Soutine transpose dans les traits du modèle une opposition entre dedans et dehors qui est l'une des constantes de l'oeuvre. S'il aime les uniformes, ici encore comme Van Gogh (le Facteur Roulin, le Zouave, le sous-lieutenant Paul-Eugène Millet ou le Collégien), c'est qu'il provoque le dédoublement vestimentaire dont il a besoin pour enserrer les corps dans une sorte d'habitacle carnavalesque, purement spectaculaire, qui lève la question de la nudité et de l'identité sexuelle. À l'aide de plastrons ajustés, de gilets hermétiquement boutonnés, de chemises à col montant, étranglées par un foulard, une fine cravate ou un noeud papillon, de chapeaux vissés sur la tête, de pantalons, de tabliers ou de robes longues, il objecte aux lapins et aux boeufs écorchés la gloire du corps vêtu de pied en cape, à l'abri derrière la parade des couleurs. La série des Enfant de choeur c.1927 trouve son explication dans ce principe obsessif de l'enveloppant. La soutane et le surplis enfouissent le corps de l'enfant dans des langes écarlates, comme chez Velazquez ou Titien, mais le vêtement liturgique est aussi par sa couleur de feu et le blanc éclatant des dentelles une manière de dévoilement émotif du corps. Il expose au regard ces pulsations qui empourprent les oreilles et les joues, gonflent les lèvres, mouillent les yeux et ensanglantent les étoffes.
Chapitre II, Têtes croisées, p. 101.
M. Pieynet - X. Girard - J.G. Meili :
Henri matisseOlivier BARROT parle d'
Henri MATISSE et propose trois livres de poche consacrés au
peintre : "Autour de MATISSE" de Marcelin PIEYNET, "L'
art de MATISSE" de
Jean GUICHARD MEILI et "MATISSE une splendeur inouie" de
Xavier GIRARD.