AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,53

sur 117 notes
Une curiosité que ce court roman écrit en 1915, paru sous la forme d'un feuilleton dans une revue. Toute l'oeuvre de son auteure, la sociologue et écrivaine américaine Charlotte Perkins Gilman, a eu une influence majeure sur le militantisme féministe outre-Atlantique.

Elle a choisi la forme d'une utopie à la Jonathan Swift, le monde imaginaire de « Herland » permettant de dénoncer les dysfonctionnements du monde réel, en l'occurence, le patriarcat et ses conséquences sexistes. Trois Américains aux profils différents découvrent un peuple de femmes qui vit en autarcie depuis 2000 ans, sans homme, se reproduisant par parthénogenèse, dans une société paisible, rationnelle, très avancée intellectuellement et du point de vue intellectuel tout en vivant en harmonie avec la nature.

On sent la sociologue derrière chaque page. Les personnages n'ont pas d'existence propre, pas de chair, rien qui ne nous touche, ils sont juste là pour étayer les thèses de l'auteur. L'écriture est un peu empesée, très scolaire. En 1915, cela devait être très novateur mais en 2019, cette utopie m'a semblé très vieillie, et pour le moins très discutable :

- toute la société de Herland tourne autour de la maternité qui est érigée en quasi religion, le grand projet collectif étant de donner naissance à d'autres femmes, les bébés étant élevés en commun, un peu comme dans une ruche.
l'individu n'a que peu de place dans cet espace très organisée, impossible de s'y exprimer et de se détacher des autres « soeurs »
- les relations sexuelles n'existent pas, complètement évacuées
- surtout, ces femmes sont de souche aryenne, l'eugénisme a sa place puisque les femmes jugées les moins aptes physiquement et psychologiquement sont écartées de la reproduction.

Inversement, ce qui m'a semblé toujours très pertinent et finalement visionnaire, c'est la place que Herland accorde au respect de la nature, ces femmes vivant en symbiose avec leur environnement, l'agriculture mise en place étant très proche des idées de la permaculture actuelle.

A lire donc pour parfaire sa connaissance historiographique du féminisme, sans perdre de vue ce qu'il y a derrière cette gynocratie utopique. A quoi ressemblerait donc une utopie féministe inventée en 2019 ?
Commenter  J’apprécie          970
Il y a quelques semaines, en flânant entre les étals recouverts de livres plus alléchants les uns que les autres, mon oeil fut attiré par une couverture, un titre : Herland. Déniché dans le rayon féminisme et avec pour illustration quelques phrases chocs comme, "le roman culte du féminisme américain", je ne pouvais que craquer ! Imaginez trois aventuriers scientifiques américains, découvrir sur une haute montagne un mystérieux petit pays peuplé exclusivement par des femmes. Impossible ! Comment font-elles pour se reproduire ? Et puis s'il n'y a pas d'hommes comment font-elles pour se nourrir, elles, ces pauvres petites choses délicates ? Ecrit en 1915, le livre de Charlotte Perkins Gilman est à la croisée entre essai sociologique et roman. Malheureusement, le fond comme la forme m'ont à plusieurs reprises fait cligner de l'oeil. Bah ouais, j'suis comme ça moi, je cligne de l'oeil quand ça ne va pas ! Pourquoi ? Un style un peu trop académique et quelques idées "tendances" de l'époque, comme l'eugénisme, m'ont légèrement refroidi. N'empêche, il fallait être sacrément courageuse pour exprimer l'idée d'un féminisme, même si je n'adhère pas à tous les arguments de la romancière. Prémices d'une réflexion sociétale, Herland ouvre la voie d'une pensée réformatrice. Merci Charlotte !

