AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782914577434
200 pages
Lettres vives (29/05/2009)
4.6/5   5 notes
Résumé :
Sous l'ancien titre publié en 1984 : Ce lieu que les pierres regardent, ce nouveau volume rassemble quatre textes majeurs dans l'oeuvre poétique de Jean-Louis Giovannoni, textes aujourd'hui épuisés et introuvables qui forment le socle d'un premier cycle marqué par une extraordinaire beauté, sobriété et intériorité de l'écriture. Il préfigure la suite de son oeuvre qui, après 1992, aborde toujours le même monde mais sous d'autres angles, et avec d'autres outils. Le r... >Voir plus
Que lire après Ce lieu que les pierres regardent : Variations, Pas japonais, L'invention de l'espaceVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Trouver les mots les plus exacts, le chant le plus juste pour nous interroger :
Et si nous n'étions qu'une bulle de silence emprisonnée dans la résine d'un corps ?
La douleur est l'âme de notre corps. : définition de Jean Louis Giovannoni. L'espace de sa poésie.
Et cela peut convenir si l'on accepte d'envisager cet enfermement comme une torture. Il y a urgence de dire la vertu des mots.
Phénomène étrange : le mot prononcer vers l'extérieur , devient regard et perce la paroi du corps libérant l'âme du corps. « Et parfois tu te demandes si tu ne vis pas essentiellement dans ton regard ».
On regarde le monde à travers soi. Et l'Autre opère de la même façon. Chacun pris dans l'ambre du silence. Une agglomération de bulles formant la salive des mots, et emplissant de silence nos bouches. Un jeu de mimes dans un couloir de glace. « Tu demandes qu'on te décrive tes traits et c'est toujours le visage de l'autre que les mots font apparaître ». Solitude en corps, solidarité des corps qui tentent de se reconnaître par les gestes, les mouvements simulés de nos mots.
Le mot est matière, le mot est image, regard, repère , le mot est une pierre en nous même. Cesser les gestes et faire rouler la pierre, à travers notre corps, le porter en un lieu, en espace. En un mot, prononcer pour s'annoncer. Car les bulles se reflètent les unes dans les autres. Il faut fendre l'écorce, déchirer l'enveloppe de la bulle, rendre béante la chair. Percevoir enfin ce qu'il nous semblait apercevoir. Notre corps est toujours au bord de l'invisible . « Le lointain n'est jamais après l'horizon, il est au dedans des corps ». Hubert Reeves, nous a appris que regarder loin, c'est regarder près. Si cela est vrai dans le cosmos, cela peut peut être s'appliquer à tous les espaces, y compris à celui de notre corps. Ce ne serait donc pas en dirigeant notre regard vers l'extérieur que l'on verrait le monde, mais mais en regardant en nous, à travers nous. « Nous ne pouvons voir le monde qu'à travers nos mots ». Expulser «  la chose », la prononcer, la porter en parole, la libèrera.
Mais le passage se trouverait en la chose elle même, comme la galaxie porte en elle son trou noir. « Tout ce qui apparaît et voué à l'effacement ». Pour se mettre au monde il faut trouver le passage. L'écrit selon la poétique de Giovannoni dissout la forme des choses que nous contenions, dont on retenait la matière.
Ne pas prononcer n'est pas se taire, c'est « raisonner » en soi. La parole se trouve en un lieu d'effacement. le silence est un lieu de mémoire, une mémoire minérale. « N'arrivant pas à parler de la présence, on parle de ce que l'on a perdu ». Prendre corps serait prendre parole, rendre l'âme en libérant la douleur, ainsi pourrions nous nous approprier l'espace. Entre le lecteur et l'auteur il y a transhumance des espaces. Et si tous ensemble, nous n'avions que ce mouvement de transvasement d'espaces pour nous rejoindre ? Pour briser notre autisme formel. On écrit pour se vouloir dire au monde alors que l'on se sait et que l'on se voit extérieur à ce monde. « Nommer c'est faire parler ce qui se tait ». Les mots de l'Autre lui permettent prendre volume en nous. Prendre place en nous, y laisser son empreinte. Est ce que Lire serait s'entendre dire ? S'annoncer, se nommer est ce se placer en dehors ? « Et si l'on ne pouvait nommer qu'en perdant son corps ? ». Accepter la dé-formation, prendre le risque de se dé-figurer, pour laisser transparaître son intimité, son intériorité ?
«  Plus on s'approche de l'intérieur, plus on on perd son corps ». Plus on se dit, plus on se dévoile, et plus nous quittons ce que nous pensions pouvoir nous donner corps.
Il y a soi dans le monde, le monde autour de soi, le monde en nous, et nous qui définissons le bord du monde. Il faut savoir s'effacer pour faire place aux mots, et ainsi apparaître. Disparaître pour devenir. Se dé-signifier pour être le juste signifiant. « Un mot n'est dit, entendu que lorsqu'il vit en dehors de lui même ». le lu est l'écho du dit. L'écrit est l'écho de l'entendu. Et si lire, écrire, entendre,dire n'étaient que la résonance du silence des uns dans le silence des autres contre les parois de ce vide qui nous habite, là, où se trouve le lieu de notre matière.
 
Astrid SHRIQUI GARAIN
Commenter  J’apprécie          200

Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Variations à partir d’une phrase de Friedrich Hölderlin [1987-1988]


Il faut si peu de chose pour que le monde n’ait qu’une seule rive.
Une seule rive comme un fleuve qui chercherait
son autre rive
là où se tient la première


Un fleuve n’ayant qu’une seule rive
et qui n’en trouverait une autre
qu’en oubliant la première.


Un fleuve n’ayant qu’une seule rive
et qui ne pourrait en toucher une autre
qu’avec le corps de la première.
Commenter  J’apprécie          200
NOTRE VOIX…


Notre voix
où trouve-t-elle son corps


On parle
on écrit
pour que les autres
oublient leurs corps
pour qu’ils viennent habiter
notre voix
nos mots


Est-ce la voix des autres
qui donne à ton silence un lieu


Et si tu n’étais présent
en ce monde
que pour donner naissance
à cette forme invisible
qui se tient dans ta voix

Ce corps aérien


Et si être présent dans les mots
ne consistait qu’à disparaître en eux.
Commenter  J’apprécie          190
De quelle pierre
de quelle chose
es-tu le mot,
la phrase
encore
imprononcés
Commenter  J’apprécie          310

autres livres classés : poésieVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus


Lecteurs (9) Voir plus



Quiz Voir plus

Testez vos connaissances en poésie ! (niveau difficile)

Dans quelle ville Verlaine tira-t-il sur Rimbaud, le blessant légèrement au poignet ?

Paris
Marseille
Bruxelles
Londres

10 questions
1220 lecteurs ont répondu
Thèmes : poésie , poèmes , poètesCréer un quiz sur ce livre

{* *}