Ce livre, qui fait partie de la rentrée littéraire 2018 est : «
Une maison parmi les arbres » de
Julia Glass avec la traduction de
Josette Chicheportiche. D'ailleurs, je trouve qu'on ne mentionne pas assez le travail des traducteurs car il est très important. D'eux, dépend souvent l'intérêt que l'on porte à l'ouvrage.
Quant à la maison d'éditions Gallmeister, elle est vraiment intéressante et j'ai eu la chance, plusieurs fois, d'en rencontrer des écrivains. Ici je fais la connaissance de l'une par son livre.
Cette maison parmi les arbres, c'est celle de Morty Lear, dans le Connecticut, un écrivain de livres pour la jeunesse. Mais un jour, bien imprudemment : « Morty s'était hissé par une fenêtre à l'étage sur le toit très incliné au-dessus de la véranda fermée, résolu à retirer une branche tombée de l'érable patriarche, son préféré parmi tous les vieux et beaux arbres pour lesquels il avait acheté la propriété – un arbre qu'il avait reproduit maintes et maintes fois dans ses livres. »
Qu'arrive-t-il ? Eh oui, Morty tombe dans le jardin et décède.
Son assistante, sa compagne de tous les jours (en tout bien tout honneur car Morty est homosexuel), Tomasina Daulair (surnommé Tommy), est en fait une sorte de gouvernante – gérante – secrétaire – une femme indispensable, est désignée comme l'héritière aussi bien de sa propriété que de son oeuvre.
Une grande partie de l'ouvrage concerne ce bien particulier personnage qu'a été Morty avec des souvenirs, des retours en arrière…
Tommy fait aussi la connaissance de Nicholas Greene (Nick), un séduisant acteur qui a en vue un rôle le représentant justement en Morty.
Tommy va fouiller dans le passé de son ancien employeur – bienfaiteur qui a vécu une relation amoureuse tragique avec Soren, sa grande passion mais qui se retrouve atteint par la Sida.
Julia Glass joue avec de nombreux flashbacks : « 1972 – Tomasina avait douze ans quand elle décida qu'elle préférait être Tommy. (…) Sa mère l'appelait une « non-conformiste obstinée », laissant manifestement entendre que la singularité de sa fille lui plaisait.
- Je suis une iste, moi aussi, disait-elle. Une féministe gauchiste optimiste activiste ! »
La première rencontre entre Tommy et Morty avait eu lieu alors qu'elle était une enfant et jouait avec son frère Dani dans un jardin pendant que Morty « croquait » le petit garçon : « Dessinez Dani si vous en avez envie. Mais seulement ici. » Quelques années plus tard elle le rencontre à nouveau et il lui avoue qu'il est devenu très riche. Alors : « Comment pourrais-je vous remercier, madame Tomasina Daulair ? Demandez-moi une faveur et je vous l'accorde. (…) Avant qu'elle ne puisse se retenir, elle lâcha :
- M'aider à trouver un travail ? » . Et voilà comment elle se retrouve embauchée par le célébrissime écrivain.
En fouillant dans le passé de son bienfaiteur, Tommy découvre qu'il a connu un grand traumatisme dans « l'abri de jardin » dont il ne veut pas parler. Il est un écrivain bien admiré mais cache bien des secrets.
Quant à Nick qui avait échangé quelques e-mails avec Morty en vue de son film, va devenir très ami avec Tommy et va même loger dans cette maison où il ne va pas se gêner pour fouiner mais aussi par se rendre indispensable avec ses nombreux talents.
On ressent bien le suspens avec cette maison au milieu des arbres car on l'a compris, il y a des non-dits.
On fait aussi la connaissance de Merry, conservatrice d'un musée où une partie sera dédiée à l'oeuvre de Morty.
On apprend aussi que Tommy avait demandé à Morty de la laisser « déployer ses ailes », ce à quoi Morty avait eu une réaction violente en refusant catégoriquement. Il a absolument d'elle et c'est là qu'il lui révèle que son amant, Soren, qu'il est très malade car il est atteint par le Sida : « Vous êtes irremplaçable, déclara-t-il. Je vous aime d'un amour égoïste et totalement injuste envers vous, Tommy, mais si vous devez me quitter, je vous en prie, accordez-moi un peu de temps. S'il vous plaît, juste... »
C'est en page 170 que l'on apprend ce qui s'est réellement passé dans le fameux abri de jardin, un traumatisme qu'il a gardé toute sa vie (mais c'est top secret).
Le talent de
Julia Glass réside dans sa façon de raconter cette histoire dramatique – sa façon de jouer avec nos nerfs et notre impatience de savoir comment tout cela va se terminer – sa façon de laisser filer les informations (celles que recherchent Tommy et Nick). Les pages se tournent pour en arriver à un final bien touchant après de nombreux rebondissements, des surprises qui vont se succéder en nous faisant part de certaines blessures qui peuvent sembler infimes mais qui, en réalité peuvent marquer à jamais une vie.
Le récit est tellement fluide qu'il se lit bien aisément et presque d'une traite. Mais attention, le livre comporte 460 pages et c'est alors un risque de nuit blanche.
J'ai bien aimé, dans les « Remerciements » cette phrase : « Gayle Grader, à toi aussi. Tu m'as offert le plus beau mantra dont peut rêver un écrivain (ou n'importe qui d'ailleurs) : Surprends-toi. »
C'est ce qu'elle a fait avec son style délicat et touchant qui va au plus profond de l'âme des êtres humains.