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sur 963 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Deux bonnes,
des bonnes à tout faire,
des bonnes à rien.
Des bonnes à tuer celle qu’elles détestent
et singent par jalousie,
leur maitresse, ni meilleure ni pire qu’une autre,
le symbole de leur soumission qu’il faut mettre à mort.
Madame est servie.
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Pièce d'une seule pièce, d'un acte unique de haine compacte et mûrie dans la servitude et l'ennui.
Un seul acte, un seul coup.
Diamant noir, comme la robe de ces bonnes-animaux domestiques.
La folie, la vengeance, la révolte, tout est là dans ce morne huis-clos, cette tranche d'existence de deux misères au service de la convention bourgeoise et mortifère.
Jean Genet secoue, révèle, insinue et s'insurge par ces deux bonnes que madame confond parfois: Claire et Solange, comme les échos noirs d'un fait divers tant provincial qu'abominable.
Les Bonnes, ces ombres de madame, vont me hanter quelques temps.
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Très bon moment de lecture de cette pièce qui a en partie inspiré Claude Chabrol pour son excellent film "La Cérémonie". Les deux soeurs Claire et Solange sont bonnes, au service de Madame depuis de nombreuses années. Tous les soirs en l'absence de leur Maîtresse elles s'adonnent à une sorte de jeu de rôle, où Claire joue la Maîtresse et Solange joue Claire. Elle se parent des robes de Madame et jouent des scènes de dialogues tendus, où la haine, la jalousie, sont présentes, envisageant de tuer leur Maîtresse.

On apprend que l'amant de Madame, qu'on appellera Monsieur, a été emprisonné sur la base de lettres de dénonciation adressées à la police par Claire, et que Solange en pincerait bien pour Monsieur, au point qu'il y a peut-être eu liaison entre eux. Et puis elles ne supportent plus d'être si bien traitées par Madame, qui pour le coup est trop "bonne". Ce soir-là, elles ont prévu de faire boire un tilleul empoisonné à leur Maîtresse à son retour, mais Monsieur appelle (Claire décroche) pour annoncer sa libération provisoire...Dès lors, Madame préférera courir rejoindre Monsieur et sabler le champagne au lieu d'avaler son tilleul...Les deux bonnes restées seules reprennent leur jeu dans un tourbillon schizophrénique.

Oeuvre troublante à plus d'un titre : beaucoup de choses sont suggérées et non vraiment dites (liaison réelle ou supposée entre Solange et Monsieur, relation peut-être homosexuelle entre les deux soeurs...), il y a un trouble sur l'identité des deux femmes qui jouent souvent quelqu'un d'autre jusqu'à une forme de dédoublement, à ne plus savoir qui elles sont vraiment et à qui elles s'adressent, trouble sur leurs intentions, malsaines et inquiétantes, et leurs motivations, obscures et absurdes. Cette ambiance de perversité confine à la folie et constitue sans doute aussi un hommage au théâtre, les bonnes jouant en quelque sorte une pièce dans la pièce.
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Lorsqu'elle a été créée, cette pièce a fait scandale, elle fut jugée odieuse et malsaine. C'est vrai, « les bonnes » n'est pas une lecture agréable mais ça n'est pas le but. de l'aveu même de l'auteur, la pièce vise à créer le malaise. Oeuvre intemporelle, encore aujourd'hui, la lecture de la pièce de Genet secoue et dérange. Loin de la provocation facile pseudo-dérangeante de pièces mettant en scène des bourgeois qui s'invectivent en hurlant sur des sujets futiles, la pièce de Genet est bien plus subversive, adoptant une approche plus insidieuse pour évoquer la violence des rapports de classe.

Les bonnes haïssent leur maîtresse. Leur haine se nourrit du mépris de classe de Madame à leur endroit, un mépris qui s'exprime dans une forme pervertie de bienveillance qui vient rappeler de façon sournoisement humiliante la place de chacun. Les ordres de Madame ont beau être susurrés, ils sonnent comme des aboiements aux oreilles des soeurs. La générosité de Madame qui offre les robes et renards dont elle ne veut plus est ressentie comme une gifle par les bonnes. Ce rapport de force dominant / dominé est tellement intériorisé par les servantes qu'il n'a pas besoin d'être exprimé explicitement par la patronne pour être ressenti dans sa violence intrinsèque. Que certains soient nés pour servir tandis que d'autres soient nés pour être servis, n'est-ce pas là la plus grande violence qui puisse être ?
A cette haine résultant de l'humiliation permanente de leur condition, s'ajoute pour les soeurs une forme d'idolâtrie envers leur maîtresse. Elles la jalousent bien entendu, elles envient ses robes, ses fards, ses amours, mais cette jalousie est teintée d'une admiration quasi-sensuelle. Cette admiration ambigüe vient encore nourrir la haine des soeurs.
Ces sentiments, qui dans les faits sont tus, retenus, contenus, s'expriment de façon exacerbée et outrancière lors de la cérémonie imaginée par les soeurs où chacune à tour de rôle incarne la patronne. Dans ce rituel cathartique, où on ne sait plus qui est qui, les émotions emprisonnées sont expulsées sans fard et expriment ainsi la réalité des relations maîtresse / servantes débarrassées du vernis de la bienséance.

