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sur 167 notes
Bernard,

J'ai tenu comme j'ai pu depuis un peu plus d'un an et demi mais j'ai craqué. Tu sais à quel point j'ai repoussé le moment de t'écrire à nouveau, juste pour savoir que j'avais un dernier rendez-vous, un jour, avec ta plume. Comme pour me rassurer, comme pour avoir un peu d'air en réserve, en cas d'urgence. Chaque livre terminé, depuis la lecture du fabuleux « Cher Amour », a été une invitation à ouvrir « Les Dames de Nage », invitation de plus en plus difficile à refuser. Après quelques lectures estivales plus ou moins difficiles car sans grand intérêt pour moi, j'ai eu besoin. Un besoin errant dans les faubourgs du vital. Besoin de ressenti, besoin de mots qui vivent l'émotion. Forcément je me suis tourné vers toi, c'était le moment.
En tournant la dernière page j'ai eu un sentiment étrange, un bref instant, le regard fixé sur l'horizon que les vagues faisaient trembler. Un sentiment oscillant entre tristesse et bien être. L'océan a vite effacé le blues d'en avoir terminé avec tes mots en me rappelant que je resterai imprégné de ceux là comme de ceux de « Cher amour ». Tiens, moi qui n'ai rien mis sur babel, ils vont être mon île déserte parce que, je sais que je me répète, rares sont les écritures qui me touchent comme la tienne. C'est bizarre d'être si différent de toi et de me sentir si proche coté « sensibilité ».
Je suis un peu comme ton ami Roland du « Marin à l'Ancre », je profite de tes voyages, je les vis sans bouger en me disant que j'aurais eu tes mots si j'avais été à ta place, que je j'aurais vécu l'émotion de la même façon, que j'aurais témoigné de la poésie d'une rencontre, d'un instant, d'un lieu, j'aurais caressé de ma plume les doutes, les espoirs, la joie, la douleur, la peur, enfin j'aurais aimé faire ça à ta manière.
Encore une fois je me suis rempli de cette poésie qui transpire de chacun de tes mots déposés sur la page. Une poésie crue qui fera fuir quelques grenouilles de bénitier, alternant avec une poésie d'une douceur extrême où l'instant semble se figer, où l'espace d'une seconde les coeurs s'effleurent tout en retenue. Les peaux se frôlent, se donnent, se fuient. Quant aux âmes elles ne peuvent que se perdre dans la violence des sentiments. Fuir le bonheur avant qu'il ne se sauve, comme le faisait magnifiquement dire Gainsbourg à sa Jeanne, ou courir après lui à travers le monde comme on court après des chimères, quelle différence au final ?
A travers tes voyages, tes rencontres, tu as filmé la vie, tu as couché tes émotions sur la pellicule. le support était trop étroit, trop impersonnel peut être, alors tu les as ancrées à tout jamais dans les plis du papier, ceux qui laissent la possibilité au lecteur de ressentir selon ce qu'ils sont. L'image impose alors que le livre propose. Quoi qu'il en soit Bernard, les portraits tracés dans ces dames de nage sont juste terriblement touchants dans des genres différents. Des femmes, des amis, des lieux, des rencontres. Je ne peux m'empêcher d'en ressortir deux.
Marguerite, tu sais qu'elle m'a nouée la gorge la mamie. Derrière les murs… ou les fenêtres. Tu as été un rayon de soleil pour elle. Tu as su… après
Et puis forcément Marco… Marcia… juste désarmant. Là je t'avoue que ce n'est pas que la gorge qui était nouée. J'ai vu le sillon laissé sur sa joue, sur son coeur, par une perle de rosée de l'âme. Une perle tombée lourdement d'un cil. Un sillon creusé depuis l'enfance, depuis la marine jusqu'au coup fatal porté par une mère qui… bref. L'espoir fusillé au petit matin, à l'aube d'une nouvelle vie. Il y a des rosées plus vivifiantes…
Il me semble bien que l'espace de quelques pages j'ai du résister pour ne pas suivre le sillage d'une de ces perles. Je ne sais plus si j'ai réussi…
Bernard, dans ces portraits que tu traces, il y a de la sanguine, du fusain, du noir et blanc, du vrai, du beau jusque dans l'intolérable (Juan), jusque dans la détresse. de l'humain tout simplement, ce qui malheureusement tendrait à se perdre proportionnellement à la misère du monde qui augmente, mais c'est un autre sujet…
Et puis bien sur tes « t'aime » favoris que sont les femmes et les amis, Amélie, Jo Camille, Ysé, Michel, Diego. Que dire si ce n'est que j'aime leurs authenticités, leurs failles, leurs forces, vos moments partagés. Des gens pas ordinaires dans tous les cas. C'est peut être pour ça que tu ne plais pas à tout le monde, juste parce que comme disait l'autre, les braves gens n'aiment pas que l'on suive une autre route qu'eux. de toutes façons, les braves gens on les « emmerde ».