Au début du XXe siècle, trois amis américains passionnés de sciences et d'aventures découvrent lors d'une expédition lointaine, un mystérieux petit territoire. Enclavé dans de hautes montagnes, dans un pays que Van, notre protagoniste, ne mentionnera jamais par mesure de protection, ce peuple est exclusivement composé de femmes. Premiers hommes à fouler ce petit territoire baptisé Herland par leur soin, et avec leur regard scientifique, mais surtout d'homme occidental, nos trois amis découvrent un monde différent où l'idée d'une féminité telle qu'il la connaisse est balayée. Prisonniers, pour l'instant, de ce merveilleux et luxuriant pays, Terry, Jeff et van sauront-ils s'adapter à ce nouvel environnement ? Leur perception des femmes changera-t-elle ?

Sociologue de métier, il n'est pas étonnant que Charlotte Perkins Gilman ait voulu utiliser cette discipline au service de son roman. Sous forme de carnet de bord, l'auteure a prêté son oeil scientifique à son protagoniste principal, Vandyck Jennings, afin de traiter le sujet féministe qui n'en ai qu'à ses débuts. Critique sans fard de la société patriarcale dans laquelle elle évolue et est sans cesse confrontée, l'auteure, amène à plusieurs pistes de réflexions comme la définition de la féminité. Quelle est-elle sinon une définition fixée par l'homme et pour l'homme ? Représentée par des codes extérieurs, où l'apparence et l'attitude revêtent une importance capitale, celle-ci ne dépend que du regard que l'homme porte sur la femme. Pis, celui-ci confond féminité et maternité.

Et parlons-en de la maternité. Sujet de discorde pour moi, l'idée est ici menée à son paroxysme ! Bye-bye la sexualité épanouie, bonjour la maternité, pleine, entière, merveilleuse. Un peu trop peut-être... Reproduites par parthénogenèse, ces femmes élèvent la maternité au rang de religion. La femme telle quelle, est effacée au profit de l'éducation. Alors oui, cette utopie dans laquelle vit cette communauté est alléchante : non-violente, écologique à souhait, tolérante... Sauf que toutes les femmes ne sont pas aptes à engendrer. Seules celles considérées comme les plus fortes ont le droit de donner la vie. D'où le principe d'eugénisme... Pas terrible n'est-ce pas ? Et le plaisir, on en parle ? Bah pas vraiment puisqu'elles n'ont pas besoin d'hommes pour procréer. Et je ne vous parle même pas du non-désir d'enfants. Bon, n'oublions pas que nous sommes en 1915... Autant vous dire que cette partie tient plus à du cauchemar qu'au rêve pour moi !

Grâce aux voix de ses trois personnages, Charlotte Perkins Gilman, donne corps aux idées ridicules que les hommes véhiculent sur les femmes. Qu'ils soient misogynes, sexistes ou à l'inverse trop complaisants, l'auteure utilise ces arguments pour mieux les retourner, quitte à véhiculer elle-même des idées parfois douteuses. le reflet d'une époque ?

Happée par la curiosité de ce monde, j'ai vite été rattrapée par un style trop professoral qui marque ces 278 pages de lourdeurs. Intéressant, ce livre fait évidemment la part belle aux femmes, mais aussi à un modèle écologique novateur pour l'époque. Ainsi, leur communauté étroitement liée à la nature, est à l'image de celle-ci, abondante, luxuriante, tout comme disciplinée.

Un livre étonnant, parfois brillant, mais teinté d'idées houleuses.
Lien : http://bookncook.over-blog.c..
Commenter  J’apprécie          260
Il existe en Amérique du Sud un pays où, depuis 2000 ans, les femmes vivent sans les hommes. Se reproduisant par parthénogenèse, elles ont créé une société idéale, juste et profondément pacifique, tournée vers la maternité et l'éducation de toutes. Quand Terry, Jeff et Vandyck, trois jeunes Américains découvrent le pays, ils sont tout à la fois sidérés et incrédules devant cette autonomie harmonieuse. Leurs principes et préjugés misogynes sont mis à mal et ils ont toutes les peines du monde à comprendre les vertus de ce monde dénué de violence, de compétition ou de domination. « Les vierges robustes n'avaient à craindre aucun mâle et, de ce fait, n'avaient pas besoin d'être protégées. [...] Elles plaçaient au plus haut le pouvoir de l'amour maternel, cet instinct que nous partons aux nues, mais aussi celui de l'amour sororal, que nous peinions à identifier alors qu'il était sous nos yeux. » (p. 99) Pendant une année, les trois hommes apprennent à connaître ce pays fabuleux, tout en sachant qu'ils n'y ont pas leur place et qu'ils devront le quitter.

