AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Christophe Josse (Traducteur)
EAN : 9782841724727
320 pages
L’Atalante (21/08/2009)
4/5   13 notes
Résumé :

Un roman de quartier est le récit d'une vengeance pour l'essentiel. Lors d'un hold-up dans les années 1970, deux hommes tuent un petit garçon de trois ans en prenant la fuite. Bien plus tard, de nos jours à Barcelone, l'un des braqueurs est assassiné. Craignant de subir un sort identique, son complice prend les devants et cherche à supprimer le vengeur présumé : David Miralles, père de l'enfant. C'est alors qu'entre en jeu l'inspecteur Méndez, fonctionn... >Voir plus
Que lire après Un roman de quartierVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Dans un immeuble de Barcelone laissé à l'abandon, un ancien braqueur de banques est retrouvé mort un beau matin, une balle dans la nuque. L'inspecteur Mendez, avatar catalan de Colombo, est chargé de mener l'enquête. Mais, naturellement, il va le faire d'une façon peu catholique...

On suit alors le policier quinqua dans les quartiers promis à la démolition de l'orgueilleuse future capitale du 29e état membre de l'Union européenne (référendum sur l'indépendance prévu le 1er octobre 2017). C'est l'occasion de découvrir la Weltanschauung (conception du monde) d'un vieux célibataire érudit qui, l'air de rien, juge au vitriol la dérive mercantiliste de la société catalane.

Ce qui fait le charme de ce roman noir qui rappelle étroitement les enquêtes de Pepe Carvalho de feu Manuel Vazquez Montalban, c'est incontestablement le parler totalement iconoclaste des principaux protagonistes : « Aujourd'hui, les gamins se touchent les couilles, les jeunes calculent leur prêt immobilier et les vieux regardent la télé. » Voilà qui est dit !

Mais, attention, qu'on ne s'y trompe pas : Francisco Gonzalez Ledesma est un auteur qui profite d'un polar apparemment ordinaire pour asséner des vérités qui n'auraient pas forcément leur place dans un éditorial de la presse d'aujourd'hui : « Les masses meurent pour des clopinettes, même si leur mort, je vous l'accorde, les propulse dans cette dimension esthétique que l'histoire peut offrir. Regardez ces milliers de gens qui sont morts pour défendre la République. Qu'ont-ils obtenu ? (...) La gauche au pouvoir. Mais voilà, mon ami, le premier gouvernement de gauche (après Franco) a compris lui aussi qu'il y avait un marché – plus fort que lui, évidemment – et il a enfreint la norme sacrée de la sécurité de l'emploi pour préserver le marché. le deuxième gouvernement de gauche, esclave des multinationales, a réduit le coût du licenciement. Putain, dites-moi, les morts, ils ont gagné quoi au juste ? Les seuls qui ont raison, ce sont les pragmatiques, comme moi (le mafieux). » Vous découvrirez d'autres exemples de la qualité de réflexion et de la profonde empathie de l'auteur pour les perdants de l'Histoire dans la partie réservée aux citations.

Une chose est sûre, il vaut la peine de persévérer la lecture de ce roman de trois cents pages au-delà des cinquante premières. En effet, si l'on n'est pas (ou plus) habitué à ce style d'écriture picaresque on peut être tenté d'abandonner. Ce serait toutefois regrettable dans la mesure où la suite s'avère captivante et les personnages extrêmement attachants. En tous cas, cet écrivain atypique constitue une belle découverte.

Last but not least, en lisant après coup la biographie de l'auteur (https://fr.wikipedia.org/wiki/Francisco_Gonz%C3%A1lez_Ledesma) je me suis aperçu que Ledesma a réellement passé sa jeunesse dans le quartier populaire de Poble Sec (hélas mentionné arbitrairement dans la traduction par « Pueblo Seco » en castillan). En tant qu'auteur engagé, il a personnellement souffert de la censure franquiste au point de devoir attendre la mort du Caudillo pour enfin pouvoir publier sans pseudonyme.

Pour cet ancien rédacteur en chef de la Vanguardia, « le véritable roman social espagnol est le roman noir, parce qu'il est celui qui pénètre avec le plus de sagacité et de sincérité au coeur de la société actuelle. Et généralement, tout crime s'explique par un drame personnel, mais aussi par un drame social ».
Commenter  J’apprécie          182
Un Roman de Quartier est un polar, un grand, mais ce pourrait très bien être un western.

En effet, comme dans les bons westerns, la question de fond, qui pousse les personnages à agir, donc à tuer, est celle de la loi : une loi injuste, qui permet par exemple à des assassins d'enfant de couler des jours paisibles, et même de faire fortune, tandis que les parents se consument dans la tristesse et l'impuissance. Ce que Ricardo Méndez, commissaire-justicier et personnage central du roman, résume par ces mots : "Au train ou vont les lois, il ne restera plus à la victime qu'à se faire justice elle-même." Dont acte...