J'aurais trop de choses à te dire ou plutôt à t'écrire, c'est tellement plus facile, mais ça va faire long. J'essaierai de ruser pour te faire parvenir un nouveau courrier ici parce que c'est la seule adresse que je connaisse pour te trouver. Celle que m'ont donné les vrp du bien et du mal, de la morale et de la peur, je n'ai pas l'impression que je t'y trouverai, question de ressenti, rien de plus, comme pour un bouquin.
Merci pour ces lectures et à bientôt ici… parce qu'ailleurs ou pas, il n'y a aucune urgence de mon coté.
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Je me suis précipité trop impatiente de m'imprégner de sa poésie.
Quel est cette âme errante qui a posé ses mots sur ces feuillets de papier que je parcoure avec frénésie ?
Je veux me remplir de ce sublime sentiment d'éternité avec ce magicien des mots,
Qui m'ensorcelle,
M'hypnotise,
Me défait du superflu et me dévoile l'essence de la vie…

Pourquoi avoir attendu tant de temps pour découvrir ce trésor de sensibilité brut qui m'emporte dans cet univers où les mots scintillent tels des éclats de lumière d'un diamant si finement ciselé ?
Bernard Giraudeau un orfèvre des mots qui tisse sa toile d'émotions autour de mon coeur avec son livre : « Les dames de nage ».
Des mosaïques de sensations qui n'en finissent pas de colorer ma vie de 10001 nuances d'un bonheur délicat.
Juste des sensations épars, sublimes, surnaturelles, passionnées, invraisemblables, impalpables.
Je suis incapable de raconter l'histoire de ce livre car ce livre ne se lit pas, il se vit…
Et j'ai vécu intensément…
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La Rochelle, ses deux tours et le regard fixé à l'Ouest. Les vagues qui déferlent et à l'autre bout, le Chili, la Patagonie. Mes yeux suivent le courant un peu plus au Sud, cap sur l'Afrique. Les embruns parfument ma mémoire, cris sauvages de beuveries rue de la Soif, cris perçants de mouettes attirées par le retour de pêche. Je pense à ces marins qui ont toujours envie de mettre le cap à l'ouest, je pense à cette Afrique, rieuse et chaleureuse, ces amants d'un soir, d'une nuit dans un port inconnu, cette belle femme noire. J'imagine ces hauts plateaux d'Atacama où le soleil et le sel te brûlent la peau, là-bas au bout du monde, pays de Coloane et de Sepulveda. Je voudrais rencontrer Bernard Giraudeau pour qu'il me conte sa vie, sa jeunesse, son parcours si atypique dans la vie d'un cinéaste. Alors, je le lis. Pour la première fois.

« Les Dames de Nage » démarre à La Rochelle, adolescence d'un jeune cinéaste, une première rencontre avec Amélie. Âme qui me lit. Âme dans mon lit. La première femme compte toujours.