Ce récit a posteriori a des airs de voyage extraordinaire à la Gulliver. Comme chez Jonathan Swift, la présentation d'une autre société est l'occasion de critiquer vivement la société dans laquelle il évolue. Ici, Charlotte Perkins Gilman donne de nombreuses leçons de féminisme et de morale. « Je pris conscience alors que ces charmes féminins qui nous fascinent tant ne sont pas féminins par essence, mais que ce sont des projections masculines, qu'elles ont cultivées pour nous plaire, parce qu'il fallait nous plaire, mais en aucun cas nécessaire à la réalisation de leur grand dessein. » (p. 101) le seul bémol de cette lecture est la tendance de l'autrice à professer l'eugénisme pour produire un être féminin parfait. Cela tient cependant au contexte d'écriture du roman : en 1915, ce genre d'idées avait le vent en poupe, et comme le dit très bien la préface d'Olivier Postel-Vinay, le roman de Charlotte Perkins Gilman développe un certain protofascisme, avec cette volonté de confier les rênes de la société aux êtres plus méritants et aux plus performants.

Mais cette lecture reste profondément inspirante et je comprends que ce roman soit un fondement du féminisme américain. « Des femmes ayant ce type de culture sont parfaitement capables de se défendre et ne seront pas accueillantes à l'égard de visiteurs inattendus. » (p. 24) J'ai maintenant envie de découvrir d'autres textes de cette autrice, notamment ses essais économiques, mais aussi la suite de Herland où elle présente l'arrivée d'une femme de ce pays aux États-Unis : je pense que le choc des cultures sera plus brutal dans ce sens-là !
Commenter  J’apprécie          213
Herland ou la terre des Femmes !
Une utopie écrite par Charlotte Perkins Gilman en 1915 et, qui a eu un grand succès auprès des féministes, puis est tombé dans l'oubli pour resurgir avec les nouvelles générations féminines dans les années 60/70 !
Trois américains : Terry, Jeef et Vanduck ( le narrateur ) découvrent avec étonnement en haute montagne un petit pays, isolé peuplé exclusivement de femmes !
Ils découvrent des Herlandaises robustes, acrobates et intelligentes qui vont les tenir emprisonnés pour leur apprendre leur langue apurée pour être plus facilement assimilable et pouvoir comparer leur mode de vie matriarcal à celui des 3 invités !
Elles vivent depuis 2000 ans éloignées de toute civilisation, suite à une éruption volcanique et des tremblements !
Elles ont du s'organiser à plusieurs niveaux :
***Pas d'hommes : elles pratiquent la parthénogenèse et, se consacrent principalement à l'éducation de leurs enfants !
Mais elles ont tout planifié même en ce domaine : la limitation des naissances par l'eugénisme et, les mamans n'ont leur bébés que durant 2 ans car ensuite : ce sont des soeurs spécialisées qui vont s'occuper d'eux pour obtenir une éducation collective !
Sur le plan économique : elles ont supprimé les élevages, le bétail (sauf celui des chats ) car ils prenaient trop de place et leur propre lait leur suffit !
Elles ont planifié les cultures et mettent en valeur les arbres, elles recyclent leurs déchets ...
Que demander de plus dans cette société sororale ? elles ont la paix, l'abondance, la beauté, la bonté et l'intelligence et surtout pas de jalousie, de criminalité ! Un monde parfait crée par les femmes pour les femmes ,mais nos 3 invités vont s'éprendre de leurs 3 belles guides : et vont se marier sous l'autorité de la Grande-sur-Mer et son cercle de Grandes conseillères du Temple !
Hélas,Terry va vouloir concrétiser son union et, ils vont être obligés de partir de ce "paradis " féminin !
Un roman avec des personnages qui ne servent qu'à valoriser les thèses de Gilman !
Un roman culte du féminisme américain sans concession pour le patriarcat mais, qui présente un intérêt pour voir quelle sera l'évolution de nos féministes actuelles !