Autre ressemblance avec le western : la lutte à mort du justicier et du bandit, lutte qui traverse tout le roman et s'achève par un superbe duel final...
Sauf qu'on est dans un polar et que les choses, bien sûr, ne sont pas aussi simples. Le justicier (Méndez) et le tueur (Leonidas) ont beaucoup de points communs. Issus des bas quartiers de Barcelone, où ils ont dû se frayer un chemin à coups de poings, ils partagent le même point de vue sur la loi : "La loi, je la conchie." proclame ainsi le policier. Et si l'un s'est rangé du côté des opprimés, et l'autre du côté de ses propres intérêts, c'est surtout affaire de circonstances et de tempérament.

Mais Un Roman de Quartier ne se résume pas à cela, loin de là. Derrière cette belle et sombre histoire de vengeance, c'est aussi le "miracle" économique de l'Espagne contemporaine qui est questionné. On est en 2007, en pleine bulle immobilière. Les plages grouillent de touristes et le vent charrie des effluves de crème solaire. Dans les quartiers populaires de Barcelone, des milliers d'immigrés s'épuisent à construire des résidences de luxe à la place des anciens immeubles dont les habitants ont été priés d'aller s'installer ailleurs, et de préférence dans de minuscules appartements achetés à crédit.

"Endettés de tous les pays, unissez-vous !" leur conseille charitablement Méndez, très en verve tout au long du roman, de même que l'auteur, Francisco González Ledesma, dont l'humour et la truculence font constamment mouche et permettent d'adoucir les contours d'une histoire qui, sans cela, pourrait sembler terriblement noire.

Commenter  J’apprécie          180
N°436– Juillet 2010
UN ROMAN DE QUARTIERFrancisco González LEDESMA – Éditions L'Atalante.
Traduit de l'espagnol par Christophe Josse.

Je voudrais bien le rencontrer ce Mendez, un inspecteur de police à deux doigts de la retraite, choisi par son commissaire pour élucider une affaire un peu ténébreuse au seul motif qu'il dispose de temps libre.

L'affaire, justement, est une vengeance. Dans les années 1970, lors d'un hold-up, un garçon de trois ans est tué par erreur et, de nos jours, à Barcelone, un des deux braqueurs est assassiné dans un vieil immeuble promis à la démolition. Craignant le subir le même sort que son complice, le truand survivant va tenter de supprimer celui qu'il prend pour le vengeur, c'est à dire le père de l'enfant : David Miralles. Ce qui m'a intéressé aussi, c'est le combat intime de cet homme désespéré qui exorcise comme il peut la mort prématurée de son fils au point de lui réinventer une vie au quotidien, une forme différente de vengeance... Il se trouve que ce Miralles, garde du corps de son état et donc titulaire d'un port d'arme, n'est pas, selon le rapport de balistique, le responsable de cette exécution. Mendez le sait, mais pas le tueur et la course-poursuite qui va être menée passe par la fréquentation d'un avocat bizarre et la consultation de petites annonces coquines, d'autres rencontres insolites...

Il y a bien d'autres histoires dans ce récit, celle des relations qu'a Miralles avec une ancienne prostituée devenue son assistante, Eva, celle de cette vieille maquerelle barcelonaise, Ruth, devenue marquise et des rapports difficiles qu'elle entretient avec une de ses anciennes pensionnaires, Mabel, qui maintenant est chargée de s'occuper d'elle. Dans cette cohabitation difficile où la mort rode à chaque instant, le règlement de compte le dispute à la méchanceté et même au sadisme.

Ce que je retiens surtout c'est le cadre, cette ville catalane dont le seul nom fait rêver parce qu'il est associé à la Guerre Civile espagnole, à la contestation permanente, à une certaine idée de la liberté, au combat pour la vie, parce que là plus qu'ailleurs un art créatif s'y est développé et que dans ces quartiers chauds existe un certain art de vivre qu'on ne rencontre sans doute qu'ici! C'est le véritable personnage de ce roman. C'est l'occasion pour l'auteur d'exprimer la nostalgie d'un temps où les bourgeois venaient au Barrio Chino pour boire un verre ou s'encanailler avec des filles... La spéculation immobilière a eu peu à peu raison des bars, des bordels et des ruelles qui faisaient le charme de cette ville. Ces quartiers que connaît bien notre inspecteur sont en train de mourir comme le suscite la 4° de couverture...
C'est aussi une peinture de la société barcelonaise faite de violence mais aussi des portraits de femmes dont l'auteur est l'admirateur inconditionnel qui luttent avec dignité dans un monde cruel.