Elle deviendra son souvenir, ce premier amour qui change le monde. de premiers émois, jeune, trop jeune, des rencontres fortuites après, mais toujours ce sentiment de communion entre deux êtres. Puis il y a eu Jo, cet amour inaccessible, cet amitié indicible, son univers harmonieux qui réunit des êtres larguées par une société pas à leur portée. Bernard a besoin de voyager. Paris, c'est bien, c'est beau, les filles sont belles. Mais l'ouest, c'est mieux. La mer, aussi, les vagues, les embruns, d'autres filles, d'autres amours. Je dis Bernard, mais cela pourrait être aussi Marc – Austère comme l'écrivain mais avec un e accent grave-re – le narrateur de cette histoire, de ces déambulations maritimes. Car, je n'émets aucun doute sur le fait qu'il y a de grands moments autobiographiques dans cette passion, dans ces rencontres, dans ces histoires d'amitié.

Un roman donc pour les amoureux de la Mer, les marins même ceux qui restent à Terre, les souvenirs de l'Afrique, les découvertes chiliennes et surtout pour les grands moments d'amitié que l'on y retrouve. Et je me reconnais dans ce portrait, sans oublier les amoureux de Nicole Kidman, la découverte du port de Wellington. Les pages déferlaient dans ma mémoire au gré du vent et de ses rafales, comme une onde sensuelle venue raviver mes premiers émois, venue entretenir la flamme des grands voyageurs littéraires.

Quelle belle rencontre maritime ! Désir Sensuel, onde marine.

« Les Dames de Nage », cap à l'ouest, le regard porté sur les vagues, les mains sur les femmes.
Lien : http://leranchsansnom.free.f..
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Je peux te poser une question : quel acteur français aurais-tu souhaité être ?
Bernard Giraudeau, il est beau, il est classe.
N'est-il pas aussi cinéaste, voyageur, marin, homme de théâtre, écrivain?
Si, si, il est multicolore dans l'esprit, bleu dans les yeux et à l'âme.
N'a t-il pas été le compagnon d'Annie Duperey, actrice, femme de théâtre, écrivaine ?
Si, si, j'ai eu un énorme coup de coeur adolescent en allant la voir au théâtre de la Ville dans « La guerre de Troie n'aura pas lieu » de Giraudoux, très très belle dame en chasuble transparente. J'étais en âge de mes premiers émois.

Et toi qui va lire ce livre, « and that's an order », tu ne seras pas en reste d'émotions.
C'est du gâteau découpé en tranches de vies parfois cocasses, souvent douloureuses, toujours émouvantes narrées par un chaud latin. C'est le paradis, lapin !
En fait non, c'est l'enfer, la recherche de soi-même au travers de vies perdues au fond de ports glauques dans les yeux rougis de presque-femmes à la barbe mauve naissante au petit matin.

« J'allais dans ma lanterne magique faire défiler en accéléré toutes ces vies amassées comme un trésor et parmi lesquelles je cherchais vainement la mienne. »

Note bien que la sensualité l'emporte sur la pauvreté, que le besoin du voyage, voyage plus loin que la nuit et le jour, dans l'espoir inouï de l'amour l'emporte sur la souffrance.
Le désir laisse place à la quête. La quête de soi, toujours.

« J'avais voyagé trop vite, dévoré le monde avec voracité, avec la peur de n'avoir jamais le temps. le temps de quoi ? »

Il l'a pourtant pris le temps de se poser cet homme impétueux et respectueux de l'amour, des femmes, de la vie, car il l'a magnifiquement écrit cette soif de découvertes, de charmes d'ailleurs au travers de belles rencontres qui donnent la chair de poule et la flamme au ventre.

Bernard, tu as croqué le fruit de la passion dans tous les continents, de toutes les façons.
C'est toi qui as eu raison.
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Mission de décembre 2019, reportée à  2020 pour cause de pandémie : lire un Giraudeau.
Recommandation spécifique: lire de préférence Les Dames de nage ou Cher Amour.

Mandateur: Pascal alias T.V.,  Grand Maître de la Loge Giraudalcienne.
Lobby : Mosaïque,  Aléatoire, Krout, Bison, Sirenna, frères bernardiens assermentés.

Esprit frondeur: Lolokilipasgiraudeausanreserve.
Esprit recalcitrant: Anne, ma soeur Rabanne qui ne veut pas en lire 

Mandataire: votre servante,  michfred. 
Mission accomplie en juillet 2020.


