Alain GERBER :
Miles.
Après
Chet, Lady Day,
Louie,
Charlie, Paul Desmond, ouvrages tous réédités au
Livre de Poche,
Alain Gerber nous offre sa vision personnelle d'un autre monstre du jazz :
Miles Davis.
Et pour cela il a endossé les personnalités de Max Roach, le batteur qui a joué avec
Miles et
Charlie Parker alias Bird, quelques autres comparses dont, étonnant quoi que, Jimi Hendricks, et
Miles lui-même, changeant à chaque fois de style d'écriture afin de mieux se mettre dans la peau du rôle.
Les relations de
Miles avec son père, chirurgien dentiste, sa mère Cleota Henry, ses compagnons de route, la musique, la drogue, sont décrites avec verve, tendresse, virulence, sérieux, rage parfois.
Ainsi le témoignage de Max Roach qui décrit l'état de
Miles de retour de Paris et dont la liaison avec
Juliette Gréco lui trottine toujours dans la tête. Les virées jusqu'à East Saint-Louis en compagnie de
CharlieMingus dit le Baron, son père étant allé le repêcher en cours de route suite à un appel au secours, la fausse décontraction de ce père envers un fils qui n'arrive pas à se détacher de la drogue. Un père qui paie les dettes sans sourciller, écoeuré par les frasques de son fils, mais qu'il tente à chaque fois de remettre sur la bonne voie.
Le témoignage de
Miles vis-à-vis de sa mère, qui ayant quitté le foyer familial pour de fumeuses raisons financières et autres, restera toujours un symbole. Et ce malgré les tannées qu'elle lui infligeait enfant, et lorsqu'elle en avait marre de taper sur son fils passait le fouet au père qui trouvait des subterfuges afin de faire croire qu'il corrigeait le jeune
Miles.
Cette femme m'aurait tué sur place, que ça ne m'aurait pas dissuadé de l'admirer. Et il continue sur ce registre « Disons que je suis spécial, de ce côté-là. Je suis ainsi fait que je ne peux pas admirer quelqu'un sans l'aimer (sauf Bird, je l'admets, mais c'est l'exception qui confirme la règle). A l'inverse, j'ai beaucoup de mal à aimer si je n'admire pas. Même s'il s'agit de mes propres enfants ».
Effectivement, les rapports entre Bird et
Miles n'étaient que purement musicaux, et encore,
Dizzy Gillespie servant de tampon. Une rencontre musicale qui le propulse alors qu'auparavant il s'était produit aux côtés d'Eddy Randle et les
Blues Devils.
Il s'engagera, sur les conseils de Clark Terry, dans un orchestre de la Nouvelle-Orléans, les Six Brown Cats d'Adam Lambert. Il les suit jusqu'à Chicago, mais ce n'est pas son truc.
Je ne supportais déjà plus ces vieilleries. Pour moi, dès qu'une musique n'est pas du lendemain, c'est qu'elle est de la veille. Et si elle est de la veille, elle est déjà morte. Ce n'est plus qu'un fossile.
Miles Davis, c'est ce caractère progressiste, avec l'envie, le besoin, de toujours aller de l'avant, d'innover, de rechercher, d'explorer, d'inventer. C'est ainsi que par épisodes
Alain Gerber nous entraîne sur les traces de ce musicien qui défraya la chronique tant par sa musique que par son comportement, fidèle à lui-même, orgueilleux, technicien, « poussant l'histoire du jazz dans le dos ».
Des témoignages poignants, révélateurs, qui semblent réels, véridiques. Mais
Alain Gerber, même s'il extrapole, a construit ce roman avec des matériaux nobles, solides, fiables. Et à la lecture, il me semble encore entendre
Alain Gerber narrer à la radio cette pseudo-biographie de
Miles Davis. C'était fin 2006 me semble-t-il.
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