Nouvelle mise en abyme avec cette autre pièce de
Genet, mais dans un genre beaucoup plus grand-guignolesque et absurde : finie la sobriété des décors, des personnages, et de la situation des soeurs des Bonnes, puisque nous atterrissons, sans coup férir également, dans un bordel bien particulier. En effet, les clients paient pour jouer des rôles de personnages puissants, dans des mises en scènes rodées au millimètre, face à des femmes qui vont être sous leur domination : ainsi de l'Evêque, du Juge, ou encore du Général. Au fil de neuf tableaux, nous découvrons le fonctionnement du bordel, sa tenancière, Irma, et tous ceux qui gravitent autour, avec en toile de fond une révolte populaire qui gronde alentour, sans que l'on ne connaisse vraiment, du début à la fin, les raisons de cette révolte, mais dont nous découvrirons, malgré tout, l'issue.
Que de thématiques abordées dans cette pièce foisonnante, parfois complexe à appréhender de ce fait, notamment en raison de la profusion des personnages, des relations, ou encore des intrigues qui se nouent, sans que l'on ne comprenne immédiatement leur finalité. L'on peut facilement s'y perdre, à l'aune des jeux de pouvoir, des jeux de miroir et de trompe-l'oeil – au sein des décors comme des personnages -, qui symbolisent tout le caractère illusoire et factice de notre société. Caractère aussi parfaitement mis en exergue par le langage utilisé, tour à tour percutant, fusant avec beaucoup de violence, et ample, permettant aux personnages de mettre en lumière toute leur duplicité – ils jouent presque tous, un rôle, après tout-, ou encore par la variété des registres, nous faisant évoluer en quelques répliques d'un grotesque carnavalesque à un tragique noir, désabusé et cynique, le tout éminemment représentatif de la pensée, et de l'esthétique, du dramaturge.
Une grande pièce en somme, qui bouscule, avec délectation, et les codes théâtraux, et les codes moraux des années 1950, sur laquelle je vais avoir plaisir à travailler cette année.
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