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EAN : 9782226220721
128 pages
Albin Michel (06/04/2011)
3.77/5   32 notes
Résumé :
Récits, hommage à ses parents disparus, dont tout lecteur ne peut que ressentir la puissance, l’émotion et la beauté. Dans Variations sibériennes, Sylvie Germain évoque un voyage dans le Transsibérien juste après la mort de sa mère. Tout en s’imprégnant de cette « terre qui dort » où reposent mammouths et princesses de l’Altaï, elle convie les poètes Pasternak, Akhmatova, Cendrars, Mandelstam, mais aussi les esprits, les légendes, tout ce qui fait l’âme d’un peuple,... >Voir plus
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«Il va, le Transsibérien, il va il va, il épouse le temps, macéré de patience. Il traverse une géographie du temps, d'ouest en est. Il va à rebours du trajet du soleil. Il désheure le corps, et peu à peu, l'esprit des passagers. Il fait matin en plein sommeil, et vif éveil au milieu de la nuit. Demain grignote chaque aujourd'hui.»
Comment dire le monde sans vous, père et mère ? Dans le Transsibérien qui l'emporte, l'éloigne, Sylvie Germain à travers les poètes qu'elle aime, la beauté des paysages traversés, les peuples disparus qu'elle évoque, tente d'apprivoiser le vide de l'absence. Elle nous offre là l'un de ses textes les plus poignants.
Le chant qu'elle élève à «la candeur souveraine du bleu du lac Baïkal» dont elle dit qu' «Il est aussi une vulve bleu satin chaste dans sa nudité qui est ostension de splendeur» est à l'image de tout ce livre, un hymne à l'amour.

C'est bien souvent que les larmes affleurent en le lisant et il rejoint un autre livre qui ne me quitte pas «La pleurante des rues de Prague» où Sylvie Germain évoquait, dans la sixième apparition de la pleurante, la mort de son père survenue alors qu'elle vivait en Tchécoslovaquie.
Ces deux disparitions se répondent dans "le monde sans vous" où elle reprend d'autres textes écrits pour la mort du jardinier amoureux des roses. Des poètes bercent l'évocation de sa mère, des peintres ravivent celle de son père.
«Et pas de dernier mot. Juste des mots nomades, infusés du silence même qui irradie des disparus, du grand silence qui flue de l'extrême lointain vers lequel ils s'en vont, inexorablement. Juste des mots légers comme des caresses, des signes de salutation, des sourires encore pâles, souvent brouillés de larmes, mais non dépourvus de clarté. Des mots, de simples mots sans prétention, moins pour chercher à bâtir de superbes tombeaux que pour tenter d'ouvrir en grand les tombeaux vides, et de les maintenir tels.»
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Je découvre Sylvie Germain par ce livre, composé de trois textes.
Le premier est le fruit d'une proposition de France Culture auprès de 4 écrivains, celle de poser en mots un voyage à bord du Transsibérien, de Moscou à Vladivostok. J'avais déjà lu le récit qui en avait résulté de Maylis de Kerangal, voici maintenant celui de Sylvie Germain.
Ce voyage presque immobile, puisqu'on ne quitte presque jamais le train, incite à l'introspection, et si quelques fragments de paysages et bribes de la vie à bord émergent de temps en temps du récit, c'est surtout en elle-même que plonge Sylvie Germain, pour y retrouver sa mère récemment disparue. Pour fixer le portrait qui se dessine, elle tisse autour de lui des extraits de poèmes, en particulier ceux de Ossip Mandelstamp qu'il me reste à découvrir, et des évocations de récits mythiques. L'écriture nous plonge dans cette contemplation de la pensée et m'a parfois perdue, je l'avoue.
De même, les textes qui suivent, ciselés autour des mots et des évocations qu'ils provoquent, rendent cette fois-ci hommage à son père, sa vie à partir de son enfance.
Certains passages sont beaux, émouvants, mais les références d'un bout à l'autre ainsi que cette recherche minutieuse par les mots m'ont parfois découragée et je pense être passée à côté de certains passages.
Je retenterai avec d'autres écrits.
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Orfèvre des mots, oui, Sylvie Germain l'est. Et comme toujours la beauté à laquelle elle nous ouvre nous fait flotter entre deux mondes, le monde d'ici-bas et celui d'en haut, auquel ses phrases magnifiques nous aident à accéder, de livre en livre, comme le révélateur laissait apparaître petit à petit la photo (avant l'ère du numérique où tout se fait si vite et si mal).
Jamais de leçon de morale chez Sylvie Germain, ni d'idées toutes faites et désespérément réductrices, mais une invitation à un travail sur soi dans lequel deuil et douleur, bien et mal sont transcendés par l'amour, et par lequel l'espérance se dégage de sa gangue informe et pesante pour nous ouvrir à la joie de la beauté . Certes ce n'est pas toujours facile à lire, et pourtant ! quel hommage, dans ce livre, à ses parents tous les deux décédés, et à ce monde si particulier de la Sibérie, qui garde en elle, jalousement cachée et parfois indûment violée, toute la mémoire de nos origines. Il faut se laisser porter par ce langage qui semble quelquefois un peu décousu, mais dont l'extrême précision métaphorique nous ouvre à un au-delà de nous-mêmes auquel il est habituellement si difficile d'accéder.
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Je tisserai les mots en guise de linceul.