L.C thématique d'avril 2021
Commenter  J’apprécie          170
Trois hommes, médecin, explorateur et sociologue, découvrent par hasard un pays enclavé, autarcique, où vit une population exclusivement féminine.
Comment est-ce possible me direz-vous ? à l'instar de nos trois mâles en goguette, qui seront invités à suivre les « cours » de langue et d'histoire de ce pays, on apprend que cette très ancienne civilisation, oubliée du reste du monde se multiplie par parthénogenèse et pratique l'eugénisme pour se maintenir au top (l'idée est évidemment choquante ! c'est que le livre date de 1915 et qu'à cette époque le concept d'amélioration de la race humaine est à la mode)
Bref, nos touristes un poil macho verront leurs idées reçues sur la gente féminine déboulonnées les unes après les autres au contact de ces femmes qui prônent la sororité comme valeur première de leur société.

L'idée de départ, audacieuse et originale, me plaisait beaucoup, mais malheureusement l'autrice s'embourbe un peu dans son concept et peine à développer l'intrigue. le ton est très didactique, l'écriture linéaire. du coup j'ai finit par m'ennuyer un peu.
Le propos se veut féministe mais ne l'est qu'à moitié, (il faut mettre cela, je pense, sur le compte de l'époque : par exemple la maternité comme ultime accomplissement, ou encore cette histoire d'idéal féminin « fabriqué » génétiquement, me paraissent franchement datés) mais il y a aussi quelques idées qui m'ont fait sourire.
Que cette population de Herland soit finalement très peu genré devait être une idée très novatrice au début du siècle dernier !

Une curieuse lecture, intéressante mais qui ne m'a pas subjugué.
Commenter  J’apprécie          160
Trois hommes, van – le narrateur du récit, proposé sous forme de journal rédigé après coup –, Jeff et Terry, font la découverte d'une contrée restée en autarcie depuis 2000 ans, pour des raisons naturelles. Cette contrée légendaire, dans laquelle ils parviennent enfin à se rendre, après diverses péripéties, a la particularité d'être exclusivement féminine, et d'avoir une reproduction permise par la parthénogenèse. Au fil des pages, van nous décrit très précisément l'organisation de la société dans laquelle nos trois hommes vont évoluer pendant un certain temps, jusqu'au drame, annoncé dès les premières pages, qui les fera en partie rentrer chez eux.

Franchement inspirée des récits de voyage fictif omniprésents durant les Lumières, donnant lieu à la découverte de contrées et de sociétés poussant à la réflexion quant à nos propres sociétés, en bien comme en mal – ici plutôt en mal du point de vue de notre protagoniste, Herland est un roman qui est intéressant en ce qu'il propose un regard qui tente de montrer les travers d'une société patriarcale, tout en proposant une alternative en une société matriarcale censément dénuée de tous ces travers. Regard précis, intellectuellement dense, particulièrement réfléchi d'ailleurs.

Mais ce regard n'en a pas moins vieilli depuis sa publication, en 1915 : il y a en effet quelque chose de très puritain proposé dans cette vision, dans laquelle la femme s'épanouit principalement par l'intermédiaire de la maternité – directe ou indirecte : toutes n'ont pas le droit de se reproduire, vive l'eugénisme, mais toutes s'occupent des filles qui vont naître –, et dans laquelle, finalement, l'intrusion d'hommes dans son « harmonie » semble être un peu trop salutaire – chassez le naturel du patriarcat pendant 2000 ans, il revient au galop –.