J'ai donc mis les voiles et emmanché mes rames de galérienne volontaire dans ces Dames de nage-là.

Ho hisse, souquons ferme, et cap vers la haute mer!

Début de voyage houleux, lyrisme à contretemps et route marine brouillée: j'ai dû jeter l'ancre. Attendre que ça se calme. Recalfater ma coque. Repartir.

Passer au large de quelques ilots de narcissisme irritants  -ah les yeux bleus, le matelot à la  belle gueule, le beau gars que guignent toutes les filles et qui tombe les plus troublantes, les plus chaudes, les plus fiévreuses, de la vierge à la pute, du trave' aux yeux de biche  à la diva décatie ...- .
 
Saisir le filin, tenir le cap : chercher Amélie -âme lie,  âme lit, à mes lits, ah m'élit... Bref chercher  la Dame de coeur de ces Dames de nage.

Mais le voyage était un drôle de périple, au gré du souvenir, aux vents du désir, ballotté d'un continent l'autre, au confluent des rencontres, hanté de visages amicaux, bercé de milles récits comme autant de petits îlots en atoll.

Il a fallu accepter de dériver, ne plus faire le point que sur des étoiles fantômes, perdre sa route comme le Manureva.

Et faire escale.

Connaître le doux visage couronné de cheveux blancs de Marguerite à la la croisée de sa fenêtre.  Les affres de Marco-Marcia qui voulut être fille et revoir sa Mamma. La haute silhouette de  Diego, le chef de gare qui fuyait la sienne, de mère, et Ana qui ne voulait plus reprendre son train. L'homme aux mains de pierre et la belle Ysé, amants éternellement contraires.

Rencontrer les amis:  Camille la monteuse de films , discrète et efficace,  grignotée , avant Bernard lui-même,   par l'affreux Crabe,  Jo l'"impératrice" peule, Diego le guitariste chilien et l'ami Michel, le "frère " trop tôt disparu.

 Et Amélie, bien sûr: Amélie perdue depuis l'enfance, Amélie retrouvée dans le kaléidoscope des miroirs d'un café , Amélie perdue encore.

Peut-être pour que Marc-Bernard la cherche indéfiniment.

Accepter de perdre pied, de flotter entre deux eaux, de se laisser capter, envoûter, séduire par ce marin aux yeux bleus un peu trop sûr de son charme mais dont on sent toute la déferlante nostalgie, la gourmandise sensuelle, la soif de vie, alors que déjà la Faucheuse, chevauchant les vagues, suivait à la trace son esquif.

PS. Merci à Faby-la-rochelaise qui m'a mis la rame en mains en me prêtant in situ son précieux livre.


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Oh que j'ai aimé cette écriture lyrique, poétique avec des envolées magnifiques qui laissent songeur. Et pourtant je crois que cette prose doit être lue avec amour pour donner tout son potentiel. Il faut être en lien avec le cosmos pour saisir toute la puissance sous-jacente qui exsude des mots de Giraudeau. Et pour cela rien de mieux que d'être en amour, empli du feu des astres qui illumine tout d'une rare beauté et permet le ressenti par le pétillement et le scintillement qui couvre l'être qui aime, lui donne toute la clairvoyance nécessaire pour être en parfaite osmose avec le monde et l'acuité pour ressentir les vibrations de la terre. Cette terre fertile qui donne la vie tout comme la femme, coeur de vie de ce roman. C'est ainsi que Marc écrit "au monde".

Mais voilà, "il faut être soudain poreux pour aimer." C'est sans doute ce qui me manque pour apprécier pleinement ce texte. Parce que j'ai eu un léger manque, non dans la profondeur des idées, mais dans leur envol, par trop régulier. Les mots sont très travaillés et je l'ai trop ressenti. Il me manquait la crépitation de la poussière d'étoile qui illumine le message, le déforme, le rend fulgurant avec des sautes d'humeurs, l'embrase pour l'élever vers des ténèbres d'où ils peuvent chuter sans peur de me perdre, mais pour mon plaisir, celui de la surprise. Ici, j'ai eu trop de tourbillons, sans rupture de rythme. Les bribes de vie de chacun étaient magnifiques, c'est la forme qui était linéaire. J'aurais voulu de l'instabilité dans les mots, de la porosité qui arrache le coeur et sort les tripes, en toute simplicité.

