April et le dernier ours

J'aime toujours autant me plonger dans la littérature de jeunesse, me tenir informée des nouvelles parutions et découvrir des romans aux thèmes variés. Quelle chance ont nos jeunes d'avoir à disposition une offre si éclectique et si attirante !
Aujourd'hui, je vous parle d'une des dernières parutions des Éditions du Seuil, April et le dernier ours. Ce roman de Hannah Gold invite le lecteur à suivre la jeune April, partie vivre pendant quelques mois sur une île située dans le cercle polaire arctique, avec son père climatologue. Enfant sensible et passionnée par les animaux, elle y fait l'expérience de la solitude : d'une part, le travail de son père l'accapare beaucoup et il y noie son chagrin depuis la mort de son épouse ; d'autre part, l'île peuplée autrefois d'ours est déserte et silencieuse. Un jour pourtant, April va faire une rencontre qui va bouleverser son quotidien…
C'est un très joli roman qui plaira, j'en suis certaine, aux enfants et aux jeunes adolescents épris de nature et de liberté. Il peut aussi être lu pour le message écologique qu'il véhicule : j'ai vraiment apprécié que l'autrice ne soit pas trop insistante sur ce point, qu'elle ne cherche pas à donner une leçon. Elle informe, au coeur du roman, mais également dans la note au lecteur qui le suit, et c'est suffisant. Elle fait surtout de son roman une belle histoire d'amitié entre un enfant et un animal sauvage, comme il en existe d'autres. Évidemment, il ne faut pas s'attarder sur l'aspect réaliste de l'histoire : April parvient à « apprivoiser » son nouvel ami l'ours, elle monte sur son dos, elle communique avec lui… Soit ! Rien de grave… Juste un peu de magie dans un monde qui n'est pas tout rose. C'est un roman qui peut constituer une belle parenthèse pour les jeunes lecteurs. J'ai failli oublier de parler des illustrations réalisées par Levi Pinfold : elles sont sublimes et apportent vraiment quelque chose au texte.

Incontournable Mars 2022


Depuis quelques temps, j'observe l'arrivé en librairie jeunesse de romans plus engagés concrètement pour traiter des enjeux climatique et de la préservation des espèces, dans la foulée des manifestations de plus en plus nombreuses de part le monde sur ces sujets. Grand bien nous fasse! Ce roman britannique en fait parti.


April a onze ans et est la fille d'un climatologue qui a du mal à se remettre du décès de sa femme, sept ans plus tôt. C,est donc avec un certain enthousiasme qu'il informe sa fille de leur projet d'aller en Norvège, sur une île non-peuplée, pour aller recueillir des données pour le gouvernement norvégien. Pour cette jeune fille qui adore être dehors et préfère la compagnie des animaux à celle des humains, c'est donc une belle opportunité et ce d'autant plus que cela pourrait lui pemettre de faire de l'exploration avec son père, bien distant et amorphe depuis quelques années. Ils se rendent donc par bateau sur l'Île aux ours, aride et froide, où se tient le poste de météorologie se tient. Hélas, le père d'April est très occupé et s'il lui fait classe le matin avec des encyclopédies, le reste du temps, elle est livrée à elle-même. Et puis, un jour, elle découvre un animal extraordinaire qui est blessé, sur une plage de l'île. C,est ainsi qu'elle fait la rencontre avec "Ours", un ours polaire famélique et solitaire, qui ne devrait pas être là, en principe. Pour les deux personnages, c,est le début d'une amitié improbable, à travers un paysage hospitalier et une choquante situation climatique qui est du fait de l'homme au détriment de la Nature.


Histoire d'un père endeuillé qui néglige sa fille et se perd dans le travail, on se met rapidement à espérer qu'il prenne conscience du fait que sa fille a besoin d'un papa. C'est également histoire d'une réalité laide sur ces animaux qui sont les premiers grands perdants de tout le bazar climatique généré par la pollution humaine, surtout les animaux du cercle polaire, dont la fonte des banquise est particulièrement dommageable et rapide. Enfin, c'est l'histoire de deux êtres très différents qui sont en mal de compagnie, qui vont devoir apprendre à s'apprivoiser et communiquer, et qui vont au final, en sortir bien plus forts.