Si l'écriture de Genet flatte joliment les oreilles, certaines répliques sont brutalement belles, ce texte demeure assez aride et demande un effort au lecteur. Les jeux de rôles des personnages, les faux-semblants, les dissimulations et les non-dits font des « bonnes » une oeuvre difficile à appréhender.
Le plaisir de lecture n'est certes pas immédiat mais la satisfaction est ailleurs et à rebours. « Les bonnes » est une oeuvre très riche qui s'insinue dans l'esprit du lecteur pour s'y installer durablement en laissant une impression très forte.

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Une pièce qui va très vite, trois personnages , et un Monsieur qui ne fera qu'une intervention téléphonique. C'est court mais intense. Ça se lit très vite, tant on veut savoir le fin mot de l'histoire, les deux soeurs vont elles aller au bout de leur folie.
La fin est étrange, on la voudrait différente.

J'ai bien aimé les instructions de l'auteur : comment jouer les bonnes. Je ne connais pas le personnage, mais il semblerait qu'il avait du caractère !


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Avec Les bonnes, c'est une entrée sans coup férir sur scène, en un souffle, sans pause permise par un quelconque acte ou une quelconque scène, via la mise en abyme classique du théâtre dans le théâtre, dans laquelle Solange est déguisée en Claire, sa soeur, tandis que Claire est déguisée en Madame, dont elles sont toutes deux les bonnes. Dans l'appartement parisien et bourgeois de Madame, toutes deux changent de rôle pour mieux sortir d'elles-mêmes, tout simplement, du moins au départ, puisque, finalement, ce jeu, en apparence d'une grande légèreté, prendra rapidement des accents plus graves, distillant le tragique pressenti dès les premiers échanges entre les soeurs.

Mise en abyme somme toute classique, mais d'une violence et d'une modernité qui peuvent perturber – du moins en 1947, année de sa première mise en scène, alors que l'on a toujours en tête l'affaire des soeurs Papin, bien que Genet ait toujours nié s'en être inspiré – : violence des gestes, des mots, des pensées qui nous sont comme parfois crachés au visage par ces jeunes femmes qui se cherchent, qui cherchent avant tout à être autre chose que leur simple condition sociale – comme aime le rappeler le titre, elles sont « Les bonnes » – ; économie de décors – selon les mises en scène -, des personnages, car ce qui importe, ce sont Claire et Solange qui sont, enfin, auréolées de lumière, celle qui leur donne une place centrale dans la pièce, celle qui deviendra sombre, de plus en plus sombre, au fur et à mesure que l'une, Claire, se laissera envahir par une passion meurtrière, tandis que l'autre, Solange, tâchera de ramener à la raison sa jeune soeur. La tension est croissante, la gêne du spectateur aussi, jusqu'à l'acmé final faisant de la mise en abyme première le véritable ressort tragique de la pièce, puisque ce sont les rôles, plus que les êtres, qui l'emportent sur la fatalité du monde et des choses.

Et c'est, en somme, tout ce qui me plaît chez Genet : cette crudité violente qui paraît derrière le masque, qui s'en échappe avec fulgurance pour mieux s'en retourner, et entrer dans les cases mondaines et sociales dévolues à chacun, jusqu'à la prochaine échappée, qui sera un jour ou l'autre fatale. Et c'est, en somme, un plaisir qu'il soit, de nouveau, cette année, au programme de l'agrégation, pour pouvoir analyser plus avant cette pièce.
Lien : https://lartetletreblog.com/..
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Une pièce de théâtre inspirée d'un fait divers, l'affaire Papin, quoique Genet s'en soit toujours défendu.

Claire et Solange, deux soeurs, sont les domestiques de Madame et Monsieur. En l'absence de leurs employeurs, elles intervertissent les rôles au cours d'une « cérémonie » (titre que Chabrol a d'ailleurs choisi pour son film basé sur la même affaire), une sorte de messe noire.

Le début de la pièce est confondant. Je m'y suis reprise à deux fois, jusqu'à ce que je saisisse le jeu de rôle. Mon premier Genet, mais sûrement pas le dernier. J'ai apprécié sa plume, saccadée, mais rythmée, et chargée de sous-entendus. À relire ou à voir (un jour j'espère) sur les planches.
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J'avais connu Jean Genet grâce à la mise en scène, au théâtre de la Criée, des Paravents, par Marcel Maréchal, et compris sa sulfureuse portée. Plus tard, j'ai connu sa biographie étonnante ; mais Les Bonnes, ce célèbre drame du XXème siècle, m'avait paru trop artificiel.

Fondée sur un fait divers (les soeurs Papin assassinant sauvagement leur maîtresse) et une chanson de Cocteau, Jean Genet a imaginé un jeu entre deux bonnes, Claire et Solange. Une sorte de jeu de rôle où l'un d'elle joue leur maîtresse et l'autre se soumet à elle, mais tente aussi de l'assassiner. Est-ce d'ailleurs bien la maîtresse qui est visée et non pas sa soeur ?

Cf. note de lecture entière sur mon blog :
Lien : http://aufildesimages.canalb..
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Roman en forme de pièce de théâtre. A peine trois personnages ; les deux bonnes et Madame. Que peut-il se passer entre ces trois personnages ? Eh bien voilà : les deux bonnes voudraient assassiner Madame . Que le rideau se lève !!! Toc,toc, toc !
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Cette année je voulais découvrir Jean Genet. J'ai aussi choisi de lire cette pièce, son oeuvre la plus connue. Je n'ai pas été déçu. Mais je la trouve très moderne pour une pièce de 1947 ! Trop avant-gardiste pour l'époque, ce qui explique son manque de succès mais pour moi c'est une réussite.
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