Pas mécontente d'avoir enfin lu ce classique, même si les limites philosophiques, morales, ou encore sociologiques, en sont nombreuses.
Commenter  J’apprécie          120
Cette utopie féministe datant de 1915 est à découvrir en tant que telle, c'est à dire davantage comme un récit fictif de voyage inspiré de l'Utopie de Thomas More plutôt que comme un roman de Science-fiction qui décrirait une communauté de femmes ayant banni les hommes de leur société.
Pour Charlotte Perkins Gilman, qui est davantage sociologue que romancière, il s'agit de démontrer, par le biais de trois voyageurs masculins, que des femmes peuvent parfaitement subvenir à leurs besoins, et même créer une société exemplaire en recourant à la parthenogenese pour se reproduire. Tout l'enjeu de ce récit est donc de pointer les défaillances d'une société patriarcale inapte à assurer le bonheur de chacun et un développement harmonieux de la civilisation.

Certes, la démonstration est parfois lourde et le ton très didactique. Mais la critique est pertinente et la perfection de Herland, en ce qui concerne les relations interpersonnelles et le bien-être de tous, creuse évidemment le fossé entre les deux sociétés. L'auteure parvient ainsi habilement à interroger le lecteur sur l'origine de ces différences et de ces échecs, qu'il est aisé d'imputer à un fonctionnement trop inégalitaire.
La surprise vient également de la réflexion écologiste menée par ces femmes: elles respectent profondément la nature, soutiennent sa diversité et élaborent des techniques de permaculture très développées. Elles sont végétariennes, ont abandonné l'élevage et planté des forêts comestibles. La rationalisation des espaces de culture est même menée conjointement avec une réflexion esthétique de manière à préserver la beauté de la nature. En 1915, ces réflexions progressistes sur l'agriculture sont passionnantes tout comme celles sur l'éducation des enfants, inspirées des travaux de Maria Montessori.

Il est vrai que, sous d'autres aspects, le récit porte la marque de son temps.
On peut ainsi lui reprocher d'élever la Maternité au rang d'objectif suprême, mais c'est malgré tout ne pas voir qu'il s'agit d'une autre maternité que celle que nous connaissons. Il ne s'agit pas de prôner l'épanouissement dans l'éducation des enfants , puisque la plupart des mères n'éduquent pas leur propre enfant dans cette société, mais de travailler à l'éducation d'une génération qui vise à la perfection.
Cet objectif va de pair avec une idéologie nettement plus redoutable. Vouloir l'amélioration de la race humaine, concept à la mode à l'époque, conduit tout droit à l'eugénisme, pratique utilisée pour limiter la population et n'en reproduire que les meilleures.

