Près de mille ans d'histoire européenne, c'est ni plus ni moins ce que propose
Gabi Gleichmann dans
L'élixir de l'immortalité. Mais de façon très romanesque, avec le prisme particulier du destin d'une lignée juive, celle de la famille
Spinoza. Si la communauté juive a été de tous temps ostracisée, pourchassée et bien davantage, le propos de l'écrivain norvégien n'est pas d'établir un catalogue de toutes les souffrances endurées mais plutôt de montrer à quel point les juifs ont été partie prenante des sociétés jusqu'aux plus hautes sphères politiques.
L'élixir de l'immortalité se présente comme une suite de récits, dans un ordre plus ou moins chronologique, qui raconte avec verve et fantaisie les mésaventures des
Spinoza. le vrai et le faux se mêlent, le tragique laisse souvent place au grotesque dans ce roman qui se veut dans la tradition des contes des mille et nuits. le plaisir de lecture est indéniable tout au long des 530 pages même si parfois Gleichmann pousse le bouchon un peu loin dans l'absurde et le rocambolesque. Beaucoup de seconds rôles célèbres apparaissent dans cette saga qui débute dans l'Espagne du XIIe siècle et se termine dans la Hongrie de 1960 :
Robespierre,
Freud, Hitler, Staline, Goya,
Voltaire, Blériot, entre autres. Ce panorama tient parfois du survol rapide des différents grands événements historiques : Inquisition, Siècle des Lumières, Révolution française, épopée napoléonienne, fascisme, socialisme. Mais c'est la fresque familiale à laquelle on s'attache, malgré les impasses, les raccourcis et les ellipses. Gleichmann en dit très peu sur l'Holocauste. Sans doute n'est-ce pas son propos et son silence pèse aussi lourd qu'une accumulation de mots qui ne pourront jamais exprimer l'horreur, par définition indicible.