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Françoise Gollain (Autre)
EAN : 9782369354222
128 pages
Le Passager Clandestin (21/01/2021)
3.9/5   5 notes
Résumé :
"La décroissance est un impératif de survie."
Figure emblématique de l'écologie politique, journaliste mais avant tout philosophe, André Gorz (1923-2007) soutient qu'il "est impossible d'éviter une catastrophe climatique sans rompre radicalement avec les méthodes et la logique économique qui y mènent depuis cent cinquante ans".
Il prône l'alliance de l'écologie et de l'anticapitalisme et aspire à une société où l'on "travaille moins et consomme moins, ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
LA DÉCROISSANCE OU LA MORT...

Courant de pensée encore très minoritaire dans le "paysage" politique, social et philosophique tant international que français, le mouvement "décroissant" n'en connaît pas moins de fortes bases théoriques développées, depuis plus d'une quarantaine d'année par des intellectuels tels que le roumain Nicholas Georgescu-Roegen ("inventeur" de ce qualificatif), le sociologue «anarchiste-chrétien» Jacques Ellul, le philosophe et penseur allemand de l'écologie politique Ivan Illich, l'auto-proclamé «semeur de panique» Günther Anders, le radicalement libre Bernard Charbonneau, l'essayiste américain, inventeur du "municipalisme libertaire", Murray Bookchin et tant d'autres qui, à bien des égards, on permit la construction de cette pensée tant indispensable que non-conformiste.

Parmi ceux-ci, il en est un dont le parcours intellectuel tout autant que les répercussions de sa profonde pensée politique et écologique a marqué pour longtemps cette pensée décroissante mais aussi la perception que nous avons du capitalisme, des rapports entre salariat et consommation - les deux ne faisant plus qu'un dans cet être hybride, désincarné et privé de réelle liberté qu'est le salarié-consommateur (notons qu'il n'y a plus là aucune place pour le "citoyen")-, d'une critique radicale de la "religion" du travail tout autant que celle de la croissance infinie promue par la société capitaliste comme source première de la destruction irrévocable de notre écosystème, l'écologie politique (mais a-partisane et "éco-sociale"), dans un projet prenant en compte l'autonomie et l'épanouissement humain, comme réponse aux travers innombrables, irrévocables et irréversibles de la société capitaliste.

Cet homme, né en 1923 de parents juifs autrichiens, émigré en Suisse durant la guerre puis en France à partir de 1949, c'est Gerhart Hirsch, plus connu sous son nom d'adoption André Gorz. Jusqu'à sa mort - volontaire et en compagnie de la femme de toute une existence, Dorine, celle grâce à qui on lui doit la troublante et belle Lettre à d': Histoire d'un amour, rédigée un an avant cet ultime choix -, le 22 septembre 2007, il approfondira ces thématiques qui lui étaient si chères, partant de la double analyse sartrienne de l'existentialisme et de celle, marxienne (et non marxiste), du capitalisme, le tout enrichi par la pensée d'Ivan Illich, tant à travers ses ouvrages d'une pensée a-dogmatique en constante évolution, souvent denses, complexes et traversés de certaines tensions, - des livres souvent publiés par son éditeur de prédilection, les éditions Galilée -, que par l'entremise de ses très nombreux articles de presse (L'Express des débuts sous le patronyme de Michel Bousquet, Les Temps Modernes, Le Nouvel Observateur, etc), plus abordables mais toujours passionnants. 

Cet opuscule enthousiasmant, publié par les éditions le Passager clandestin - que nous remercions infiniment tant pour l'ouvrage lui-même que pour la découverte de cette très riche en enthousiasmante maison, reçu à l'occasion de la dernière Masse Critique "non-fiction" organisée par notre site de lecture en ligne préféré, Babelio.com - se présente peu ou prou comme un "Que sais-je ?" (il en a à peu près toutes les qualités). Intitulé, pour être parfaitement précis, André Gorz & l'écosocialisme, il est conçu et rédigé par la sociologue Françoise Gollain, spécialiste de l'oeuvre d'André Gorz, et qui l'a d'ailleurs fort bien connu. Il comprend quelques repères biographiques, suivi d'un rapide développement du même tonneau puis d'une analyse aussi précise que ramassée des thématiques traversant la pensée gorzienne. Une rapide mais très éclairante dernière partie propose de découvrir quelques textes et extraits révélateurs de cette pensée. L'ensemble se conclut par l'inévitable et indispensable bibliographie. 

