pour mettre en images ce fait divers où l'horreur atteint des sommets.

D'un semi-réalisme minimaliste, où la seule note de couleur au milieu du noir et blanc est le rouge écarlate du sang versé, le trait voit ses contours se dissoudre sous des traces charbonneuses, comme pour masquer l'innommable, bifurquant parfois vers la métaphore en référence aux légendes locales.

Dieu, que l'humain est con !

Un album très noir, très dérangeant, qui nous met face à notre sauvagerie potentielle et s'impose comme un des indispensables à posséder.

Merci.

Bravo.
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Une loi ne pourra jamais obliger un homme à aimer mais il est important qu'elle lui interdise de me lyncher.
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- Otez cet homme de là ! Il gène la circulation !
- L'emmener plus loin ? Mais pour quoi faire ?
- Ce que vous voudrez ! Mangez-le si vous voulez.
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Et pourtant, nous étions de braves gens...
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Mes amis, il y a méprise... Vous vous trompez... Je suis prêt à souffrir pour la France !
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Il faut le brûler, sinon c'est la Prusse qui viendra nous mettre le feu ! (119)
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Vidéo de Dominique Gelli
1,2,3 BD ! Chez les libraires ! présente les BD coups de cœurs de Jérôme et la librairie La planète dessin à Paris. -Zaroff, La Vengeance de Zaroff - « Crénom, Baudelaire ! » de Jean Teulé adapté par Dominique et Tino Gelli chez Futuropolis -L’Oulipo par la bande par Étienne Lécroart chez l’Association 1,2,3 BD c’est le jeudi à 18h30 sur la chaine Youtube et les RS. Trait pour Trait parcourt toujours les librairies de France pour des conseils de lecture
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