Charlotte Perkins Gilman était une femme engagée, nièce d'Harriett Beecher Stowe, et elle connut une dépression post partum après la naissance de sa fille. A cette époque, maris et medecins preconisaient l'abandon de la lecture, pratique dangereuse pour des femmes trop fragiles... Fort heureusement, elle divorca et voulut prouver aux hommes que des femmes trop fragiles étaient capables de créer une société bien supérieure à celle des hommes... Et ce livre en fait le récit.
Commenter  J’apprécie          100
Herland, pays reculé aux confins d'une forêt…
Ses habitants ?? Uniquement des femmes. Belles, musclées, intelligentes, sages, créatives et bien d'autres choses encore…
3 hommes vont s'aventurer dans cette contrée, connue uniquement des quelques sauvages habitant la région.
Ils vont découvrir un monde merveilleux de beauté, d'inventivité, de sagesse, de travail, de force… Mais est-ce possible sans hommes ? Bien sûr que non voyons ! La femme est faite pour être à la maison et élever les enfants.
Inconcevable et difficilement compréhensible dans ce pays où ces Femmes (oui avec un F majuscule) ont poussé leur pouvoir jusqu'à être parthénogénétique. Oui, elles procréent sans hommes et en plus uniquement des filles !
Outre le fait qu'on retrouve dans ce roman une belle utopie sur un pays où tout le monde vit heureux, en harmonie, loin des maladies, des guerres, c'est surtout un roman sur la condition féminine, l'ultra domination par les hommes de notre société, la vue masculine étriquée sur les possibilités, l'intelligence de la femme !
Ce livre, pourtant écrit en 1915, est encore tout à fait d'actualité et décrit très bien la position des hommes et des femmes dans notre société moderne (enfin… qui se croit moderne !).
Commenter  J’apprécie          100
J'avais entendu parler de cette utopie par une booktubeuse que je suis régulièrement. Ce roman est perçu comme le premier - ou l'un des premiers, cela serait plus juste - roman féministe (de science-fiction féministe pour être exact). Lorsque l'on regarde de plus près les éléments biographiques de Charlotte Perkins Gilman, on en comprend davantage les raisons, non seulement par son implication dans le mouvement des suffragettes (et elle est aussi une descendante de Harriet Beecher Stowe, et vient d'une lignée d'abolitionnistes et de féministes) mais aussi par sa vie privée. En effet, le père de Charlotte Perkins Gilman a abandonné sa famille quand il a compris que son épouse ne pourrait plus avoir d'enfant, ce qui a laissé la jeune Charlotte songeuse quant au mythe autour de la famille, notamment la place de la femme dans le foyer puisque sa mère a dû subvenir à leurs besoins, rôle dévolu au père dans la société du 19ème siècle. D'autant que ce sont les femmes de la famille de son père qui ont aidé sa mère à élever les enfants. Ayant été éduquée, la jeune Charlotte se destine à une carrière littéraire, on ne parlait de carrière à l'époque que pour les femmes célibataires. Or, elle s'est mariée une première fois, a eu une fille, s'est enfoncé dans la mélancolie. le médecin, soutenu par le mari, préconise alors qu'elle arrête d'écrire, et de lire, car c'était ces activités qui la mettaient dans tous ses états... Après plusieurs mois, elle et son mari se séparent d'un commun accord, Charlotte reprend sa liberté, et sa liberté de penser et d'écrire.

Herland s'inscrit donc naturellement dans ce processus: il s'agit de montrer, par le biais d'un narrateur masculin, que les femmes peuvent se suffire à elles-mêmes, que, finalement, les femmes n'ont pas besoin des hommes pour subvenir à leurs besoins, et même pour procréer. Scandale bien évidemment... L'auteure nous raconte ici l'aventure de trois hommes, qui représentent chacun un pan de la société patriarcale, du Masculin, au pays des femmes.

A bien des égards, ce roman est assez instructif sur le comment et le pourquoi d'une telle société, il pourrait s'apparenter à une étude sociale de cette époque, presque un essai qui préconiserait des solutions.
A contrario, je trouve également que le roman à un poil mal vieilli, une réécriture - et une traduction - plus moderne pourrait le rendre plus accessible et attractif.

En bref, un roman intéressant dans l'ensemble, original et moderne pour l'époque, mais qui mériterait d'être préfacé (peut-être l'est-il dans une autre édiction que la mienne) pour les lecteurs d'aujourd'hui.
Commenter  J’apprécie          90
Célèbre intellectuelle féministe du tournant du XIXème au XXème siècle, Charlotte Perkins Gilman est l'auteure d'une oeuvre prolixe composée de nombreux romans, nouvelles, poèmes, essais et articles, publiés entre 1888 et 1935. En 1909, elle lança seule son propre mensuel, baptisé The Forerunner, dans lequel parut pour la première fois en 1915 et sous la forme d'un feuilleton, son utopie la plus célèbre, Herland. le texte n'est paru sous forme de livre qu'en 1979, au moment où l'oeuvre de Gilman était redécouverte. Il est pour la première fois traduit cette année en français aux éditions Books.