"Comment retrouver l'innocence, être nu, désarmé comme l'enfance, comment être perméable ?"
Pas facile…
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Il écrit l'amour, la liberté, le désir, la beauté comme seuls savent le faire les poètes.

Il nous emmène avec lui, sa caméra sur l'épaule pour voir plusieurs vies, plusieurs destins et se fondre avec eux dans un ailleurs.

Ses héros sont l'inconnu, le clair-obscur des sentiments, les jouissances de la vie.

Nostalgie - Poésie et Voyages pour découvrir.

Un tourbillon d'aventures.

Magnifique.
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Pas facile de rédiger un billet concernant un roman de Bernard Giraudeau...
Son oeuvre est une immense palette de couleurs et de poésie que l'on ne peut savourer qu'en prenant le temps.
C'est une lecture qu'il faut aborder sans attente bien précise, sinon le simple plaisir des mots.
Il faut aussi pouvoir se laisser surprendre au fil des pages, se laisser séduire par les rencontres improbables de personnages finement esquissés...des femmes, beaucoup.
Bernard Giraudeau a toujours aimé parler des femmes, les a toujours décrites avec sensualité, émotion, délicatesse.
Des hommes, aussi...aux destins hors normes, des écorchés vifs pour la plupart, qu'il peint plus crûment et sans concessions.
Juan qui prend le poste fou de chef de la gare déserte d'Atacama pour échapper à l'emprise de sa mère et auquel le destin envoie Ana, jeune évangéliste, laissée sur le quai parce qu'elle était aux toilettes.
Ou Marcia, anciennement Marco, déchirée de devoir taire la vérité à sa mère qui attend désespérément le retour d'un fils et qui voit revenir une fille.
Le narrateur n'est pas l'auteur lui-même mais, pour qui a déjà lu Bernard Giraudeau, il est impossible de ne pas y voir son double.
En toile de fond, toujours, la nature, sauvage, étincelante, phosphorescente, les grands espaces qu'il a tant parcourus, de la forêt d'Amazonie aux confins du Chili et qu'il décrit avec une passion d'amoureux émerveillé.
Trois étoiles seulement parce que ce n'est pas une lecture facile même si elle est très belle, trop belle parfois, à en devenir complexe.
Je me suis accrochée pour essayer de comprendre, d'apprécier; captivée aussi, de temps en temps, par des moments forts.
Je ne regrette pas un instant et, après Cher amour et Les dames de nage, je continuerai à lire Bernard Giraudeau avec plaisir et obstination !

Tiens, entre parenthèses, savez-vous ce que sont des dames de nage ? Non ? Et bien ce sont les supports des rames fixés aux barques.... Je vous ai scotchés, là...avouez !!
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Je referme ce livre comme je rentre de voyage : dépaysée, remplie de lumières multicolores, enrichie de rencontres et de découvertes passionnantes et passionnées, émue, profondément touchée.
Bernard Giraudeau, mon guide dans cette aventure, a instantanément comblé mon besoin immense de poésie, ma soif de cette tendresse qui désarme, ma quête de ces regards émerveillés que l'on pose sur les gens lorsqu'on les aime.

Je dois vous avouer que j'étais conquise avant même d'entamer cette lecture : la plume de ce marin aventurier, comédien talentueux, homme de lettres sensible, observateur amoureux et poète délicat, m'avait déjà tant bouleversée dans Cher Amour.
Je n'ai pas été déçue.

A travers Les dames de nage, j'ai rencontré les femmes qui, par leur pudeur, leur force, leur engagement, leur douleur, leur déchéance, leur beauté, leur choix, leur attachement ont marqué éternellement le coeur et la peau du marin-reporter.

