Superbe!
Dans un petit village d'Andalousie, un petit garçon est le témoin impuissant de la "nouvelle paix" qui suit la victoire franquiste. Alternant avec les souvenirs d'une autre vie, où il était "l'enfant du maire" rouge, c'est le présent, où il n'est plus que "
l'enfant pain", affamé, obsédé par l'odeur des miches que sa mère doit faire cuire pour les autres. Lui, fils de républicain vaincu, n'a même pas droit, comme les autres enfants,à la distribution quotidienne du "pain de l'indigence".
Il vit, sans toujours comprendre, les rapports à jamais altérés dans le village, les réglements de compte entre voisins, les délations, l'humiliation des siens, la haine, l'absence de ses frères,incarcérés dans les prisons franquistes, leur retour et la nécessité de les cacher.
On assiste à des scènes durement réalistes: le suicide par noyade d'un "rouge",aprés une accusation infamante, la cueillette de l'alfa qui entaille les mains, la chiffonnière tondue pour avoir injurié les autorités.
Pourtant, de lumineuses images de naguère trouent ce sombre présent: la fête du village, la réfection du toit de la cuisine et le gueuleton qui suit.
de l'humour, aussi: le village, ses superstitions, ses pittoresques habitants: Josefita la Blonde,accueillante aux mâles, et son père, le "Couché", Felisa" la Pleureuse " et ses enfants "les tous pareils", Carmen Moriane, "la Sainte Pisseuse d'eau bénite", l'oncle Visionnaire.
Mais ce qui l'emporte, c'est la poèsie, l'émotion pudique, la tendresse retenue de
Gomez Arcos qui a su enfin faire parler l'enfant sans nom et sans voix qu'il a été.