Les premières affaires de l'inspecteur Studer

Une sorte de Maigret, que cet Inspecteur (ex-commissaire) Studer.... Une belle découverte, pour moi, que celle de Friedrich Glauser qui admirait Georges Simenon! Lui, avait compris que le roman policier classique et engoncé dans dix commandements (pourquoi dix?) s'éloignait trop de la vie et de la réalité.
En fait foi cette lettre ouverte à l'auteur de ces "dix commandements" (Stefan Brockhoff) dans laquelle Glauser fait oeuvre de pédagogie, de lucidité et de pertinence. Peut-être l'un des textes les plus importants écrit sur le roman policier et son devenir.
Les douze nouvelles proprement-dites du volume, m'ont semblé de très haute tenues, en me donnant l'envie de continuer de lire l'oeuvre de Friedrich Glauser avec, entre autres, les enquêtes de Studer.
Ces douze récits, marquées parfois au fer de l'expérience aventureuse et douloureuse de l'auteur, offrent de belles pages emplies d'humanité pour quelques--unes et de fantastique pour d'autres.
Passionnantes, aussi, sont Les Notes sur le texte qui offrent quelques éclairages bienvenus sur les douze nouvelles, et la postface de Franck Göre.
Cette dernière (c'est le cas de le dire) clôt avec brio ce volume d'un auteur attachant et captivant.
Un auteur qu'il serait vraiment dommage d'ignorer lorsqu'on rencontre ses livres.

Fugues à répétition, maisons de redressement, addiction à la morphine, séjours en prison, internements forcés en hôpital psychiatrique, tentatives de suicide, instabilité professionnelle, décès à l'âge de 42 ans...La vie de Friedrich Glauser, écrivain suisse de langue allemande, n'a pas été un long fleuve tranquille mais il en a tiré de quoi nourrir son oeuvre littéraire.
Faussement titré ''Les premières affaires de l'inspecteur Struder'', ce recueil de nouvelles policières aborde des thèmes comme la prison, la folie, et même la légion étrangère que Glauser a intégré pendant deux ansmais le fameux policier Jakob Struder y est finalement peu présent. Il en fera cependant son personnage récurrent, il n'est donc pas inutile d'apprendre ici à le connaître, même partiellement. On saura qu'il est suisse, de la police bernoise, qu'il est marié, qu'il fume le cigare, qu'il a été commissaire mais qu'il a été rétrogradé. Inspiré du Maigret de Simenon dont Glauser disait être le disciple, c'est un homme calme, empathique et sensible à la psychologie de ses suspects.

Ces nouvelles constituent une véritable curiosité. Etrangement, elles sont à la fois désuète et moderne. Désuète par le contexte décrit, souvent la campagne suisse et moderne par l'écriture, le ton, les techniques policières évoquées. La découverte d'un auteur prolifique, très populaire à son époque et tombé dans l'oubli, est forcément intéressante. Par contre, il faut aimer les nouvelles...des histoires courtes qui montent très vite en puissance et finissent par retomber comme un soufflé. Un genre souvent frustrant. Mais on retiendra un style plaisant, de l'humour, du cynisme parfois, une dénonciation du pouvoir des notables, des bourgeois, une prise de position en faveur des plus humbles, des miséreux, des délinquants par nécessité et bien sûr, Struder, qu'on aimerait retrouver dans une histoire plus longue.

Les premières affaires de l'inspecteur Studer (recueil de nouvelles édité à titre posthume) promettaient d'être intéressantes au regard de la vie courte, dissolue et douloureuse de l'auteur; mais dans la plupart on cherche le fameux Studer. Les critiques sont souvent dithyrambiques pour décrire ces chroniques mais passée la seconde aventure, je me suis lassée de l'écriture.
J'ai fini le recueil pour être sûre de ne pas être passée à côté , j'ai même lu les dix commandements pour le roman policier par Stefan Brockhoff afin de cerner au plus près l'auteur mais rien n'y a fait.
Un chapitre, tout à la fin de l'ouvrage, m'a paru digne d'intérêt , il s'intitule Notes sur le texte et parle de la genèse des différentes histoires.

Belle découverte pour moi d'un auteur inconnu (1896-1938) publié dans une collection qui m'a souvent déçu.

Pour ce qui est de l'auteur, je vous renvoie à sa notice wikipedia. L'expression est souvent galvaudée mais pour le coup sa vie est un roman en soi.

Pour l'aspect littéraire du récit policier, il l'expose dans un texte qui complète ce recueil de nouvelles : "Tout ce qui manque dans la littérature policière dans son ensemble, je l'ai trouvé réuni chez un auteur. L'auteur s'appelle Simenon (...). Ce qui est singulier dans ces romans (...) c'est que l'on reste au fond indifférent à la solution (...). Mais il flotte entre les lignes cet air de rêve, il y brille cette lumière qui donne aux choses les plus petites, les plus modestes, une vie parfois mystérieuses. le coupable ? C'est un homme parmi d'autres (...).
Pour Glauser la découverte du coupable n'est pas un coup d'arrêt : "(...) la vie continue, illogique, passionnante, triste et grotesque à la fois."

Quand un auteur a un tel recul sur ses textes, l'avis du lecteur n'en est que plus facile à exprimer. Il y a bien longtemps que je n'avais pas lu une analyse (préface, postface ou commentaire) jusqu'à son terme.

J'aime les nouvelles, donc je suis automatiquement un peu partisan.
Ici, on a droit à un univers un peu déjanté, peut-être un peu influencé par la vie de l'auteur.
Ce n'est pas forcément de la grande littérature, mais ça donne de bonnes lectures.
N'est-ce pas le principal ?