On pourra, parfois, reprocher à l'autrice de cette - néanmoins excellente - monographie un vocabulaire quelque peu "jargonnant", un style un peu technique, mais il nous a aussi semblé qu'un ouvrage aussi ramassé qui se donne pourtant pour mission d'être le plus complet possible ne pouvait que difficilement faire l'économie de concepts, de notions parfois complexes issues des champs de la pensée politique, sociologique, économique, écologique et philosophique. Cela peut effectivement rendre certains développement d'un abord un peu plus ardu, mais c'est aussi à ce prix que "résumé" ne signifie ni abêtissement ni édulcoration. 

Les plus curieux pourront aller tout aussi bien y voir de plus près dans l'oeuvre de l'auteur de ecologica qu'au sein de cette excellente collection des Editions le Passager clandestin, intitulée "précurseur.ses de la décroissance", où l'on retrouve aussi bien Épicure que Simone Weil, Kropotkine que Cornelius Castoriadis, George Orwell que Françoise d'Eaubonne, de même que tous les penseurs, essayiste et philosophes mentionnés plus haut. Une bien précieuse source de références ! 
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J'aime beaucoup les livres de cette collection des “Précurseurs de la décroissance”. C'est le troisième que je lis, après “Françoise d'Eaubonne & l'écoféminisme” et “Cornélius Castoriadis & l'autonomie radicale”. L'avantage que je vois à cette collection est de nous présenter la pensée d'un auteur dans un format assez court, de donner une vue d'ensemble de son oeuvre (qui s'étale souvent sur plusieurs dizaines d'années) et de faire des liens avec le mouvement de la décroissance. C'est d'autant plus utile quand les auteurs m'ont semblé un peu ardus à lire, comme c'est le cas d'André Gorz dont j'ai essayé de lire l'essai “Misère du présent, richesse du possible” sans arriver au bout malgré l'aspect hautement prometteur du titre. Je suis donc très contente d'avoir ce petit livre entre mes mains et de dépasser ma frustration de n'avoir pas pu percer la pensée de cet auteur qui à mes yeux est un maillon incontournable de l'écologie politique.

André Gorz s'appuie sur les pensées de Marx et de Jean-Paul Sartre pour construire une philosophie de l'écologie qui ne perd jamais son humanisme. Dans cette optique, l'écologie ne peut jamais être une excuse pour restreindre les libertés ou la démocratie. L'idée est de “préserver la qualité du monde vécu”. J'aime beaucoup cette articulation entre préservation de l'environnement et prise en compte du regard humain qui l'englobe, entre écologie et luttes sociales.

Pour être honnête, quand je me plonge dans la pensée des auteurs et d'autrices de cette collection qui ont écrit il y a plusieurs décennies déjà, je suis prise de tristesse et de découragement... Toutes ces idées de décroissance ne sont pas nouvelles. Elles ont été très bien décrites et développées il y a bien longtemps, tout en étant amenées dans la cité par des activistes très engagé-e-s. Pourtant, elles restent extrêmement marginales et ne sont pas appliquées. Ce qui m'attriste surtout c'est qu'à ce moment-là (disons dans les années 70), tout était encore possible : l'hécatombe de la biodiversité n'avait pas encore eu lieu, le mode de vie ne devait pas être changé de beaucoup, à condition de stopper la croissance. Aujourd'hui, tous les voyants sont au rouge. Est-ce que nous arriverons à faire advenir une société soutenable, écologique et éthique avant le grand effondrement final ? L'avenir (proche) nous le dira.

Une collection passionnante et essentielle, à lire et à garder sous la main.
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Ce livre est divisé en 2 parties. Dans la première, l'autrice nous présente André Gorz, sa vie, ses idées, son parcours. La deuxième est composée d'extraits de textes, articles ou essais, rédigés par André Gorz au cours de sa carrière.

