Les mains vides

Une histoire simple ? pas si sûr, l'histoire d'un homme qui se pense artiste, qui cherche la perfection chez les autres mais surtout en lui. Un homme tout compte fait égoïste, lâche, faible. Un homme qui semble magnifique, puis perdu, puis méprisable puis ignoble...puis perdu à nouveau.

Mais au coeur du récit, il y a la langue de Genevoix. Lire Genevoix, c'est réapprendre la richesse de la langue française. Se rendre compte à chaque page de la pauvreté de notre propre vocabulaire. Mots balayés par les textos, anglicismes, raccourcis, imprécisions de toutes sortes. Lire Genevoix c'est redécouvrir l'art de la description, de la contemplation.
Un récit qui coule en douceur mais avec puissance...tout comme la Loire, fil conducteur de ce court roman.

Roger Cassagnères est un artiste peintre sans véritable talent. Confronté en permanence à la dualité de ses pensées qui le ballotent entre des rêves fous et une réalité désastreuse, il mène une existence précaire, faite de malchance et de perpétuels désamours. Doté d'une personnalité asociale, d'un caractère ombrageux et instable, ses réactions égocentriques lui vaudront bien des désillusions au plan relationnel ainsi que des déboires sentimentaux. Peu à peu, les troubles de son comportement ébranleront son psychisme et éveilleront en lui des pulsions mortifères.

A la manière d'Emile Zola, de Guy de Maupassant ou d'Honoré de Balzac, Maurice Genevoix démontre une nouvelle fois son immense talent d'écrivain. A la faveur d'un style littéraire qui force le respect et d'une plume qu'il trempe dans une palette de couleurs multicolores, il brosse un sublime tableau en clair-obscur que Roger, le personnage principal du roman, n'aurait jamais pu créer. Il dépeint, avec force détails, les déficiences comportementales et mentales de cet homme en proie à de graves souffrances psychiques. Pour adoucir cette atmosphère pesante, il dévoile un récit naturiste et romanesque dont le scénario principal se déroule le long des rives de la Loire, au coeur de la Beauce, région de prédilection du romancier, qu'il magnifie par de superbes envolées poétiques et lyriques. Cette lecture passionnante m'a littéralement subjuguée et emportée dans un nouveau chef d'oeuvre de la littérature classique.

Un village du Morvan dans les années 1920. Un peintre, écrivain, raté intégral. Un drame rural. On s'ennuie à mourir dans ce roman pourtant fort bien écrit. Quel supplice ! Quel dommage !