Sous des allures au départ de simple fiction, Herland bascule rapidement dans le registre de l'utopie. Dans celle-ci, Gilman imagine un monde dans lequel le féminin est l'unique et peut se passer du masculin grâce à la parthénogenèse. Présenté comme un pays propre, dépourvu de violence, libéré des conflits, de la peur et de la maladie, Herland offre à Gilman le cadre parfait pour développer ses réflexions d'une société idéale. Dans ce lieu à la beauté ordonnée, les normes reconnues sur ce que sont le « masculin » et le « féminin » n'existent pas. Découpé en douze chapitres, ce texte percutant permet à son auteure d'exposer ses théories concernant la maternité, l'éducation des enfants, et les rapports entre hommes et femmes.

En mettant en exergue les incohérences de la société patriarcale, Gilman questionne les rapports et les interactions entre hommes et femmes. Face aux trois explorateurs, les herlandaises se montrent particulièrement enthousiastes à l'idée de pouvoir comparer leurs deux mille ans d'histoire et d'étudier les différences entre leur propre peuple composé exclusivement de femmes et la société mixte de leurs hôtes. Car à travers leurs questions a priori naïves, elles parviennent bientôt à ébranler sérieusement les croyances les plus solides du narrateur quant aux fondements et au bien fondé des valeurs de la société des hommes. Au cours de leurs échanges, van et son hôtesse confrontent leurs visions sur de multiples sujets, tels la religion, la mort, le travail, les traditions… En soumettant sa pensée patriarcale à un angle de vue externe et dépourvu de préjugés, le jeune homme remet bientôt en question les fonctionnements et les principes communément admis d'un système qu'il n'avait jusqu'alors jamais remis en cause.

A Herland, la maternité constitue l'institution fondamentale de la société, sous une conception qui transcende les liens biologiques. Les enfants sont la raison d'être du pays, et les femmes mettent toute leur énergie au service de leur avenir. Elles concentrent toutes leurs forces et leur intelligence à concevoir des plans pour atteindre leurs idéaux en matière d'éducation. Leur projet se résume en une question: comment oeuvrer à rendre chacun meilleure ? Historiquement, c'est dans l'intérêt de leurs enfants qu'elles développèrent plusieurs secteurs d'activités et organisèrent l'espace. Confrontées à une démographie galopante, elles durent cependant bientôt trouver une solution au problème de surpopulation qui aurait eu pour conséquence une baisse de la qualité de la vie. Refusant la compétition et la « lutte pour la vie » tout autant que le colonialisme, elles décidèrent de réguler leurs naissances et de ne plus se reproduire, sacrifiant leur maternité pour leur pays. Car pour les habitantes de Herland, l'amour maternel irradie de bien des façons, et les femmes qui n'ont pas d'enfant peuvent trouver un réconfort en prenant soin de ceux qui sont déjà là.

Si à Herland, la maternité, entendue comme le fait de porter un enfant, est accessible à chacune, l'éducation de l'enfant est en revanche un art réservé seulement aux plus compétentes. Dans cet esprit, le soin aux bébés, qui participe de l'éducation, est donc confié aux « plus capables ».

Puisant dans le mythe des Amazones, Gilman charpente une utopie passionnante dans laquelle les rapports de force se trouvent inversés, au service d'un discours féministe et engagé. Dans Herland, Gilman imagine une société sans hommes dans laquelle les femmes se reproduisent par parthénogenèse. Plus que d'imaginer un mode de reproduction alternatif permettant aux femmes de se passer totalement des hommes, Gilman créée dans son livre une société où la sexualité est totalement absente.

Avec l'arrivée de ces voyageurs, les habitantes voient l'occasion de rétablir la bisexualité à Herland. Après plusieurs mois passés à les étudier, les observer et les évaluer, elles envisagent la réintroduction des hommes et d'une reproduction sexuée normale. Mais pour les Herlandaises, l'acte sexuel reste indissociable d'une volonté de procréation.