On ne peut pas dire que l'action est haletante, néanmoins l'histoire est jolie et touchante. Elle est en outre intéressante et constitue un sujet de première heure pour notre jeunesse de plus en plus consciente des enjeux liés à l'environnement. En outre, rares sont les récits qui prennent place au-delà du cercle polaire. La dernière fois que j'avais lu sur des ours polaires, c'était avec la trilogie de Pullman "À la Croisée des Mondes".


Petits détail amusant: les norvégiens ont un terme pour désigner la joie d'être dehors : "Friluftsliv" qu'on peut traduire littéralement par "L'air de la vie est gratuit". Ils ont en outre plusieurs mots pour désigner la neige. Ça je connais, on a aussi plusieurs expressions pour qualifier la neige, au Québec.


Enfin, les illustrations qui jalonnent le récit sont merveilleuses et rendent hommage à la beauté du texte et de cette île polaire où neige, terre et ciel, qui occupent tout l'espace, sont de vrais artistes.


À voir!


Pour un lectorat du second cycle primaire, 8-9 ans.


*Dans la note de l'autrice, qui apporte quelques informations et précisions sur son oeuvre, on retrouvera des sites pour "aller plus loin". Les voici:

"Vous pouvez en apprendre plus sur l'action des WWF en faveur des ours polaires et des espèces en danger et sur ce que vous pouvez faire pour les soutenir ici": www.wwf.fr/especes-prioritaires/ours-polaire

"L'institut polaire existe réellement et vous pouvez en apprendre plus à son sujet ici": institut-polaire.fr

"Si vous voulez en apprendre davantage sur l'île aux Ours, j'ai trouvé ce site très intéressant. Vous y trouverez des photos de la baie des Morses ( Kvalrossbukta). Vous pouvez aussi aller sur Google Maps et jeter un coup d'oeil" : www.lagardenuit.com/wiki/index.php?title=Île-aux-ours

April est une petite fille qui se plaît mieux dans la compagnie des animaux que des autres enfants. Autant dire que l'idée de passer six mois seule avec son père sur une île déserte du cercle polaire arctique n'est pas pour lui déplaire. Son seul regret est que, sur l'île aux Ours, ne vit plus aucun ours. Normalement. Pourtant, April va y découvrir un ours polaire, isolé, prisonnier de l'île.

Si vous rencontrez un ours polaire isolé et affamé sur une île trop petite pour lui, vous avez plus de chances de devenir son casse-croûte que son ami. L'auteur, dans sa note finale, ne manque pas de le préciser. Pourtant, cette histoire d'amitié impossible, on arrive à y croire. Elle s'installe progressivement (même si l'ours est mentionné dès les premières lignes, il faut plusieurs chapitres pour mettre en place le contexte de la rencontre et les personnages qui joueront un rôle dans cette histoire). Elle ne peut pas tout à fait éviter l'écueil inhérent à ce genre d'histoire : une action un peu lente, voire un manque d'action. Mais le sort tragique d'Ours et le départ inévitable d'April installent une tension dramatique suffisante pour entraîner le lecteur à tourner les pages.

April et le dernier ours n'est pas seulement une énième histoire d'amitié improbable entre un enfant et un animal (Sauvez Willy 3452, le retour), c'est aussi une fable poignante. Bien qu'imaginaire et irréaliste, cette histoire qui rend concrètes les conséquences du réchauffement climatique interpelle et dérange. La réaction courageuse d'April interroge le lecteur, jeune ou moins jeune, sur sa propre capacité et volonté d'action face à un phénomène qui impacte la planète toute entière, avec tous ses occupants.

Outre ce propos "militant" amené avec beaucoup de finesse, c'est aussi une histoire touchante sur le deuil, sur les relations parfois complexes avec les parents... (même si, là aussi, ce n'est pas très neuf).

Le style d'écriture est très correct, simple avec quelques images originales et bien trouvées. Un dernier aspect qui m'a beaucoup plu, ce sont les illustrations. Elles sont tout à fait magnifiques. Elles font la part belle à l'ours et accompagnent judicieusement le récit. Elles sont tellement belles qu'elles participaient beaucoup à mon envie d'attaquer sans attendre un nouveau chapitre pour découvrir une nouvelle image. Il y avait longtemps que je n'avais pas été aussi séduite par les illustrations d'un livre jeunesse.

