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Critique de Bazart


Une fois n'est pas coutume, ce n'est pas un roman mais un essai que j'ai choisi de lire dans le cadre de l'opération Masse Critique proposé par le site Babelio. Pour corser le tout, l'essai en question s'avère être un document à forte connotation politique puisqu'il est écrit par un élu communiste, ancien maire d'une ville que je connais bien, Vénissieux, agglomération limitrophe de Lyon.

Pourquoi Vénissieux? Car c'est ici que le 16 juillet 1981, ont été photographiées les premières voitures en feu. Sous le joli nom d'"étés chauds des Minguettes", débutait ce jour-là sans qu'on le comprenne bien, la crise des banlieues qui a pris l'ampleur que l'on sait.

André Gerin fut Maire de Vénissieux de 1985 à 2008. Depuis 1993, il est député du Rhône et a d'ores et déjà annoncé qu'il ne briguerait pas un nouveau mandat. C'est donc un homme plus libre que jamais qui décide d'interpeler l'ensemble de la classe politique et au-delà l'ensemble des Français sur la situation de nos banlieues et plus particulièrement des quartiers difficiles comme celui des Minguettes qu'il n'hésite pas à qualifier de "Ghettos de la République".

Dans ce livre, André Gerin raconte sans fard la vie des quartiers au quotidien ; il décrit la violence, l'économie parallèle, la place prise par les fondamentalistes musulmans, les difficultés d'intégration et la misère. Il parle de son expérience, de la politique qu'il mène, du rôle des maires et de leur manque de moyens. Au risque de choquer son camp politique, il explique comment la réalité l'a conduit à changer son rapport à la police et à faire de la sécurité sa priorité. Il fut l'un des premiers à comprendre que la gauche devait prendre cette question à bras-le-corps faute de quoi, elle verrait - et tout particulièrement le PC - une partie significative de son électorat déserter les urnes ou se déporter vers le Front national.

Cinq ans après la première parution de ce livre, et à la veille des prochaines élections présidentielles, André Gerin veut de nouveau tirer la sonnette d'alarme. Depuis 2007, rien n'a été fait. Et c'est avec une certaine amertume que l'auteur constate que ce qu'il écrivait il y a cinq ans est plus que jamais d'actualité et qu'il est urgent de mettre en oeuvre les solutions qu'il préconise.
Pire, sous l'oeil indifférent de responsables politiques qui ont toujours mieux à faire et plus urgent à traiter, la situation s'est dégradée.

Dans son livre qui vire parfois au programme politique (alors même qu'il a cessé toutes fonctions électives), André Gerin propose un certain nombre mesures pour en finir avec les ghettos ( raccompagnement des enfants de moins de 12 ans après 22 heures chez leurs parents ; création d'un service civique obligatoire pour les garçons et filles de 16 à 21 ans, rétablissement de la police nationale de proximité...)

Gérin souligne également le développement inquiétant d'un islam radical qui, nourri par la misère et le désespoir, s'épanouit et impose ses lois dans ces espaces abandonnés par la République. Sur cette question de la laïcité qui est au coeur du pacte républicain, André Gerin, qui a présidé la commission parlementaire sur le port du voile intégral en public, se veut sans indulgence.

André Gerin affirme qu'il faut « oser parler de l'islam et de l'immigration sans donner dans la naïveté, ni dans l'hostilité », pour mieux défendre les valeurs républicaines et laïques contre l'électoralisme du Front National et contre « les gourous islamistes intégristes »

Les Ghettos de la république est donc une lecture passionnante à lire, même si pas toujours trés confortable pour l'homme de gauche que je suis, car elle va assez proondément à l'encontre du clivage classique gauche droite et de certaines valeurs habituellement défendues par la Gauche.

Si je n'ai pas toujours été d'accord avec les propos de son auteur ( sur les mesures qu'il propose, comme le service civique obligatoire, mesure totalement superflue à mes yeux), le fait qu'il connaisse parfaitement le terrain, contrairement à d'autres élus qui s'approprient le thème sans avoir les mains dans le cambouis, lui confère forcément une légitimité que nul ne peut ignorer.

Même si je ne pense pas que ce livre sera un document essentiel de la campagne qui s'annonce- le sujet des banlieues semblant être complètement ignoré par l'ensemble des candidats à la présidentielle- la prise de conscience d'André Gerin mérite d'être saluée.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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