Le mariage des trois explorateurs à trois des habitantes permet à l'auteure de développer ses opinions concernant cette institution et d'affirmer son point de vue concernant la nécessité de discipliner l'instinct sexuel. Ancrée dans la morale victorienne, Gilman expose une vision de la sexualité uniquement procréatrice. Après avoir tenté de violer son épouse, Alima, Terry est finalement chassé de Herland. En voulant prendre par la force la jeune femme qui se refusait à lui dans la mesure où son but n'était pas la reproduction, Terry a commis la transgression ultime des règles régissant la société herlandaise. Son acte symbolise au demeurant la concrétisation de ses intentions prédatrices (latentes depuis le début du récit) et de sa volonté de domination qui caractérisent son personnage phallocrate.

Selon Gilman, la féminité exacerbée et l'hypersexualisation des femmes du XXème siècle ne s'explique pas par la nature ou des causes biologiques mais par l'environnement économique, social et culturel dans lequel elles vivent. Parce qu'elles sont économiquement dépendantes des hommes, les femmes doivent sur-développer leurs caractéristiques féminines au dépens d'autres caractéristiques universelles. Van, le narrateur, prend progressivement conscience que sa vision de la place de la femme n'est en réalité qu'une construction culturelle.

Herland est donc un texte qui vaut surtout pour ses thèses avant-gardistes au regard de l'époque où il fut rédigé. Gilman y avance des réflexions novatrices pour son temps sur certaines questions, telles que le rapport à la nature, la féminité, l'éducation des enfants (où elle prône le recours à des méthodes pédagogiques alternatives et innovantes pour l'époque, à l'instar de la méthode Montessori) et l'éloge du partage des connaissances. Elle oppose en particulier l'esprit de compétition (la société américaine) à celui de coopération (Herland), qui constitue selon elle la clé de l'évolution humaine et du progrès.

Si certaines réflexions lancées par l'auteure apparaissent incroyablement visionnaires pour son époque, d'autres au contraire, témoignent aujourd'hui d'un regard éculé et d'une conception datée à l'égard de certains sujets. Dans sa vision de la différence des sexes, Gilman semble opposer de façon binaire une énergie masculine violente et portée à la destruction à une énergie féminine maternelle et conservatrice. En filigrane de sa démonstration se dessine par ailleurs une société où les individualités sont sacrifiées au nom du bien collectif. La maternité constitue pour ces femmes le seul engagement personnel, tout le reste s'inscrivant dans un projet commun. A Herland, tout est fait au service du pays et de l'amélioration de la « race ». Impossible aujourd'hui de ne pas tiquer devant cet éloge d'un certain eugénisme, ni d'occulter les sous-entendus racistes qui ponctuent l'oeuvre. Bien que marquée par son temps par certains aspects, Herland, n'en reste pas moins, cent ans après sa rédaction, une oeuvre globalement étonnamment moderne, qui force l'admiration et mérite qu'on s'y intéresse. Considéré comme un roman culte, il occupe par ailleurs une place centrale dans la littérature féministe américaine.

Première partie de sa construction utopique, Herland sera suivi en 1916 de la publication de With Her in Ourland, suite bien moins connue, dans laquelle l'auteure délivre pourtant certaines clés de compréhension de son oeuvre et de sa pensée, étoffant encore davantage sa réflexion. Espérons donc qu'une traduction française de ce second volet arrive prochainement, afin de permettre aux lecteurs francophones de découvrir encore un peu plus la production d'une auteure injustement tombée dans l'oubli.

Retrouvez mon avis complet ainsi que des extraits sur mon blog.
Lien : https://lectriceafleurdemots..
Commenter  J’apprécie          90




Lecteurs (347) Voir plus



Quiz Voir plus

Les Chefs-d'oeuvre de la littérature

Quel écrivain est l'auteur de Madame Bovary ?

Honoré de Balzac
Stendhal
Gustave Flaubert
Guy de Maupassant

8 questions
11105 lecteurs ont répondu
Thèmes : chef d'oeuvre intemporels , classiqueCréer un quiz sur ce livre

{* *}