Ce qui me plait bien, c'est surtout ce personnage de Ricardo Mendez, fonctionnaire de police un peu marginal, légèrement alcoolique et désabusé par la vie, qui fait son métier d'une manière efficace mais parfois discutable, un homme un peu frustre qui n'a pas vraiment le sens des convenances. le style administratif et réglementaire de ses rapports, sa vie dans des pensions minables, ses déjeuners dans des bouis-bouis à la limite de l'insalubrité, son mépris pour l'avancement et pour sa hiérarchie retiennent mon attention et mon intérêt. Ses investigations ont cette particularité d'être pour le moins bizarres et originales, mais cela marche. On y rencontre d'anciennes putes, des proxénètes sur le retour, de vielles maquerelles rangées qui égrènent leurs souvenirs, ou d'autres êtres cabossés par la vie, bref toute une société interlope qui va si bien à ce quartier... Cet être familier des livres autant que de l'alcool bon marché (« Mendez vida son orujo du terroir, qui avait certainement voyagé à dos d'homme depuis la Galice en suivant la route des églises romanes ») , méprisé des femmes autant que de ses supérieurs[« Je ne suis qu'un chat de gouttière, admit Mendez, il n'est pas inutile de me le rappeler de temps en temps. »], aime sa ville et ce quartier où il a grandi et qu'il ne quitte pratiquement jamais, même s'il est promis à la démolition, ces rues qui sont sa véritable école... Sa qualité de policier se caractérise davantage par l'indépendance et la justice que par la soumission à la procédure, à la hiérarchie ou au plan de carrière, mais peut lui chaut. Il est « un vieux serpent » et avoue lui-même que sa « vie est toujours un désastre absolu » .

J'ai apprécié aussi le suspense, ce texte humoristique, le style alerte, un peu gouailleur et aussi ce sens de la formule [« Dans ce monde mécanisé, il ne reste que deux gâteries faites exclusivement à la main : le havane et la branlette »]qui sied si bien au roman noir autant qu'à son héros, le climat de ce récit où on rencontre que modérément ce qui peuple ordinairement, et à toutes les pages, les oeuvres de ce registre : le sexe, la violence et le sang.

Cette première lecture favorisée par le hasard m'engage à en connaître davantage.
Et puis c'est vrai que je voudrais bien le rencontrer ce Mendez, et tant pis s'il est un personnage fictif comme tous les héros de romans, mais quand même, il me plaît bien!!




Hervé GAUTIER – Juillet 2010.http://hervegautier.e-monsite.com
Lien : http://hervegautier.e-monsit..
Commenter  J’apprécie          80
Il sera court, une fois n'est pas coutume. J'aime le style de cet auteur, sa manière d'aborder les sujets les plus sordides en n'ayant pas peur d'employer les termes justes. J'ai rarement vu un auteur abordé le thème de la prostitution en restant toujours au plus près de la réalité de ce plus vieux métier du monde, et en se gardant des clichés.
Mendez est à deux doigts de la retraite, et là où d'autres la joueraient profil bas, pour ne surtout pas s'embarrasser – une retraite anticipée d'un autre genre – lui ne craint strictement rien, surtout pas de se placer dans des situations délicates au nom de son sens de la justice. La justice semble d'ailleurs un concept très flou en Espagne – il faut estimer les intentions, non les actes, du pain béni pour les avocats. A retord, retord et demi : les stratagèmes de Mendez pour contrecarrer ses adversaires sont à hurler de rire – dans le genre humour noir, bien sûr. Mendez et d'autres avec lui vont au bout des choses – ce n'est pas le cas de tous les enquêteurs, encore moins de tous les romanciers.
Un roman de quartier est un magnifique roman noir.
Lien : http://deslivresetsharon.wor..
Commenter  J’apprécie          110
et pourquoi pas un polar pour trembler de temps en temps, de vez en cuando ?
Commenter  J’apprécie          10

Citations et extraits (14) Voir plus Ajouter une citation
Aujourd'hui, on ne vaut plus tripette à cinquante ans, ouste, va jouer aux cartes, et à ta place on colle un jeune intérimaire qui rêvera lui aussi de retraite à cinquante ans. Et le pays décolle, à tel point que les multinationales se taillent dans les contrées où la population compte bosser jusqu'à soixante-dix ans. Et le sale boulot, c'est pour les immigrés, ouais, même qu'il y a des ministres pour nous dire que les immigrer vont sauver le pays, mais s'ils le sauvent, ils réclameront leur part, et tout ça va partir en couilles.
Commenter  J’apprécie          30
Cette putain de ville est pleine de gens prêts à tuer et de gens prêts à se faire tuer - marmonna le commissaire - Ils pourraient se mettre d'accord.
Commenter  J’apprécie          110
Le peuple, toujours épris de justice et de liberté, vit sous l'emprise des règlements. Ainsi, il se tient à carreau.
Commenter  J’apprécie          111
Dans les quartiers pauvres, il pleut autrement, se disait souvent Miralles : dans les quartiers pauvres, la seule poésie, c'est la pluie.
Commenter  J’apprécie          90
- Vous vous demandez pourquoi on laisse ressortir Bermudez ; eh bien, ne vous cassez pas la tête. Un meurtrier, on le voit, il vous supplie, alors que la victime ne réclame rien, on ne la voit pas.
Commenter  J’apprécie          40

autres livres classés : barceloneVoir plus
Les plus populaires : Polar et thriller Voir plus


Lecteurs (55) Voir plus



Quiz Voir plus

Retrouvez le bon adjectif dans le titre - (6 - polars et thrillers )

Roger-Jon Ellory : " **** le silence"

seul
profond
terrible
intense

20 questions
2816 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature , thriller , romans policiers et polarsCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..