Apprivoiser l'absence, laisser les pensées flotter, laisser sourdre l'émotion…Sylvie Germain nous livre quatre récits consacrés à ses parents disparus.

« Variations sibériennes » est un récit nomade …souvenirs, évocations et paroles à sa mère présente en filigranes au fil d'un voyage en Sibérie. Sylvie Germain met en mots ses pensées, ses émotions, son hommage et son au revoir à sa mère.
De cet au revoir naît la beauté, nous l'accueillons et entrons en résonance avec cet ailleurs, nos pensées errent entre ciel et terre.
« Kaléidoscope ou notules en marge du père » est d'une autre nature, il s'agit plus d'une évocation, d'un hommage au père et à son univers. Cette fois encore, les mots de Sylvie Germain sont justes et suscitent l'émotion.
Il faut lire Sylvie Germain en ouvrant toutes les écoutilles, ses mots rebondissent dans notre être faisant naître une mélodie, dessinant un paysage ; tous les sens sont réceptifs, émotions et pensées synchrones…un voyage vers l'au-dedans.
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Un monde sans vous
Un monde sans vous – toute une terre en nous.
Tout au long de cet atlas amoureux, Sylvie Germain ne nous parle que d'amour. L'amour primaire, l'amour terre . La terre muette, la terre fablier ,la terre en sommeil , la terre joueuse, la terre terminale. La mère première.
La terre dans tout notre état.
Savait elle en prenant le Transsibérien jusqu'à Vladivostok qu'elle prendrait avec elle tous ces mots? « Les mots sont des chiens d'aveugle » écrivait Serge Wellens.
Alors commence un voyage, un regard mis en mots. La cécité? L'absence de la personne.
L'absence de la mère et de tous ses autres.
Les autres dont on devine l'amour que Sylvie Germain a pour leurs mots. Pour leurs dits, pour tous les mots d'Ossip Mandelstam, Anna Akhmatova, Boris Pasternak, Serge Wellens. .
Tous ces autres en voyage, en partance, en exil, en recherche. Tous chamans.
Un livre résurgence. Des mots qui vous atteignent par capillarité.
La Sibérie, le centre du Loin.
Un voyage à rebours. Recherche d'une passerelle entre les vivants et les morts. Tous ces mots remontent en nous, nous respirons la terre, nous la regardons. Sylvie Germain nous la dit.
Et les couleurs se déploient, défilent, nous enveloppent et nous entraînent vers l'oeil bleu du lac Baïkal, vers les abîmes. Au plus profond.
S'extirper de la terre, la parcourir et puis la retrouver. Se fondre en elle. Sylvie Germain prend un poignée de lettres: T a ï g a , la soupèse et la décortique. Elle nous montre l'humus des mots.
Vivre pour renaître, et, transmettre.
Rien n'est plus grouillant de vie que la terre. Paradoxe. Là reposent les absents.
Symbiose entre la terre et les hommes.

Kaléidoscope ou notules en marge du père, Il n'y a plus d'images,Cependant.
Image du père. Beauté du père. Poussière d'or. Poussière d'étoile. Père passeur – homme lumière homme mémoire. Homme sable. Homme pierre.
Il apparaît dans le Songe de Piero della Francesca, dans le St Christophe de Patinir.
Et c'est une magnifique parole que nous délivre Sylvie Germain sur ce père, ce père conteur.
Son amour de la terre s'enracine dans cette filiation. le temps des roses. le temps de choses, celui des hommes.
Alors vient le temps du laisser partir, du laisser aller, accepter ce non savoir qu'est la mort tout en évitant tous les faux savoirs, seulement accueillir le vide de l'absence, accepter l'inconnu du devenir de cet absent.
Le carnet de tous nos voyages, le récit de toutes nos vies.