April et le dernier ours semble faire beaucoup parler de lui parmi les sorties jeunesse récentes. À juste titre, à mon avis.

Merci à Netgalley et à Seuil Jeunesse pour cette belle découverte.

Challenge Romans Jeunesse 2021/2022

j'ai terminé ce livre les larmes aux yeux et une horrible boule au ventre ! le message qu'il délivre nous met face à nos responsabilités et est malheureusement d'actualité.
Les jeunes sont très sensibles à l'avenir de notre planète et au phénomène du réchauffement climatique. Nul doute que ce roman jeunesse les ravira tant par la forme que par le fond et qu'il séduira les lecteurs confirmés aussi bien que les jeunes moins enthousiastes à l'idée de lire.
L'auteure nous envoie dans des contrées un peu hostiles et les descriptions, bien que précises, sont relativement courtes.
Elle raconte extrêmement bien cette amitié improbable entre un ours polaire et une petite fille. Pour des raisons bien différentes, ils se sentent tous les deux abandonnés. Ils sont complices, parviennent à se comprendre. Leur relation est merveilleuse, avec un soupçon de magie qui plaira aux plus jeunes.
L'histoire d'Ours est le prétexte pour aborder un sujet bien grave : la fonte de la calotte glaciaire et la survie des ours polaires.
Ces propos sont magnifiquement illustrés par des dessins noirs et blancs qui accentuent la gravité du texte. les traits, le décor témoignent de la rudesse du climat, de la beauté sauvage du lieu mais surtout des sentiments éprouvés par les personnages.
Un bel hommage à la nature, à l'amitié, au courage, à l'amour filial et surtout, une envie de se mettre en marche, de faire quelque chose, même de minime, pour protéger la Terre et toutes les formes de vie qu'elle abrite.

Flirtant entre le récit de vie et le fantastique, ce roman jeunesse est avant tout une belle histoire d'amitié et un ouvrage engagé.

L'univers dans lequel se déroule le récit - cette île aux ours, vaste étendue glacée et inhospitalière - m'a beaucoup plu. L'autrice sait nous y transporter grâce à ses mots et les illustrations (signées Levi Pinfold), absolument magnifiques, subliment ses descriptions. On entrevoie la buée s'échapper de nos lèvres, on grelotte aux côtés d'April en regardant les sommets enneigés des montagnes.

J'ai trouvé la relation entre April et Ours très réaliste malgré la dimension fantastique de la situation. Ils s'apprivoisent petit à petit et se comprennent sans échanger de mots. Cela m'a paru important d'ailleurs, qu'ils ne se parlent pas, et j'ai apprécié qu'ils soient plutôt dans le ressenti de leurs émotions respectives, cela donne une profondeur supplémentaire au récit. Je ne me suis pas attachée au personnage d'April par contre. Je l'ai trouvée assez quelconque et l'ai quittée sans regret à la fin de l'histoire, ce qui est assez dommage pour un roman où l'identification au personnage me paraît importante (mais je ne suis pas le public cible).

Enfin, j'ai apprécié la dimension engagée du roman qui aborde des thématiques écologiques comme le réchauffement climatique, la fonte des glaces (et donc la disparition du lieu de vie des ours polaires) ou encore les déchets qui sont rejetés à la mer. Plusieurs informations chiffrées sont données au long du récit ce qui renforce la prise de conscience du/de la lecteur.rice. À la fin du livre, l'autrice renvoie vers quelques sites internet pour faire de plus amples recherches, ce qui m'a semblé utile pour connecter ce récit de fiction avec la réalité. Elle utilise d'ailleurs un ton neutre pour raconter son histoire, sans être moralisatrice et sans mettre trop de responsabilités sur le dos des jeunes lecteur.rice.s.

C'est peut-être ce que je lui reprocherai d'ailleurs, et ce qui m'empêche de définir cette lecture comme un coup de coeur : ce ton neutre face à lequel je n'ai ressenti aucune émotion. En résumé, j'ai passé un bon moment avec ce livre mais il me semble pas s'inscrire dans les incontournables à découvrir dans la littérature jeunesse.