La première partie est intéressante, on découvre une personnalité parmi les précurseurs des mouvements décroissants (le titre de la collection est bien choisie, pour le coup). Personnellement je n'avais jamais entendu parler d'André Gorz et j'ai appris beaucoup de choses à son sujet, mais également sur l'évolution des mouvements écologiques du siècle dernier et les idées développées par Gorz au fil de sa réflexion. Réflexion reposant sur l'écologie, mais aussi le socialisme, comme l'indique le titre, notamment sur les écrits de Marx.

La deuxième partie permet de voir à quel point l'autrice a malheureusement complexifié inutilement des idées et une réflexion qui étaient parfaitement clairs et accessibles. C'est le gros point noir de ce livre: analyser une oeuvre devrait permettre de la rendre plus simple d'accès, pas le contraire. Ici j'ai eu parfois du mal à tout saisir dans le propos de Françoise Gollain, ma lecture a été lente, voire laborieuse. Alors que je n'ai eu aucun mal à comprendre les extraits choisis pour illustrer la pensée d'André Gorz.

Si le sujet vous intéresse, je vous recommande donc plutôt de vous diriger directement vers un ouvrage d'André Gorz plutôt que vers celui-ci.

Lecture intéressante, mais les idées qu'on voulait mettre en valeur y sont rendues parfois absconses alors qu'elles ne l'étaient pas à la base.
Lien : https://bienvenueducotedeche..
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
Aujourd'hui, «nous sommes incapables de décider voire de nous demander de quoi nous avons besoin en quantité et en qualité. Nos désirs et nos besoins sont amputés, formatés, appauvris par l'omniprésence des propagandes commerciales et la surabondance des marchandises*». La norme traditionnelle du «suffisant», caractéristique des sociétés précapitalistes, a été érodé, donnant naissance à une dynamique sans fin des désirs et des besoins. Le salarié «perçoit l'argent comme ce qui peut tout acheter symboliquement. Si l'on ajoute que la durée du travail, les conditions de logement, l'environnement urbain sont autant d'obstacles à l'épanouissement des facultés individuelles et des relations sociales, à la possibilité de jouir du temps de non-travail, on comprend que le travailleur ne rêve que de marchandises*».
[...]
Le travailleur-consommateur des pays dits «développés» qui, pour la pensée libérale, incarne le plus haut degré de liberté politique et économique n'est d'ailleurs pour André Gorz que la victime d'une double dépossession par subordination aux impératifs de la production comme moyen d'accumulation du capital. Cet impératif d'accumulation constitue en effet non seulement la source de la destruction de la nature, mais également de l'entrave de l'autonomie des individus.

(*extraits de textes d'André Gorz cités par l'autrice)
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C'est le capitalisme lui-même qui, sans le vouloir, travaille à sa propre extinction en développant les outils d'une sorte d'artisanat high-tech, qui permettent de fabriquer à peu près n'importe quels objets à trois dimensions avec une productivité très supérieure à celle de l'industrie et une faible consommation de ressources naturelles.
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Dès que la masse peut espérer accéder à ce qui était jusque-là un privilège de l'élite, ce privilège (le bac, la voiture, le téléviseur) est dévalorisé par là même, le seuil de la pauvreté est haussé d'un cran, de nouveaux privilèges sont créés dont la masse est exclue. "Recréant sans cesse la rareté pour recréer l'inégalité et la hiérarchie, la société engendre plus de besoins insatisfaits qu'elle n'en comble, le taux de croissance de la frustration excède largement celui de la production."
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L'inaptitude socialement entretenue au loisir conduit à concevoir le temps libre selon le modèle inversé du temps de travail : comme un temps qu'au lieu de vendre nous devons acheter à des marchands qui nous en fournissent l'emploi et les équipements permettant cet emploi : parcs de loisirs, croisières, tourisme, hôtels, spectacles, etc. Capté et monétarisé, le temps reste ainsi un bien marchand dont, puisqu'il se paie, il faut profiter au maximum afin d'"en avoir pour son argent".
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une réappropriation de ces moyens avec maîtrise locale ainsi qu'internationale par la connexion entre réseaux de coopératives, pratiquement impossible jusqu'ici, lui semble le devenir par le biais des nouvelles technologies informatiques. En autorisant une grande versatilité des équipements et une gestion décentralisée et horizontale de la production, les microprocesseurs pourraient se prêter à une production relocalisée.
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