Par sa plume divinement attachante, Bernard Giraudeau a su parfaitement me confier la beauté de leur existence. Comme un passage de témoin. Comme le plus beau des trésors que l'on offre à une personne de confiance.
Je me suis sentie invitée dans cet univers intime marqué de douceur et de dureté mélangées. Je m'y suis sentie à ma place, tantôt témoin impuissante, tantôt actrice impliquée, toujours voyageuse passionnée !
J'ai découvert l'extrême sensibilité d'un Bernard Giraudeau en quête de sens, de rêves, d'aspirations, de lui-même. Au fil des pages, il a mis son âme à nu. Les dames de nage lui ont tout donné pour enrichir son voyage intérieur et lui, il en a fait de même avec moi.
Dans ce livre, tout est don.

« le don est la source même de l'infini, une houle de tendresse dans l'éternité ».

Je quitte Les dames de nage, reconnaissante d'avoir vécu ce tour du monde lumineux, émerveillée par la beauté de ces femmes au coeur vaste et infini, titillée par la petite flamme aventurière qui ne cesse de briller en moi.
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N°316 – Octobre 2008

LES DAMES DE NAGE - Bernard GIRAUDEAU [Editions Métailié].

La première fois que j'ai appris la publication de ce livre, ce fut à la fin d'un journal télévisé, à travers les mots économes d'une belle journaliste blonde. Je me souviens de ses yeux qui en parlaient beaucoup mieux, puis le temps a passé et j'ai remis à plus tard cette lecture... J'avais eu l'impression fugace que ces pages évoquaient une longue liste de conquêtes féminines, des aventures amoureuses d'un séducteur...

Pourtant, dès les première lignes, l'auteur accroche son lecteur par des phrases apparemment anodines «  J'attends sans impatience, en vivant l'instant comme une éternité » ou bien «  J'ai alors, comme le veilleur, le sentiment de garder un territoire ». Alors moi, d'un coup, je comprends qu'il ne s'agit pas là d'une banale succession de passades d'un improbable Don Juan et je m'embarque avec lui dans son voyage.

Il y a d'abord l'évocation de cette jeunesse rochelaise, le père lointain et happé par la mort, la mère authentique, la famille, immédiate. Nous savons tous que cet épisode de la vie est primordial. Puis c'est l'approche des femmes, très tôt dans la timidité gauche de l'enfance, à travers l'image diaphane d' Amélie, celle du monde extérieur que tout à la fois on craint et souhaite conquérir pour elle, celle de la terre et de la mer parce qu'à La Rochelle l'une de va pas sans l'autre. C'est l'intuition que les rêves se tressent dans les ports parce que ceux qui y naissent et y vivent les premières années de leur vie ne peuvent pas ne pas les imaginer autrement, partagés qu'ils sont entre leur soif d'aventure et leurs certitudes...Pour Giraudeau l'enfance c'est la mère qui phonétiquement se confond avec l'océan, cette première femme qui non seulement donne la vie mais aussi le bagage qui accompagnera toujours l'enfant devenu un homme. C'est vers elle qu'il reviendra, c'est elle qui a imprimé, d'une manière définitive, ses traits dans la trame de sa mémoire et qu'il recherchera dans le visage de chaque femme... et d'avouer « Marguerite me rappelait que j'avais une mère qui vieillissait... elle était là-bas, à La Rochelle, la ville d'Amélie, celle de mon enfance, tournée vers la mer et des rêves à n'en plus finir ».

C'est l'éveil à l'amour, puéril et merveilleux, qui contient en lui tout ce qui sera plus tard la perpétuelle quête de l'homme vers la femme. Ce sont souvent les boucles innocentes d'une camarade de classe, d'une voisine ou d'une cousine qui en sont la cause, une vision fugace pour un garçon qui en gardera toute sa vie d'homme la trace au point d'en rechercher l'empreinte dans toutes les autres. «  Tout au long de ma vie j'ai aimé les nuques déliées, les femmes comme des gerbes et le secret des graines et dans les épis », même si l'existence se chargera plus tard de mâtiner tout cela, dans ses vicissitudes ou les brisures de la souffrance et de la mort... « Amélie tu fus une messagère, un guide que je reconnus sans conscience... Ce n'est pas toi que je quitte, c'est mon enfance , ma naïveté et ce long silence parce que tu n'es plus... Ce n'est pas une rupture, on ne rompt pas avec ce qu'on a aimé, je m'éloigne, puisque depuis longtemps nous nous sommes lâché la main ».