Un très bel écrit.

Astrid SHRIQUI GARAIN
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Citations et extraits (24) Voir plus Ajouter une citation
Et c'est ainsi que le désert est entré en lui, au lieu que lui-même y pénètre. Il y a eu retournement. Tous les livres lus sont retombés au silence, ne laissant plus en lui qu'un long murmure de sable, de vent, de roches et de soleil, et qu'un désir à nu devenu patience, humilité. le désert dès l'enfance a tant ébloui son imagination, son coeur, tant éveillé sa curiosité, qu'il a marqué en profondeur sa pensée, ses goûts, ses valeurs, il s'est transformé en lui en une géographie intellectuelle et morale. Il s'est glissé dans sa vie de part en part.
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« En amont de mon père il y a ces deux êtres, et ma mémoire d’eux qui le traverse et faiblement l’éclaire dans un très doux fouillis de roses, de terre et d’eau. Il y a ces deux êtres dont il ne me reste plus que les noms gravés dans une pierre blanche…

Deux noms gravés dans une pierre blanche.

Là-haut sur la colline en plein pays celtique qui longtemps associa le culte des pierres et les divinités des eaux. Pays qui garde traces d’anciens sanctuaires druidiques et de thermes gallo-romains. Colline dont le nom lentement a glissé, fluidifié par les siècles. Vercellacum, Verselai, Vézelay. Et ainsi seront à leur détour déclinés par le temps les deux noms inscrits sur le lourd rectangle de calcaire, jusqu’à parvenir un jour à l’effacement, comme si toujours les divinités des eaux, et du vent, devaient l’emporter sur la mémoire des pierres. Là-haut sur la colline le cimetière s’étend au pied de la basilique, à la proue de l’abside, plein est. Il s’ouvre comme un livre aux pages séparées, posées parmi les arbres, les fleurs, la broussaille. Un livre dispersé dans l’immobilité, le silence, sous le soleil levant et qui dorénavant compte une nouvelle page. »
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Se peut-il que la mort soit venue te saisir, toi ma mère la vivante, qu'elle t'ait fait basculer d'un coup et sans retour dans un gouffre qui n'est ni d'azur ni de terre, ou bien des deux peut-être, la terre étant pétrie de poussières stellaires ?
Se peut-il que la mort soit une autre façon d'explorer la vie, d'avoir accès à sa source ? Y est-on plus réel ? Y est-on plus vivant ?
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C'est pourquoi un peu de nuit tremble toujours au coeur des roses, ce coeur poudreux où tourne l'un des pivots invisibles du temps. Une nuit plurielle où s'entremêlent divers pans de mémoire, confuse autant qu'aiguë, où se murmurent appels, plaintes et chants, échos en fugue et répons. Une nuit mouvante où se balance le désir qui tantôt chavire côté tristesse, tantôt se redresse côté joie. La joie d'avoir aimé. Joie devenue gratitude et demeurée telle par-delà la disparition, le deuil.
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La lyre de l’amoureux n’a pas sa place en Sibérie, et il n’est pas besoin de crécelle du lépreux – le cri aigu d’un aigle striant le ciel, le craquement d’un arbre disloqué par le gel, le grondement des fleuves en débâcle, l’écho lointain d’un hululement d’esprit ou de loup errant, d’un chant de femme veillant sur les braises du foyer, suffisent. Ce sont le vent, les bêtes, les fleuves et les forêts qui tiennent la lyre et tournent la crécelle.
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Videos de Sylvie Germain (26) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Sylvie Germain
Lecture de Jean Lancri : une création originale inspirée par Edmond Jabès.
Ce cycle est proposé par la Maison des écrivains et de la littérature (Mel) en partenariat avec la BIS. Un mois avant la restitution, l'écrivain est invité à choisir un élément dans les fonds de la BIS. Lors de la rencontre publique, « le livre en question » est dévoilé. Chaque saison donne lieu à la publication d'un livre aux éditions de la Sorbonne "Des écrivains à la bibliothèque de la Sorbonne" Saison 5 : Jean Lancri, Gaëlle Obiégly, Sylvie Germain et Michel Simonot
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