Ce sont aussi des souvenirs de voyage maritimes, des bribes de texte confiés au fragile support du papier, rangés dans un repli de la mémoire, qui viennent d'Afrique ou d'Amérique du Sud où le vent est bien souvent le seul témoin, le seul écrin de toute aventure humaine. Les ports sont des lieux d'exception qui accueillent les marins après l'exil du large. Les hommes qui y sont nés portent malgré eux, jusque dans leur sang, le rythme de la houle, l'haleine des embruns, l'écume blanche des vagues qui invitent à l'ailleurs. Ici se conjugue les forces de la terre et de l'eau, la volonté d'être de quelque part et celle, parfois plus forte de fouiller l'horizon, les valeurs de la permanence et celles, plus subtiles et irréelles de l'intemporel. Ils sont tiraillés entre leur volonté de plonger leurs racines dans les murs d'une maison, dans la vie quotidienne d'un couple rangé et celle, souvent plus forte, comme une aventure renouvelée, de partir à l'appel prégnant du vent, au hasard de l'escale, de ses plaisirs fugaces, de ses rencontres parfois noyées dans l'alcool et les bordels des ports. Il y a la mémoire, forcément sélective et labile « Il y eut d'autres escales, d'autres quais, d'autres amours... j'ai seulement gardé le visage de celles qui étaient venues à moi comme des cadeaux, des messages de vie. Il y eut des trésors et de fausses perles, des mirages d'amour et des corps glacés »
Quand on croise un regard de femme au hasard d'une rue, qu'on goûte à la délicate fragrance du parfum qui la suit, il se passe toujours quelque chose d'exceptionnel et parfois de frustrant. L'homme de mer, aventurier à la peau burinée, mais aussi le poète-témoin à l'âme bouleversée, malgré sa volonté d'indépendance, garde cela dans la grosse toile de son sac qui, posé à terre, se vide malgré tout de son contenu, avec des mots pour le papier, des images pour le ruban d'arlequin d'une pellicule... Et Bernard Giraudeau de convoquer Albert Camus pour « l'étranger », Alvaro Mutis pour le voyage et Pierre Loti pour tout cela et peut-être aussi pour la beauté des mots...

Portraits de femmes sensuelles, dispensatrices d'amour et de plaisirs, compagnes fugace du marin, partagées entre les larmes d'une foucade et la volonté définitive de s'établir, silhouettes d'hommes aussi, comme ce chef d'une gare perdue dans le désert d'Atacama au Chili, d'homos et de transfuges du sexe comme celui, sublime et douloureux, de Marco devenu Marcia...

Je n'en finirai pas de citer les phrases de ce livre tant elles m'appartiennent sans doute un peu. Les pages en sont autant de bouteilles jetées à la mer du quotidien, une invitation à la complicité...

C'est peut-être puéril, mais j'ai lu de nombreux passages de ce texte à haute voix, parce que ces mots sont comme des notes d'une musique alternativement tranquille et crue, apaisée et tourmentée. J'ai voulu me pénétrer de cette poésie, du balancement de la phrase, du ronronnement des allitérations qui ont été pour moi, pauvre lecteur, autant d'invitations au rêve que d'évocations intimes mais aussi du plaisir plus secret du non-dit.

Les dames de nage, une pièce d'accastillage pour chaloupe, un instrument qui permet au bateau d'avancer à la force des bras des rameurs, un beau titre évocateur. On pense aux femmes et à la mer, au voyage et au tangage de la houle et des corps dans l'étreinte, aux rencontres d'exception que seule l'aventure peut vous prêter ... le livre refermé, il reste des impressions, des paysages, des personnages, des délicates ombres de femmes, mais surtout le parfum de l'aventure, le dépaysement et ...la délicieuse musique des mots.


© Hervé GAUTIER - Octobre 2008. http://hervegautier.e-monsite.com 
Lien : http://hervegautier.e-monsit..
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